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17/10/2013 | FRANCE | N°12-23375

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 17 octobre 2013, 12-23375


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 1er juin 2012) qu'un tribunal d'instance, statuant à la requête de la société Banque CIC Est (la banque) aux droits de la société Crédit industriel d'Alsace et de Lorraine, a, sur le fondement d'un acte notarié, ordonné la vente par voie d'exécution forcée d'un bien appartenant à la société civile immobilière « Le Marquis du lac » (la société) ; que la société a formé un pourvoi immédiat de droit local à l'encontre de cett

e ordonnance ; que le tribunal de l'exécution a maintenu son ordonnance d'admission ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 1er juin 2012) qu'un tribunal d'instance, statuant à la requête de la société Banque CIC Est (la banque) aux droits de la société Crédit industriel d'Alsace et de Lorraine, a, sur le fondement d'un acte notarié, ordonné la vente par voie d'exécution forcée d'un bien appartenant à la société civile immobilière « Le Marquis du lac » (la société) ; que la société a formé un pourvoi immédiat de droit local à l'encontre de cette ordonnance ; que le tribunal de l'exécution a maintenu son ordonnance d'admission et transmis le dossier de l'affaire à la cour d'appel ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la débouter de son pourvoi immédiat et de confirmer l'ordonnance ayant ordonné l'adjudication forcée de l'immeuble lui appartenant inscrit au livre foncier de Munster, section 17, n°115/45, 2 Chemin dit Untersolbergweg, pour une contenance de 173,63 ares alors, selon le moyen, que les tombeaux et le sol sur lequel ils sont élevés, que ce soit en cimetière public ou dans un cimetière privé, sont en dehors des règles du droit sur la propriété et la libre disposition des biens et ne peuvent être considérés comme ayant une valeur appréciable en argent ; qu'il en résulte qu'un tombeau et le sol qui le supporte ne peuvent être l'objet d'une saisie immobilière ; qu'au cas d'espèce, en ordonnant l'adjudication forcée de la totalité de la propriété de la société civile immobilière Le Marquis du lac, quand ils relevaient eux-mêmes qu'une sépulture y était édifiée, de sorte que celle-ci et le sol lui servant de support ne pouvaient être compris dans le périmètre de la saisie, les juges du fond, qui n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations, ont violé l'article 144 de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, l'article 14 de la loi n°91-650 du 9 juillet 1991, devenu l'article L. 112-2 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble les articles 537 et 1128 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant exactement retenu que l'existence d'une sépulture n'a pas pour effet de rendre inaliénable et incessible la propriété dans laquelle celle-ci est située dont la vente amiable ou judiciaire est possible sous réserve qu'il en soit fait mention dans le cahier des charges et qu'un accès soit réservé à la famille, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel a ordonné la vente par voie d'exécution forcée du bien appartenant à la société tel qu'inscrit au livre foncier ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Le Marquis du lac aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Le Marquis du lac ; la condamne à payer à la société Banque CIC Est la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Le Marquis du lac
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la SCI Le Marquis du Lac de son pourvoi immédiat et d'AVOIR confirmé l'ordonnance du tribunal d'instance de Colmar du 10 décembre 2010 ayant ordonné l'adjudication forcée de l'immeuble appartenant à la SCI inscrite au livre foncier de Munster, section 17, n°115/45, 2 Chemin dit Untersolbergweg, pour une contenance de 173,63 ares ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article 15 du décret du 27 juillet 2006 énumère les mentions que doit comporter le commandement préalable. Ce texte de droit général n'est applicable dans les trois départements d'Alsace-Moselle qu'autant qu'il n'est pas contraire aux dispositions de droit local, les mentions spécifiques à la procédure de saisie immobilière de droit général devant en effet être exclues ; que l'alinéa 3 de ce texte exige un décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l'indication du taux des intérêts moratoires ; qu'or, contrairement à ce que soutient la SCI Le Marquis du Lac, le commandement de payer qui lui a été signifié le 27 septembre 2010, comporte le décompte des sommes dues en principal, intérêts, indemnité conventionnelle et frais et précise que les intérêts sont dus au taux de 4,2 % à compter du 8 septembre 2010, mentions qui répondent aux exigences du texte susvisé ; que le moyen doit donc être rejeté ; que de même, la SCI Le Marquis du Lac affirme à tort que le titre exécutoire ne lui aurait pas été signifié, alors que, selon exploit du 20 septembre 2010, l'acte a été signifié à l'adresse de son siège par dépôt en l'étude de l'huissier, conformément aux dispositions de l'article 656 du code de procédure civile ; qu'il échet en outre de constater que le contrat de prêt a été revêtu de la clause exécutoire le 5 mai 2010 pour un montant de 1.200.000 ¿ en capital, outre intérêts convenus à l'acte, frais et accessoires et que la créance est déterminable au vu des termes de cet acte qui fixe les conditions essentielles du prêt ; qu'à l'appui de la requête, la SA Banque CIC Est a également produit un décompte des sommes dues qui fait apparaître un défaut de paiement des échéances depuis le 25 mai 2009 ainsi que le courrier recommandé en date du 10 mai 2010 par lequel elle a prononcé la déchéance du terme conformément à l'article 15 des conditions générales du prêt ; qu'il appartient à la SCI Le Marquis du Lac qui prétend que la créance ne serait pas exigible et qui conteste les conditions dans lesquelles la déchéance du terme