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10/07/2013 | FRANCE | N°12-14629

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 juillet 2013, 12-14629


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant en référé (Paris, 28 novembre 2011), que le groupe Auto distribution souhaitant réorganiser son réseau de distribution, la société Auto distribution (AD-BPN) a consulté chacun de ses comités d'établissement ; que, s'estimant insuffisamment informé, celui d'Aumerle a demandé des explications ; que l'employeur a mis fin à la consultation à l'issue de la dernière réunion sans fournir les explications demandées ; que le comité d'établissement et la fédération CGT des

personnels du commerce, de la distribution et des services ont sollicité ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant en référé (Paris, 28 novembre 2011), que le groupe Auto distribution souhaitant réorganiser son réseau de distribution, la société Auto distribution (AD-BPN) a consulté chacun de ses comités d'établissement ; que, s'estimant insuffisamment informé, celui d'Aumerle a demandé des explications ; que l'employeur a mis fin à la consultation à l'issue de la dernière réunion sans fournir les explications demandées ; que le comité d'établissement et la fédération CGT des personnels du commerce, de la distribution et des services ont sollicité le 18 février 2011 que soit ordonnée la suspension du projet de restructuration du réseau de distribution ;
Sur les premier et troisième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'ordonner la suspension de la mise en oeuvre du projet de réorganisation de son réseau de distribution jusqu'à régularisation du processus d'information-consultation du comité d'établissement et de dire que le comité d'établissement est en droit d'obtenir la communication des documents qu'il énumère, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsqu'une mesure concernant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise s'inscrit dans une procédure complexe comportant des décisions échelonnées, le comité d'entreprise est informé et consulté à l'occasion de chacune d'elles au fur et à mesure de l'avancement du projet ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que dès la première réunion d'information consultation du comité d'établissement d'Auto distribution Aumerle le 29 juin 2010 sur le projet de réorganisation du réseau de distribution de la société, il avait été précisé au comité d'établissement que le projet comportait plusieurs étapes, dont la première-objet de la présente consultation-consistait en la création de zones et la nomination des directeurs de zone, des directeurs de centre de services partagés, lesquels seraient ensuite chargés de définir l'organisation des zones et des centres de service partagés, sur laquelle le comité d'établissement serait ultérieurement consulté, ce dont il s'évinçait que l'information et la consultation ne devait porter dans un premier temps que sur le principe de la création des zones et la nomination de directeurs des zones ; qu'en suspendant le projet de réorganisation du réseau de distribution de la société Auto distribution Bassin Parisien Nord, jusqu'à ce que cette dernière transmette au comité d'établissement tous les documents relatifs au projet dans toutes ses phases, au motif inopérant que l'ordre du jour des réunions concernait « le projet de réorganisation du réseau de distribution », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles L. 2323-2 et L. 2323-6 du code du travail ;
2°/ que les juges du fond n'ont pas à porter d'appréciation sur les choix de gestion faits par l'employeur ; qu'en retenant que la société Auto distribution Bassin Parisien Nord ne pouvait faire valoir que le projet de réorganisation de son réseau de distribution constituait un projet complexe nécessitant une consultation en plusieurs étapes, « sauf à admettre que la société se serait lancée dans un projet de réorganisation sans en avoir anticipé les principaux impacts, notamment en matière de mutations géographiques, ni réfléchi à la taille des CSP », pour contraindre la société à informer d'emblée le comité d'établissement sur tous les aspects de son projet, la cour d'appel qui a ainsi porté une appréciation sur les modalités de mise en oeuvre du projet de réorganisation de l'exposante, s'est immiscée dans les choix de gestion de celle-ci, et ainsi violé les articles L. 2323-2 et L. 2323-6 du code du travail ;
