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25/09/2013 | FRANCE | N°11-20948

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 septembre 2013, 11-20948


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte au CGEA-AGS de Châlon-sur-Saône de ce qu'il se désiste de la seconde branche du second moyen de son pourvoi incident ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par une lettre du 13 avril 2004, M. X..., salarié de la société ZF Masson, a présenté sa démission pour prétendre au bénéfice de l'Allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA) en application de l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ; qu'il a ultérieurement saisi la juridiction prud'hom

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte au CGEA-AGS de Châlon-sur-Saône de ce qu'il se désiste de la seconde branche du second moyen de son pourvoi incident ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par une lettre du 13 avril 2004, M. X..., salarié de la société ZF Masson, a présenté sa démission pour prétendre au bénéfice de l'Allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA) en application de l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ; qu'il a ultérieurement saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir la condamnation de son ancien employeur à lui verser diverses sommes à titre de dommages-intérêts ; que par un jugement du 7 juin 2005, la société ZF Masson a été placée en redressement judiciaire, M. Y... étant désigné en qualité de commissaire à l'exécution du plan puis, par ordonnance du 11 avril 2007, M. Z... étant désigné en qualité de mandataire ad hoc ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter la demande d'indemnisation du préjudice économique, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte de l'article L. 4121-1 du code du travail que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise doit en assurer l'effectivité ; que l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 crée un dispositif spécifique destiné à compenser la perte d'espérance de vie que peuvent connaître des salariés en raison de leur exposition à l'amiante ; que ce dispositif ne tend ainsi ni à compenser un préjudice économique, ni à en exclure la réparation ; qu'en considérant que M. X... n'était pas fondé à demander réparation de son préjudice économique au motif qu'il avait fait le choix de demander le bénéfice de l'allocation de l'ACAATA la cour d'appel a violé l'article L. 4121-1 du code du travail, ensemble l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;

2°/ que M. X... soutenait qu'il avait été placé dans des conditions de travail dangereuses, en inhalant des poussières d'amiante, et que la société ZF Masson, pourtant informée de cette situation, n'avait pas pris pendant de nombreuses années, les mesures efficaces et adaptées permettant d'y mettre fin ; que l'inexécution fautive par son employeur de son obligation de sécurité de résultat l'avait contraint à adhérer au régime de l'ACAATA entraînant une perte de revenus ; qu'ainsi le préjudice ne résultait pas de son choix mais de la faute de l'employeur ; qu'en ne recherchant pas si l'adhésion à l'ACAATA n'était pas le résultat non pas d'un choix mais de l'attitude fautive de l'employeur, et en ne s'expliquant pas sur la contrainte subie par le salarié et en se contentant d'invoquer le choix fait par lui, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil et de l'article L. 4121-1 du code du travail, ensemble l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;

Mais attendu que selon l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, qui crée un dispositif spécifique destiné à compenser la perte d'espérance de vie que peuvent connaître des salariés en raison de leur exposition à l'amiante, une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparations navales, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent certaines conditions ; que le salarié qui est admis au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité présente sa démission à son employeur ; qu'il résulte de ces dispositions que le salarié qui a demandé le bénéfice de l'allocation n'est pas fondé à obtenir de l'employeur fautif, sur le fondement des règles de la responsabilité civile, réparation d'une perte de revenu résultant de la mise en oeuvre du dispositif légal ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi principal du salarié :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter la demande de réparation du préjudice résultant du bouleversement dans les conditions d'existence, alors, selon le moyen :
