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02/10/2013 | FRANCE | N°12-18839

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 02 octobre 2013, 12-18839


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, qui est recevable :
Vu l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, ensemble l'article 1304 du même code ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 12 mai 2010, pourvoi n° 09-11.877), que la société civile immobilière Plum Bay (la SCI) a été constituée par la société Constructions et chantiers maritimes et hôteliers (la CCMH), qui en est devenue la gérante, pour réaliser des opérations d

éfiscalisées de construction de logements dans les départements et territoire...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, qui est recevable :
Vu l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, ensemble l'article 1304 du même code ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 12 mai 2010, pourvoi n° 09-11.877), que la société civile immobilière Plum Bay (la SCI) a été constituée par la société Constructions et chantiers maritimes et hôteliers (la CCMH), qui en est devenue la gérante, pour réaliser des opérations défiscalisées de construction de logements dans les départements et territoires d'outre-mer ; que la SCI et certains de ses associés ont assigné la Société d'aide et de conseil et d'intervention financière (la SACIF), venant aux droits de la CCMH, ses anciens dirigeants et la société Banque de crédit industriel de Normandie, devenue Banque Scalbert-Dupont, aux fins notamment d'obtenir l'annulation pour dol des prêts souscrits par l'ensemble des associés de la SCI en vue de l'augmentation de son capital ; que l'arrêt rendu le 18 décembre 2008 par la cour d'appel de Paris, qui a annulé l'intégralité des prêts consentis par la CCMH et déchargé les emprunteurs de leurs obligations envers la SACIF, a été cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il a déclaré recevable l'action de la SCI pour ses associés absents de la procédure ;
Attendu que pour déclarer la SCI irrecevable en son action oblique du chef de ses associés non présents à la procédure et défaillants en leur réclamation, l'arrêt, après avoir relevé que l'argument et la volonté d'exercer une action oblique pour faire annuler les augmentations de parts concernant les parties non présentes à la procédure et celles qui ne le réclamaient pas ne sont apparus que dans les dernières écritures déposées le 10 mars 2006 devant les premiers juges, retient qu'à cette date, et dès lors que la connaissance du reversement des fonds en faveur d'une société tierce était antérieure à la fin de l'année 1999, l'action en nullité pour dol des parties au nom desquelles l'action oblique a été exercée était prescrite ;
Attendu cependant que l'effet interruptif de prescription attaché à une demande en justice s'apprécie au regard de son objet et non de son fondement juridique ;
D'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher à quelle date avait été délivrée l'assignation tendant à obtenir l'annulation des contrats de prêt souscrits par l'ensemble des associés de la SCI, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société SACIF aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société SACIF et la condamne à payer à la société Plum Bay la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux octobre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Plum Bay
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré la SCI PLUM BAY irrecevable en son action oblique du chef de ses associés non présents à la procédure et défaillants en leur réclamation ;
AUX MOTIFS QUE « Considérant que la Cour est présentement saisie de la question de la recevabilité et du bien fondé de la réclamation de la SCI PLUM BAY dirigée contre les associés absents de la procédure ; que la SACIF ayant été condamnée de ce chef, est nécessairement recevable à former appel de cette décision et partant, à saisir la Cour de céans sur renvoi d'un arrêt de la cour de cassation ayant relevé que la qualification de la nature juridique de l'intervention des associés visés avait été omise ; Considérant que la SCI PLUM BAY ne peu pour les mêmes raisons se prévaloir de la fin de non-recevoir tirée de la chose jugée se rapportant au dol et à la fictivité de tous les prêts souscrits par ses associés, qu'ils soient absents ou non ; que seule la situation de ces derniers a en effet été définitivement tranchée ; (¿) Vu l'article 1166 du Code civil ; Considérant qu'aux termes de cet article « les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur, à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à leur personne » ; qu'il s'en évince que l'action oblique constitue une garantie contre un dépérissement du droit du créancier né de l'inaction du débiteur ; Considérant qu'en exerçant une action oblique, le créancier doit agir comme s'il exerçait du créancier négligent et non en son propre nom et pour son compte ; que l'exercice d'une action de cette nature suppose une carence ou négligence du débiteur envers son propre débiteur, précision étant faite que cette carence ou négligence est établie lorsque ce débiteur ne justifie d'aucune diligence dans la réclamation de son dû ; que toute action de nature patrimoniale du débiteur peut être exercée par la voie de cette action ; que la négligence de ce même débiteur doit encore compromettre les droits du créancier titulaire d'une créance certaine, liquide et exigible ; Considérant qu'en l'espèce, il est constant que les différents prêts que les associés de la SCI PLUM BAY avaient vocation à consentir constituent, en raison des liens existant entre eux, un ensemble contractuel indivisible puisqu'ils obéissaient à la même logique et devaient concourir à la réalisation d'une opération unique, l'augmentation du capital social de cette SCI ; que ces contrats ayant été souscrits au cours de la même séquence et dans les mêmes conditions, la nullité de chacun mène à la nullité des autres ; que la SCI PLUM BAY est recevable à solliciter par voie d'action oblique, l'invalidité pour vice de consentement des contrats souscrits par les associés absents