LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 10 janvier 2012), qu'Emilie est née le 31 juillet 2009 à Mumbai (Inde), de Mme X... et de M. Y..., lequel, de nationalité française, l'avait reconnue en France, le 29 juillet 2009, devant un officier de l'état civil ; que le procureur de la République s'est opposé à la demande de M. Y... tendant à la transcription sur un registre consulaire de l'acte de naissance établi en Inde ;
Sur le premier moyen, pris en ses première, quatrième, sixième et septième branches :
Attendu que M. Y... et Mme X... font grief à l'arrêt de refuser d'ordonner la transcription de l'acte de naissance de l'enfant sur les registres de l'état civil français alors, selon le moyen :
1°/ que tout acte de l'état civil des français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant, après toute vérification utile, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ; qu'en l'espèce, l'acte de naissance établi en Inde d'Emilie Sanjana Lauriane Y..., née le 31 juillet 2009 à Mumbai, énonce que M. Y... est le père de l'enfant ; qu'en cause d'appel, n'étaient contestées ni la régularité formelle de cet acte, ni la conformité à la réalité de ses énonciations ; que la circonstance selon laquelle M. Y... aurait eu recours à « un contrat de mère porteuse prohibé par la loi française » ou encore à l'« achat d'enfant » n'était pas de nature à enlever toute force probante à l'acte de naissance au regard de la filiation paternelle de ce dernier à l'égard de l'enfant qui était incontestable et incontestée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui n'était pas saisie de la validité d'un contrat de gestation pour autrui, mais de la transcription d'un acte de l'état civil, a violé les articles 47 et 332 du code civil, ensemble l'article 423 du code de procédure civile ;
2°/ qu'aucun des éléments retenus par la cour d'appel, ni le court séjour, à le supposer sans objet particulier, de M. Y... en Inde à l'époque de la conception, ni l'absence de connaissance respective des parents de leurs biographies, ni le fait, si son abandon était envisagé, de confier l'enfant née de cette relation au père de l'enfant plutôt qu'à un service d'adoption, ni l'absence de projet commun tant de vie de couple que de suivi de l'enfant, ni le versement par le père à la mère d'origine extrêmement modeste de la somme de 1 500 euros, n'étaient de nature à caractériser l'existence d'une convention portant sur la gestation pour le compte d'autrui ; qu'en retenant le contraire la cour d'appel a, en toute hypothèse, violé les articles 47 et 16-7 et 16-9 du code civil, ensemble l'article 423 du code de procédure civile ;
3°/ que chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale ; que là où l'existence d'un lien familial avec un enfant se trouve établie, l'Etat doit agir de manière à permettre à ce lien de se développer et accorder une protection juridique rendant possible l'intégration de l'enfant dans sa famille ; que le refus de transcrire un acte de naissance étranger sur les registres de l'état civil rend la filiation qu'il constate inopposable en France ; qu'en l'espèce, le refus de transcription de l'acte de naissance de l'enfant, née d'un père français, sur les registres français de l'état civil, qui rend la filiation paternelle de cette enfant inopposable en France, porte atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant et au droit au respect de la vie privée et familiale de celle-ci et de M. Y... ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4°/ que c'est l'intérêt supérieur de l'enfant qui doit primer ; que le principe de primauté de l'intérêt supérieur de l'enfant impose au juge de rechercher concrètement si l'intérêt de l'enfant guide la mesure qu'il ordonne ; qu'en l'espèce, en refusant de tenir compte de l'intérêt de l'enfant et de rechercher, comme elle le devait, si le refus de transcription de l'acte de naissance de l'enfant sur les registres français de l'état civil, qui rend la filiation paternelle de l'enfant inopposable en France, ne conduisait pas à une méconnaissance de l'intérêt supérieur de ce dernier, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 3-1 de la de la Convention internationale des droits de l'enfant, ensemble l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu qu'en l'état du droit positif, est justifié le refus de transcription d'un acte de naissance fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays lorsque la naissance est l'aboutissement, en fraude à la loi française, d'un processus d'ensemble comportant une convention de gestation pour le compte d'autrui, convention qui, fût-elle licite à l'étranger, est nulle d'une nullité d'ordre public aux termes des articles 16-7 et 16-9 du code civil ;
Qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a caractérisé l'existence d'un tel processus frauduleux, comportant une convention de gestation pour le compte d'autrui conclue entre M. Y... et Mme X..., en a déduit à bon droit que l'acte de naissance de l'enfant établi par les autorités indiennes ne pouvait être transcrit sur les registres de l'état civil français ;
Qu'en présence de cette fraude, ni l'intérêt supérieur de l'enfant que garantit l'article 3, § 1, de la Convention internationale des droits de l'enfant, ni le respect de la vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sauraient être utilement invoqués ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, pris en ses diverses branches :
Attendu que M. Y... et Mme X... font grief à l'arrêt d'annuler la reconnaissance de paternité de M. Y... alors, selon le moyen :
1°/ que la paternité peut être contestée en rapportant la preuve que l'auteur de la reconnaissance n'est pas le père ; que si toute filiation peut être effectivement contestée par le ministère public pour fraude à la loi, il incombe alors à celui-ci de rapporter la preuve de l'inexactitude de la filiation ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats et non contesté, pas même par le ministère public, que M. Y... était le père d'Emilie Sanjana Lauriane Y... ; qu'en annulant néanmoins la reconnaissance de paternité souscrite le 29 juillet 2009 par M. Y..., la cour d'appel a violé les articles 332, alinéa 2, et 336 du code civil ;
2°/ que dans leurs conclusions de première instance du 17 mars 2010 au vu desquelles il a été statué en cause d'appel, M. Y... et Mme X... faisaient expressément valoir que nul ne prétendait ¿ pas même le ministère public ¿ que l'auteur de la reconnaissance n'était pas le père, qu'en d'autres termes, la reconnaissance dont le ministère public demandait ici l'annulation n'était pas mensongère, qu'une reconnaissance qui n'est pas mensongère ne saurait, dès lors, être annulée sous prétexte d'un contournement ¿ qualifié de « fraude à la loi » - des dispositions régissant l'adoption ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions des demandeurs, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale ; que là où l'existence d'un lien familial avec un enfant se trouve établie, l'Etat doit agir de manière à permettre à ce lien de se développer et accorder une protection juridique rendant possible l'intégration de l'enfant dans sa famille ; qu'en l'espèce, l'annulation de la reconnaissance de paternité souscrite le 29 juillet 2009 par M. Y..., qui prive l'enfant de sa filiation paternelle, porte atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant et au droit au respect de la vie privée et familiale de celui-ci et de M. Y... ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4°/ que le principe de primauté de l'intérêt supérieur de l'enfant impose au juge de rechercher concrètement si l'intérêt de l'enfant guide la mesure qu'il ordonne ; qu'en l'espèce, en refusant de tenir compte de l'intérêt de l'enfant et de rechercher, comme elle le devait, si l'annulation de la reconnaissance de paternité souscrite le 29 juillet 2009 par M. Y... qu'elle ordonnait, qui prive l'enfant de sa filiation paternelle, ne conduisait pas à une méconnaissance de l'intérêt supérieur de ce dernier, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 3-1 de la de la Convention internationale des droits de l'enfant, ensemble l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que l'action en contestation de paternité exercée par le ministère public pour fraude à la loi, fondée sur l'article 336 du code civil, n'est pas soumise à la preuve que l'auteur de la reconnaissance n'est pas le père au sens de l'article 332 du même code ; qu'ayant caractérisé la fraude à la loi commise par M. Y..., la cour d'appel en a exactement déduit que la reconnaissance paternelle devait être annulée ;
