LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 11 mai 2010) que M. X... a été engagé le 18 octobre 1982 en qualité d'infirmier par le Centre hospitalier Saint-Jean de Dieu, qui est soumis à la convention collective nationale de l'hospitalisation privée à but non lucratif du 31 octobre 1951, dite de la FEHAP ; que par note de service du 25 janvier 1993, l'employeur a réduit à 35 heures la durée hebdomadaire de travail des personnels du service infirmier de nuit, par diminution de la durée quotidienne de travail de 9 heures 45 à 9 heures 30, et attribution de jours de repos s'ajoutant aux congés payés et jours fériés, et compensant la durée des nuits de travail pour atteindre une moyenne de 35 heures hebdomadaires de travail ; qu'un accord d'entreprise du 18 janvier 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail (ARTT), excluant de son champ d'application les personnels affectés aux services de nuit, a prévu, dans la majorité des situations, que la durée hebdomadaire de travail serait réduite à 37 heures, avec 12 jours de réduction du temps de travail par an : qu'une note de service n° 22.2000 du 21 septembre 2000, relative aux modalités du passage effectif aux 35 heures a mentionné notamment, pour les roulements, la nécessaire planification annuelle prévisionnelle des jours de réduction du temps de travail ; que l'accord de branche n° 2002-01 du 17 avril 2002 (branche sanitaire, sociale et médico-sociale à but non lucratif) visant à mettre en place le travail de nuit, a été agréé par arrêté du 23 juin 2003 et étendu par arrêté du 3 février 2004 ; qu'il prévoit notamment, à compter du 1er janvier 2004, des contreparties de la sujétion de travail de nuit sous forme d'octroi d'un certain nombre de jours de repos par an ; qu'une note de service n° 09-2005 du 2 juin 2005 relative au temps de travail des personnels affectés au service infirmier de nuit, remplaçant celle de 1993, a fixé à 9 heures 36 le temps de travail quotidien pour les personnels soignants, selon l'horaire de 20 heures 39 à 6 heures 15, et à 35 heures en moyenne sur un cycle de 8 semaines la durée hebdomadaire de travail de ces personnels ; que le même texte a prévu en outre que, pour tenir compte de la fatigue liée aux 9 heures 36 de travail de nuit, les infirmiers de nuit disposeraient de "jours de repos aménagé" (JRA) au sein de la semaine de travail afin de ne pas dépasser les 35 heures ; que critiquant le fait que désormais l'employeur déduisait de ses congés payés annuels les JRA qui y étaient accolés, alors que dans la même situation les JRTT des infirmiers de jour n'étaient pas décomptés comme congés annuels, le salarié, infirmier de nuit soutenu par les syndicats C.G.T. et SUD, a saisi la juridiction prud'homale le 15 juin 2007 pour contester les modalités de décompte des congés payés et des jours fériés ;
Sur le moyen unique, en ce qu'il est dirigé contre les chefs de l'arrêt ayant débouté les syndicats SUD et CGT de leurs demandes de dommages-intérêts pour déloyauté de l'employeur :
Attendu que le salarié ne justifiant ni d'un intérêt personnel ni d'une qualité à agir à la place des syndicats, qui avaient présenté des demandes distinctes des siennes, le moyen est irrecevable ;
Sur le moyen unique en ce qu'il est dirigé contre des chefs de l'arrêt concernant les propres demandes du salarié :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de juger qu'il n'existe pas d'inégalité de traitement entre les infirmiers de jour et les infirmiers de nuit au regard du décompte des jours de congés payés, et de le débouter en conséquence de ses demandes de rappel de salaire à ce titre ainsi que de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et congés, alors, selon le moyen :
1°/ que si l'employeur peut accorder des avantages particuliers à certains salariés, c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique au regard de l'avantage octroyé puissent en bénéficier ; qu'en l'espèce, la cour d'appel avait constaté que les infirmiers de nuit bénéficiaient de jours de repos aménagés destinés à répartir les heures de travail à l'intérieur d'un module de 28 semaines pour atteindre une moyenne de 35 heures hebdomadaires, tandis que les infirmiers de jour bénéficiaient d'un jour de réduction du temps de travail à la quatorzaine, soit 24 jours annuels, destinés à compenser les heures de travail accomplies au-delà de la durée légale dans un cycle de 10 semaines ; que les premiers se voyaient décompter en jours de congés payés les jours de repos aménagés, tandis que les jours de réduction du temps de travail des seconds s'ajoutaient à leurs jours de congés payés ; qu'il résultait de telles constatations qu'au regard de l'avantage accordé - l'octroi de jours de congés payés -, les deux catégories de salariés - infirmiers de jour ou infirmiers de nuit - étaient dans une situation identique, dès lors qu'il s'agissait pour eux de définir des règles de décompte des jours destinés à compenser les heures de travail effectuées au-delà de la durée légale avec leur jours de congés payés ; qu'en estimant pourtant que l'adoption de modalités distinctes de calcul des congés payés pour les infirmiers de jours et ceux de nuit ne procédait pas d'une différence de traitement, au motif erroné, au regard de l'avantage octroyé, que les jours de repos aménagé n'avaient pas le même objet que les jours de réduction du temps de travail, la cour d'appel a violé la règle «à travail égal, salaire égal» énoncée par les articles L. 2261-22 II 4 et L. 2271-1 8° du code du travail et ensemble l'article 09.02.01 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, l'article 5 de l'accord de branche visant à mettre en place le travail de nuit et l'article 1.1 de l'accord d'entreprise relatif à l'aménagement du temps de travail au centre hospitalier Saint-Jean de Dieu ;
