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08/10/2013 | FRANCE | N°12-21709

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 08 octobre 2013, 12-21709


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Continue a été l'agent commercial de la société de droit néerlandais Vepa Bins sans qu'un contrat écrit ne soit intervenu ; qu'à la suite de la rupture de leurs relations, la société Continue a fait assigner la société Vepa Bins aux fins de la lui voir imputer et d'obtenir le paiement des commissions qui lui seraient dues sur le chiffre d'affaires réa

lisé avec la société Manutan et d'une indemnité de cessation de contrat ;
Atte...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Continue a été l'agent commercial de la société de droit néerlandais Vepa Bins sans qu'un contrat écrit ne soit intervenu ; qu'à la suite de la rupture de leurs relations, la société Continue a fait assigner la société Vepa Bins aux fins de la lui voir imputer et d'obtenir le paiement des commissions qui lui seraient dues sur le chiffre d'affaires réalisé avec la société Manutan et d'une indemnité de cessation de contrat ;
Attendu que pour rejeter la demande de commissions de la société Continue et réduire le montant de son indemnité de rupture, l'arrêt, après avoir constaté que les sociétés Vepa Bins et Continue s'étaient rapprochées pour mettre en place une collaboration portant sur la commercialisation des produits de la première par la seconde sur le territoire français, retient qu'il n'est pas prouvé que la société Vepa Bins ait attribué, même de manière non exclusive, un secteur géographique déterminé à la société Continue ;
Attendu qu'en statuant ainsi, par des motifs contradictoires, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Continue tendant à obtenir de la société Vepa Bins des commissions sur le chiffre d'affaires réalisé avec la société Manutan et réduit à la somme 22 061 euros l'indemnité de résiliation due par la société Vepa Bins à la société Manutan, l'arrêt rendu le 11 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Vepa Bins aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Continue la somme de 3000 euros et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit octobre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société Continue
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société Continue de ses demandes tendant à obtenir de la société Vepas Bins des commissions sur le chiffre d'affaire réalisé avec la société Manutan, et d'avoir réduit à la somme de 22.061 euros l'indemnité de résiliation due par la société Vepas Bins à la société Continue au titre de la rupture abusive de son contrat d'agent commercial
AUX MOTIFS QU'au cours de l'année 1994, les sociétés Vepas Bins et Continue se sont rapprochées pour mettre en place une collaboration portant sur la commercialisation des produits Vepas Bins par la société Continue en France ; que cette collaboration s'est matérialisée par une lettre du 28 février 1994 adressée par la société Vepas Bins à la société Continue, formalisant le principe d'un accord entre les deux parties et définissant la commission de distribution due à la société Continue ; que la société Continue a sollicité par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 mars 2007 un relevé du chiffre d'affaires réalisé par la société Vepas Bins avec le groupe français Manutan afin de pouvoir calculer la commission qui lui était due sur ce client qu'elle prétendait avoir prospecté ; que celle-ci lui ayant répondu, par lettre du 9 mars 2007, que les ventes de Manutan étaient exclues de l'assiette de ses commissions, elle l'a assignée en paiement des commissions litigieuses devant le Tribunal de commerce, par acte du 29 juillet 2008 ; que le Tribunal a fait droit à ses demandes, estimant qu'elle jouissait d'une exclusivité de distribution de fait sur le territoire français des produits de la société Vepas Bins et que les commissions lui étaient dues sur le chiffre d'affaires réalisé avec ce client (soit 8 % de la somme de 1 441 404 euros, 115 300 euros) ; que le Tribunal a également condamné la société Vepas Bins à payer à la société Continue une indemnité de résiliation du contrat sur le fondement de l'article L 134-4 du code de commerce, correspondant à deux années de commission brute ( soit (33 092 euros perçues au titre des années 2006 à 2008, + les commission Manutan de 115 300 euros) x 2/3), 98 928 euros ; que les parties s'accordent sur le statut d'agent commercial de la société Continue, l'accord entre elles étant matérialisé par une lettre