1°/ que M. X... demandait réparation du préjudice causé par le bouleversement dans ses conditions d'existence résultant de ce que l'employeur, avant même l'option d'adhérer ou non au régime de l'ACAATA l'avait placé devant des options dont aucune n'était souhaitée par lui et dont la cause indiscutable est le grave manquement de l'employeur à son obligation de sécurité qui doit être indemnisé ; qu'en disant que M. X... se limitait à demander réparation du préjudice économique et perte de chance de mener à bien une carrière normale, la cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en s'abstenant de rechercher si, indépendamment du choix fait, le seul fait d'être placé devant lesdites options n'était pas constitutif en soi d'un préjudice réparable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du code civil, L. 4121-1 du code du travail et 41 de la loi du 23 décembre 1998 précitée ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le salarié fondait sa demande sur la baisse substantielle de ses revenus compensée par une inactivité non souhaitée résultant de l'adhésion au dispositif de l'ACAATA, la cour d'appel en a exactement déduit, sans modifier l'objet du litige ni avoir à effectuer une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que cette demande, qui ne visait qu'à voir réparer sous une autre dénomination son préjudice économique, ne pouvait qu'être rejetée ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident de l'AGS et le premier moyen du pourvoi incident de l'employeur, réunis :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de fixer au passif de la société ZF Masson, une somme à titre de dommages-intérêts réparant le préjudice d'anxiété, alors, selon le moyen, que le salarié exposé au risque de contamination à l'amiante du fait de son employeur ne peut obtenir la réparation de son préjudice d'anxiété que s'il est amené à subir des contrôles et examens réguliers propres à réactiver cette angoisse ; que la cour d'appel a, au cas d'espèce, réparé le préjudice d'anxiété du salarié, tout en constatant qu'il ne justifiait pas d'un suivi médical ou psychologique particulier ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, ensemble l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que le salarié, qui avait travaillé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, se trouvait, par le fait de l'employeur, dans une situation d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante, qu'il se soumette ou non à des contrôles et examens médicaux réguliers, a ainsi caractérisé l'existence d'un préjudice spécifique d'anxiété ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi incident de l'AGS :
Attendu que l'AGS fait grief à l'arrêt de dire que la décision lui est opposable, alors, selon le moyen, que la réparation par l'employeur du préjudice d'anxiété du salarié ne résulte pas de l'inexécution d'une obligation résultant de son contrat de travail ; qu'il s'en suit que les dommages-intérêts dus à ce titre n'entrent pas dans le cadre de la garantie de l'AGS ; qu'en statuant en sens contraire, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, ensemble l'article L. 3253-6 du code du travail ;
Mais attendu que les dommages-intérêts dus au salarié à raison de l'inexécution par l'employeur d'une obligation découlant du contrat de travail sont garantis par l'AGS dans les conditions prévues par l'article L. 3253-6 du code du travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen du pourvoi incident de l'employeur :
Vu l'article 41 V de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, ensemble l'article L. 1234-1 du code du travail ;
Attendu que pour fixer au passif de la société les sommes dues à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, la cour d'appel énonce que c'est en vain que les intimés soutiennent qu'aucune somme n'est due à ce titre eu égard à l'accord intervenu entre les parties, dès lors que la société, même si elle dispensait le salarié de l'exécution de son préavis, devait lui verser une indemnité compensatrice à laquelle celui-ci n'avait pas renoncé ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le salarié avait souhaité être dispensé de l'exécution de son préavis et que l'employeur y avait consenti, ce dont il résultait que l'inexécution du préavis par le salarié avait été décidée d'un commun accord entre les parties, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé au passif de la société ZF Masson, les sommes dues à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, l'arrêt rendu le 11 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Rejette les demandes de M. X... au titre d'une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande de dommages et intérêts en réparation de son préjudice économique en raison de l'attitude fautive de son employeur.
