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15/10/2013 | FRANCE | N°12-22008

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 octobre 2013, 12-22008


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 10 mai 2012, RG : 11/04019), que par jugement du 30 novembre 2009 publié au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC) le 8 décembre 2009, une procédure de sauvegarde a été ouverte à l'égard de la société Thomson devenue groupe Technicolor (société Technicolor) qui a bénéficié ultérieurement d'un plan de sauvegarde ; que la société Bank of America qui lui avait consenti un prêt, a cédé ses créances sur

la société Technicolor, le 14 décembre 2009, à la société Banco Finantia ; que les...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 10 mai 2012, RG : 11/04019), que par jugement du 30 novembre 2009 publié au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC) le 8 décembre 2009, une procédure de sauvegarde a été ouverte à l'égard de la société Thomson devenue groupe Technicolor (société Technicolor) qui a bénéficié ultérieurement d'un plan de sauvegarde ; que la société Bank of America qui lui avait consenti un prêt, a cédé ses créances sur la société Technicolor, le 14 décembre 2009, à la société Banco Finantia ; que les créances déclarées par cette dernière le 7 avril 2010, ont été contestées comme tardives ; que par ordonnance du 28 mars 2011, sa créance d'intérêts a été admise à concurrence d'un euro pour mémoire ;
Attendu que la société Technicolor, les mandataires judiciaires et le commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde font grief à l'arrêt d'avoir confirmé l'ordonnance n° 2010M05723 et dit que le délai de déclaration de créance de quatre mois à compter de la publication du jugement d'ouverture de la sauvegarde était applicable à la société Banco Finantia, alors, selon le moyen :
1°/ que le délai de déclaration de créance est de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au BODACC ; que lorsque la procédure est ouverte par une juridiction qui a son siège sur le territoire de la France métropolitaine, le délai est augmenté de deux mois pour les créanciers qui ne demeurent pas sur ce territoire ; que le cessionnaire d'une créance ne disposant pas de plus de droits que le cédant n'en détenait lui-même à l'encontre du débiteur, il en résulte qu'en cas de cession de créance intervenue postérieurement à la publication du jugement d'ouverture d'une procédure collective à l'encontre du débiteur cédé, le cessionnaire d'une créance ne peut prétendre à un délai de déclaration de créance plus long que celui dont le cédant pouvait lui-même se prévaloir ; que c'est donc en la seule personne du titulaire de la créance au jour du jugement d'ouverture qu'il convient d'examiner les conditions de délai de déclaration ; qu'en retenant pourtant « qu'il convient (¿) d'examiner si les conditions d'allongement du délai sont réunies au moment où le créancier titulaire de la créance la déclare, et non en considération de la situation du créancier titulaire de la créance au jour de l'ouverture de la procédure collective », la cour d'appel a violé l'article R. 622-24 du code de commerce ;
2°/ que le délai de déclaration de créance est de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales pour les créanciers demeurant sur le territoire de la France métropolitaine ; que ce délai est applicable au créancier disposant d'une succursale de plein exercice sur ce territoire ; qu'en retenant pourtant qu' « à supposer même (¿) que le domicile à retenir soit celui du créancier au jour de l'ouverture de la procédure de la sauvegarde, en l'espèce celui de la société Bank of America, le délai de déclaration applicable reste identique, à savoir un délai de quatre mois à compter de la publication au BODACC du jugement d'ouverture », cependant qu'elle avait elle-même constaté « l'existence à Paris d'une succursale de cette banque, même de plein exercice », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article R. 622-24 du code de commerce ;
3°/ que, subsidiairement, lorsque la procédure est ouverte par une juridiction qui a son siège sur le territoire de la France métropolitaine, le délai de déclaration de créance est augmenté de deux mois pour les créanciers qui ne demeurent pas sur ce territoire ; qu'en retenant, pour en déduire que la société Bank of America disposait d'un délai de quatre mois pour déclarer sa créance, que « l'application de l'allongement du délai de déclaration de créance serait déterminée par le lieu du siège social de la banque où se trouvent les organes habilités à la représenter en justice et donc à déclarer les créances ou à déléguer ce pouvoir, en l'absence de tout élément démontrant que les représentants de la succursale française auraient disposé d'un tel pouvoir », cependant que le délai de déclaration est déterminé en considération de la présence effective, sur le territoire de la France métropolitaine, du créancier et non de ses organes habilités à le représenter en justice, la cour d'appel a violé l'article R. 622-24 du code de commerce ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que le délai de déclaration de l'article R. 622-24, alinéa 1, du code de commerce n'était pas expiré lorsque la société Banco Finantia, cessionnaire de la créance, en est devenue titulaire par un acte auquel la société débitrice était représentée, de sorte que la cession de créance lui est opposable, l'arrêt énonce, d'abord, que le délai de déclaration applicable n'est pas un accessoire de la créance transmise au cessionnaire, ensuite, que l'appréciation du lieu où demeure le créancier doit se faire en considération de la personne du créancier cessionnaire déclarant, et, enfin, que l'allongement du délai de