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13/06/2013 | FRANCE | N°12-20218

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 13 juin 2013, 12-20218


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par arrêt du 22 novembre 2007 d'une cour d'assises, M. X... a été déclaré coupable de l'assassinat, le 5 août 2004, de Moulay Idriss Y...-Z... qui lui fournissait habituellement de la drogue ; que le 10 juin 2008, les parents, les frères et la soeur de la victime (les consorts Y...-Z...) ont saisi une commission d'indemnisation des victimes d'infraction d'une demande d'indemnisation de leur préjudice moral ;
Attendu que les consorts Y...-Z..

. font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors, selon le mo...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par arrêt du 22 novembre 2007 d'une cour d'assises, M. X... a été déclaré coupable de l'assassinat, le 5 août 2004, de Moulay Idriss Y...-Z... qui lui fournissait habituellement de la drogue ; que le 10 juin 2008, les parents, les frères et la soeur de la victime (les consorts Y...-Z...) ont saisi une commission d'indemnisation des victimes d'infraction d'une demande d'indemnisation de leur préjudice moral ;
Attendu que les consorts Y...-Z... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que, pour être exclusive de l'indemnisation que prévoit l'article 706-3 du code de procédure pénale, la faute de la victime doit être dans un lien de causalité direct avec l'atteinte à son intégrité physique ; qu'en énonçant que Moulay Idriss Y...-Z... se livrait à un « trafic de résine de cannabis portant sur de grandes quantités », que son assassin était un de ses « clients réguliers », que c'est « dans le cadre de ces relations » de clientèle, « quelle qu'en soit la cause exacte, qu'est intervenu l'assassinat », et que « le décès de Moulay Idriss Y...-Z... est ainsi directement lié à sa participation délibérée et consciente à une activité délictueuse qui présentait pour lui des dangers et sans laquelle il n'aurait pas été assassiné », la cour d'appel, qui, loin de justifier en fait que l'assassinat de Moulay Idriss Y...-Z... serait la conséquence directe du trafic de résine de cannabis auquel il se livrait, énonce que la cause exacte de cet assassinat est sans importance, a violé l'article 706-3 du code de procédure pénale ;
2°/ que si la cour d'appel adopte les motifs du premier juge, pour être exclusive de l'indemnisation que prévoit l'article 706-3 du code de procédure pénale, la faute de la victime doit être dans un lien de causalité direct avec l'atteinte à son intégrité physique ; que le premier juge relève que M. X..., l'assassin, a volé de l'argent à Moulay Idriss Y...
Z..., que « c'est c e vol qui est à l'origine des craintes de représailles de M. X..., qui l'ont amené à perpétrer l'assassinat », et qu'« il y a donc bien un lien entre l'activité délictueuse de Moulay Idriss Y...-Z... et son assassinat ; que, si elle adopte les motifs du premier juge, la cour d'appel justifie d'un certain lien entre le commerce illégal de Moulay Idriss Y...-Z... et son assassinat, mais ne justifie pas que l'assassinat est la conséquence directe du trafic auquel il se livrait ; qu'elle a violé l'article 706-3 du code de procédure pénale ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article 706-3 du code de procédure pénale que la réparation du dommage causé par les faits présentant le caractère matériel d'une infraction peut être refusée ou son montant réduit en raison de la faute de la victime en relation de causalité directe et certaine avec le dommage ;
Et attendu que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que Moulay Idriss Y...-Z..., se livrait de manière habituelle, et depuis plusieurs années, à un trafic de résine de cannabis portant sur de grandes quantités ; que M. X..., qui l'a assassiné, était un de ses clients réguliers ; que c'est dans le cadre de ces relations, quelle qu'en soit la cause exacte, qu'est intervenu l'assassinat ; que le décès de Moulay Idriss Y...-Z... est ainsi directement lié à sa participation délibérée et consciente à une activité délictueuse qui présentait pour lui des dangers, et sans laquelle il n'aurait pas été assassiné ; que le lien de causalité direct entre la faute de la victime et l'atteinte à son intégrité physique exclut tout droit à indemnisation ; qu'il ressort des pièces produites, et notamment de l'ordonnance de mise en accusation, que l'auteur de l'assassinat, M. X..., était un « client » de Moulay Idriss Y...-Z... depuis plusieurs mois et qu'il lui a volé de l'argent, connaissant les importantes sommes transitant chez sa victime ; qu'il apparaît également que c'est le vol qui est à l'origine des craintes de représailles de M. X..., qui l'ont amené à perpétrer l'assassinat ; que, ces craintes étant fondées ou non, l'enquête n'ayant pas permis de le déterminer, il y a donc bien un lien entre l'activité délictueuse de Moulay Idriss Y...-Z... et son assassinat ;