2°/ Qu'aux termes de l'article L. 3141-5 du code du travail, sont considérées comme périodes de travail effectif pour la détermination de la durée du congé payé les jours de repos acquis au titre de la réduction du temps de travail ; qu'en considérant que les jours de repos aménagés programmés ne devaient pas être considérés comme périodes de travail effectif, tout en ayant relevé que les jours de repos aménagés étaient destinés à répartir les heures de travail à l'intérieur d'un module de 28 semaines pour atteindre une moyenne de 35 heures hebdomadaires, ce dont il résultait qu'il s'agissait bien de jours de réduction du temps de travail devant être considérés comme du temps de travail effectif, la cour d'appel a violé ensemble l'article L. 3141-5 du code du travail, l'article 5 de l'accord de branche visant à mettre en place le travail de nuit et l'article 1.1 de l'accord d'entreprise relatif à l'aménagement du temps de travail au centre hospitalier Saint-Jean de Dieu ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les jours de repos aménagé (JRA) et les jours de réduction du temps de travail (JRTT) n'avaient ni le même objet, ni la même nature, ni la même finalité ni le même régime, les premiers ne correspondant pas à du temps de travail effectif mais visant à répartir des heures de travail au sein d'un cycle de huit semaines, alors que les seconds constituaient la contrepartie d'un travail supérieur à 35 heures hebdomadaires, en sorte que les infirmiers de nuit et les infirmiers de jour ne se trouvant pas dans une situation identique au regard du mode de décompte des congés payés, la règle "à travail égal, salaire égal" invoquée n'était pas opérante, la cour d'appel n'encourt pas les griefs du moyen ;
PAR CES MOTIFS :
Déclare le pourvoi irrecevable en ce qu'il est dirigé contre les chefs de l'arrêt déboutant les syndicats SUD et CGT de leurs demandes de dommages-intérêts pour déloyauté de l'employeur ;
LE REJETTE pour le surplus.
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes des parties ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre avril deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils pour M. X..., le syndicat Sud santé sociaux du Rhône et le syndicat Cgt de l'hôpital Saint-Jean de Dieu
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé qu'il n'existait pas d'inégalité de traitement entre les infirmiers de jours et les infirmiers de nuit au regard du décompte des jours de congés payés, d'AVOIR en conséquence débouté M. X... de ses demandes de rappel de salaire à ce titre, de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et congés non pris et de dommages-intérêts au titre de l'article 700 du code de procédure civile et d'AVOIR également débouté les syndicats SUD et CGT de leurs demandes de dommages-intérêts pour déloyauté de l'employeur et au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
AUX MOTIFS QUE selon l'article 09.02.1 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, les salariés bénéficient chaque année d'un congé payé dont la durée est déterminée à raison de deux jours et demi ouvrables par mois de travail sans que la durée totale du congé exigible puisse excéder trente jours ouvrables ; qu'il est possible de convertir le décompte des congés payés en jours ouvrés ; que sont des jours ouvrés pour le calcul des congés payés les jours normalement travaillés dans l'entreprise, et non les seuls jours où le salarié aurait effectivement travaillé s'il avait été présent ; que le décompte en jours de congés payés des jours de repos aménagé inclus dans une période de congés n'est que l'application de cette règle générale qui assure l'égalité entre les salariés, quelle que soit la répartition de leurs heures de travail entre les jours de la semaine ; qu'au regard du principe d'égalité de traitement, les personnels du service infirmier de nuit, dont la durée hebdomadaire du travail, devait être ramenée à 35 heures au plus tard le 31 décembre 1993, en application de l'avenant du 16 février 1993 conclu dans le cadre des accords dits «protocole Durieux» et repris à l'article 05.04.2 de la convention collective applicable, et qui bénéficient en outre de deux jours de repos de compensation en contrepartie de la sujétion de travail de nuit (article 5 de l'accord de branche du 17 avril 2002) ne se trouvent pas dans une situation comparable à celle des infirmiers et aides soignants en roulement intra-hospitalier de jour dont la durée du travail a été réduite en application de l'accord d'entreprise du 18 janvier 2000, par l'octroi d'un jour de réduction du temps de travail à la quatorzaine, inclus dans les roulements ; que l'inclusion des jours de réduction du temps de travail dans les plannings prévisionnels de certaines catégories de personnels entrant dans le champ d'application de cet accord est insuffisante à elle seule pour permettre d'assimiler, pour le décompte des congés payés, ces jours de réduction du temps de travail aux «jours de repos aménagé» inclus dans les plannings des