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04/07/2013 | FRANCE | N°12-20242

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 04 juillet 2013, 12-20242


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Assurances mutuelles Le Conservateur (l'assureur) a confié à M. X... un mandat non salarié, l'autorisant à proposer et à conclure des contrats d'assurance sur la vie ; qu'à la suite de plusieurs réclamations formulées par des clients, l'assureur a révoqué ce mandat ; que M. X... a été condamné par un tribunal correctionnel du chef d'abus de confiance aggravé et de faux et usage de faux ; que M. Vladimir Y..., ayant souscrit par l

'entremise de M. X... un contrat d'assurance sur la vie « Multivalor » AR...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Assurances mutuelles Le Conservateur (l'assureur) a confié à M. X... un mandat non salarié, l'autorisant à proposer et à conclure des contrats d'assurance sur la vie ; qu'à la suite de plusieurs réclamations formulées par des clients, l'assureur a révoqué ce mandat ; que M. X... a été condamné par un tribunal correctionnel du chef d'abus de confiance aggravé et de faux et usage de faux ; que M. Vladimir Y..., ayant souscrit par l'entremise de M. X... un contrat d'assurance sur la vie « Multivalor » AREP, lui a remis quatre chèques dont M. X... a détourné le montant ; que Vladimir Y... étant décédé le 6 octobre 2007, ses enfants, Laure, Jérôme et Guillaume Y... (les consorts Y...) ont repris l'action en justice qu'il avait engagée contre l'assureur en remboursement des sommes détournées ; que l'assureur a assigné la société Crédit lyonnais en intervention forcée et en garantie ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal tel que reproduit en annexe :
Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer aux consorts Y... la somme de 76 354,92 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2004, outre la somme de 1 000 euros à chacun d'eux au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Mais attendu que sous le couvert des griefs non fondés de défaut de base légale au regard des articles L. 511-1 III du code des assurances et 1384, alinéa 5, du code civil, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve par la cour d'appel qui, répondant aux conclusions par une décision motivée, a pu en déduire que M. X... avait agi dans le cadre de ses fonctions de mandataire non salarié pour le compte de l'assureur, et que les circonstances dans lesquelles les souscripteurs avaient opéré la remise des chèques n'étaient pas de nature à éveiller leurs soupçons sur la réalité des opérations, de sorte que l'assureur ne s'exonérait pas de la responsabilité encourue en sa qualité de commettant ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen du pourvoi principal et sur le moyen unique du pourvoi incident, réunis :
Attendu que l'assureur fait grief à l' arrêt de le débouter de sa demande de garantie dirigée contre la société Le Crédit lyonnais et de la condamner à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et que les consorts Y... font grief à ce même arrêt de les débouter de leur demande tendant à ce que la société Le Crédit lyonnais soit condamnée solidairement avec l'assureur à indemniser leur préjudice, alors, selon le moyen :
1°/ que le banquier présentateur d'un chèque falsifié est responsable, sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, du préjudice subi par le tireur lorsque, manquant à son devoir de vigilance, il a encaissé le chèque en dépit de circonstances ou d'irrégularités qui auraient dû attirer son attention ; que la cour d'appel a constaté que M. X... exerçait une profession réglementée, ce dont il résultait que les opérations qu'il réalisait devaient nécessairement faire l'objet d'une vigilance accrue, et que les chèques mentionnaient le nom d'un bénéficiaire qui ne correspondait pas à l'intitulé du compte sur lequel ils étaient déposés ; qu'en retenant qu'en dépit de ces circonstances, qui auraient dû attirer l'attention de la banque, celle-ci n'avait pas commis de faute en procédant à l'encaissement des chèques, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;2°/ que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; qu'en refusant de rechercher si la faute reprochée à la banque avait provoqué le dommage subi par Vladimir Y... au motif inopérant l'assureur avait lui-même commis une faute à l'origine du dommage, la cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du code civil ;