Que de ces constatations et énonciations la cour d'appel a pu déduire que Moulay Idriss Y...-Z... avait commis une faute qui devait exclure l'indemnisation du préjudice moral subi par les consorts Y...-Z... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juin deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Capron, avocat aux Conseils, pour Mme Hanane Y...-Z..., M. Tayeb Y...-Z... et M. Kamel Y...-Z....
Le pourvoi fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR :
. décidé que Moulay Idriss Y...-Z... a commis une faute qui est à l'origine de son décès ;
. débouté Mme Hanane Y...-Z... et MM. Kamel et Tayeb Y...-Z... de leurs demandes d'indemnisation ;
AUX MOTIFS QU'« il résulte des pièces du dossier que la victime, M. Moulay Idriss Y...-Z..., se livrait de manière habituelle et depuis plusieurs années, à un trafic de résine de cannabis portant sur de grandes quantités, que M. Nassim X..., qui l'a assassiné, était un de ses clients réguliers ; que c'est bien dans le cadre de ces relations, quelle qu'en soit la cause exacte, qu'est intervenu l'assassinat ; que le décès de M. Moulay Idriss Y...-Z... est ainsi directement lié à sa participation délibérée et consciente à une activité délictueuse qui présentait pour lui des dangers et sans laquelle il n'aurait pas été assassiné » (cf. arrêt attaqué, p. 5, 2e attendu) ; « que le lien de causalité directe entre la faute de la victime et l'atteinte à son intégrité physique exclut tout droit à indemnisation ; que, comme l'a retenu la civi, le fgv n'est appelé à intervenir qu'à titre subsidiaire au nom de la solidarité nationale en l'absence de faute de la victime » (cf. arrêt attaqué, p. 5, 3e attendu) ; qu'« il ressort des pièces produites et, notamment, de l'ordonnance de mise en accusation, que l'auteur de l'assassinat, M. X..., était un " client " de M. Moulay Idriss Y...-Z... depuis plusieurs mois et qu'il lui a volé de l'argent, connaissant les importantes sommes transitant chez sa victime ; qu'il apparaît également que c'est le vol qui est à l'origine des craintes de représailles de M. X..., qui l'ont amené à perpétrer l'assassinat ; que, que ces craintes aient été fondées ou non, l'enquête n'ayant pas permis de le déterminer, il y a donc bien un lien entre l'activité délictueuse de M. Moulay Idriss Y...-Z... et son assassinat » (cf. décision entreprise, p. 4, 2e alinéa) ; que, « dès lors qu'en l'espèce, il est démontré que M. Moulay Idriss Y...-Z... vivait dans le monde des stupéfiants avec tous les dangers qu'il comporte et s'exposait aux risques inhérents à ce milieu, la commission d'indemnisation des victimes d'infractions ne peut que considérer, même si les faits dont il a été victime sont regrettables et causent à la famille et à ses proches un réel préjudice, qu'il a commis une faute qui est à l'origine de son décès et que la collectivité ne peut prendre en charge les conséquences que cette faute » (cf. décision entreprise, p. 4, 4e alinéa) ;
1. ALORS QUE, pour être exclusive de l'indemnisation que prévoit l'article 706-3 du code de procédure pénale, la faute de la victime doit être dans un lien de causalité direct avec l'atteinte à son intégrité physique ; qu'en énonçant que Moulay Idriss Y...-Z... se livrait à un « trafic de résine de cannabis portant sur de grandes quantités », que son assassin était un de ses « clients réguliers », que c'est « dans le cadre de ces relations » de clientèle, « quelle qu'en soit la cause exacte, qu'est intervenu l'assassinat », et que « le décès de M. Moulay Idriss Y...-Z... est ainsi directement lié à sa participation délibérée et consciente à une activité délictueuse qui présentait pour lui des dangers et sans laquelle il n'aurait pas été assassiné », la cour d'appel, qui, loin de justifier en fait que l'assassinat de Moulay Idriss Y...-Z... serait la conséquence directe du trafic de résine de cannabis auquel il se livrait, énonce que la cause exacte de cet assassinat est sans importance, a violé l'article 706-3 du code de procédure pénale ;
2. ALORS, si la cour d'appel adopte les motifs du premier juge, QUE, pour être exclusive de l'indemnisation que prévoit l'article 706-3 du code de procédure pénale, la faute de la victime doit être dans un lien de causalité direct avec l'atteinte à son intégrité physique ; que le premier juge relève que Nassim X..., l'assassin, a volé de l'argent à Moulay Idriss Y...
Z..., que « c'est c e vol qui est à l'origine des craintes de représailles de M. X..., qui l'ont amené à perpétrer l'assassinat », et qu'« il y a donc bien un lien entre l'activité délictueuse de M. Moulay Idriss Y...-Z... et son assassinat ; que, si elle adopte les motifs du premier juge, la cour d'appel justifie d'un certain lien entre le commerce illégal de Moulay Idriss Y...-Z... et son assassinat, mais ne justifie pas que l'assassinat est la conséquence directe du trafic auquel il se livrait ; qu'elle a violé l'article 706-3 du code de procédure pénale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-20218
Date de la décision : 13/06/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 17 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 13 jui. 2013, pourvoi n°12-20218


Composition du Tribunal
Président : M. Bizot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.20218
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