AUX MOTIFS QUE depuis un arrêté du 23 mars 2003, la société ZF Masson est inscrite sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante-ACAATA-. M. Patrick X... a été exposé à l'inhalation des poussières d'amiante entre 1963 et 1997 alors qu'il occupait le poste de tourneur et était également chargé du nettoyage de l'atelier sans bénéficier de protection individuelle. Il a ainsi été placé dans des conditions de travail dangereuses, en inhalant des poussières d'amiante, comme en atteste M. A... qui a travaillé avec lui entre 1965 et 2003, la société ZF Masson, pourtant informée de cette situation, n'ayant pas pris pendant de nombreuses années les mesures efficaces et adaptées permettant d'y mettre fin. La loi n° 98-11 94 du 23 décembre 1998, a institué en son article 41 en faveur des travailleurs qui ont été particulièrement exposés à l'amiante, sans être atteints d'une maladie professionnelle consécutive à cette exposition, un mécanisme de départ anticipé à la retraite ainsi conçu :- sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle et à la condition de travailler ou d'avoir travaillé dans un établissement figurant sur une liste établie par arrêté où étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, les salariés ou anciens salariés d'un tel établissement peuvent, à partir de l'âge de 50 ans, bénéficier d'une allocation de cessation anticipée d'acivité-ACAATA-,- le montant de l'allocation est égal à 65 % du salaire dans la limite du plafond de la sécurité sociale et de 50 % de celui-ci pour la limite comprise entre une et deux fois ce même plafond, sans pouvoir être inférieure au montant journalier de l'allocation d'assurance-chômage, ni excéder 85 % du salaire de référence. Elle cesse d'être versée quand le bénéficiaire remplit les conditions pour bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein,- le salarié qui est admis au bénéfice de l'ACAATA présente sa démission à l'employeur. Le contrat de travail cesse de s'exécuter dans les conditions prévues à l'article L 122-6 du code du travail. Cette rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié ouvre droit, au bénéficie du salarié, au versement par l'employeur d'un montant égal à celui de l'indemnité de départ en retraite. * Sur le préjudice économique ou subsidiairement les dommages-intérêts sollicités en réparation du bouleversement dans ses conditions d'existence M. Patrick X... expose avoir subi une perte de revenus consécutive à son départ anticipé en retraite, que le lien de causalité entre l'exposition à l'amiante et ce dommage économique est incontestable, qu'alors qu'il percevait un salaire mensuel moyen de 1 482, 95 euros, il perçoit une allocation de cessation d'activité anticipée mensuelle nette de 1 169 euros, sa perte de revenus s'élevant ainsi sur 60 mois à la somme de 18 837 euros dont il sollicite le paiement à titre de dommages-intérêts à titre principal. A titre subsidiaire, il sollicite la somme de 15 000 euros en réparation du bouleversement dans ses conditions d'existence. Cependant, comme l'invoquent tant Maîtres Z... et Y..., ès qualités, que le CGEA-AGS de Chalon sur Saône, selon l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ci-dessus rappelée qui crée un dispositif spécifique destiné à compenser la perte d'espérance de vie que peuvent connaître des salariés en raison de leur exposition à l'amiante, une allocation de cessation anticipée d'activité dite ACAATA est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparations navales, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle lorsqu'ils remplissent certaines conditions, le salarié admis au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité présentant sa démission à son employeur. Il en résulte que le salarié qui a fait le choix de demander le bénéfice de cette allocation n'est pas fondé à obtenir de l'employeur fautif, sur le fondement des règles de la responsabilité civile, réparation d'une perte de revenu résultant de la mise en oeuvre du dispositif légal. M. Patrick X... sera ainsi débouté de sa demande en paiement de la somme principale de 18 837 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de cette perte de revenu.