Qu'en présence de cette fraude, ni l'intérêt supérieur de l'enfant que garantit l'article 3, § 1, de la Convention internationale des droits
de l'enfant, ni le respect de la vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sauraient être utilement invoqués ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le premier moyen, pris en ses deuxième, troisième et cinquième branches, n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils pour M. Y... et Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement du 10 juin 2010 en ce qu'il avait ordonné la transcription de l'acte de naissance de l'enfant sur les registres du service central de l'état civil du ministère des affaires étrangères, et annulé la reconnaissance de paternité souscrite le 29 juillet 2009 par Didier Y... devant l'officier d'état civil du 11ème arrondissement de Paris ;
AUX MOTIFS QUE : « les recherches et constatations du consulat général de France à Bombay permettent de retenir le court séjour sans objet particulier de l'intimé en Inde à l'époque de la conception, l'absence de connaissance respective des parents de leurs biographies, qu'ainsi apparaît pour le moins insolite le fait, si son abandon était envisagé, de confier l'enfant né de cette relation supposée à un étranger inconnu plutôt qu 'à un service d'adoption ; qu'en l'absence de projet commun tant de vie de couple que de suivi de l'enfant, la seule justification qui vaille est la somme versée par le père qui ne doit pas être appréciée en fonction de la situation de celui-ci, mais de celle de la mère d'origine extrêmement modeste pour qui 1.500 ¿ représentent 3 ans de salaire, cette somme étant manifestement sans relation avec les frais même « confortables » de sa grossesse ; qu'ainsi il ne s'agit pas seulement en l'espèce d'un contrat de mère porteuse prohibé par la loi française, mais encore d'un achat d'enfant, évidemment contraire à l'ordre public» ;
ALORS 1°) QUE : tout acte de l'état civil des français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant, après toute vérification utile, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ; qu'en l'espèce, l'acte de naissance établi en Inde d'Emilie Sanjana Lauriane Y..., née le 31 juillet 2009 à Mumbai, énonce que Didier Y... est le père de l'enfant ; qu'en cause d'appel, n'étaient contestées ni la régularité formelle de cet acte, ni la conformité à la réalité de ses énonciations ; que la circonstance selon laquelle Didier Y... aurait eu recours à « un contrat de mère porteuse prohibé par la loi française » ou encore à l'« achat d'enfant » n'était pas de nature à enlever toute force probante à l'acte de naissance au regard de la filiation paternelle de ce dernier à l'égard de l'enfant qui était incontestable et incontestée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui n'était pas saisie de la validité d'un contrat de gestation pour autrui, mais de la transcription d'un acte de l'état civil, a violé l'article 47 et 332 du code civil, ensemble l'article 423 du code de procédure civile ;
ALORS 2°) QUE : dans leurs conclusions de première instance du 17 mars 2010 au vu desquelles il a été statué en cause d'appel, les exposants faisaient expressément valoir qu'il n'était point contesté, pas même par le Ministère public, que l'enfant avait été conçue, portée et mise au monde de la manière la plus naturelle qui fut, que Monsieur Y... comme Madame X... étaient à tous égards les seuls père et mère de cet enfant et que les faits déclarés dans l'acte de naissance litigieux correspondaient à la réalité au sens de l'article 47 du code civil, de sorte que le Ministère public n'était pas fondé à refuser l'enregistrement de l'acte de naissance étranger qui faisait pleinement foi conformément aux dispositions de ce texte ; qu'ils exposaient ainsi que Didier Y... étant le père biologique de l'enfant, sa filiation paternelle, telle que reflétée dans l'acte de naissance, ne pouvait être remise en cause en raison d'une prétendue gestation pour autrui ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions des exposants, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 3°) QUE : dans leurs conclusions de première instance du 17 mars 2010 au vu desquelles il a été statué en cause d'appel, les exposants faisaient également expressément