à la procédure dans le but de pouvoir régulariser ses statuts, en écartant de ceux-ci toute mention portant sur l'existence d'un capital social fictif ; Considérant que la SACIF oppose subsidiairement à la SCI PLUM BAY une fin de non-recevoir tirée de la prescription quinquennale de l'action en résolution qu'elle entend exercer ; qu'elle relève que l'examen des conclusions de première instance des requérants permet de constater que l'argument et la volonté d'exercer une action oblique pour faire annuler les augmentations de parts concernant les parties non présentes à la procédure et celles qui ne le réclamaient pas, n'est apparue que dans les dernières écritures déposées devant les premiers juges ; qu'à cette date (le 10 mars 2006) et dès lors que la connaissance du reversement des fonds en faveur de la société tierce, la société VIKING PARTICIPATIONS, est antérieure à la fin de l'année 1999, l'action en nullité pour dol des parties au nom desquelles l'action oblique était exercée était indiscutablement prescrite ; que toute exception et argument opposable au débiteur principal étant opposable au titulaire de l'action oblique, ce dernier apparaît en réalité devoir être déclaré irrecevable ; Considérant que la SCI PLUM BAY n'oppose à hauteur d'appel aucun argument à cette fin de non-recevoir et ne justifie d'aucune cause d'interruption de prescription ; Qu'il convient pour ces raisons de la déclarer irrecevable en son action oblique du chef des associés non présents à la procédure et défaillants en leur réclamation et partant, d'infirmer sous cet aspect le jugement entrepris » ;
1°/ ALORS QUE l'autorité de chose jugée a lieu à l'égard de ce qui fait l'objet du jugement, lorsque la chose jugée est la même, que la demande est fondée sur la même cause, qu'elle est formée entre les mêmes parties et par et contre elles en la même qualité ; qu'en l'espèce, par arrêt du 18 décembre 2008, la Cour d'appel de Paris, devant laquelle la société CCMH-SACIF sollicitait notamment que soit « déclar ée prescrite la demande de nullité des contrats de prêt » (cf. arrêt du 18 décembre 2008, p. 6, § 2, al. 4), a confirmé le jugement ayant déclaré recevables les demandes de nullité pour dol formées par les associés de la SCI PLUM BAY et par la SCI PLUM BAY elle-même aux termes d'une assignation et de conclusions communes ; que cet arrêt du 18 décembre 2008 n'a été cassé par arrêt du 12 mai 2010 qu'«en ce qu'il a déclaré recevable l'action de la société civile immobilière PLUM BAY pour ses associés absents de la procédure », de sorte qu'il était définitivement jugé que les actions en nullité pour dol des contrats consentis par la société CCMH-SACIF aux associés de la SCI PLUM BAY formées par les 28 associés présents à la procédure et la SCI PLUM BAY elle-même n'étaient pas prescrites ; qu'après avoir expressément consacré le caractère indivisible de l'ensemble des contrats de prêt consentis par la société CCMH-SACIF aux associés de la société SCI PLUM BAY, la Cour d'appel a énoncé que la SCI PLUM BAY était irrecevable comme prescrite en son action en nullité pour dol des contrats consentis à ses associés absents de la procédure formée sur le fondement d'une action oblique ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé l'article 1351 du Code civil, ensemble l'article 122 du Code de procédure civile ;
2°/ ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE le juge ne fait droit à la demande que s'il la juge bien fondée ; que la circonstance que le défendeur n'oppose pas d'argument en défense à la fin de non-recevoir soulevée par son adversaire ne dispense pas le juge de s'assurer lui-même, même d'office, de son bien-fondé, dès lors que cette fin de non-recevoir est contestée ; qu'en l'espèce, pour dire que l'action oblique formée par la SCI PLUM BAY était irrecevable comme prescrite, la Cour d'appel s'est bornée à exposer le moyen soulevé en ce sens par la société CCMH-SACIF et à énoncer que la SCI PLUM BAY « n'oppos ait à hauteur d'appel aucun argument à cette fin de non-recevoir et ne justifi ait d'aucune cause d'interruption de prescription » ; qu'en déduisant ainsi le bien-fondé de la fin de non-recevoir soulevée par la société CCMH-SACIF, dont le rejet était sollicité par l'exposante, de la seule prétendue absence d'argument opposé par cette dernière, sans vérifier elle-même que les conditions d'acquisition de la prescription quinquennale étaient réunies, la Cour d'appel a méconnu son office et violé les articles 4, 5 et 12 du Code de procédure civile ;
3°/ ALORS QU' une citation en justice signifiée à celui qu'on veut empêcher de prescrire interrompt la prescription ; que l'interruption de la prescription s'apprécie au regard de l'objet de la demande formulée et non au regard de son fondement juridique ; qu'en l'espèce, pour déclarer irrecevable comme prescrite l'action en nullité formée par la SCI PLUM BAY, la Cour d'appel a énoncé que « l'argument et la volonté d'exercer une action oblique pour faire annuler les augmentations de parts concernant les parties non présentes à la procédure » ne seraient apparues pour la première fois que dans les dernières conclusions déposées devant les premiers juges le 10 mars 2006 ; qu'en se déterminant ainsi au regard d'une circonstance inopérante et sans rechercher à quelle date la SCI PLUM BAY avait délivré à la société CCMH-SACIF une assignation aux fins d'obtenir l'anéantissement de l'ensemble des conventions de prêt consenties par celle-ci à ses associés, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2244 du Code civil, ensemble l'article 1304 du même Code ;
4°/ ALORS QUE dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans ; que ce temps ne court dans le cas d'erreur ou de dol que du jour où ils ont été découverts ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel s'est bornée à affirmer « que la connaissance du reversement des fonds en faveur de la société tierce, la société VIKING PARTICIPATIONS, est antérieure à la fin de l'année 1999 » ; qu'en s'abstenant ainsi de toute précision sur le point de départ de la prescription quinquennale, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1304 du Code civil ;