ALORS QU''il résulte de l'article L. 4121-1 du code du travail que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise doit en assurer l'effectivité ; que l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 crée un dispositif spécifique destiné à compenser la perte d'espérance de vie que peuvent connaître des salariés en raison de leur exposition à l'amiante ; que ce dispositif ne tend ainsi ni à compenser un préjudice économique, ni à en exclure la réparation ; qu'en considérant que Monsieur X... n'était pas fondé à demander réparation de son préjudice économique au motif qu'il avait fait le choix de demander le bénéfice de l'allocation de l'ACAATA la cour d'appel a violé l'article L. 4121-1 du code du travail, ensemble l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998
ALORS en tout cas QUE Monsieur X... soutenait qu'il avait été placé dans des conditions de travail dangereuses, en inhalant des poussières d'amiante, et que la société ZF Masson, pourtant informée de cette situation, n'avait pas pris pendant de nombreuses années, les mesures efficaces et adaptées permettant d'y mettre fin ; que l'inexécution fautive par son employeur de son obligation de sécurité de résultat l'avait contraint à adhérer au régime de l'ACAATA entraînant une perte de revenus ; qu'ainsi le préjudice ne résultait pas de son choix mais de la faute de l'employeur ; qu'en ne recherchant pas si l'adhésion à l'ACAATA n'était pas le résultat non pas d'un choix mais de l'attitude fautive de l'employeur, et en ne s'expliquant pas sur la contrainte subie par le salarié et en se contentant d'invoquer le choix fait par lui, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil et de l'article L. 4121-1 du code du travail, ensemble l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du bouleversement de ses conditions d'existence en raison de l'attitude fautive de son employeur.
AUX MOTIFS QUE Il sollicite à titre subsidiaire la somme de 15 000 euros sous l'intitulé de " réparation du bouleversement dans ses conditions d'existence " qu'il fonde également sur le fait qu'il a été tenu d'opérer un choix dans une situation d'incertitude, soutenant que " dans ces conditions, l'aléa ne chasse pas la lésion, il l'a crée :- diminution substantielle et immédiate de revenus faussement compensée par une inactivité qui n'a pas été souhaitée par le salarié et qui est en réalité source de de désocialisation précoce d'un côté,- renonciation non compensée à une période de retraite dans des conditions égales à celles des autres salariés en raison d'une perte d'espérance de vie dont le législateur dans la loi du 23 décembre 1998 a formulé l'équation, d'un autre côté,- absence de choix enfin pour les exclus de I'ACAATA ". S'il considère que ces éléments caractérisent un bouleversement dans ses conditions d'existence, alors même que le troisième terme ne le concerne pas puisqu'il ne fait pas partie des " exclus de 1'ACAATA ", il apparaît qu'il entend ainsi sous une autre dénomination voir réparer le même préjudice économique ou perte de chance de mener à bien une carrière normale jusqu'à son terme. Il sera, en conséquence, et pour le même motif, débouté de sa demande subsidiaire, étant observé qu'il ne fournit par ailleurs aucun élément sur le montant de la somme réclamée. Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a à la fois condamné la société ZF Masson à lui payer la somme de 10 000 euros en réparation de ce préjudice " au titre de la perte de chance " et fixé cette même somme au passif de la procédure collective de cette société.
ALORS AUSSI QUE Monsieur X... demandait réparation du préjudice causé par le bouleversement dans ses conditions d'existence résultant de ce que l'employeur, avant même l'option d'adhérer ou non au régime de l'ACAATA l'avait placé devant des options dont aucune n'était souhaitée par lui et dont la cause indiscutable est le grave manquement de l'employeur à son obligation de sécurité qui doit être indemnisé ; qu'en disant que Monsieur X... se limitait à demander réparation du préjudice économique et perte de chance de mener à bien une carrière normale, la Cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile
QU'en tout cas, en s'abstenant de rechercher si, indépendamment du choix fait, le seul fait d'être placé devant lesdites options n'était pas constitutif en soi d'un préjudice réparable, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du Code civil, L. 4121-1 du code du travail et 41 de la loi du 23 décembre 1998 précitée. Moyens produits par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. Z..., ès qualités, la société Y...- B..., ès qualités et la société ZF Masson, demandeurs au pourvoi incident
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt, infirmatif sur ce point, d'avoir fixé au passif de la procédure collective de la société ZF Masson la somme de 10. 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice d'anxiété ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur Patrick X... qui a été débouté par le jugement déféré de cette demande qu'il formait à hauteur de la somme de 10. 000 euros sollicite devant la cour 15. 000 euros en réparation de ce préjudice, en rappelant différentes décisions de justice intervenues et notamment l'arrêt de la Cour de cassation du 11 mai 2010 qui n'a pas censuré l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux de ce chef, s'agissant d'autres salariés qui se trouvaient dans la même situation que lui ; que même si, comme l'observe le CGEA-AGS de Chalon sur Saône et que l'a retenu le conseil de prud'hommes, il ne justifie pas d'un suivi médical ou psychologique particulier, il est indéniable qu'ayant travaillé dans un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, il se trouve, par le fait de l'employeur, dans une situation d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante ; que ce préjudice sera réparé par l'allocation de la somme de 10. 000 euros qu'il sollicitait en première instance et qu'il a augmentée sans nouvel élément devant la cour, somme qui sera fixée au passif de la procédure collective de la société ZF Masson » ;
ALORS QUE le salarié, exposé au risque de contamination à l'amiante du fait de son employeur, ne peut obtenir la réparation de son préjudice d'anxiété que s'il est amené à subir des contrôles et examens réguliers propres à réactiver cette angoisse ; que la Cour d'appel a, au cas d'espèce, réparé le préjudice d'anxiété du salarié, tout en constatant qu'il ne justifiait pas d'un suivi médical ou psychologique particulier (arrêt, p. 7, 1er §) ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, ensemble l'article 1382 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt, infirmatif sur ce point, d'avoir fixé au passif de la procédure collective de la société ZF Masson les sommes de 3. 707, 37 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 370, 73 euros au titre des congés payés incidents ;
AUX MOTIFS QUE « l'appelant expose qu'afin de pouvoir bénéficier de l'ACAATA, il a démissionné par lettre du 13 avril 2004, qu'il devait, compte tenu de son ancienneté, respecter un délai-congé de trois mois, comme le prévoit la convention collective de la métallurgie applicable, que par courrier du 27 avril 2004, le directeur des ressources humaines l'a informé de ce qu'il était dispensé d'effectuer son préavis sans que lui soit versée une quelconque indemnité compensatrice, laquelle s'élevait alors à la somme de 5. 169, 55 euros ; qu'il précise que si l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 prévoit que c'est au salarié de prendre l'initiative de la rupture, la responsabilité de celle-ci incombe à l'employeur, puisqu'il est précisé que ¿'le contrat de travail cesse de s'exécuter dans les conditions de l'article L 122-6 du code du travail'', devenu L. 1234-1 du même code qui prévoit que le salarié a droit à un préavis de deux mois, sauf dispositions légales ou conventionnelles plus favorables, ou à une indemnité compensatrice d'un même montant, que conformément aux dispositions de la convention collective, l'employeur aurait dû l'informer de ce qu'il devait accomplir un préavis de trois mois, que s'il l'en a dispensé, lui-même n'a pas renoncé dans sa lettre de démission à percevoir une indemnité compensatrice ; que par lettre remise en main propre le 13 avril 2004, M. Patrick X... a démissionné en précisant que ¿'mon préavis de démission est de deux semaines. Je quitterai donc définitivement la société le 30 avril 2004...''; qu'en réponse, par lettre du 27 avril 2004, sur laquelle M. Patrick X... a apposé la mention ¿'Bon pour accord le 23/ 5/ 03'', le directeur des ressources humaines de la société lui a rappelé qu'il devait respecter un préavis de trois mois, qu'il prenait cependant en compte son souhait et qu'ainsi il ne ferait plus partie