valoir que le Ministère public devait préalablement transcrire l'acte de naissance étranger s'il voulait contester la filiation d'Emilie et, qu'à défaut, il n'avait pas qualité pour agir et contester la filiation ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions des exposants, la cour d'appel a violé, à ce titre encore, l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 4°) QUE : aucun des éléments retenus par la cour d'appel, ni le court séjour, à le supposer sans objet particulier, de Didier Y... en Inde à l'époque de la conception, ni l'absence de connaissance respective des parents de leurs biographies, ni le fait, si son abandon était envisagé, de confier l'enfant née de cette relation au père de l'enfant plutôt qu'à un service d'adoption, ni l'absence de projet commun tant de vie de couple que de suivi de l'enfant, ni le versement par le père à la mère d'origine extrêmement modeste de la somme de 1.500 ¿, n'étaient de nature à caractériser l'existence d'une convention portant sur la gestation pour le compte d'autrui ; qu'en retenant le contraire la cour d'appel a, en toute hypothèse, violé les articles 47 et 16-7 et 16-9 du code civil, ensemble l'article 423 du code de procédure civile ;
ALORS 5°) QUE : l'on ne saurait acheter son propre enfant ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats que Didier Y... était le géniteur et donc le père d'Emilie Sanjana Lauriane Y... ; qu'en considérant qu'il avait acheté son propre enfant pour lui refuser la transcription de l'acte de naissance de ce dernier sur les registres de l'état civil français, la cour d'appel a, encore en toute hypothèse, violé les articles 47 du code civil, ensemble l'article 423 du code de procédure civile ;
ET AUX MOTIFS QUE : « « l'intérêt supérieur de l'enfant » ne peut utilement être mis en avant par Didier Y... qui a fait le choix délibéré de mettre cette enfant et lui-même hors la loi ; que de même il ne peut alléguer d'une atteinte à la vie privée au sens de l'article 8 de la CEDH, en ce qu 'il a été admis à faire pénétrer cette même enfant sur le territoire français ; que le jugement déféré sera donc infirmé et sera annulée la reconnaissance paternelle souscrite à la mairie du 11ème arrondissement de Paris le 29 juillet 2009 par Didier Y... » ;
ALORS 6°) QUE : chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale ; que là où l'existence d'un lien familial avec un enfant se trouve établie, l'Etat doit agir de manière à permettre à ce lien de se développer et accorder une protection juridique rendant possible l'intégration de l'enfant dans sa famille ; que le refus de transcrire un acte de naissance étranger sur les registres de l'état civil rend la filiation qu'il constate inopposable en France ; qu'en l'espèce, le refus de transcription de l'acte de naissance de l'enfant, née d'un père français, sur les registres français de l'état civil, qui rend la filiation paternelle de cette enfant inopposable en France, porte atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant et au droit au respect de la vie privée et familiale de celle-ci et de Didier Y... ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
ALORS 7°) QUE: c'est l'intérêt supérieur de l'enfant qui doit primer ; que le principe de primauté de l'intérêt supérieur de l'enfant impose au juge de rechercher concrètement si l'intérêt de l'enfant guide la mesure qu'il ordonne ; qu'en l'espèce, en refusant de tenir compte de l'intérêt de l'enfant et de rechercher, comme elle le devait, si le refus de transcription de l'acte de naissance de l'enfant sur les registres français de l'état civil, qui rend la filiation paternelle de l'enfant inopposable en France, ne conduisait pas à une méconnaissance de l'intérêt supérieur de ce dernier, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 3-1 de la de la Convention internationale des droits de l'enfant, ensemble l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement du 10 juin 2010, en ce qu'il avait ordonné la transcription de l'acte de naissance de l'enfant sur les registres du service central de l'état civil du ministère des affaires étrangères, et annulé la reconnaissance de paternité souscrite le 29 juillet 2009 par Didier Y... devant l'officier d'état civil du 11ème arrondissement de Paris ;