3°/ que, subsidiairement, que le mandant n'est pas tenu de surveiller l'activité de son mandataire, lequel exerce sa mission de manière indépendante et autonome ; qu'en déterminant la cause principale du préjudice subi par Vladimir Y... au regard du respect par l'assureur d'une obligation de surveillance des activités de son mandataire, dépourvue de toute existence légale, la cour d'appel a violé les articles 1382, 1383, 1984 et 1998 du code civil ;
Mais attendu que pour débouter l'assureur de sa demande de garantie dirigée contre la société Le Crédit yonnais et le condamner à lui payer une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt retient que, courant 1989, M. X... a ouvert un compte à l'agence de Mende du Crédit lyonnais sous l'intitulé « M. Gérard X... AGF » ; que s'agissant d'un compte individuel ouvert par une personne physique, à usage professionnel, la banque n'avait pas d'autre obligation que celle de vérifier l'identité et le domicile du postulant, et notamment n'avait pas à vérifier les liens unissant celui-ci à la société AGF, qui n'était pas co-titulaire du compte ; que les quatre chèques émis par Vladimir Y... en règlement des cotisations qu'il entendait verser sur son contrat Multivalor ont été encaissés sur ce compte ; qu'à l'exception du premier chèque de 40 000 francs remis sans ordre à M. X... qui s'y est mentionné comme bénéficiaire, ces chèques étaient libellés à l'ordre du « conservateur » ou « conservateur finance », auquel le nom de M. X... était accolé, sans indication d'une quelconque forme sociale - société, compagnie, association, groupe¿ - susceptible de désigner Le Conservateur, personne morale qui n'était titulaire d'aucun compte ouvert à son nom à l'agence de Mende du Crédit lyonnais ; que depuis de nombreuses années, M. X... exerçait son activité à Mende sous la dénomination et enseigne commerciale « Le conservateur finance G. Varsovie consultant financier », ainsi qu'établi par le tampon apposé sur un certain nombre de documents remis ou adressés à M. Y... ; que le Crédit lyonnais qui, dès lors que le compte en litige n'était pas ouvert au nom de la société Le Conservateur, n'avait pas à vérifier si dans le cadre de son activité de mandataire non salarié de cette société, M. X... avait ou non le pouvoir d'encaisser les cotisations versées par les clients a donc pu, sans faute de sa part, créditer le compte professionnel de celui-ci du montant de ces chèques, qui ne présentait aucune anomalie apparente telle rature, grattage ou surcharge, l'ajout du nom de Varsovie à celui de Conservateur écrit de la main du tireur des chèques n'étant pas suffisamment perceptible pour attirer l'attention d'un employé de banque normalement diligent lors d'un examen nécessairement superficiel du chèque à l'occasion d'une opération courante d'encaissement ; qu'en l'absence d'anomalie matérielle ou intellectuelle de nature à l'alerter, le Crédit lyonnais n'avait pas à s'immiscer dans le fonctionnement du compte de M. X..., qui n'avait pas donné lieu à incident depuis son ouverture une quinzaine d'année auparavant, la banque pouvant légitimement penser que les chèques libellés à l'enseigne de son cabinet étaient destinés à être encaissés par M. X... dans le cadre de son activité professionnelle, d'autant que lui-même émettait régulièrement des chèques à l'ordre des sociétés Le Conservateur - onze entre le 7 mars 1997 et le 9 avril 2002 - dont la banque ne pouvait connaître l'objet exact mais qui contribuaient à conférer aux opérations enregistrées sur un compte professionnel une apparence de normalité ;
Que de ces constatations et énonciations procédant de son appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve, la cour d'appel, répondant aux conclusions par une décision motivée, a pu déduire qu'à l'occasion de l'encaissement des chèques litigieux, la banque n'avait pas commis de faute ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Condamne la société Assurances mutuelles Le Conservateur, Mme Laure Y..., épouse Z..., MM. Jérôme et Guillaume Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Assurances mutuelles Le Conservateur à payer la somme de 3 000 euros à la société Le Crédit lyonnais ; rejette les autres demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Defrénois et Lévis, avocat aux Conseils, pour la société Les Assurances mutuelles Le Conservateur