5°/ ET ALORS QUE pour dire que l'action de la SCI PLUM BAY était prescrite, la Cour d'appel a énoncé que l'argument et la volonté d'agir en nullité des contrats de prêt sur le fondement d'une action oblique ne seraient apparus que dans ses dernières conclusions déposées devant les premiers juges le 10 mars 2006, ce alors que la connaissance du reversement des fonds à la société VIKING PARTICIPATIONS serait « antérieure à la fin de l'année 1999 » ; que cependant, dans son assignation signifiée le 17 février 2004 à la société CCMH-SACIF, la SCI PLUM BAY faisait expressément valoir qu' « à toutes fins, et eu égard à la rédaction des contrats de prêt soumis par CCMH-SACIF à la signature des associés, la SCI PLUM BAY entend préciser que quand bien même elle n'aurait pas été « partie intervenante » aux contrats de prêt ¿ce qui n'est pas le cas- elle n'en disposerait pas moins d'un droit d'agir par action oblique à l'encontre de la CCMH-SACIF. (¿) Ainsi, même tiers aux conventions de prêt, la SCI PLUM BAY pourrait-elle de jure, au nom de l'intérêt social, agir par voie oblique, alors que l'article 1166 du Code civil dispose que « les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à leur personne » » (cf. assignation du 17 février 2004, p. 20, § 5 et p. 21, § 2), et demandait à la Cour, aux termes de son dispositif, « vu l ¿ article (¿) 1166 (¿) du Code civil (¿) de prononcer la résolution de chacun des quarante-trois contrats de prêt conclus entre la société CCMH (aujourd'hui dénommée SACIF) et chacun des quarante-trois associés de la SCI PLUM BAY » (cf. assignation du 17 février 2004, p. 35), de sorte que la SCI PLUM BAY avait, dès l'introduction de son action, soit à une date où par hypothèse la prescription n'était pas acquise, entendu agir en nullité des contrats de prêt sur le fondement de l'action oblique ; que la Cour d'appel qui s'abstient de se prononcer sur l'effet interruptif de cette assignation, qui constituait l'acte introductif d'instance du présent litige, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1304 et 2244 du Code civil ;
6°/ ET ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE dans son assignation signifiée le 17 février 2004 à la société CCMH-SACIF, la SCI PLUM BAY faisait expressément valoir qu' « à toutes fins, et eu égard à la rédaction des contrats de prêt soumis par CCMH-SACIF à la signature des associés, la SCI PLUM BAY entend préciser que quand bien même elle n'aurait pas été « partie intervenante » aux contrats de prêt ¿ce qui n'est pas le cas- elle n'en disposerait pas moins d'un droit d'agir par action oblique à l'encontre de la CCMH-SACIF. (¿) Ainsi, même tiers aux conventions de prêt, la SCI PLUM BAY pourrait-elle de jure, au nom de l'intérêt social, agir par voie oblique, alors que l'article 1166 du Code civil dispose que « les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à leur personne » » (cf. assignation du 17 février 2004, p. 20, § 5 et p. 21, § 2), et demandait à la Cour, aux termes de son dispositif, « vu l ¿ article (¿) 1166 (¿) du Code civil (¿) de prononcer la résolution de chacun des quarante-trois contrats de prêt conclus entre la société CCMH (aujourd'hui dénommée SACIF) et chacun des quarante-trois associés de la SCI PLUM BAY » ((cf. assignation du 17 février 2004, p. 35) ; que la Cour d'appel qui énonce que la SCI PLUM BAY a sollicité pour la première fois l'annulation des conventions en cause par voie d'action oblique dans ses ultimes écritures de première instance du 10 mars 2006, cependant que cette demande figurait clairement dans l'acte introductif d'instance du 17 février 2004, la Cour d'appel a dénaturé cette assignation en méconnaissance de l'objet du litige et violé en conséquence les articles 4 et 5 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-18839
Date de la décision : 02/10/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 mars 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 02 oct. 2013, pourvoi n°12-18839


Composition du Tribunal
Président : M. Gridel (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.18839
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