AUX MOTIFS QUE : « les recherches et constatations du consulat général de France à Bombay permettent de retenir le court séjour sans objet particulier de l'intimé en Inde à l'époque de la conception, l'absence de connaissance respective des parents de leurs biographies, qu'ainsi apparaît pour le moins insolite le fait, si son abandon était envisagé, de confier l'enfant né de cette relation supposée à un étranger inconnu plutôt qu'à un service d'adoption ; qu'en l'absence de projet commun tant de vie de couple que de suivi de l'enfant, la seule justification qui vaille est la somme versée par le père qui ne doit pas être appréciée en fonction de la situation de celui-ci, mais de celle de la mère d'origine extrêmement modeste pour qui 1.500 ¿ représentent 3 ans de salaire, cette somme étant manifestement sans relation avec les frais même « confortables » de sa grossesse ; qu'ainsi il ne s'agit pas seulement en l'espèce d'un contrat de mère porteuse prohibé par la loi française, mais encore d'un achat d'enfant, évidemment contraire à l'ordre public ; « que l'intérêt supérieur de l'enfant » ne peut utilement être mis en avant par Didier Y... qui a fait le choix délibéré de mettre cette enfant et lui-même hors la loi ; que de même il ne peut alléguer d'une atteinte à la vie privée au sens de l'article 8 de la CEDH, en ce qu'il a été admis à faire pénétrer cette même enfant sur le territoire français ; que le jugement déféré sera donc infirmé et sera annulée la reconnaissance paternelle souscrite à la mairie du11ème arrondissement de Paris le 29 juillet 2009 par Didier Y... » ;
ALORS 1°) QUE : la paternité peut être contestée en rapportant la preuve que l'auteur de la reconnaissance n'est pas le père ; que si toute filiation peut être effectivement contestée par le Ministère public pour fraude à la loi, il incombe alors à celui-ci de rapporter la preuve de l'inexactitude de la filiation ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats et non contesté, pas même par le Ministère public, que Didier Y... était le père d'Emilie Sanjana Lauriane Y... ; qu'en annulant néanmoins la reconnaissance de paternité souscrite le 29 juillet 2009 par Didier Y..., la cour d'appel a violé les articles 332, alinéa 2, et 336 du code civil ;
ALORS 2°) QUE : dans leurs conclusions de première instance du 17 mars 2010 au vu desquelles il a été statué en cause d'appel, les exposants faisaient expressément valoir que nul ne prétendait ¿ pas même le Ministère public ¿ que l'auteur de la reconnaissance n'était pas le père, qu'en d'autres termes, la reconnaissance dont le Ministère public demandait ici l'annulation n'était pas mensongère, qu'une reconnaissance qui n'est pas mensongère ne saurait dès lors être annulée sous prétexte d'un contournement ¿ qualifié de « fraude à la loi » - des dispositions régissant l'adoption ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions des exposants, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 3°) QUE : chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale ; que là où l'existence d'un lien familial avec un enfant se trouve établie, l'Etat doit agir de manière à permettre à ce lien de se développer et accorder une protection juridique rendant possible l'intégration de l'enfant dans sa famille ; qu'en l'espèce, l'annulation de la reconnaissance de paternité souscrite le 29 juillet 2009 par Didier Y..., qui prive l'enfant de sa filiation paternelle, porte atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant et au droit au respect de la vie privée et familiale de celui-ci et de Didier Y... ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
ALORS 4°) QUE : le principe de primauté de l'intérêt supérieur de l'enfant impose au juge de rechercher concrètement si l'intérêt de l'enfant guide la mesure qu'il ordonne ; qu'en l'espèce, en refusant de tenir compte de l'intérêt de l'enfant et de rechercher, comme elle le devait, si l'annulation de la reconnaissance de paternité souscrite le 29 juillet 2009 par Didier Y... qu'elle ordonnait, qui prive l'enfant de sa filiation paternelle, ne conduisait pas à une méconnaissance de l'intérêt supérieur de ce dernier, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 3-1 de la de la Convention internationale des droits de l'enfant, ensemble l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.