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Les Assurances Mutuelles Le Conservateur à payer aux consorts Y... la somme de 76.354,92 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2004, outre la somme de 1.000 euros chacun à M. Jérôme Y..., Mme Laure Y... et M. Guillaume Y... au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QU' il ressort des pièces produites que Vladimir Y... a signé avec Madame A... le 12 juillet 2000 une proposition de souscription au contrat d'assurance-vie Multivalor AREP au taux garanti de 9% net, sur un formulaire à l'en-tête du groupe Le Conservateur et de la société d'assurances mutuelles Assurances Mutuelles Le Conservateur, portant également la signature de Monsieur X... et le tampon « Le Conservateur Finance G . Varsovie Consultant Financier », mentionnant le versement de la somme de 40.800 francs outre le coût du contrat de 100 francs soit au total 40.900 francs réglés le jour même ; qu'il est produit la photocopie du chèque bancaire de 40.000 francs émis par Vladimir Y... le 12 juillet 2000 débité le 18 suivant au profit de Monsieur X... ; que Vladimir Y... et Madame A... ont ultérieurement reçu un document daté du 19 septembre 2000 à l'en-tête de Le Conservateur et de la société d'assurances mutuelles Assurances Mutuelles Le Conservateur intitulé AREP, « conditions particulières », concernant le contrat n° 10107999 et portant le tampon « Le Conservateur Finance G. Varsovie consultant financier » qui contrairement aux allégations de l'appelante, correspond manifestement à la demande de souscription du 12 juillet précédent dont elle reprend les éléments, en particulier le versement d'une cotisation de 40.800 francs (6.219,92 euros) ; que le 25 septembre 2002, Monsieur X... a délivré à Vladimir Y... un reçu portant toujours le même tampon « Le Conservateur Finance G. Varsovie consultant financier » d'une somme de 3.500 euros pour le contrat n° 10107999 ; que le 3 janvier 2003, Vladimir Y... a émis un chèque de 3.900 euros à l'ordre de Conservateur Varsovie Gérard débité de son compte le 10 suivant au profit de Monsieur X... ; que dans une attestation du 2 mars 2004 à l'entête de « Le Conservateur » et portant en pied l'adresse de son siège social et le nom des différentes sociétés constituant le groupe Le Conservateur, visant en référence le compte n° 101017999, il a été accusé réception à Vladimir Y... de versement par chèques des 22 janvier et 6 février 2004 de respectivement 55.112 euros et 7.623 euros, chèques dont les photocopies sont produites et qui ont été débités les 23 janvier et 11 février 2004 au profit de M. X... ; qu'il résulte de ces éléments que Vladimir Y... s'est vu remettre par Monsieur X..., mandataire de la société Le Conservateur, des documents qui avaient l'apparence de pièces contractuelles caractérisant la souscription d'un contrat d'assurance vie émanant de cette société, et lui a versé des sommes pour alimenter ce contrat ; que Monsieur X... a ainsi agi dans le cadre de ses fonctions de mandataire de la société Le Conservateur, dont il a profité pour se faire remettre des fonds qui étaient destinés à son mandant, et a trouvé dans l'exercice de celles-ci les moyens de sa faute et l'occasion de la commettre ; que la société Le conservateur ne démontre aucunement l'existence d'une collusion frauduleuse entre Monsieur X... et Vladimir Y... que la procédure pénale n'a pas révélée et qui ne saurait se déduire de ce que les parties se fréquentaient depuis plusieurs années ou que Monsieur X..., juste avant son incarcération, a cru devoir adresser à certaines de ses victimes une lettre circulaire les incitant à rechercher la responsabilité des sociétés du groupe Le Conservateur ; qu'elle ne démontre pas d'avantage que la somme de 5.500 que Vladimir Y... a reçue de Monsieur X... en juin 2004 avant son arrestation correspondrait à un remboursement de fonds détournés, Vladimir Y... ayant déclaré lors de son audition par les enquêteurs qu'il s'agissait du solde du prix de vente d'un fusil de collection qu'il avait remis en dépôt-vente à monsieur