3°/ qu'en jugeant que le comité d'établissement n'avait pas été destinataire d'une information loyale, et en suspendant le projet de réorganisation du réseau de distribution de la société Auto distribution Bassin Parisien Nord, jusqu'à ce que cette dernière transmette au comité d'établissement tous les documents relatifs au projet dans toutes ses phases, sans à aucun moment caractériser que la société était d'ores et déjà en possession desdits documents qu'elle aurait refusés de transmettre au comité d'établissement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2323-2, L. 2323-4 et L. 2323-6 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement l'utilité et la loyauté des informations fournies au comité d'établissement au regard de la nature et des implications du projet en cause, la cour d'appel a retenu que l'employeur avait mis fin à la procédure de consultation sans avoir fourni toutes les explications nécessaires permettant au comité de donner un avis éclairé ; qu'elle a, par ces seuls motifs, caractérisé l'existence d'un trouble manifestement illicite et ordonné en conséquence la suspension du projet de réorganisation envisagé jusqu'à la régularisation du processus de consultation du comité d'établissement ; que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Auto distribution Bassin Parisien Nord aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Auto distribution Bassin Parisien Nord à payer au comité d'établissement Auto distribution d'Aumerle et à la fédération CGT des personnels du commerce, de la distribution et des services la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Auto distribution Bassin Parisien Nord
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné la suspension de la mise en.. uvre du projet de réorganisation du réseau de distribution de la société AUTODISTRIBUTION Bassin Parisien Nord, jusqu'à régularisation du processus d'information consultation du CE relativement audit projet, et d'AVOIR dit que le CE AD AUMERLE est en droit, dans le cadre de son information consultation d'obtenir les documents énumérés au dispositif de l'arrêt et d'AVOIR condamné la société AUTODISTRIBUTION Bassin Parisien Nord à verser aux demandeurs une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile
AUX MOTIFS QUE « Considérant sur l'exception de nullité relative à la validité de l'assignation, que la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord soutient que le CE ne peut être représenté par l'un de ses membres que si ce dernier bénéficie d'une délégation expresse, votée en réunion, à l'occasion d'une délibération ; que le secrétaire du CE n'en est pas le représentant légal et doit être expressément mandaté pour le représenter ; que le mandat doit être spécial et indiquer le type d'action à intenter ; que pour intenter une action en justice le CE doit nécessairement rendre une délibération à la majorité de ses membres, laquelle doit préciser, l'objet de l'action en justice ; qu'en l'absence de mandat exprès l'assignation est nulle et les demandes du CE irrecevables ; Considérant que pour sa part, le CE rappelle qu'aux termes de l'article L 2327 du code du travail " les CE sont dotés de la personnalité civile " et sont en conséquence habilités à ester en justice par leur mandataire ; qu'aux termes d'un P. V de réunion du CE du 29 juin 2010, M. X...a reçu un mandat permanent pour ester en justice ; Considérant qu'en l'espèce, la résolution n° 10 approuvée à l'unanimité par les membres du comité, lors de la réunion du Comité d'établissement A. D AUMERLE en date du 29 juin 2010, a donné un " mandat permanent au secrétaire pour ester en justice " ; qu'une délégation permanente expresse et générale donnée par délibération au secrétaire du comité d'entreprise pour représenter en justice ce dernier et agir en son nom tant comme demandeur que comme défendeur dans toutes les phases de la procédure emporte, en l'absence, ce qui est le cas en l'espèce, de dispositions contraires du règlement intérieur ou de délibération contraire du comité, le pouvoir d'engager une action en justice ; Considérant au vu de ce qui précède, qu'il convient, par confirmation de la décision du premier juge de rejeter l'exception de nullité ainsi soulevée » ALORS QUE si le comité d'entreprise est valablement représenté par l'un de ses membres délégué à cet effet, ce membre délégué doit cependant avoir un mandat exprès pour agir au nom du comité d'entreprise après une délibération préalable de celui-ci précisant l'objet exact du mandat ; qu'il était constant en l'espèce que la résolution n° 10 approuvée à l'unanimité par les membres du comité, lors de la réunion du Comité d'établissement A. D AUMERLE en date du 29 juin 2010, avait donné un " mandat permanent au secrétaire pour ester en justice " ; qu'en jugeant que ce mandat général qui ne précisait pas l'objet de l'action en justice pour laquelle le secrétaire était habilité à représenter le comité d'établissement, lui donnait le pouvoir