LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° A 12-14.929 et D 12-15.323 ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... était titulaire de deux cartes bancaires dites « Platinum » et « Centurion » auprès de la société American express carte France (la société) ; qu'il a par ailleurs adhéré au programme de fidélité « Membership rewards » ; qu'à la suite du rejet de quatre prélèvements en février, mars, avril et mai 2007, la société a sollicité la restitution de ces deux cartes, courant octobre 2007, et lui a opposé l'article 4 des conditions générales du programme de fidélité aux termes duquel « Si une carte American express au moins est annulée du fait d'Américan express, le compte Membership Rewards du titulaire sera annulé et les points Membership perdus... » ; que soutenant que cette clause n'avait pas été portée à sa connaissance et lui était donc inopposable, M. X... a assigné la société, lui réclamant une somme de 150 000 euros en réparation de la perte de ses points ;
Attendu que pour déclarer les conditions générales du programme « Membership Rewards » opposables à M. X..., l'arrêt, après avoir constaté que la société American Express ne fournissait ni les conditions générales de la carte « Platinium » ni celles du programme de fidélité, en vigueur au jour de l'adhésion le 23 avril 1999, et que les conditions générales figurant au verso de la demande de carte « Centurion » ne renvoyaient pas à celles du programme de fidélité, relève que les modalités de calcul des points figurent sur les relevés de compte et que la conversion en 2006 de ces points, sous forme de miles Air France/KLM, suppose nécessairement que M. X... a eu accès au guide Membership Rewards de l'année 2006/2007 qui comporte les conditions générales en vigueur ; qu'il est ainsi établi que l'intéressé a eu connaissance des clauses qui y sont contenues en sorte que les conditions générales de ce programme lui sont opposables ;
Qu'en statuant ainsi, en se fondant sur des circonstances postérieures à l'adhésion au programme de fidélité, alors que seules sont opposables à l'adhérent les conditions générales entrées dans le champ contractuel et dont l'intéressé a eu connaissance au moment de son adhésion, à moins qu'il n'ait expressément accepté des modifications postérieures, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 janvier 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société American express carte France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société American express carte France ; la condamne à payer à M. X... la somme de 3 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre avril deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit aux pourvois par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de ses demandes tendant à voir condamner la société AMERICAN EXPRESS CARTE FRANCE à lui payer la somme de 150.000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'annulation de ses deux cartes bancaires et de la perte consécutive des points de fidélité y afférents,
AUX MOTIFS QUE :
« Si le programme « MEMBERSH1P REWARDS » ne figure pas dans les clauses des conditions générales exposées au verso de la demande de carte, sur les relevés de compte « Centurion » adressés à Claude X..., versés aux débats, sont mentionnées les modalités de calcul des points MEMBERSHIP REWARDS, conformément aux conditions générales ; qu'à supposer que cette mention soit insuffisante à elle seule pour établir la connaissance par l'adhérent de la teneur des autres clauses qui y sont contenues, il ressort d'une copie d'écran que le 24 octobre 2006, Claude X... a demandé la conversion de points MEMBERSHJP REWARDS, pour obtenir une prime sous la forme de miles AIR FRANCE/ KLM; que le choix de cette prime suppose nécessairement l'accès au guide MEMBERSHIP REWARDS de l'année concernée 2006/2007 qui comporte les conditions générales en vigueur ; qu'il est ainsi établi que Claude X... a eu connaissance des clauses qui y sont contenues ; qu'il s'ensuit que les conditions générales du programme MEMBERSH1P REWARDS lui sont opposables ; Que la clause résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des parties ne satisfera pas à son engagement ; que Claude X... conteste les conditions d'annulation des deux cartes de paiement ; qu'il ressort des pièces versées aux débats que si, après plusieurs rejets de paiement, sur la carte Platinium courant février, mars, avril et mai 2007 et sur la carte Centurion, en avril et mai 2007, le compte de Claude X... est redevenu créditeur en juillet 2007, il présentait un solde débiteur le 6 novembre, le 6 décembre 2007 et le 7 février 2008 ; que, par lettre recommandée avec avis de réception du 13 mai 2008, la société AMERICAN EXPRESS a, en vain, mis en demeure Claude X... de lui régler la somme de 2.490,24 € représentant les impayés de ses comptes cartes ; que par ordonnance du 4juillet 2008, la juridiction de proximité de Pans 9ème a enjoint Claude X... de payer à la société AMERICAN EXPRESS la somme globale de 2.490,24 € ; que par jugement du 2 juin 2009, la juridiction de proximité a reçu Claude X... en son opposition et l'a condamné à payer à la société AMERICAN EXPRESS la somme de 2.383 € avec intérêts au taux légal à compter du 5 juillet 2008, celle de 107,24 € au titre de la clause pénale et celle de 1.