a été prononcée de démontrer que des paiements seraient intervenus postérieurement au 25 mai 2009 et qu'ils n'auraient pas été comptabilisés, preuve non rapportée en l'espèce ; que la SCI Le Marquis du Lac prétend enfin à tort que la requête serait entachée de nullité en l'absence de justification d'un pouvoir spécial par le mandataire ; qu'il convient en effet de constater que la requête a été présentée par la SA Banque CIC Est, représentée par un avocat, lequel, conformément à l'article 828 du code de procédure civile, n'a pas à justifier d'un pouvoir spécial pour introduire une action en justice ; qu'enfin, ainsi que l'ajustement retenu le premier juge, l'existence d'une sépulture n'a pas pour effet de rendre inaliénable et incessible en totalité la propriété dans laquelle celle-ci est située, seule la partie du terrain comportant la sépulture étant hors du commerce ; que la vente amiable, respectivement la vente forcée, d'un bien immobilier comportant une sépulture est donc possible (Civ. 3ème, 1er mars 2006 pourvoi n° 05-11.327) sous réserve qu'il en soit fait mention dans le cahier des charges et qu'un accès soit réservé à la famille ; qu'il n'y a donc pas lieu de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de l'action paulienne engagée par la SA Banque CIC Est devant le tribunal de grande instance de Colmar ; que pour le surplus, la SCI Le Marquis du Lac ne peut se prévaloir du caractère non contradictoire de la procédure qui est inhérent à la procédure sur requête, le principe du contradictoire étant respecté au stade du pourvoi immédiat et ne démontre aucune irrégularité ou faute imputable à la banque ; que la procédure d'exécution forcée immobilière étant régulièrement poursuivie sur la base d'un titre exécutoire dûment signifié et après délivrance d'un commandement de payer, l'ordonnance entreprise doit donc être confirmée ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE la partie débitrice, à l'appui du pourvoi a invoqué, en premier lieu, des "irrégularités intervenues dans le cadre de l'octroi du crédit" et " en tout état de cause", "les multiples fautes professionnelles et les obligations de devoir de conseils commises "par la banque" au préjudice de la SCI le marquis du lac" ; que ces allégations n'ayant pas été explicitées et n'étant justifiées par aucun élément, l'ordonnance de vente ne saurait être rétractée pour ces motifs ; que la SCI a encore fait valoir que la parcelle est frappée d'inaliénabilité et d'incessibilité pour être devenue un cimetière à la suite de l'inhumation d'une personne à la date du 11 décembre 2008 ; que, cependant, la banque a souligné à juste titre que si la sépulture elle-même ne peut être saisie et si un droit de passage doit être réservé, ce n'est pas l'ensemble de la propriété qui se trouve inaliénable ; que le caractère inaliénable et incessible est attaché à la sépulture elle-même et non au terrain en son entier ; qu'il a été considéré que le propriétaire d'un terrain contenant la sépulture de son auteur, reste propriétaire de cette sépulture et possède un droit d'accès par le chemin le plus court et le moins dommageable (Cour d'appel de Douai, 4 mars 1930, Civ., 11 avril 1938) ; que la vente d'un terrain privé contenant une sépulture reste cependant possible (Cass 3e Civ, 1er mars 2006), le notaire ayant seulement pour obligation de faire figurer cette sujétion dans le cahier des charges ; qu'au vu de ce qui précède, l'ordonnance de vente sera maintenue et le dossier transmis à la cour d'appel ;
ALORS QUE les tombeaux et le sol sur lequel ils sont élevés, que ce soit en cimetière public ou dans un cimetière privé, sont en dehors des règles du droit sur la propriété et la libre disposition des biens et ne peuvent être considérés comme ayant une valeur appréciable en argent ; qu'il en résulte qu'un tombeau et le sol qui le supporte ne peuvent être l'objet d'une saisie immobilière ; qu'au cas d'espèce, en ordonnant l'adjudication forcée de la totalité de la propriété de la SCI Le Marquis du Lac, quand ils relevaient eux-mêmes qu'une sépulture y était édifiée, de sorte que celle-ci et le sol lui servant de support ne pouvaient être compris dans le périmètre de la saisie, les juges du fond, qui n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations, ont violé l'article 144 de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, l'article 14 de la loi n°91-650 du 9 juillet 1991 (devenu l'article L. 112-2 du code des procédures civiles d'exécution), ensemble les articles 537 et 1128 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-23375
Date de la décision : 17/10/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SAISIE IMMOBILIERE - Biens saisis - Immeuble comportant une sépulture - Vente amiable ou judiciaire - Possibilité

SAISIE IMMOBILIERE - Adjudication - Immeuble - Immeuble comportant une sépulture - Conditions - Détermination - Portée PROPRIETE - Immeuble - Immeuble comportant une sépulture - Inaliénabilité ou incessibilité (non) VENTE - Immeuble - Immeuble comportant une sépulture - Inaliénabilité ou incessibilité (non)

L'existence d'une sépulture située dans une propriété n'a pas pour effet de rendre inaliénable et incessible cette propriété dont la vente amiable ou judiciaire est possible sous réserve, dans ce dernier cas, qu'il en soit fait mention dans le cahier des charges et qu'un accès soit réservé à la famille


Références :

article 144 de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle

article L. 112-2 du code des procédures civiles d'exécution

articles 537 et 1128 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 01 juin 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 17 oct. 2013, pourvoi n°12-23375, Bull. civ. 2013, II, n° 206
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, II, n° 206

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Rapporteur ?: Mme Robineau
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.23375
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