déclaration des créances prévu par l'article R. 622-24, alinéa 2, a pour seule finalité de compenser au profit du créancier ne demeurant pas sur le territoire de la France métropolitaine, sur lequel est ouverte la procédure collective de son débiteur, la contrainte résultant de l'éloignement; que de ces seuls motifs la cour d'appel a exactement déduit que la déclaration de créance de la société Banco Finantia effectuée à l'intérieur du délai de quatre mois suivant la publication du jugement de sauvegarde au BODACC, n'était pas forclose ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés MJA et Ouizille de Keating en leur qualité de mandataires judiciaires au plan de sauvegarde de la société Technicolor, et la société FHB, en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la société Technicolor, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze octobre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour la société Technicolor et autres
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la société Banco Finantia a déclaré la créance détenue sur la société Technicolor dans le délai de quatre mois à compter de la publication du jugement d'ouverture de la sauvegarde qui était applicable et d'avoir confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance n° 2010M05723 rendue par le juge-commissaire du tribunal de commerce de Nanterre le 28 mars 2011 ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' « il est établi, par les actes signés entre les sociétés Bank of America et Banco Finantia, et au demeurant non contesté qu'en exécution d'accords antérieurs, la créance détenue par la société Bank of America sur la société Technicolor a été cédée à la société Banco Finantia le 15 décembre 2009 par un acte auquel la société débitrice était représentée, de sorte que la cession de créance lui est opposable dès cette date ; qu'il est tout aussi constant que la société Bank of America n'a pas déclaré la créance à la procédure de sauvegarde avant de la céder, et la société Banco Finantia, cessionnaire de la créance, était en droit de la déclarer lorsqu'elle en est devenue titulaire le 15 décembre 2009 puisque le délai de déclaration de l'article R. 622-24, alinéa 1er, du Code de commerce, à le supposer applicable, n'était pas alors expiré, le jugement d'ouverture ayant été publié au BODACC le 8 décembre 2009 ; que la société Banco Finantia a déclaré la créance le 7 avril 2010, postérieurement au délai de deux mois de l'article R. 622-24, alinéa 1er, précité, mais dans le délai de quatre mois prévu pour les créanciers ne demeurant pas sur le territoire de la France métropolitaine édicté à l'alinéa 2 du même article ; qu'il n'est pas non plus discuté que le siège social de la société Banco Finantia est situé à Lisbonne (Portugal) et aucune contestation n'est élevée sur la fixation à son siège social du lieu où demeure cette banque au sens du texte précité ; que les parties s'opposent en revanche sur le point de savoir à quelle date il convient de retenir la localisation du créancier pour la détermination du délai de déclaration applicable : celle existant au jour de l'ouverture de la procédure collective, comme le soutiennent les appelantes, ou celle existant au jour où le droit de déclarer la créance est exercé comme le prétendent les intimées ; que l'allongement du délai de déclaration des créances prévu par l'article R. 622-24, alinéa 2, déjà cité a pour seule finalité de compenser au profit du créancier ne demeurant pas sur le territoire de la France métropolitaine, sur lequel est ouverte la procédure collective de son débiteur, la contrainte résultant de l'éloignement ; qu'il convient donc d'examiner si les conditions d'allongement du délai sont réunies au moment où le créancier titulaire de la créance la déclare, et non en considération de la situation du créancier titulaire de la créance au jour de l'ouverture de la procédure collective ; que le délai de déclaration applicable n'est ainsi pas un accessoire de la créance transmise au cessionnaire et l'appréciation du lieu où demeure le créancier doit se faire, sous la réserve de l'existence d'une fraude démontrée, en considération de la personne du créancier cessionnaire déclarant ; qu'en conséquence, le lieu où demeurait en l'espèce le créancier cédant Bank of America lors de l'ouverture de la procédure de sauvegarde est indifférent ; qu'en tout état de cause et surabondamment, à supposer même, comme l'a retenu le juge-commissaire, que le domicile à retenir soit celui du créancier au jour de l'ouverture de la procédure de la sauvegarde, en l'espèce celui de la société Bank of America, le délai de déclaration applicable reste identique, à savoir un délai de quatre mois à compter de la publication au BODACC du jugement d'ouverture ; qu'en effet, il est établi et non contesté que le siège social de la société Bank of America se situe aux Etats-Unis en Caroline du Nord et l'existence à Paris d'une succursale de cette banque, même de plein exercice, immatriculée au registre du commerce et des sociétés et soumise à la réglementation bancaire française, mais dénuée de la personnalité juridique, n'est pas de nature à écarter l'application de l'allongement du délai de déclaration de créance, déterminé par le lieu du siège social de la banque où se trouvent les organes habilités à la représenter en justice et donc à déclarer les créances ou à déléguer ce pouvoir, en l'absence de tout élément démontrant que les représentants de la succursale française auraient disposé d'un tel pouvoir ; qu'ainsi, en toute hypothèse, la déclaration de créance de la société Banco Finantia du 7 avril 2010 a été effectuée à l'intérieur du délai de quatre mois suivant la publication du jugement de sauvegarde au BODACC et son admission au passif de la société Technicolor, telle que prononcée par le juge-commissaire pour son montant déclaré, établi et non contesté, doit être confirmée » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la créance déclarée est une créance d'intérêts calculés à compter du jour du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde de SA Technicolor (ex-Thomson) soit le 30 novembre 2009 ; qu'aux termes de l'article R. 622-23, 2ème alinéa du Code de commerce, la déclaration de créance contient « les modalités de calcul des intérêts dont le cours n'est pas arrêté, cette indication valant déclaration pour le montant ultérieurement arrêté » ; que dès lors les intérêts à échoir postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde ne peuvent être déclarés que pour un montant total de 1 euro (pour mémoire)» ;