d'engager une action tendant à voir suspendre le projet de réorganisation mis en place par la société AUTODISTRIBUTION Bassin Parisien Nord, en l'absence de dispositions contraires du règlement intérieur ou de délibération contraire du comité, la Cour d'appel a violé les articles L 2325-1 du Code du travail et 117 et 121 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné la suspension de la mise en.. uvre du projet de réorganisation du réseau de distribution de la société AUTODISTRIBUTION Bassin Parisien Nord, jusqu'à régularisation du processus d'information consultation du CE relativement audit projet, et d'AVOIR dit que le CE AD AUMERLE est en droit, dans le cadre de son information consultation d'obtenir les documents énumérés au dispositif de l'arrêt et d'AVOIR condamné la société AUTODISTRIBUTION Bassin Parisien Nord à lui verser une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile
AUX MOTIFS QUE « Aux termes de l'article 808 du code de procédure civile, le juge des référés peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend ; qu'en vertu de l'article 809 du même code, même en présence d'une contestation sérieuse, le président peut toujours prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remises en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; Considérant qu'il est constant que :- le groupe Autodistribution est le leader Français et Européen de la distribution indépendante de pièces détachées automobiles et poids lourds et notamment principal fournisseur d'équipements de garages auprès des professionnels,- au premier semestre de l'année 2010 ce groupe a engagé une réflexion sur la réorganisation de son réseau de distribution qui jusqu'alors était organisé en 6 régions regroupant des enseignes assurant la distribution des pièces de rechange sur un périmètre géographique déterminé, ces enseignes, qui sont dirigées par des directeurs généraux d'Enseigne, étant soit des établissements de la société régionale, soit des filiales de celle-ci,- afin d'assurer ces missions, la région est dirigée par un Directeur Régional (supérieur hiérarchique des Directeurs Généraux d'enseigne de sa zone), assisté d'une équipe comprenant, *un Directeur Administratif et Financier Régional (DAFR) animant une équipe composée des services comptables de la région-comptabilité fournisseurs, comptabilité clients-ainsi que de contrôleurs de gestion. il anime également un correspondant informatique Régional *un responsable des ressources humaines régional * un responsable logistique régional, * un ADV-ce modèle d'organisation devait être repensé pour permettre de faire évoluer l'organisation régionale, aux fins notamment que la région puisse recentrer son rôle sur l'accompagnement des projets, le suivi opérationnel de l'activité en séparant les activités de pilotage opérationnel, des activités de production administrative, les enseignes devant ainsi avoir davantage d'autonomie dans leurs initiatives commerciales leur permettant de développer leur chiffre d'affaires et leur marge,- une consultation des IRP était ainsi engagée dans l'ensemble des sociétés du groupe, laquelle devait, selon la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord, se dérouler en plusieurs étapes successives ; la première consultation ayant vocation à nommer les directeurs de zone, les directeurs de CSP et les directeurs financiers Zone, ces directeurs ayant ensuite vocation, dans un second temps à élaborer un projet organisationnel : " le projet d'organisation des CSP et des zones, lequel devait faire l'objet d'une consultation spécifique ;- dans le cadre du " processus d'information consultation à étapes successives ", les CE de la société Autodistribution Bassin Parisien Nord, dont le Comité d'établissement A. D AUMERLE, était réuni sur " le projet de réorganisation régionale ", les 29 juin 2010, 30 juillet 2010, 24 août et 14 septembre 2010 ;- s'estimant insuffisamment informé le Comité d'établissement A. D AUMERLE et la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution et des services, assignaient la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord en référé pour voir ordonner la suspension du projet de réorganisation du réseau de distribution de la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord et obtenir la transmission de divers documents Considérant qu'aux termes des article L2323-1 du code du travail le comité d'entreprise, ou par analogie, le comité d'établissement), a pour objet d'assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décision relatives à l'organisation du travail. Il examine à la demande de l'employeur toute proposition de nature à améliorer les conditions de travail ; que les décisions de l'employeur