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20/06/2013 | FRANCE | N°12-17009

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 20 juin 2013, 12-17009


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Poitiers, 8 février 2012), qu'au décès de son époux, qui était pharmacien, survenu le 1er novembre 2004, Mme X... est devenue coindivisaire successoral avec son fils d'une officine pharmaceutique qu'elle a fait gérer par des pharmaciens agréés par l'administration dans les conditions prévues par l'article L. 5124-4 du code de la santé publique qui concède aux héritiers un délai de deux ans pour maintenir le fonds de commerce en e

xploitation dans l'attente de sa vente ; que l'union de recouvrement des ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Poitiers, 8 février 2012), qu'au décès de son époux, qui était pharmacien, survenu le 1er novembre 2004, Mme X... est devenue coindivisaire successoral avec son fils d'une officine pharmaceutique qu'elle a fait gérer par des pharmaciens agréés par l'administration dans les conditions prévues par l'article L. 5124-4 du code de la santé publique qui concède aux héritiers un délai de deux ans pour maintenir le fonds de commerce en exploitation dans l'attente de sa vente ; que l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de la Vienne (l'URSSAF) a affilié d'office l'intéressée au régime des travailleurs indépendants pour lui réclamer les cotisations correspondant aux bénéfices perçus jusqu'à la cession de l'officine intervenue le 26 octobre 2006 ; que Mme X... a contesté cette décision devant une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que l'URSSAF fait grief à l'arrêt d'accueillir ce recours alors, selon le moyen, que doit être affiliée au régime des travailleurs indépendants et payer des cotisations personnelles d'allocations familiales, la CSG et la CRDS, la veuve d'un pharmacien qui exploite un fonds de commerce d'officine de pharmacie indivis, l'indivision étant inscrite au registre du commerce et des sociétés, et en tire des revenus, quand bien même, ne disposant pas du titre lui permettant d'être titulaire de l'officine, elle en a confié la gestion à deux pharmaciens qu'elle a engagés en qualité de salariés dans l'attente de la cession dudit fonds ; qu'en considérant que Mme X... n'avait pas à être affiliée comme travailleur indépendant, la cour d'appel a violé les articles L. 131-6, L. 242-11 et R. 241-2 du code de la sécurité sociale, l'article L. 136-3 du même code et l'article 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 ;
Mais attendu que les dispositions de l'article L. 5124-4 du code de la santé publique ont précisément pour objet d'exclure de la gestion de l'officine les héritiers non pharmaciens ;
Et attendu que, tant par motifs propres qu'adoptés, l'arrêt retient que Mme X... s'est limitée à assurer la pérennité du bien jusqu'à sa vente dans les délais légaux sans interférer dans sa gestion et constate qu'elle n'a exercé aucune activité au sein de l'établissement ;
Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a exactement déduit que l'intéressée, copropriétaire indivise par dévolution successorale d'une pharmacie officinale dont elle a recueilli les fruits sans l'exploiter, n'avait pas la qualité de travailleur indépendant ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'URSSAF de la Vienne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'URSSAF de la Vienne ; la condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt juin deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour l'URSSAF de la Vienne
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé la décision de l'URSSAF de la VIENNE affiliant Madame Marie-Chantal X... en qualité de travailleur indépendant redevable de cotisations personnelles d'allocations familiales et de CSG/CRDS à raison de son activité d'exploitante du fonds de commerce d'officine de pharmacie précédemment exploité par son époux, décédé ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « L'article L.5124-4 du code de santé publique dispose qu'en cas de décès du pharmacien propriétaire d'un établissement pharmaceutique le délai pendant lequel son conjoint ou ses héritiers peuvent faire gérer l'établissement par un pharmacien autorisé à cet effet par le représentant de l'état ne peut excéder deux ans.
Cette gérance après décès est une exception à la règle de l'indivisibilité entre la propriété et l'exploitation de l'officine.
L'URSSAF de la Vienne soutient que par la continuation de l'activité, le maintien volontaire de l'indivision et le partage de bénéfices, il existait entre les indivisaires une communauté d'intérêt assimilable à une société de fait, qu'en l'espèce, Mme Marie-Chantal X..., indivisaire, a perçu des revenus non salariés de l'officine exploitée en indivision qu'elle a déclarés à l'URSSAF, que le maintien pendant presque deux ans de l'indivision dans un but lucratif permet d'assimiler l'indivision successorale X... à une société créée de fait justifiant l'affiliation de Mme Marie-Chantal X... à l'URSSAF de la Vienne pendant la période de l'indivision, que la gérance technique ayant été confiée à un gérant salarié qui n'est pas affilié en tant que travailleur indépendant, Mme Marie-Chantal X... a tiré profit de l'activité de l'officine et en a conservé la gestion administrative en embauchant des salariées et en procédant à la rupture des contrat de travail.
L'encaissement par Mme Marie-Chantal X... des bénéfices dégagés par l'officine de pharmacie, l'embauche de pharmaciennes autorisées dans le cadre de l'article L.5124-4 du code de santé publique, la rupture de leurs contrats de travail, la cession de l'officine dans le délai légal découlent du seul droit de propriété indivis de Mme Marie-Chantal X... sur le fonds, en l'absence de preuve rapportée d'une quelconque ingérence de celle-ci dans la gestion administrative de l'officine ou d'une activité qu'elle y aurait exercée en qualité de travailleur indépendant qui seules pouvaient fonder son obligation d'affiliation à l'URSSAF.