des effectifs à compter du 30 avril 2004 ; que c'est en vain que les intimés soutiennent qu'aucune somme n'est due à ce titre à l'appelant, eu égard à l'accord intervenu entre les parties ; qu'en effet, l'article 41 en son paragraphe V précise, comme il l'a été ci-dessus rappelé, que ¿'le contrat de travail cesse de s'exécuter dans les conditions prévues à l'article L. 122-6 du code du travail''devenu L. 1234-1 du même code qui prévoit un préavis dans les conditions fixées par le code du travail ou la convention collective pour un motif autre qu'une faute grave ; que dès lors, la société ZF Masson devait, même si elle dispensait le salarié de l'exécution de son préavis, lui verser une indemnité compensatrice à laquelle celui-ci n'a pas renoncé ; qu'il en résulte que M. Patrick X... est fondé à solliciter à ce titre, sur la base de la moyenne des derniers mois de salaire qui lui ont été versés soit 1. 482, 95 euros, les sommes de :- indemnité compensatrice de préavis (1. 482, 95 euros/ 30 jours) x 75 jours : 3. 707, 37 euros,- congés payés incidents : 370, 73 euros ; que ces sommes seront fixées au passif de la procédure collective de la société ZF Masson et la décision déférée infirmée en ce qu'elle l'a débouté de cette prétention » ;
ALORS QU'en cas d'inexécution par le salarié du préavis, l'employeur n'est tenu au paiement d'une indemnité compensatrice que lorsqu'il a unilatéralement décidé de dispenser le salarié d'exécuter sa prestation de travail ou lorsque cette inexécution lui est imputable ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que par lettre de démission du 13 avril 2004, le salarié a indiqué quitter « définitivement la société le 30 avril 2004 », et qu'« en réponse, par lettre du 27 avril 2004, sur laquelle M. Patrick X... a apposé la mention ¿'Bon pour accord le 23/ 5/ 03'', le directeur des ressources humaines de la société lui a rappelé qu'il devait respecter un préavis de trois mois, qu'il prenait cependant en compte son souhait et qu'ainsi il ne ferait plus partie des effectifs à compter du 30 avril 2004 » (arrêt, p. 7, antépénult. §) ; qu'en retenant pourtant, pour accueillir la demande du salarié en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, que « la société ZF Masson devait, même si elle dispensait le salarié de l'exécution de son préavis, lui verser une indemnité compensatrice à laquelle celui-ci n'a pas renoncé », cependant qu'elle avait elle-même relevé que l'employeur avait répondu au « souhait » du salarié d'exécuter un préavis écourté, ce dont il résultait que l'inexécution de l'intégralité du préavis procédait d'un accord intervenu entre les parties à l'initiative du salarié, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations en violation de l'article 41, V., de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, ensemble l'article L. 1234-1 du Code du travail. Moyens produits par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour le CGEA-AGS, demandeur au pourvoi incident
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fixé au passif de la procédure collective de la société ZF Masson, à la somme de 10. 000 ¿ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice d'anxiété de Monsieur X... ;
Aux motifs que « M. Patrick X... qui a été débouté par le jugement déféré de cette demande qu'il formait à hauteur de la somme de 10 000 euros sollicite devant la cour 15 000 euros en réparation de ce préjudice, en rappelant différentes décisions de justice intervenues et notamment l'arrêt de la Cour de cassation du 11 mai 2010 qui n'a pas censuré l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux de ce chef, s'agissant d'autres salariés qui se trouvaient dans la même situation que lui.
Même si, comme l'observe le CGEA-AGS de Chalon sur Saône et que l'a retenu le conseil de prud'hommes, il ne justifie'pas d'un suivi médical ou psychologique particulier, il est indéniable qu'ayant travaillé dans un des établissements mentionnés à l'article 41. de la loi du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, il se trouve, par le fait de l'employeur, dans une situation d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante.
Ce préjudice sera réparé par l'allocation de la somme de 10 000 euros qu'il sollicitait en première instance et qu'il a augmentée sans nouvel élément devant la cour, somme qui sera fixée au passif de la procédure collective de la société ZF Masson ».
