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28/11/2011 | FRANCE | N°11/05537

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 1, 28 novembre 2011, 11/05537


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 1



ARRET DU 28 NOVEMBRE 2011



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/05537



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 18 Février 2011 -Tribunal de Grande Instance de MELUN - RG n° 10/00449





APPELANTS



COMITE D'ETABLISSEMENT A.D AUMERLE, agissant poursuites et diligences de son secrétaire et tou

s représentants légaux.

[Adresse 4]

[Localité 5]

représenté par la SCP MICHEL BLIN et LAURENCE BLIN AVOUES ASSOCIES, et par Me MEKOUAR avocat au barreau de PARIS, toque : D2494



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Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 1

ARRET DU 28 NOVEMBRE 2011

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/05537

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 18 Février 2011 -Tribunal de Grande Instance de MELUN - RG n° 10/00449

APPELANTS

COMITE D'ETABLISSEMENT A.D AUMERLE, agissant poursuites et diligences de son secrétaire et tous représentants légaux.

[Adresse 4]

[Localité 5]

représenté par la SCP MICHEL BLIN et LAURENCE BLIN AVOUES ASSOCIES, et par Me MEKOUAR avocat au barreau de PARIS, toque : D2494

FEDERATION CGT DES PERSONNELS DU COMMERCE DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux.

[Adresse 1]

[Localité 6]

représenté par la SCP MICHEL BLIN et LAURENCE BLIN AVOUES ASSOCIES, Me MEKOUAR, avocat au barreau de PARIS, toque : D2494

INTIMEE

Société AUTO DISTRIBUTION BASSIN PARISIEN NORD, prise en la personne de ses représentants légaux.

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par la SCP FISSELIER CHILOUX BOULAY, avoués à la Cour, et Me David CALVAYRAC, avocat au barreau de PARIS, toque : P0107

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 24 Octobre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Yves GARCIN, Président

Madame Claire MONTPIED, Conseillère

Monsieur Paul BAUDOIN, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Chantal HUTEAU

ARRET :

- contradictoire,

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Yves GARCIN, président et par Nathalie GIRON, greffier présent lors du prononcé, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

**************

Vu l'appel interjeté, par déclaration au greffe enregistrée le 23 mars 2011 , par le Comité d'Etablissement de A.D AUMERLE et par la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution et des services , à l'encontre de l'ordonnance rendue le 18 février 2011 par le Tribunal de Grande Instance de Melun , qui statuant en référés , à la suite de la saisine de ce même Comité d'établissement et de la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution et des services a :

- rejeté l'exception de nullité de l'assignation présentée par la SAS BPN,

- déclaré les demandeurs recevables en leur action ,

- dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes aux fins de suspension du Comité d'établissement A.D AUMERLE et de la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution et des services ,

condamné solidairement le Comité d'établissement A.D AUMERLE et la Fédération CGT à verser à la SAS A.D AUMERLE la somme de 700€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes prétentions des parties plus amples et contraires,

- condamné solidairement le Comité d'établissement A.D AUMERLE et la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution et des services aux dépens ;

Vu les conclusions signifiées le 5 octobre 2011 aux termes desquelles le Comité d'établissement A.D AUMERLE et la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution et des services , agissant par leurs représentants légaux , demandent à la Cour de: - confirmer l'ordonnance dont appel en ce qu'elle a rejeté l'exception de nullité de l'association devant le juge des référés ,

- infirmer l'ordonnance dont appel, en ce qu'elle a déclaré qu'il n'y avait pas lieu à référé faute de trouble manifestement illicite ,

statuant à nouveau ,

- ordonner la suspension du projet de réorganisation du réseau de distribution de la société A.D Bassin Parisien Nord dans l'attente :

* de la mise à disposition du CE des documents lui permettant d'émettre son avis dans les conditions prescrites par l'article L2323-3 du code du travail ,