doivent être précédées de la consultation du comité d'entreprise que pour lui permettre de formuler un avis motivé, le comité d'entreprise dispose d'informations précises et écrites transmises par l'employeur, d'un délai d'examen suffisant et de la réponse motivée de l'employeur à ses propres observations ; qu'en vertu de l'article L 2323-6 le comité d'entreprise est informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise ; que l'article L 2323-27 précise que le comité d'entreprise est informé et consulté sur les problèmes généraux intéressant les conditions de travail ; qu'à cet effet il étudie les incidences sur les conditions de travail des projets et décisions de l'employeur et formule des propositions ; qu'il bénéficie dans ce cadre du concours du CHSCT dans les matières relevant de sa compétence ; Considérant par ailleurs que les articles L 2325-15 et L2325-16 du code du travail disposent que l'ordre du jour du comité d'entreprise est arrêté par l'employeur et le secrétaire et communiqué à ses membres au moins trois jours à l'avance ; que lorsque le comité d'entreprise se réunit à la demande de la majorité de ses membres, les questions jointes à la demande de convocation sont inscrites à l'ordre du jour de la séance ; Considérant, en ce qui concerne la consultation-information du CE, qu'il ressort des pièces versées aux débats que le Comité d'établissement A. D AU MERLE a été destinataire d'un document daté du 15 juin 2010 intitulé " Information et consultation sur un projet de réorganisation régionale " décrivant l'organisation actuelle de la structure et les limites qui sont les siennes, définissant des objectifs à atteindre et précisant les grandes lignes de la nouvelle organisation consistant à regrouper les régions en 3 " zones " animées par un directeur de zone, ayant pour rôle d'animer les collaborateurs fonctionnels des régions, les services comptables-back-office-étant regroupés dans des centres de services partagés (CSP), dont le rôle sera d'assurer le traitement des opérations administratives et la mise à disposition d'informations chiffrées pour les zones et les enseignes, un responsable Financier d'enseigne) étant progressivement mis en place dans les enseignes pour renforcer la capacité entrepreneuriale de l'Enseigne ; qu'il y était également expliqué que les incidences du projet seraient limitées dès lors que les structures juridiques ne seraient pas impactées, non plus que les contrats de travail ; qu'en revanche il était indiqué que des postes de directeur de Zone et de responsable financier d'Enseigne seraient créés et que des repositionnement de directeurs régionaux sur des postes de directeurs de Zones seraient envisagés ; il était enfin précisé qu'une réflexion s'en suivrait sur le " dimensionnement adéquat " des CSP, laquelle ferait l'objet d'un processus spécifique d'information-consultation des IRP ; Considérant qu'au cours de la réunion du comité d'établissement A. D en date du 29 juin 2010, les élus constatant que de nombreux points restaient imprécis (chiffrage des coûts et économies escomptées, nouveau business plan, nouvel organigramme, affectation des personnels à la partie opérationnelle et administrative, préalable du dimensionnement adéquat des CSP) refusaient d'émettre un avis ; Considérant qu'il ressort également du P. V de la réunion du CE du 30 juillet 2010, que le président du CE admettait que le projet entraînerait des mutations, mais n'était pas en mesure d'indiquer où seraient situés les centres de services partagés, ni quelles seraient l'importance de ces mutations et les conséquences sur les contrats de travail ; qu'il était par ailleurs précisé que les documents réclamés par le CE (volet économique, volet social, planning envisagé, business plan, personnels affectés, organigramme, lieux de travail, taille des CSP) n'avaient pas été transmis ce qui a conduit les élus a considérer qu'ils étaient insuffisamment informés ; Considérant par ailleurs, que la réponse écrite de la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord aux questions du CE d'Aumerle fait ressortir pour le " volet économique " qu'aucun chiffrage ne pouvait être annoncé à ce stade, que " le volet organisationnel " serait précisé lorsque le projet d'organisation des CSP serait élaboré ; que l'échéancier de la réorganisation n'était pas précisé ; qu'il n'y avait pas eu d'audit, non plus que de nouveau business plan ; que des mobilités géographiques seraient effectuées avec l'accord des personnes concernées si elles ont lieu en dehors du même secteur géographique ; Considérant que le P. V de la réunion du CE du 24 août 2010 ne contient aucune information supplémentaire quant au projet de réorganisation litigieux ; Considérant enfin que l'examen du P. V de la réunion extraordinaire du CE du 14 septembre 2010 révèle que sur le point 4 de l'ordre du jour " information consultation sur le projet de réorganisation régionale " M. A... président de la SAS ADBPN a indiqué, en réponse à l'observation selon laquelle la présentation du projet était insuffisante et ne contenait aucun élément concret, " il n'y a pas de projet élaboré, donc pas de réponses aux questions posées... la consultation est en deux temps " ajoutant que le projet de réorganisation était " loin d'être finalisé ". Il sollicitait l'avis du CE sur le projet en l'état " aussi flou soit-il, ajoutant que l'établissement d'Aumerle n'était en tout état de cause pas concerné ; il limitait finalement la consultation du CE à un " avis sur la nomination du futur directeur de zone ", soit sur sa propre désignation ; que sur ce point les élus faisaient observer que la question n'était pas à l'ordre du jour et qu'ils n'avaient pas à émettre d'avis sur une telle nomination ; Considérant, qu'il résulte de l'analyse des pièces produites au débat, que les élus du personnel n'ont pas été, ni utilement, ni loyalement informés ; qu'en effet, le projet communiqué est particulièrement vague ; que les élus n'ont, malgré leurs demandes, reçu aucune des informations qu'ils réclamaient pour leur permettre d'émettre un avis sur le projet litigieux, décrit d'ailleurs comme " flou " par le représentant de l'employeur au CE, M. A... et alors pourtant que des mutations géographiques étaient attendues ; Considérant que l'argument selon lequel il s'agirait d'un projet complexe nécessitant une consultation en plusieurs étapes n'est en l'espèce pas recevable, sauf à admettre que la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord se serait lancée dans un projet de réorganisation sans en avoir anticipé les principaux impacts, notamment en matière de mutations géographiques, ni réfléchi à la taille des CSP et sauf à considérer que la première phase du projet concernant la seule désignation nominative des directeurs de Zone serait un préalable nécessaire à la définition dudit projet ; qu'il convient d'ailleurs à cet égard d'observer que l'ordre du jour des CE visait l'information et la consultation sur un " projet de réorganisation régionale " et non sur la nomination des directeurs de Zone ; Considérant dès lors, qu'il y a lieu de constater l'existence d'un trouble manifestement illicite dès lors que le processus d'information-consultation du CE, tel que ci-dessus retracé était incomplet et ne répondait pas aux exigences d'un véritable dialogue social tel que défini par les dispositions du code du travail ; qu'au surplus, il convient de souligner que bien que le CE, n'ait à aucun moment, faute d'éléments sérieux d'information sur la globalité du projet, été en mesure de donner un avis utile et éclairé sur le projet de réorganisation, lequel implique des mutations géographiques, qui lui a été soumis, le président du CE a estimé le 14 septembre 2010 que " les débats étaient clos et que les membres du CE avaient rendu un avis " ;

Considérant, dans ces conditions, qu'il y a lieu, infirmant la décision dont appel, de suspendre le projet de réorganisation envisagé, dans l'attente de la mise à disposition du CE des documents qu'il a réclamé lui permettant d'émettre un avis éclairé sur le projet concerné, et ce sans qu'il soit besoin de prononcer une astreinte »
1. ALORS QUE lorsqu'une mesure concernant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise s'inscrit dans une procédure complexe comportant des décisions échelonnées, le comité d'entreprise est informé et consulté à l'occasion de chacune d'elles au fur et à mesure de l'avancement du projet ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que dès la première réunion d'information consultation du Comité d'établissement de d'AUTODISTRIBUTION AUMERLE le 29 juin 2010 sur le projet de réorganisation du réseau de distribution de la société, il avait été précisé au comité d'établissement que le projet comportait plusieurs étapes, dont la première ¿ objet de la présente consultation-consistait en la création de zones et la nomination des directeurs de zone, des directeurs de centre de services partagés, lesquels seraient ensuite chargés de définir l'organisation des zones et des centres de service partagés, sur laquelle le comité d'établissement serait ultérieurement consulté, ce dont il s'évinçait que l'information et la consultation ne devait porter dans un premier temps que sur le principe de la création des zones et la nomination de directeurs des zones ; qu'en suspendant le projet de réorganisation du réseau de distribution de la société AUTODISTRIBUTION Bassin Parisien Nord, jusqu'à ce que cette dernière transmette au Comité d'établissement tous les documents relatifs au projet dans toutes ses phases, au motif inopérant que l'ordre du jour des réunions concernait « le projet de réorganisation du réseau de distribution », la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles L 2323-2 et L 2323-6 du Code du travail ;
