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17/09/2013 | FRANCE | N°12-17741

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 septembre 2013, 12-17741


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 621-9 du code de commerce, dans sa rédaction issue de loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, et 145 du code de procédure civile ;
Attendu que lorsque la désignation d'un technicien est nécessaire, seul le juge-commissaire peut y procéder en vue d'une mission qu'il détermine, sans préjudice de la faculté pour le tribunal prévue à l'article L. 621-4 du code de commerce de désigner un ou plusieurs experts ;
Attend

u, selon l'arrêt attaqué, qu'afin d'éviter, en décembre 2004, la cessation ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 621-9 du code de commerce, dans sa rédaction issue de loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, et 145 du code de procédure civile ;
Attendu que lorsque la désignation d'un technicien est nécessaire, seul le juge-commissaire peut y procéder en vue d'une mission qu'il détermine, sans préjudice de la faculté pour le tribunal prévue à l'article L. 621-4 du code de commerce de désigner un ou plusieurs experts ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'afin d'éviter, en décembre 2004, la cessation des paiements de la société Agri élevage distribution (la société AED), dont le gérant est M. X..., une société AED Nutrition a été constituée ayant pour associés ses quatre principaux fournisseurs et créanciers, à savoir les sociétés Dumoulin, Rocourt dont le gérant est M. Y..., Idena et Vitalac avec promesse de céder leurs créances sur la société AED à la société AED Nutrition et de conclure une convention de location gérance d'une branche d'activité de la société AED au profit de la société AED Nutrition moyennant une redevance annuelle de 153 310 euros HT ; que, faute de cession des créances, la société AED a assigné, le 27 avril 2008, la société AED Nutrition en résiliation du contrat de location gérance ; que, le 3 avril 2008, la société AED a été mise en redressement judiciaire, la société Soinne étant désignée mandataire judiciaire puis ultérieurement commissaire à l'exécution du plan ; que, les 7 juillet et 9 octobre 2008, la société AED Nutrition a été mise en redressement puis liquidation judiciaires, M. Z... étant désigné liquidateur ; que, le 25 novembre 2008, la société Dumoulin a assigné en référé M. Z... et la société Soinne, ès qualités, la société Rocourt, MM. X... et Y... pour obtenir la désignation d'un expert sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter la demande d'expertise de la société Dumoulin présentée sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, l'arrêt, après avoir relevé que cette société, qui avait saisi le juge des référés, n'avait pas saisi le juge-commissaire d'une demande de mesure d'instruction qu'il lui appartenait d'ordonner en application de l'article L. 621-9 du code de commerce, en déduit que l'ordonnance du 16 mars 2010 en ce qu'elle a rejeté cette demande d'expertise in futurum doit être confirmée ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avertissement délivré aux parties ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Annule l'ordonnance de référé du 16 mars 2010 ;
Déclare le juge des référés incompétent pour statuer sur la demande de la société Dumoulin relative à l'application des dispositions de l'article 145 du code de procédure civile ;
Dit qu'il appartient à la société Dumoulin de saisir le juge-commissaire de la procédure collective, seul compétent pour désigner un technicien, conformément aux dispositions de l'article L. 621-9 du code de commerce, dans sa rédaction issue de loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;
Condamne la société Soinne, ès qualités, les sociétés AED et Etablissement Rocourt, MM. X... et Y..., M. Z..., ès qualités, aux dépens, y compris ceux exposés devant les juges du fond ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept septembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Vincent et Ohl, avocat aux Conseils, pour la société Dumoulin NV
En ce que l'arrêt attaqué, par confirmation de l'ordonnance dont appel, a débouté la société Dumoulin de ses demandes de désignation d'un expert judiciaire sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ;
Aux motifs propres premièrement qu'aux termes de l'article 621-9 du code de commerce, "Lorsque la désignation d'un technicien est nécessaire, seul le juge-commissaire peut y procéder en vue d'une mission qu'il détermine, sans préjudice de la faculté pour le tribunal prévue à l'article L 621-4 de désigner un ou plusieurs experts" ; que la demande d'expertise présentée par la société Dumoulin vise à obtenir des éléments propres à établir que ses co-associés dans la société AED Nutrition auraient bénéficié de conditions préférentielles de règlement de leurs créances en tant que fournisseurs de cette société ; que toutefois le société AED Nutrition a fait l'objet d'une procédure collective ; que la société Dumoulin n'a pas saisi le juge-commissaire d'une demande de mesure d'instruction qu'il lui appartenait d'ordonner en application de l'article 621-9 du code de commerce ; qu'il en résulte que sa demande est irrecevable devant le juge des référés ; que l'ordonnance déférée sera confirmée en ce qu'elle a débouté la société Dumoulin de sa demande d'expertise (arrêt attaqué, p. 3, dernier al. et p. 4, 1er §) ;