* des réponses motivées aux observations émises par le CE lors de la réunion extraordinaire du 29 juin 2010 ,

- ordonner à la société A.DBassin Parisien Nord de communiquer au CE , au besoin sous astreinte de 200€ à compter de la signification de l'ordonnance, les documents sollicités de l'employeur lors de la réunion extraordinaire du 29 juin et 30 juillet 2010 dont la liste fait l'objet de l'annexe 04 et notamment:

* le projet global avec chacun de ses volets ( économique, social et organisationnel) ;

* liste des effectifs actuels CDI ,CDDopérationnels et fonctionnels dans les 6 régions ;

* liste des effectifs actuels CDI,CDDde chaque service fonctionnel au niveau central,

* liste des effectifs actuels CDI,CDDopérationnels et fonctionnels de chacune des Zones ,

* liste des effectifs futurs centraux pour chaque fonction support( RH,Finances, Logistique, Qualité,Achats)

* organigrammes actuels et futurs de chaque service fonctionnel au niveau central,

* l'organisation des 3 centres des services partagés ( fonctions, contenu des postes, modifications des postes, localisation et justification de ce choix) et coûts de leur mise en place et mesures d'accompagnement,

* coûts actuels et futurs de la fonction comptable et finances dans chaque région et dans chaque zone ,

*coûts actuels et futurs pour chaque fonction support (RH, Finances, Logistique, qualité, Achats,)

* économie du projet dans sa globalité,

* détail des postes supprimés et détails des postes créés par région, Zone et au niveau central ,

* nombre de mutations envisagées,

* planning et échéancier envisagé pour la passage des Régions en Zones et mise en place des CSP et mesures d'accompagnement envisagées,

effectifs prévisionnels sur une période de 3 ans (total France) opérationnels et fonctionnels ,

- condamner la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord à payer à la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution 3.000€ à titre de provision sur dommages et intérêts ,

- condamner la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord à payer au CE A D Bassin Parisien Nord ( A.D AUMERLE) 2.000€ chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ,

- condamner la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord aux dépens qui seront recouvrés par la SCP BLIN dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions signifiées le 13 octobre 2011 aux termes desquelles la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord entend voir :

- relever la nullité de l'assignation délivrée en l'absence de mandant exprès et spécial du secrétaire du CE A.D Aumerle à cet effet,

en conséquence,

- débouter le Comité d'établissement A.D AUMERLE et la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution et des services de leurs demandes,

subsidiairement si la Cour retenait la validité de l'assignation,

- confirmer l'ordonnance dont appel,

- dire n'y avoir lieu à référé ,

à titre infiniment subsidiaire,

- constater que la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord a satisfait à son obligation d'information dans le cadre de la première consultation du CE relatif au premier volet du projet de réorganisation,

en conséquence,

- dire n'y avoir lieu à suspension du projet de réorganisation du réseau de distribution de la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord ,

- dire n'y avoir lieu à communication des éléments sollicités,

en tout état de cause,

- débouter les appelants de l'ensemble de leurs prétentions,

condamner le Comité d'établissement A.D AUMERLE et la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution et des services à verser à la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord , chacun la somme de 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ,

Vu l'ordonnance de clôture en date du 24 octobre 2011 ;

SUR CE LA COUR

Considérant sur l'exception de nullité relative à la validité de l'assignation, que la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord soutient que le CE ne peut être représenté par l'un de ses membres que si ce dernier bénéficie d'une délégation expresse , votée en réunion, à l'occasion d'une délibération ; que le secrétaire du CE n'en est pas le représentant légal et doit être expressément mandaté pour le représenter ; que le mandat doit être spécial et indiquer le type d'action à intenter ; que pour intenter une action en justice le CE doit nécessairement rendre une délibération à la majorité de ses membres , laquelle doit préciser , l'objet de l'action en justice ; qu'en l'absence de mandat exprès l'assignation est nulle et les demandes du CE irrecevables ;