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; qu'il n'est pas contesté que ce jugement est devenu définitif ; qu'en outre, l'article 7 des conditions générales d'utilisation prévoit que : « La carte reste notre propriété. Nous pouvons à tout moment vous en demander la restitution sans avoir à motiver notre décision. Vous devrez alors nous restituer la carte ou la restituer à tout établissement affilié ou toute personne qui vous en ferait la demande sur nos instructions » ; que Claude X... ne remet pas en cause la validité de cette clause ; la société AMERICAN EXPRESS était donc bien fondée, au regard des quatre rejets de prélèvements consécutifs sur les comptes cartes de Claude X..., qui n'ont été régularisés qu'au mois de juillet 2007, de demander la restitution des cartes ; qu'il s'ensuit que l'annulation des cartes de paiement, ensuite des rejets de prélèvements, a emporté perte des points accumulés sur les comptes cartes ouverts » ;
ALORS, de première part, QU'en retenant que le choix de Monsieur X... de demandé la conversion de points Membership rewards en prime sous la forme de Miles Air France/KLM « suppose nécessairement » l'accès au guide de l'année 2006/2007 qui comporte les conditions générales en vigueur pour en déduire qu'il en aurait eu connaissance, la Cour d'appel, qui a statué par un motif purement hypothétique, a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, de deuxième part, QU'il appartient à celui qui se prévaut de conditions générales de rapporter la preuve que celles-ci ont été connues et acceptées par son contractant au moment de la conclusions du contrat ; qu'en retenant que le choix de Monsieur X... de demander la conversion de points Membership rewards en prime sous la forme de Miles Air France/KLM suppose nécessairement l'accès au guide de l'année 2006/2007 qui comporte les conditions générales en vigueur, la Cour d'appel, qui a statué par un motif impropre à établir que la société AMERICAN EXPRESS avait rapporté la preuve, qui lui incombait, de ce qu'elle avait porté les conditions générales de vente à la connaissance de Monsieur X... au moment de la conclusion du contrat, ce qu'il contestait, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1315 du Code civil, ensemble les articles 1108 et 1134 du Code civil ;
ALORS, de troisième part, QUE les conditions générales de vente ne sont opposables à une partie que dans la mesure où elles ont été portées à sa connaissance et acceptées par elle au moment de la conclusion du contrat, lequel doit y faire référence directement ou indirectement ; qu'en se bornant à retenir que Monsieur X... a eu connaissance des conditions générales en vigueur, sans constater qu'il les aurait acceptées, au plus tard moment de la formation du contrat, lequel n'y faisait pas référence directement ou indirectement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1108 et 1134 du Code civil ;
ALORS, de quatrième part, subsidiairement, QUE la résiliation unilatérale du contrat n'est possible qu'autant que le comportement du débiteur est suffisamment grave pour justifier une telle sanction ; qu'en se fondant sur les rejets de paiement réalisés entre février et mai 2007 après avoir constaté que ceux-ci avaient été régularisés en juillet 2007, ce dont il résultait qu'au mois d'octobre 2007, Monsieur X... n'avait commis aucun manquement susceptible de justifier l'annulation par la banque de ses deux cartes bancaires, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé l'article 1184 du Code civil ;
ALORS, de cinquième part, tout aussi subsidiairement, QUE la résiliation unilatérale du contrat n'est possible qu'autant que le comportement du débiteur est suffisamment grave pour justifier une telle sanction ; que des manquements postérieurs ne peuvent rétrospectivement justifier la résiliation unilatérale du contrat ; qu'en se fondant sur les incidents de paiement intervenus les 6 novembre, 6 décembre 2007 et 7 février 2008, postérieurement à l'annulation des cartes bancaires survenue au mois d'octobre 2007, la Cour d'appel a, de plus fort, violé l'article 1184 du Code civil ;
ALORS, de sixième part, plus subsidiairement encore, QUE M. X... faisait valoir que la Banque ne pouvait se prévaloir de l'article 7 des conditions générales du programme de fidélité qu'elle a fait jouer de mauvaise foi en procédant à l'annulation des deux cartes bancaires sans mise en demeure préalable (Conclusions, pp. 8-9) ; qu'en ne répondant pas à ce moyen opérant des conclusions, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs et méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.