1°/ Alors que le juge des référés possède un pouvoir concurrent de celui du juge-commissaire à l'effet d'ordonner une expertise préventive telle que prévue par l'article 145 du code de procédure civile ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 621-9 du code de commerce et 145 du code de procédure civile ;
Aux motifs propres deuxièmement qu' au surplus, force est de constater en l'espèce que l'hypothèse d'un paiement préférentiel n'est étayé par aucun élément (arrêt attaqué, p. 4, 2ème al.) ;
2°/ Alors qu' en statuant ainsi par une motivation fondée sur l'absence de preuve de faits que la mesure d'instruction sollicitée avait précisément pour objet de conserver ou d'établir, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard l'article 145 du code de procédure civile ;
Aux motifs propres troisièmement que la cour observe en outre que la société Dumoulin a été partie prenante à un montage juridique destiné à lui assurer ainsi qu'à ses co-associés et fournisseurs de la société AED Nutrition, le paiement préférentiel de sa créance au détriment des autres créanciers de cette société (arrêt attaqué p. 4, al. 2, in fine) ;
3°/ Alors qu' il appartient au juge de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'en statuant par un tel motif sans préciser le fondement juridique de son raisonnement ni les conséquences devant résulter de son « observation » sur la recevabilité ou le bien fondé de la demande, la cour d'appel a encore violé l'article 12 du code de procédure civile ;
Et aux motifs adoptés du premier juge, que la société Dumoulin n'a pas cédé à la société AED Nutrition la créance qu'elle détenait sur la société AED empêchant ainsi de rendre juridiquement opérationnelle la compensation loyer contre créance prévue dans le cadre du contrat de location gérance voulue par elle-même ; que la société Dumoulin a poursuivi ses livraisons avec la société AED et AED Nutrition en toute connaissance de cause, augmentant ainsi ses créances sur lesdites sociétés, alors que les difficultés de règlement de celles-ci ne pouvaient lui être inconnues ; qu'ainsi, la société Dumoulin, comme les autres associés, est pleinement responsable de l'imbroglio juridique et financier dans lequel se sont trouvées les sociétés AED et AED Nutrition ; qu'il est impossible de faire le lien entre le loyer et les créances antérieures au contrat de location gérance ; qu'on se trouve dans la situation de deux sociétés commerciales indépendantes dont le seul lien est le bail d'un fonds de commerce ; que, juridiquement, il faut considérer que ces deux sociétés ont certes des fournisseurs communs mais qu'elles procèdent à des achats et à des règlements en toute indépendance ; qu'il apparaît que la société Dumoulin, fournisseur et associée de la société AED Nutrition ne peut sérieusement prétendre n'avoir ou n'avoir pu obtenir les renseignements utiles à la préservation de ses créances ; qu'il apparaît ainsi que la société Dumoulin a fait preuve de peu de diligence, ce qui est inconcevable de la part d'un associé ; que la requérante ne justifie d'aucun motif légitime à l'appui de sa demande ; qu'il convient de la débouter purement et simplement de sa demande de mesure d'instruction (ordonnance dont appel, p. 9 et 10) ;
4°/ Alors que l'article 146 du code de procédure civile est sans application lorsque le juge est saisi sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ; qu'en statuant comme elle a fait et en opposant à la demande de la société Dumoulin sa carence prétendue dans le recherche de la preuve des faits que la mesure d'instruction sollicitée avait précisément pour objet de conserver ou d'établir, la cour d'appel a encore violé les articles 145 et 146 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-17741
Date de la décision : 17/09/2013
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Organes - Juge-commissaire - Compétence exclusive - Désignation d'un technicien - Cas - Sauvegarde de la preuve avant tout procès - Portée

Il résulte des dispositions de l'article L. 621-9 du code de commerce, dans sa rédaction issue de loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, que lorsque la désignation d'un technicien est nécessaire, seul le juge-commissaire peut y procéder en vue d'une mission qu'il détermine, sans préjudice de la faculté pour le tribunal prévue à l'article L. 621-4 du même code de désigner un ou plusieurs experts. Excède, en conséquence, ses pouvoirs la cour d'appel qui, statuant au fond en matière de référés, rejette la demande d'un créancier du débiteur mis en procédure collective présentée sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile et non sur celui de l'article L. 621-9 du code de commerce


Références :

article L. 621-9 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005

article 145 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 02 novembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 sep. 2013, pourvoi n°12-17741, Bull. civ. 2013, IV, n° 134
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, IV, n° 134

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Rapporteur ?: M. Arbellot
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.17741
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