Considérant que pour sa part, le CE rappelle qu'aux termes de l'article L 2327 du code du travail ' les CE sont dotés de la personnalité civile ' et sont en conséquence habilités à ester en justice par leur mandataire ; qu'aux termes d'un P.V de réunion du CE du 29 juin 2010 , M. [L] a reçu un mandat permanent pour ester en justice ;

Considérant qu'en l'espèce, la résolution n°10 approuvée à l'unanimité par les membres du comité, lors de la réunion du Comité d'établissement A.D AUMERLE en date du 29 juin 2010, a donné un 'mandat permanent au secrétaire pour ester en justice' ;

qu'une délégation permanente expresse et générale donnée par délibération au secrétaire du comité d'entreprise pour représenter en justice ce dernier et agir en son nom tant comme demandeur que comme défendeur dans toutes les phases de la procédure emporte, en l'absence , ce qui est le cas en l'espèce, de dispositions contraires du règlement intérieur ou de délibération contraire du comité, le pouvoir d'engager une action en justice ;

Considérant au vu de ce qui précède, qu'il convient , par confirmation de la décision du premier juge de rejeter l'exception de nullité ainsi soulevée ;

Considérant , au Fond

Considérant qu'aux termes de l'article 808 du code de procédure civile , le juge des référés peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend ;

qu'en vertu de l'article 809 du même code , même en présence d'une contestation sérieuse, le président peut toujours prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remises en état qui s'imposent , soit pour prévenir un dommage imminent , soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ;

Considérant qu'il est constant que

- le groupe Autodistribution est le leader Français et Européen de la distribution indépendante de pièces détachées automobiles et poids lourds et notamment principal fournisseur d'équipements de garages auprès des professionnels ,

- au premier semestre de l'année 2010 ce groupe a engagé une réflexion sur la réorganisation de son réseau de distribution qui jusqu'alors était organisé en 6 régions regroupant des enseignes assurant la distribution des pièces de rechange sur un périmètre géographique déterminé ,ces enseignes , qui sont dirigées par des directeurs généraux d'Enseigne , étant soit des établissements de la société régionale , soit des filiales de celle-ci ,

- afin d'assurer ces missions , la région est dirigée par un Directeur Régional ( supérieur hiérarchique des Directeurs Généraux d'enseigne de sa zone) , assisté d'une équipe comprenant,

* un Directeur Administratif et Financier Régional (DAFR) animant une équipe composée des services comptables de la région- comptabilité fornisseurs , comptabilité clients- ainsi que de contrôleurs de gestion . Il anime également un correspondant informatique Régional ,

* un responsable des ressources humaines régional ,

*un responsable logistique régional,

*un ADV

- ce modèle d'organisation devait être repensé pour permettre de faire évoluer l'organisation régionale , aux fins notamment que la région puisse recentrer son rôle sur l'accompagnement des projets , le suivi opérationnel de l'activité en séparant les activités de pilotage opérationnel, des activités de production administrative , les enseignes devant ainsi avoir davantage d'autonomie dans leurs initiatives commerciales leur permettant de développer leur chiffre d'affaires et leur marge ,

- une consultation des IRP était ainsi engagée dans l'ensemble des sociétés du groupe , laquelle devait, selon la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord , se dérouler en plusieurs étapes successives ; la première consultation ayant vocation à nommer les directeurs de zone, les directeurs de CSP et les directeurs financiers Zone , ces directeurs ayant ensuite vocation , dans un second temps à élaborer un projet organisationnel : 'le projet d'organisation des CSP et des zones , lequel devait faire l'objet d'une consultation spécifique;

- dans le cadre du 'processus d'information consultation à étapes successives' , les CE de la société Autodistribution Bassin Parisien Nord , dont le Comité d'établissement A.D AUMERLE , était réuni sur 'le projet de réorganisation régionale', les 29 juin 2010 , 30 juillet 2010 , 24 août et 14 septembre 2010 ;