De même, Mme Marie-Chantal X..., coindivisiaire de l'officine, s'est limitée à assurer la pérennité du bien jusqu'à sa vente dans les délais légaux sans interférer dans sa gestion ni avoir collaboré à la réalisation d' un projet commun pour le développement de l'officine pouvant caractériser l'affectio societatis d'une société de fait, ainsi qu'en ont jugé les premiers juges pour fonder leur décision par des motifs que la cour adopte » ;
ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS DU JUGEMENT ENTREPRIS QUE « M. Jean-Michel X..., pharmacien, est décédé brutalement le 1er novembre 2004, Mme X... et son fils Sébastien sont devenus propriétaires en indivision de la pharmacie. Ne disposant ni l'un ni l'autre des diplômes nécessaires, conformément aux dispositions de l'article L5124-4 du Code de Santé Publique Mme Y... puis Mme Z... ont été nommées par arrêté préfectoral des 16 décembre 2004 et 12 octobre 2005 pour gérer le fonds dans l'attente de la vente de celui-ci qui est intervenue le 17 juillet 2006.
Sur la qualité de travailleur indépendant
L'article L5124-4 du Code de Santé Publique dispose qu'en cas de décès du pharmacien propriétaire d'un établissement pharmaceutique le délai pendant lequel son conjoint ou ses héritiers peuvent faire gérer l'établissement par un pharmacien autorisé à cet effet par le représentant de l'état ne peut excéder deux ans.
Cette gérance après décès est une exception à la règle de l'indivisibilité entre la propriété et l'exploitation de l'officine.
Les dispositions légales confèrent au gérant la gestion quotidienne de la pharmacie dont il assure l'ensemble de l'activité, le ou les propriétaires non pharmaciens ne pouvant interférer dans cette gestion.
Ces règles diffèrent de celles applicables aux co-indivisaires d'un fonds de commerce classique, co-indivisaires qui peuvent assurer la gestion.
Il n'est nullement démontré par l'URSSAF que Mme X... a conservé, en attendant la vente de l'officine, une quelconque gestion administrative.Si l'indivision a procédé à la cession de l'officine, outre qu'elle ne pouvait faire autrement, cette possibilité découle de son droit de propriété sur le fonds. C'est de même en sa qualité de propriétaire indivis que Mme X... a encaissé les bénéfices provenant de l'activité de la pharmacie.N'exerçant aucune activité au sein de l'établissement, Mme X... n'a jamais eu la qualité de travailleur indépendant.
Sur la société de fait
La société de fait suppose la réunion d'éléments cumulatifs qui sont l'apport, l'intention de collaborer à la réalisation d'un projet commun et l'intention de participer aux bénéfices ou pertes.
La différence entre l'indivision et la société de fait réside dans le fait que l'indivision est statique, elle a pour objet de conserver et d'administrer une situation existante, au mieux des intérêts des co-indivisaires.
En l'espèce, Mme X... et son fils sont demeurés en indivision jusqu'à la vente de l'officine, cessation qui a eu lieu le 17 juillet 2006 afin de conserver la valeur économique de celle ci. Ce maintient ne résulte pas d'un souhait de leur part mais de la nécessité de trouver un acquéreur et il n'est nullement volontaire. La pharmacie a été vendue dans le délai de deux ans conformément à l'obligation légale.
Pendant cette période, les co-indivisaires n'ont jamais en « l'affectio societatis » et se sont limités à assurer la pérennité du bien jusqu'à sa vente.
En conséquence, il résulte de l'ensemble de ces éléments que Mme X... n'avait pas lieu de s'affilier comme travailleur indépendant » ;
ALORS QUE doit être affiliée au régime des travailleurs indépendants et payer des cotisations personnelles d'allocations familiales, la CSG et la CRDS, la veuve d'un pharmacien qui exploite un fonds de commerce d'officine de pharmacie indivis, l'indivision étant inscrite au registre du commerce et des sociétés, et en tire des revenus, quand bien même, ne disposant pas du titre lui permettant d'être titulaire de l'officine, elle en a confié la gestion à deux pharmaciens qu'elle a engagés en qualité de salariés dans l'attente de la cession dudit fonds ; qu'en considérant que Madame X... n'avait pas à être affiliée comme travailleur indépendant, la cour d'appel a violé les articles L.131-6, L. 242-11 et R. 241-2 du code de la sécurité sociale, l'article L. 136-3 du même code et l'article 14 de l'Ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-17009
Date de la décision : 20/06/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, PRESTATIONS FAMILIALES - Assujettis - Travailleurs indépendants - Héritier d'une officine pharmaceutique (non)

SECURITE SOCIALE - Assujettissement - Personnes assujetties - Héritier d'une officine pharmaceutique (non)

L'héritier d'une officine pharmaceutique qui en recueille les fruits sans l'exploiter et la fait gérer par des pharmaciens agréées par l'Administration dans les conditions et durant le délai prévu par l'article L. 5124-4 du code de la santé publique n'a pas la qualité de travailleur indépendant et n'est pas redevable de cotisations sociales à ce titre


Références :

article L. 5124-4 du code de la santé publique

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 08 février 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 20 jui. 2013, pourvoi n°12-17009, Bull. civ. 2013, II, n° 137
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, II, n° 137

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : Mme de Beaupuis
Rapporteur ?: M. Cadiot
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.17009
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