X..., lequel, parallèlement à son activité de mandataire d'assurance, dirigeait un magasin d'armurerie à Mende ; que Vladimir Y... n'avait aucune compétence particulière en matière d'assurance vie et de gestion de patrimoine, a pu légitiment croire au vu des documents remis ou adressés par Monsieur X..., même si ceux-ci comportaient certaines anomalies pouvant échapper à un non professionnel, qu'il souscrivait régulièrement un contrat Multivalor auprès de la société Le Conservateur, ses règlements ayant d'ailleurs tous été effectués par chèques libellés à l'ordre du « Conservateur » ou « Conservateur Finance », auquel Monsieur X... a apparemment ajouter son nom afin de pouvoir les encaisser, ou par reçu délivré par Monsieur X... au travers de son cabinet dénommé « Le Conservateur Finance », à l'exclusion du chèque de 40.000 francs remis « en blanc » concomitamment à la souscription du contrat à Monsieur X..., qui l'a complété à son ordre, ce qui s'explique par la relation de confiance que ce dernier avait su instaurer avec ses victimes ; que de même, si le taux de rendement annuel de 9% prévu dans la proposition de souscription apparaît très élevé au regard de ceux appliqués à l'époque, il n'était pas en lui-même de nature à éveiller les soupçons du profane qu'était Vladimir Y... ; qu'en conséquence, la responsabilité de la société Le Conservateur est engagée à l'égard de Vladimir Y... du fait des agissements fautifs de son mandataire, le préjudice subi par la victime correspondant au montant total des versements justifiés, soit la somme de 76.354,92 euros ;
ALORS QUE la responsabilité de l'assureur sur le fondement de l'article L. 511-1 III du code des assurances est écartée lorsqu'il est établi que les victimes d'un détournement de fonds ne pouvaient ignorer que les opérations présentaient un caractère anormal et avaient conscience que l'intermédiaire d'assurance abusait de ses fonctions ; que la cour d'appel a constaté que le taux d'intérêt annuel proposé à M. Y... s'élevait à 9 %, que celui-ci avait effectué un versement par le biais d'un chèque sans ordre d'un montant de 40.000 francs, sans rapport avec la somme mentionnée dans la proposition de contrat, que les documents remis ou adressés à M. Y... comportaient de nombreuses anomalies ; que l'exposante faisait en outre valoir que M. Y... s'était nécessairement étonné des conditions hors du commun dans lesquelles le taux de rendement de 9 % lui était octroyé ¿ sans limitation de durée, sans fiscalité ni prélèvements sociaux ¿ ainsi que de l'absence totale de communication de décomptes des intérêts ou de relevé de situation ; qu'en s'abstenant de rechercher s'il ne se déduisait pas de ses propres constatations et des éléments précités que la responsabilité de la société Les Assurances Mutuelles Le Conservateur devait être exclue, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 511-1 III du code des assurances et 1384 alinéa 5 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société Les Assurances Mutuelles Le Conservateur de sa demande de garantie dirigée contre la société Le Crédit Lyonnais et de l'AVOIR condamné à payer à la société Le Crédit Lyonnais la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QU' il ressort des pièces produites que courant 1989, Monsieur X... a ouvert un compte à l'agence de Mende du Crédit Lyonnais portant le n° 079102 W sous l'intitulé « Monsieur Gérard X... AGF » ; que s'agissant d'un compte individuel ouvert par une personne physique, à usage professionnel, la banque n'avait pas d'autre obligation que celle de vérifier l'identité et le domicile du postulant, et notamment n'avait pas à vérifier les liens unissant celui-ci à la société UAP, qui n'était pas co-titulaire du compte ; que les quatre chèques émis par Vladimir Y... en règlement des cotisations qu'il entendait verser sur son contrat Multivalor ont été encaissés sur ce compte ; qu'à l'exception du premier chèque de 40.000 francs remis sans ordre à Monsieur X... qui s'y est mentionné comme bénéficiaire, ces chèques étaient libellés à l'ordre du «Conservateur» ou « Conservateur Finance », auquel le nom de Monsieur X... était accolé, sans indication d'une quelconque forme sociale ¿ société, compagnie, association, groupe¿ ¿ susceptible de désigner Le Conservateur, personne morale qui n'était titulaire d'aucun