- s'estimant insuffisamment informé le Comité d'établissement A.D AUMERLE et la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution et des services , assignaient la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord en référé pour voir ordonner la suspension du projet de réorganisation du réseau de distribution de la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord et obtenir la transmission de divers documents

Considérant qu'aux termes des article L2323-1 du code du travail le comité d'entreprise,( ou par analogie, le comité d'établissement ) , a pour objet d'assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décision relatives à l'organisation du travail . Il examine à la demande de l'employeur toute proposition de nature à améliorer les conditions de travail ;

que les décisions de l'employeur doivent être précédées de la consultation du comité d'entreprise ;

que pour lui permettre de formuler un avis motivé , le comité d'entreprise dispose d'informations précises et écrites transmises par l'employeur , d'un délai d'examen suffisant et de la réponse motivée de l'employeur à ses propres observations;

qu'en vertu de l'article L 2323-6 le comité d'entreprise est informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation , la gestion et la marche générale de l'entreprise ;

que l'article L 2323-27 précise que le comité d'entreprise est informé et consulté sur les problèmes généraux intéressant les conditions de travail ;

qu'à cet effet il étudie les incidences sur les conditions de travail des projets et décisions de l'employeur et formule des propositions ; qu'il bénéficie dans ce cadre du concours du CHSCT dans les matières relevant de sa compétence ;

Considérant par ailleurs que les articles L 2325-15 et L2325-16 du code du travail disposent que l'ordre du jour du comité d'entreprise est arrêté par l'employeur et le secrétaire et communiqué à ses membres au moins trois jours à l'avance ; que lorsque le comité d'entreprise se réunit à la demande de la majorité de ses membres , les questions jointes à la demande de convocation sont inscrites à l'ordre du jour de la séance ;

Considérant , en ce qui concerne la consultation-information du CE , qu'il ressort des pièces versées aux débats que le Comité d'établissement A.D AUMERLE a été destinataire d'un document daté du 15 juin 2010 intitulé 'Information et consultation sur un projet de réorganisation régionale' décrivant l'organisation actuelle de la structure et les limites qui sont les siennes ; définissant des objectifs à atteindre et précisant les grandes lignes de la nouvelle organisation consistant à regrouper les régions en 3"zones' animées par un directeur de zone, ayant pour rôle d'animer les collaborateurs fonctionnels des régions , les services comptables - back-office- étant regroupés dans des centres de services partagés ( CSP) , dont le rôle sera d'assurer le traitement des opérations administratives et la mise à disposition d'informations chiffrées pour les zones et les enseignes , un responsable Financier d'enseigne , étant progressivement mis en place dans les enseignes pour renforcer la capacité entrepreneuriale de l'Enseigne ;

qu'il y était également expliqué que les incidences du projet seraient limitées dès lors que les structures juridiques ne seraient pas impactées, non plus que les contrats de travail ;

qu'en revanche il était indiqué que des postes de directeur de Zone et de responsable financier d'Enseigne seraient créés et que des repositionnement de directeurs régionaux sur des postes de directeurs de Zones seraient envisagés;

il était enfin précisé qu'une réflexion s'en suivrait sur le 'dimensionnement adéquat' des CSP , laquelle ferait l'objet d'un processus spécifique d'information-consultation des IRP ;

Considérant qu'au cours de la réunion du Comité d'établissement A.D AUMERLE en date du 29 juin 2010 , les élus constatant que de nombreux points restaient imprécis ( chiffrage des coûts et économies escomptées, nouveau business plan, nouvel organigramme , affectation des personnels à la partie 'opérationnelle' et 'administrative', préalable du dimensionnement adéquat des CSP ) refusaient d'émettre un avis ;