2. ALORS QUE les juges du fond n'ont pas à porter d'appréciation sur les choix de gestion faits par l'employeur ; qu'en retenant que la société AUTODISTRIBUTION Bassin Parisien Nord ne pouvait faire valoir que le projet de réorganisation de son réseau de distribution constituait un projet complexe nécessitant une consultation en plusieurs étapes, « sauf à admettre que la Société se serait lancée dans un projet de réorganisation sans en avoir anticipé les principaux impacts, notamment en matière de mutations géographiques, ni réfléchi à la taille des CSP », pour contraindre la société à informer d'emblée le comité d'établissement sur tous les aspects de son projet, la Cour d'appel qui a ainsi porté une appréciation sur les modalités de mise en oeuvre du projet de réorganisation de l'exposante, s'est immiscée dans les choix de gestion de celle-ci, et ainsi violé les articles L 2323-2 et L 2323-6 du Code du travail ;
3. ALORS QU'en jugeant que le comité d'établissement n'avait pas été destinataire d'une information loyale, et en suspendant le projet de réorganisation du réseau de distribution de la société AUTODISTRIBUTION Bassin Parisien Nord, jusqu'à ce que cette dernière transmette au Comité d'établissement tous les documents relatifs au projet dans toutes ses phases, sans à aucun moment caractériser que l'exposante était d'ores et déjà en possession desdits documents qu'elle aurait refusés de transmettre au comité d'établissement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 2323-2, L2323-4 et L 2323-6 du Code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société AUTODISTRIBUTION Bassin Parisien Nord à verser à la Fédération CGT des personnels du commerce la somme de 2500 euros en réparation du préjudice subi par la profession ainsi qu'une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile
AUX MOTIFS QUE « Considérant sur la demande de la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution et des services de dommages et intérêts à titre provisionnel, que la méconnaissance par la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord des dispositions impératives du code du travail relatives au processus d'information-consultation des IRP est génératrice d'un préjudice subi par la profession à laquelle appartiennent les salariés et dont le syndicat Fédération CGT qui la représente est fondé à demander réparation ; qu'il lui sera alloué 2. 500 ¿ à titre de provision de ce chef ; Considérant en outre, qu'il convient de faire droit à la demande du Comité d'établissement A. D AUMERLE et de la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution, visant à mettre à la charge de la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord les frais irrépétibles qu'ils ont été amenés à exposer dans la présente instance ; qu'il leur sera en conséquence alloué, à chacun, la somme de 2. 000 ¿ pour l'ensemble de la procédure »

1/ ALORS QUE la cassation à intervenir de la disposition de l'arrêt ayant ordonné la suspension de la mise en.. uvre du projet de réorganisation du réseau de distribution de la société AUTODISTRIBUTION Bassin Parisien Nord, jusqu'à régularisation du processus d'information consultation du CE relativement audit projet, entraînera l'annulation de ce chef de dispositif, en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;
2/ ALORS QUE le non respect des prérogatives des institutions représentatives du personnel porte atteinte aux intérêts propres aux salariés de l'entreprise, et non à l'intérêt collectif de la profession ; qu'en jugeant que la méconnaissance par la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord des dispositions impératives du code du travail relatives au processus d'information-consultation des IRP est génératrice d'un préjudice subi par la profession à laquelle appartiennent les salariés, pour condamner l'exposante à verser des dommages et intérêts à la Fédération CGT des Personnels du Commerce de la Distribution et des Services, la Cour d'appel a violé l'article L 2132-3 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-14629
Date de la décision : 10/07/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 28 novembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 jui. 2013, pourvoi n°12-14629


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.14629
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