LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile, ensemble l'article 15 du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009, tel que modifié par l'article 14 du décret n° 2010-1647 du 28 décembre 2010 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'une expertise judiciaire ayant été ordonnée en référé afin d'évaluer l'indemnité due par Mme X... en raison de son occupation d'une maison qu'elle avait acquise en indivision avec M. Y..., ce dernier l'a assignée devant un tribunal de grande instance qui, par un jugement du 6 septembre 2010, a rejeté la demande de nullité du rapport d'expertise formée par Mme X..., l'a condamnée au paiement de certaines sommes au titre de l'indemnité d'occupation et de la taxe foncière 2008, a condamné M. Y... au paiement d'une autre somme au titre du « diagnostic gaz » et a ordonné la compensation entre leurs dettes respectives ; que par acte du 15 octobre 2010, Mme X... a relevé appel de ce jugement ;
Attendu que pour considérer qu'il n'y a pas lieu de remettre en cause les dispositions du jugement statuant sur la validité du rapport d'expertise et sur le partage des factures d'intervention de la SAVAC, l'arrêt retient que l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret du 9 décembre 2009, dont la présente disposition est entrée en vigueur le 1er janvier 2011, mentionne expressément que la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 954, alinéa 2, dans sa rédaction résultant du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009 modifié, ne s'applique qu'aux appels formés à compter du 1er janvier 2011, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande en nullité du rapport d'expertise formée par un litigant (Mme X..., l'exposante) ;
AUX MOTIFS QUE l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret du 9 décembre 2009, dont la disposition était entrée en vigueur le 1er janvier 2011, mentionnait expressément que « la cour ne statu(ait) que sur les prétentions énoncées au dispositif », de sorte qu'il n'y avait pas lieu de remettre en cause les dispositions du jugement statuant sur la validité du rapport d'expertise et sur le partage des factures d'interventions de la SAVAC ;
ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que, pour refuser de se prononcer sur la demande en nullité du rapport d'expertise, l'arrêt attaqué s'est fondé d'office sur le texte selon lequel la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; qu'en se prononçant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à s'en expliquer, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction, en violation de l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, subsidiairement, l'exposante demandait (v. ses conclusions signifiées le 23 septembre 2011, p. 5, dernier alinéa, p. 6, p. 7, alinéas 1 à 5, et p. 12, alinéa 6, prod.), dans les motifs de ses écritures, l'annulation du rapport d'expertise et sollicitait, dans leur dispositif, la réformation du jugement en chacune de ses dispositions, notamment en ce qu'il avait rejeté la demande en nullité du rapport d'expertise ; qu'elle avait donc réclamé la nullité de ce rapport non seulement dans les motifs de ses conclusions mais également dans leur dispositif ; qu'en refusant néanmoins de se prononcer sur la demande d'annulation du rapport d'expertise, prétexte pris de ce qu'elle n'était tenue de statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif, sans s'en expliquer autrement, la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, en toute hypothèse, l'exposante demandait dans les motifs de ses écritures, l'annulation du rapport d'expertise et sollicitait, dans leur dispositif, la réformation du jugement en chacune de ses dispositions, notamment en ce qu'il avait rejeté la demande en nullité du rapport d'expertise (v. ses conclusions signifiées le 23 septembre 2011, p. 12, alinéa 6, prod.) ; qu'en refusant néanmoins de se prononcer sur la demande d'annulation du rapport d'expertise, prétexte pris de ce qu'elle n'était tenue de statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif, la cour d'appel a dénaturé les écritures de l'exposante en violation de l'article 4 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris qui avait condamné le coindivisaire d'une maison (Mme X..., l'exposante) à payer à son coïndivisaire (M. Y...) une indemnité d'occupation pour la période de janvier 2007 au 31 juillet 2008, d'un montant de 16.340 ¿ avec intérêts légaux à compter du 28 avril 2009 ;
AUX MOTIFS QUE l'indemnité d'occupation était due par un indivisaire ayant la jouissance exclusive d'un bien ; que c'était finalement par courrier du 28 décembre 2006 que M. Y... avait pris acte de ce que Mme X... lui avait refusé l'accès de la maison et qu'il avait déclaré en conséquence ne plus vouloir en assumer les charges ; qu'en cause d'appel les parties n'avaient pas produit de pièces susceptibles d'apporter un nouvel éclairage sur les conditions de l'occupation du bien indivis, Mme X... ne pouvant valablement se prévaloir de ce que M. Y... avait reconnu, par procès-verbal du 20 octobre 2009, avoir pénétré dans la maison le 16 avril 2008, quand il s'agissait pour lui de rentrer dans les lieux, en l'absence de son ancienne concubine, afin de récupérer les objets lui appartenant, et qu'il importait peu de savoir comment il y avait pénétré, dès lors qu'il ne disposait pas des clés et que cet acte isolé ne s'analysait ni en une tentative de reprise d'une vie commune, ni en la manifestation d'une remise en cause de la jouissance exclusive du bien par la femme, qui durait déjà depuis plus d'un an ; que, relativement à la détermination de la valeur locative du bien, le tribunal de grande instance avait refusé de prendre en considération les sommes avancées par Mme X..., qui avait produit des évaluations de faible valeur, établies par des agences immobilières n'ayant pas pu pénétrer dans les lieux, et retenu celle faite par M. Z..., à savoir 1.720 ¿ par mois, qui se trouvait en concordance tant avec le prix de vente du bien à hauteur de 555.000 ¿ qu'avec les loyers couramment pratiqués dans des immeubles de nature semblable ;
ALORS QUE, en présence d'une indivisibilité ou d'un lien de dépendance nécessaire entre divers chefs d'une décision, la cassation s'étend à la disposition qui constitue la suite nécessaire de celle encourant la censure ; que la cassation à intervenir de l'arrêt attaqué en ce qu'il a refusé l'annulation de la mesure d'expertise judiciaire entraînera par voie de conséquence, en application de l'article 625 du code de procédure civile, l'annulation de la même décision en ce qu'elle a fixé la valeur de l'indemnité d'occupation au regard dudit rapport.