Considérant qu'il ressort également du P.V de la réunion du CE du 30 juillet 2010 , que le président du CE admettait que le projet entraînerait des mutations , mais n'était pas en mesure d'indiquer où seraient situés les centres de services partagés , ni quelle seraient l'importance de ces mutations et les conséquences sur les contrats de travail ;

qu'il était par ailleurs précisé que les documents réclamés par le CE ( volet économique, volet social, planning envisagé , business plan, personnels affectés , organigramme , lieux de travail, taille des CSP ) n'avaient pas été transmis ce qui a conduit les élus a considérer qu'ils étaient insuffisamment informés;

Considérant par ailleurs, que la réponse écrite de la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord aux questions du CE d'Aumerle fait ressortir pour le 'volet économique' qu'aucun chiffrage ne pouvait être annoncé à ce stade , que 'le volet organisationnel' serait précisé lorsque le projet d'organisation des CSP serait éléboré ; que l'échéancier de la réorganisation n'était pas précisé; qu'il n'y avait pas eu d'audit, non plus que de nouveau business plan ; que des mobilités géographiques seraient effectuées avec l'accord des personnes concernées si elles ont lieu en dehors du même secteur géographique

Considérant que le P.V de la réunion du CE du 24 août 2010 ne contient aucune information supplémentaire quant au projet de réorganisation litigieux ;

Considérant enfin que l'examen du P.V de la réunion extraordinaire du CE du 14 septembre 2010 révèle que sur le point 4 de l'ordre du jour 'information consultation sur le projet de réorganisation régionale' M. [N] président de la SAS ADBPN a indiqué, en réponse à l'observation selon laquelle la présentation du projet était insuffisante et ne contenait aucun élément concret , 'il n'y a pas de projet élaboré, donc pas de réponses aux questions posées ...la consultation est en deux temps ' ajoutant que le projet de réorganisation était 'loin d'être finalisé' . Il sollicitait l'avis du CE sur le projet en l'état 'aussi flou soit-il' , ajoutant que l'établissement d'Aumerle n'était en tout état de cause pas concerné ; il limitait finalement la consultation du CE à un 'avis sur la nomination du futur directeur de zone' , soit sur sa propre désignation ; que sur ce point les élus faisaient observer que la question n'était pas à l'ordre du jour et qu'ils n'avaient pas à émettre d'avis sur une telle nomination ;

Considérant , qu'il résulte de l'analyse des pièces produites au débat, que les élus du personnel n'ont pas été, ni utilement , ni loyalement informés ; qu'en effet, le projet communiqué est particulièrement vague ; que les élus n'ont , malgré leurs demandes, reçu aucune des informations qu'ils réclamaient pour leur permettre d'émettre un avis sur le projet litigieux , décrit d'ailleurs comme 'flou' par le représentant de l'employeur au CE , M. [N] et alors pourtant que des mutations géographiques étaient attendues ;

Considérant que l'argument selon lequel il s'agirait d'un projet complexe nécessitant une consultation en plusieurs étapes n'est en l'espèce pas recevable , sauf à admettre que la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord se serait lancée dans un projet de réorganisation sans en avoir anticipé les principaux impacts , notamment en matière de mutations géographiques , ni réfléchi à la taille des SCP et sauf à considérer que la première phase du projet concernant la seule désignation nominative des directeurs de Zone serait un préalable nécessaire à la définition dudit projet ; qu'il convient d'ailleurs à cet égard d'observer que l'ordre du jour des CE visait l'information et la consultation sur un 'projet de réorganisation régionale' et non sur la nomination des directeurs de Zone ;

Considérant dès lors, qu'il y a lieu de constater l'existence d'un trouble manifestement illicite dès lors que le processus d'information- consultation du CE , tel que ci-dessus retracé était incomplet et ne répondait pas aux exigences d'un véritable dialogue social tel que défini par les dispositions du code du travail ; qu'au surplus, il convient de souligner que bien que le CE , n' ait à aucun moment, faute d'éléments sérieux d'information sur la globalité du projet, été en mesure de donner un avis utile et éclairé sur le projet de réorganisation, lequel implique des mutations géographiques , qui lui a été soumis , le président du CE a estimé le 14 septembre 2010 que 'les débats étaient clos et que les membres du CE avaient rendu un avis ' ;