Alors que le salarié exposé au risque de contamination à l'amiante du fait de son employeur ne peut obtenir la réparation de son préjudice d'anxiété que s'il est amené à subir des contrôles et examens réguliers propres à réactiver cette angoisse ; que la Cour d'appel a, au cas d'espèce, réparé le préjudice d'anxiété du salarié, tout en constatant qu'il ne justifiait pas d'un suivi médical ou psychologique particulier ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, ensemble l'article 1382 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit le présent arrêt opposable au CGEA-AGS de Chalon sur Saône les limites de sa garantie légale ;
Aux motifs que « contrairement à ce que soutient l'AGS-CGEA, tant le solde d'indemnité compensatrice de préavis que le préjudice spécifique d'anxiété entrent dans le cadre de sa garantie telle que fixée par l'article L 3253-6 du code du travail selon lequel tout employeur assure ses salariés contre le risque de non paiement des sommes qui leur sont dues en. exécution du contrat de travail en cas de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, cette garantie ne visant pas uniquement les salaires et ses accessoires mais s'étendant aux dommages-intérêts dus au salarié à raison de l'inexécution par l'employeur d'une obligation résultant de s'on contrat de travail.
Cette garantie ne pourra en revanche jouer, comme elle le rappelle, qu'à titre subsidiaire, sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement » ;
Alors d'une part que la réparation par l'employeur du préjudice d'anxiété du salarié ne résulte pas de l'inexécution d'une obligation résultant de son contrat de travail ; qu'il s'en suit que les dommages intérêts dus à ce titre n'entrent pas dans le cadre de la garantie de l'AGS ; qu'en statuant en sens contraire, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, ensemble l'article L. 3253-6 du code du travail.
Alors d'autre part et subsidiairement que l'assurance mentionnée à l'article L. 3253-6 du code du travail couvre les sommes dues aux salariés à la date du jugement d'ouverture de toute procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, ainsi que les contributions dues par l'employeur dans le cadre de la convention de reclassement personnalisé ; qu'il en résulte que l'AGS ne garantit pas la créance de réparation née du préjudice spécifique d'anxiété postérieurement au jugement d'ouverture ; qu'en se bornant à décider que l'AGS devait garantir une telle créance, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant expressément invitée par l'exposante, si elle était née antérieurement au jugement d'ouverture, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3253-8 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-20948
Date de la décision : 25/09/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION, SANTE ET SECURITE - Employeur - Obligations - Sécurité des salariés - Obligation de résultat - Manquement - Préjudice - Préjudice spécifique d'anxiété - Caractérisation - Soumission du salarié à un suivi médical régulier - Nécessité (non)

La cour d'appel, qui a constaté que le salarié, qui avait travaillé dans un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, se trouvait, par le fait de l'employeur, dans une situation d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante, qu'il se soumette ou non à des contrôles et examens médicaux réguliers, a ainsi caractérisé l'existence d'un préjudice spécifique d'anxiété


Références :

Sur le numéro 3 : article 41 de la loi n° 98-114 du 23 décembre 1998 portant financement de la sécurité sociale pour 1999

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 mai 2011

Sur le n° 3 : Sur le principe selon lequel le salarié victime de l'amiante ayant demandé le versement de l'allocation de cessation anticipée d'activité ne peut prétendre à réparation par l'employeur fautif d'une perte de revenu trouvant sa cause dans la mise en oeuvre du dispositif légal, à rapprocher :Soc., 11 mai 2010, pourvoi n° 09-42241, Bull. 2010, V, n° 106 (cassation partielle). Sur le fait que la caractérisation de la situation d'inquiétude permanente face au risque de déclaration d'une maladie liée à l'amiante, n'est pas subordonnée à la justification par le salarié d'un suivi médical particulier, à rapprocher :Soc., 4 décembre 2012, pourvoi n° 11-26294, Bull. 2012, V, n° 316 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 sep. 2013, pourvoi n°11-20948, Bull. civ. 2013, V, n° 212
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, V, n° 212

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Lalande
Rapporteur ?: Mme Sabotier
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Bénabent et Jéhannin, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.20948
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