compte ouvert à son nom à l'agence de Mende du Crédit Lyonnais ; que depuis de nombreuses années, Monsieur X... exerçait son activité à Mende sous le dénomination et enseigne commerciale « Le Conservateur Finance G. Varsovie Consultant Financier », ainsi qu'établi par le tampon apposé sur un certain nombre de documents remis ou adressés à Monsieur Y... ; que le Crédit Lyonnais qui, dès lors que le compte en litige n'était pas ouvert au nom de la société Le Conservateur, n'avait pas à vérifier si dans le cadre de son activité de mandataire non salarié de cette société, Monsieur X... avait ou non le pouvoir d'encaisser les cotisations versées par les clients a donc pu, sans faute de sa part, créditer le compte professionnel de celui-ci du montant de ces chèques, qui ne présentait aucune anomalie apparente telle rature, grattage ou surcharge, l'ajout du nom de Varsovie à celui de Conservateur écrit de la main du tireur des chèques n'étant pas suffisamment perceptible pour attirer l'attention d'un employé de banque normalement diligent lors d'un examen nécessairement superficiel du chèque à l'occasion d'une opération courante d'encaissement ; qu'en l'absence d'anomalie matérielle ou intellectuelle de nature à l'alerter, le Crédit Lyonnais n'avait pas à s'immiscer dans le fonctionnement du compte de Monsieur X..., qui n'avait pas donné lieu à incident depuis son ouverture une quinzaine d'année auparavant, la banque pouvant légitimement penser que les chèques libellés à l'enseigne de son cabinet étaient destinés à être encaissés par M. X... dans le cadre de son activité professionnelle, d'autant que lui-même émettait régulièrement des chèques à l'ordre des sociétés Le Conservateur ¿ onze entre le 7 mars 1997 et le 9 avril 2002 ¿ dont la banque ne pouvait connaître l'objet exact mais qui contribuaient à conférer aux opérations enregistrées sur un compte professionnel une apparence de normalité ; qu'au surplus, la société Le Conservateur ne démontre pas que la faute imputée au Crédit Lyonnais est la cause déterminante et principale du préjudice subi par Monsieur Y... dont l'assureur est responsable en vertu de l'article L. 511-1 III du code des assurances, alors que ce préjudice s'inscrit dans des détournements de plusieurs millions de francs commis par Monsieur X... pendant plus d'une dizaine d'années et qui ont fait une centaine de victimes, traduisant nécessairement un manquement caractérisé de la société Le Conservateur à son devoir de surveillance et de contrôle des activités de son mandataire ;
1/ ALORS, d'une part, QUE le banquier présentateur d'un chèque falsifié est responsable, sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, du préjudice subi par le tireur lorsque, manquant à son devoir de vigilance, il a encaissé le chèque en dépit de circonstances ou d'irrégularités qui auraient dû attirer son attention ; que la cour d'appel a constaté que M. X... exerçait une profession réglementée, ce dont il résultait que les opérations qu'il réalisait devaient nécessairement faire l'objet d'une vigilance accrue, et que les chèques mentionnaient le nom d'un bénéficiaire qui ne correspondait pas à l'intitulé du compte sur lequel ils étaient déposés ; qu'en retenant qu'en dépit de ces circonstances, qui auraient dû attirer l'attention de la banque, celle-ci n'avait pas commis de faute en procédant à l'encaissement des chèques, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
2/ ALORS, d'autre part, QUE tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ;qu'en refusant de rechercher si la faute reprochée à la banque avait provoqué le dommage subi par Vladimir Y... au motif inopérant l'assureur avait lui-même commis une faute à l'origine du dommage, la cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du code civil ;
3/ Et ALORS, subsidiairement, QUE le mandant n'est pas tenu de surveiller l'activité de son mandataire, lequel exerce sa mission de manière indépendante et autonome ; qu'en déterminant la cause principale du préjudice subi par Vladimir Y... au regard du respect par l'assureur d'une obligation de surveillance des activités de son mandataire, dépourvue de toute existence légale, la cour d'appel a violé les articles 1382, 1383, 1984 et 1998 du code civil.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour les consorts Y...