1°/ ALORS QUE le délai de déclaration de créance est de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales ; que lorsque la procédure est ouverte par une juridiction qui a son siège sur le territoire de la France métropolitaine, le délai est augmenté de deux mois pour les créanciers qui ne demeurent pas sur ce territoire ; que le cessionnaire d'une créance ne disposant pas de plus de droits que le cédant n'en détenait lui-même à l'encontre du débiteur, il en résulte qu'en cas de cession de créance intervenue postérieurement à la publication du jugement d'ouverture d'une procédure collective à l'encontre du débiteur cédé, le cessionnaire d'une créance ne peut prétendre à un délai de déclaration de créance plus long que celui dont le cédant pouvait lui-même se prévaloir ; que c'est donc en la seule personne du titulaire de la créance au jour du jugement d'ouverture qu'il convient d'examiner les conditions de délai de déclaration ; qu'en retenant pourtant « qu'il convient (¿) d'examiner si les conditions d'allongement du délai sont réunies au moment où le créancier titulaire de la créance la déclare, et non en considération de la situation du créancier titulaire de la créance au jour de l'ouverture de la procédure collective » (arrêt, p. 6, antépénult. §), la Cour d'appel a violé l'article R. 622-24 du Code de commerce ;
2°/ ALORS QUE le délai de déclaration de créance est de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales pour les créanciers demeurant sur le territoire de la France métropolitaine ; que ce délai est applicable au créancier disposant d'une succursale de plein exercice sur ce territoire ; qu'en retenant pourtant qu' « à supposer même (¿) que le domicile à retenir soit celui du créancier au jour de l'ouverture de la procédure de la sauvegarde, en l'espèce celui de la société Bank of America, le délai de déclaration applicable reste identique, à savoir un délai de quatre mois à compter de la publication au BODACC du jugement d'ouverture » (arrêt, p. 6, dern §), cependant qu'elle avait elle-même constaté « l'existence à Paris d'une succursale de cette banque, même de plein exercice » (arrêt, p. 7, § 2), la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article R. 622-24 du Code de commerce ;
3°/ ALORS QUE, subsidiairement, lorsque la procédure est ouverte par une juridiction qui a son siège sur le territoire de la France métropolitaine, le délai de déclaration de créance est augmenté de deux mois pour les créanciers qui ne demeurent pas sur ce territoire ; qu'en retenant, pour en déduire que la société Bank of America disposait d'un délai de quatre mois pour déclarer sa créance, que « l'application de l'allongement du délai de déclaration de créance serait déterminée par le lieu du siège social de la banque où se trouvent les organes habilités à la représenter en justice et donc à déclarer les créances ou à déléguer ce pouvoir, en l'absence de tout élément démontrant que les représentants de la succursale française auraient disposé d'un tel pouvoir » (arrêt, p. 7, § 2), cependant que le délai de déclaration est déterminé en considération de la présence effective, sur le territoire de la France métropolitaine, du créancier et non de ses organes habilités à le représenter en justice, la Cour d'appel a violé l'article R. 622-24 du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-22008
Date de la décision : 15/10/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Sauvegarde - Période d'observation - Déclaration de créances - Délai - Augmentation de deux mois - Bénéficiaires - Cessionnaire de créance demeurant hors de France métropolitaine

Le délai de déclaration d'une créance dont la cession, opposable au débiteur, est intervenue postérieurement à la publication du jugement d'ouverture de la procédure collective mais dans le délai de déclaration prévu par l'article R. 622-24, alinéa 1er, du code de commerce, n'est pas un accessoire de la créance transmise au cessionnaire lequel bénéficie, lorsqu'il ne demeure pas sur le territoire de la France métropolitaine sur lequel est ouverte la procédure collective de son débiteur, de l'allongement du délai de déclaration prévu par l'article R. 622-24, alinéa 2, du même code, dont la seule finalité est de compenser au profit de ce créancier la contrainte résultant de l'éloignement


Références :

article R. 622-24 du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 10 mai 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 oct. 2013, pourvoi n°12-22008, Bull. civ. 2013, IV, n° 154
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, IV, n° 154

Composition du Tribunal
Président : M. Gérard (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : Mme Pénichon
Rapporteur ?: Mme Jacques
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Bénabent et Jéhannin

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.22008
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