du 28 février 1994 émanant de la société Vepas Bins, parlant d'une « bonne coopération » entre les parties, annonçant que les prix de vente des produits Vepas Bins seraient fixés au départ entrepôt en Hollande et évoquant une commission de 8 %, des rabais en cas d'achat par grande quantité et des condition de paiement ; que les conditions de paiement des commissions sont évoquées en mauvais français par la phrase suivante « votre commission est payer de concert avec toi » ; qu'il ressort de ces termes que la rémunération de l'agent se faisait de manière consensuelle, en fonction des clients démarchés ; que si aucun accord d'exclusivité n'a été matérialisé entre les parties dans un écrit, la société Continue a, de fait, été l'unique distributeur en France des produits de la société Vepas Bins, aucun autre distributeur n'ayant été désigné sur ce territoire pendant la période litigieuse ; que cependant, il ne résulte pas de cette situation purement factuelle que la société Continue se soit vue attribuer une exclusivité sur le territoire français ni que cette société ait pu légitimement croire qu'elle y constituait le seul distributeur ; que par ailleurs, la preuve n'est pas davantage rapportée que le mandant lui ait attribué, même de manière non exclusive un secteur géographique ou un groupe de personne déterminé ; que si la société Continue figure sur la quatrième de couverture des catalogues de la société Vepas Bins, à son côté ainsi qu'aux côtés d'autres sociétés, il n'en ressort nullement la mention d'une exclusivité territoriale ; que le mandant restait libre, en l'absence d'accord attribuant formellement certains clients à son agent, ou d'accords tacites ayant le même objet, de prospecter lui-même des clients pour vendre ses produits, sans être obligé de passer par l'intermédiaire de son agent ni de le rémunérer ; qu'il appartient dès lors à la société Continue de démontrer que l'accord de distribution conclu par la société Vepas Bins avec la société Manutan l'a été grâce à son intervention et qu'elle doit donc être rémunérée par l'allocation de commissions sur le chiffre d'affaires réalisé par la société Vepas Bins avec ce client ; que les diligences effectuées à la demande de la société Vepas Bins par la société Continue en direction de la société Manutan se sont avérées ponctuelles, centrées sur la fin de l'année 2002 et 2003 et limitées à des transmissions purement matérielles, par téléphone ou par messagerie, de contrat ou de tarifs ; qu'aucune autre diligence, conséquente ou régulière dans le temps, n'est démontrée par les pièces versées au dossier, à l'exception de l'organisation d'une réunion commune en décembre 2003, la transmission de l'offre de Vepas Bins à Manutan en deux exemplaires le 17 décembre 2003, et enfin, l'accueil d'une délégation de Manutan à Amsterdam le 10 mai 2004 ; que les attestations versées aux débats par la société Continue pour attester des diligences effectuées ne sont pas probantes, M. Y... parlant de relations antérieures à la période litigieuse et M. Z... étant un ancien salarié de la société Continue ; que les interventions dont elle rapporte la preuve, sporadiques, ne constituent pas des diligences suffisantes pour permettre d'attester que ce client était considéré comme le client de l'agent commercial ou se considérait lui-même comme tel ; qu'il ressort au contraire des pièces du dossier que, dès l'origine, la société Vepas Bins a contracté directement avec la société Manutan, par l'intermédiaire de Manutan Pays-Bas (société Overtoom), qui était déjà son client ; que si, par messagerie du 25 janvier 2002, la société Vepas Bins a demandé à la société Continue d'appeler, par commodité, des « contacts chez Manutan» par téléphone, tous les courriers versés au débat sont des courriers échangés entre les sociétés Vepas Bins et Manutan, tel le message électronique du 19 juin 2002 dans lequel la société Vepas Bins annonce l'envoi de son catalogue et communique ses conditions de paiement, franco de port, le minimum des commandes s'élevant à 2500 euros ; que parallèlement, la société Vepas Bins a loyalement informé son agent de l'état d'avancement des négociations, lui indiquant, dans un courrier du 1er octobre 2003, qu'elle avait décidé de livrer « certains produits pour un prix inférieur (au) prix de revient, dans le but stratégique de pouvoir livrer au groupe Manutan Europe un plus gros assortiment à long terme, ce qui (leur) permettr(ait) de faire un bénéfice réel » ; que dès le début des relations avec ce distributeur de la VPC, la société Vepas Bins a manifesté qu'elle