Les consorts Y... reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté leur demande tendant à ce que Le Crédit lyonnais soit condamné solidairement avec la société Le Conservateur à indemniser leur préjudice ;
AUX MOTIFS QU'il ressort des pièces produites que courant 1989, M. X... a ouvert un compte à l'agence de Mende du Crédit Lyonnais portant le n° 079102 W sous l'intitulé M. Gérard X... AGF"; QUE s'agissant d'un compte individuel ouvert par une personne physique, à usage professionnel, la banque n'avait pas d'autre obligation que celle de vérifier l'identité et le domicile du postulant, et notamment n'avait pas à vérifier les liens unissant celui-ci à la société UAP, qui n'était pas co-titulaire du compte ; QUE les quatre chèques émis par Vladimir Y... en règlement des cotisations qu'il entendait verser sur son contrat MultiValor ont été encaissés sur ce compte ; QU'à l'exception du premier chèque de 40 000 francs remis sans ordre à M. X... qui s'y est mentionné comme bénéficiaire, ces chèques étaient libellés à l'ordre ; du "Conservateur" ou "Conservateur Finance", auquel le nom de M. X... était accolé, sans indication d'une quelconque forme sociale société, compagnie, association, groupe¿susceptible de désigner la société Le Conservateur, personne morale qui n'était titulaire d'aucun compte ouvert à son nom à l'agence de Mende du Crédit Lyonnais ; QUE depuis de nombreuses années, M. X... exerçait son activité à Mende sous la dénomination d'enseigne commerciale "Le Conservateur Finance G. Varsovie Consultant Financier", ainsi qu'établi par le tampon apposé sur un certain nombre de documents remis ou adressés à Vladimir Y... ; QUE le Crédit Lyonnais qui, dès lors que le compte en litige n'était pas ouvert au nom de la société Le Conservateur, n'avait pas à vérifier si dans le cadre de son activité de mandataire non salarié de cette société, M. X... avait ou non le pouvoir d'encaisser les cotisations versées par les clients, a donc pu, sans faute de sa part, créditer le compte professionnel de celui-ci du montant de ces chèques, qui ne présentaient aucune anomalie telle rature, grattage ou surcharge, l'ajout du nom de VARSOVIE à celui de CONSERVATEUR écrit de la main du tireur des chèques n'étant pas suffisamment perceptible pour attirer l'attention d'un employé de banque normalement diligent lors d'un examen nécessairement superficiel du chèque à l'occasion d'une opération courante d'encaissement ; QU'en l'absence d'anomalie matérielle ou intellectuelle de nature à l'alerter, le Crédit Lyonnais n'avait pas à s'immiscer dans le fonctionnement du compte de M. X..., qui n'avait pas donné lieu à incident depuis son ouverture une quinzaine d'années auparavant, la banque pouvant légitimement penser que les chèques libellés à l'enseigne de son Cabinet était destinés à être encaissés par M. X... dans le cadre de son activité professionnelle, d'autant que l'intéressé émettait lui-même régulièrement des chèques à l'ordre des sociétés Le Conservateur entre le 7 mars 1997 Et le 9 avril 2002 - dont la banque ne pouvait connaître l'objet exact mais qui contribuaient à conférer aux opérations enregistrées sur un compte professionnel une apparence de normalité ; QU'au surplus, la société Le Conservateur et les consorts Y... ne démontrent pas que la faute imputée au Crédit Lyonnais est la cause déterminante et principale du préjudice subi par Vladimir Y... dont l'assureur est responsable en vertu de l'article L. 511-1 II du code des assurances, alors que ce préjudice s'inscrit dans des détournements de plusieurs millions de francs commis par M. X... pendant plus d'une dizaine d'années et qui ont fait une centaine de victimes, traduisant nécessairement un manquement caractérisé de la société Le Conservateur à son devoir de surveillance et de contrôle des activités de son mandataire ; QU'en conséquence, il convient de réformer le jugement entrepris en ce qu'il est entré en voie de condamnation à l'encontre du Crédit Lyonnais et de débouter la société Le Conservateur et les consorts Y... de toutes demandes dirigées contre lui ;
1- ALORS QUE le banquier présentateur d'un chèque falsifié est responsable, sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, du préjudice subi par le tireur lorsque, manquant à son devoir de vigilance, il a encaissé le chèque en dépit de circonstances ou d'irrégularités qui auraient dû attirer son attention ; que la cour d'appel a constaté que M. X... exerçait une profession réglementée, ce dont il résultait que les opérations qu'il réalisait devaient nécessairement faire l'objet d'une vigilance accrue, et que les chèques mentionnaient le nom d'un bénéficiaire qui ne correspondait pas à l'intitulé du compte sur lequel ils étaient déposés ; qu'en retenant qu'en dépit de ces circonstances, qui auraient dû attirer l'attention de la banque, celle-ci n'avait pas commis de faute en procédant à l'encaissement des chèques, la cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du code civil ;
2- ALORS QUE tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; qu'en énonçant, pour refuser de rechercher si la faute reprochée à la banque avait provoqué le dommage subi par Vladimir Y..., que l'assureur avait lui-même commis une faute à l'origine du dommage, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-20242
Date de la décision : 04/07/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 mars 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 04 jui. 2013, pourvoi n°12-20242


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Defrénois et Lévis, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.20242
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