Considérant , dans ces conditions, qu' il y a lieu, infirmant la décision dont appel, de suspendre le projet de réorganisation envisagé , dans l'attente de la mise à disposition du CE des documents qu'il a réclamé lui permettant d'émettre un avis éclairé sur le projet concerné , et ce sans qu'il soit besoin de prononcer une astreinte ;

Considérant sur la demande de la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution et des services de dommages et intérêts à titre provisionnel ,que la méconnaissance par la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord des dispositions impératives du code du travail relatives au processus d'information-consultation des IRP est génératrice d'un préjudice subi par la profession à laquelle appartiennent les salariés et dont le syndicat Fédération CGT qui la représente est fondé à demander réparation; qu'il lui sera alloué 2.500€ à titre de provision de ce chef ;

Considérant en outre, qu'il convient de faire droit à la demande du Comité d'établissement A.D AUMERLE et de la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution , visant à mettre à la charge de la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord les frais irrépétibles qu'ils ont été amenés à exposer dans la présente instance; qu'il leur sera en conséquence alloué, à chacun , la somme de 2.000€ pour l'ensemble de la procédure ;

Considérant en revanche, que la demande de la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord sur ce fondement sera rejetée ,

Considérant enfin que la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord devra supporter les dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS

La Cour , statuant publiquement et contradictoirement ,

Infirme l'ordonnance dont appel, en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau ,

Ordonne la suspension de la mise en oeuvre du projet de réorganisation du réseau de distribution de la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord , jusqu'à régularisation du processus d'information - consultation du CE , relativement au dit projet ,

Dit , sans qu'il soit besoin de prononcer une astreinte, que dans le cadre de son information-consultation, le CE A.D AUMERLE est en droit d'obtenir de la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord les documents suivants :

* le projet global avec chacun de ses volets ( économique, social et organisationnel) ;

* liste des effectifs actuels CDI ,CDDopérationnels et fonctionnels dans les 6 régions ;

* liste des effectifs actuels CDI,CDDde chaque service fonctionnel au niveau central,

* liste des effectifs actuels CDI,CDDopérationnels et fonctionnels de chacune des Zones ,

* liste des effectifs futurs centraux pour chaque fonction support( RH,Finances, Logistique, Qualité, Achats)

* organigrammes actuels et futurs de chaque service fonctionnel au niveau central,

* l'organisation des 3 centres des services partagés ( fonctions, contenu des postes, modifications des postes, localisation et justification de ce choix) et coûts de leur mise en place et mesures d'accompagnement,

* coûts actuels et futurs de la fonction comptable et finances dans chaque région et dans chaque zone ,

*coûts actuels et futurs pour chaque fonction support (RH, Finances, Logistique, qualité, Achats,)

* économie du projet dans sa globalité,

* détail des postes supprimés et détails des postes créés par région, Zone et au niveau central ,

* nombre de mutations envisagées,

* planning et échéancier envisagé pour la passage des Régions en Zones et mise en place des CSP et mesures d'accompagnement envisagées,

*effectifs prévisionnels sur une période de 3 ans (total France) opérationnels et fonctionnels ,

condamne la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord à payer 2.500€ à titre de dommages et intérêts provisionnel à la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution

Condamne la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord à payer tant au CE qu' à la Fédération CGT des Personnels du commerce de la distribution et des services la somme de 2000€ sur fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la Société Auto Distribution Bassin Parisien Nord aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP BLIN , avoué , dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 11/05537
Date de la décision : 28/11/2011

Références :

Cour d'appel de Paris K1, arrêt n°11/05537 : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-11-28;11.05537 ?
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