entendait lui réserver un sort particulier, ces commandes étant nécessairement plus importantes que celles des autres clients ; que dans ce courrier, la société Vepas Bins mentionne en effet : « En ce qui concerne votre commission sur les ventes chez Manutan France il faudra d'abord savoir avec quels produits nous réaliserons un chiffre d'affaires en France. S'il s'agit justement des produits que nous avons décidé de livrer pour un prix inférieur à notre prix de revient, il n'y aura pas de possibilité. En cas de bénéfice sur le chiffre d'affaires en France, vous recevrez certainement une commission. Je vous tiendrai au courant et vous donnerai une réponse définitive au plus tard fin décembre 2003 » ; qu'aucune rémunération n'était donc garantie à l'agent sur les ventes effectuées par la société Vepas Bins auprès de la société Manutan ; qu'il ressort d'une attestation rédigée par le cabinet Koopman, datée du 3 septembre 2010, versée aux débats par la société Vepas Bins mais nullement contredite par la société Continue, que les prix effectivement consentis à la société Manutan étaient des prix inférieurs en moyenne de plus de 30 % aux prix consentis aux autres clients ; qu'ainsi, les produits vendus échappaient à toute commission, selon les termes du courrier précité ; que la société Continue n'a jamais sollicité de son mandant des commissions sur le chiffre d'affaires, pourtant très important, réalisé par Vepas Bins avec Manutan, ni n'a évoqué des problèmes particuliers concernant cette société, avant l'envoi de sa lettre recommandée avec accusé de réception du 6 mars 2007, dans laquelle elle sollicite de la société Vepas Bins la communication du chiffre d'affaires réalisé avec cette centrale ; qu'aucun des décomptes versés aux débats, ni aucune facture, émanant de l'une ou l'autre des parties, ne comptabilise la société Manutan dans les clients de la société Continue ; qu'en définitive, aucune commission n'est due à la société Continue sur le chiffre d'affaires réalisé avec la société Manutan, n'étant pas à l'origine de la prospection de ce client, n'ayant accompli que des diligences très ponctuelles et limitées à son égard et le principe d'exclusion de toute rémunération ayant été annoncé par la société Vepas Bins dans le courrier du 1er octobre 2003 ; que le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la société Vepas Bins au paiement de commissions à la société Continue, sur le chiffre d'affaires réalisé avec Manutan;
1°- ALORS QUE la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire, retenir, d'une part (p. 2) que les sociétés Vepas Bins et Continue se sont rapprochées pour mettre en place une collaboration portant « sur la commercialisation des produits Vepas Bins par la société Continue en France » et, d'autre part, qu'aucune preuve n'est rapportée que la société Vepas Bins ait attribué, même de manière non exclusive, un secteur géographique déterminé à la société Continue ; qu'en statuant par ces motifs contradictoires, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°- ALORS QUE la cour d'appel, après avoir constaté que la société Vepas Bins s'était engagée à verser une commission sur le chiffre d'affaires réalisé avec la société Manutan France, sauf s'il s'agissait de produits que la mandante avait décidé de livrer « pour un prix inférieur à son prix de revient », ne pouvait en déduire que tout droit à commission était exclu dès lors et pour le seule motif que les prix consentis à la société Manutan ont été « inférieurs de plus de 30% aux prix consentis aux autres clients » ; qu'en statuant par ces motifs inopérants, sans constater que les produits livrés à la société Manutan France l'auraient été à un prix inférieur au prix de revient, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
3°- ALORS subsidiairement QU'en retenant que la lettre du 1er octobre 2003 annonçait le principe « d'exclusion de toute rémunération », quand cette dernière indiquait au contraire à la société Continue « en cas de bénéfice sur le chiffre d'affaires en France, vous recevrez certainement une commission », la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé l'article 1134 du Code civil


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-21709
Date de la décision : 08/10/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 avril 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 08 oct. 2013, pourvoi n°12-21709


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Gaschignard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.21709
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