personnels du service infirmier de nuit ; qu'en effet, les «jours de repos aménagé», dont la dénomination a obscurci les termes de la comparaison, ont une fonction de répartition des heures de travail à l'intérieur d'un module de huit semaines pour atteindre une moyenne de trentecinq heures hebdomadaires ; que les vingt-quatre jours annuels de réduction du temps de travail des personnels soignants de jour en roulement ont une fonction de compensation des heures de travail accomplies au-delà de la durée légale dans un cycle de dix semaines ; que seuls ces derniers sont acquis, et considérés comme période de travail effectif pour la durée des congés payés en application de l'article L. 3141-5 du code du travail ; que si, en cas de congé de maladie, les jours de repos aménagé programmés sont perdus et les jours de réduction du temps de travail conservés, ces derniers donnent lieu ensuite à une compensation de la part du salarié, ce qui exclut tout caractère forfaitaire ; que les avantages comparés par l'intimé ne sont pas identiques, ce qui conduit à écarter le manquement allégué au principe de l'égalité de traitement entre les salariés travaillant de nuit et ceux travaillant de jour ; que, sur l'inégalité de traitement alléguée entre salariés travaillant de nuit, la situation décrite par Bernard X... à la page 13 de ses conclusions n'est que l'effet indirect de l'usage que font les salariés d'une mesure qui n'implique en elle-même, de la part de l'employeur, aucune différence entre les salariés concernés quant au nombre de nuits travaillées chaque année ; qu'elle ne saurait ouvrir droit à réparation ; que, sur la prétendue méconnaissance des dispositions légales et conventionnelles sur le travail de nuit, Bernard X... reconnaît que les plannings communiqués prévoient qu'un salarié travaillant deux nuits de suite observe les horaires suivants : de 20 heures 39 à 6 heures 15 (1ère nuit), de 20 heures 39 à 6 heures 15 (2ème nuit), chaque nuit de travail étant ainsi séparée par un repos quotidien de 14 heures et 24 minutes ; qu'il est ainsi satisfait aux prescriptions de l'article 3 de l'accord de branche du 17 avril 2002 sur le travail de nuit, aux termes duquel : «La durée maximale quotidienne est portée de 8 heures à 12 heures par dérogation à l'article L. 213-3 du code du travail ; en contrepartie, lorsque la durée dépasse 8 heures, les salariés bénéficieront d'un repos équivalent à la durée du dépassement ; ce temps de repos s'additionnera soit au temps de repos quotidien de 11 heures prévu par l'article L. 220-1 du code du travail, soit au repos hebdomadaire ; que, sur la prétendue méconnaissance des dispositions légales et conventionnelles sur les congés payés, que s'il résulte des dispositions de l'article L. 3141-3 du code du travail que les congés payés se décomptent en jours, les bulletins de paie de Bernard X... portent mention du nombre de jours de congés payés acquis et pris ; que le tableau contenu dans la note de service du 2 juin 2005 n'a pas pour objet de décompter les droits individuels des salariés de nuit aux congés payés, mais de calculer le nombre de nuits qu'ils auraient en moyenne à travailler chaque année ; qu'en conséquence, le jugement entrepris sera infirmé dans ses dispositions relatives aux rappel de congés payés ; que le Centre hospitalier Saint-Jean de Dieu n'a pas manqué à l'obligation d'exécuter de bonne foi de contrat de travail de Bernard X... ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts.
ALORS QUE si l'employeur peut accorder des avantages particuliers à certains salariés, c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique au regard de l'avantage octroyé puissent en bénéficier ; qu'en l'espèce, la cour d'appel avait constaté les infirmiers de nuit bénéficiaient de jours de repos aménagés destinés à répartir les heures de travail à l'intérieur d'un module de 28 semaines pour atteindre une moyenne de 35 heures hebdomadaires, tandis que les infirmiers de jour bénéficiaient d'un jour de réduction du temps de travail à la quatorzaine, soit 24 jours annuels, destinés à compenser les heures de travail accomplies au-delà de la durée légale dans un cycle de 10 semaines ; que les premiers se voyaient décompter en jours de congés payés les jours de repos aménagés, tandis que les jours de réduction du temps de travail des seconds s'ajoutaient à leurs jours de congés payés ; qu'il résultait de telles constatations qu'au regard de l'avantage accordé - l'octroi de jours de congés payés -, les deux catégories de salariés - infirmiers de jour ou infirmiers de nuit - étaient dans une situation identique, dès lors qu'il s'agissait pour eux de définir des règles de décompte des jours destinés à compenser les heures de travail effectuées au-delà de la durée légale avec leur jours de congés payés ; qu'en estimant pourtant que l'adoption de modalités distinctes de calcul des congés payés pour les infirmiers de jours et ceux de nuit ne procédait pas d'une différence de traitement, au motif erroné, au regard de l'avantage octroyé, que les jours de repos aménagé n'avaient pas le même objet que les jours de réduction du temps de travail, la cour d'appel a violé la règle «à travail égal, salaire égal» énoncée par les articles L. 2261-22 II 4 et L. 2271-1 8° du code du travail et ensemble l'article 09.02.01 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, l'article 5 de l'accord de branche visant à mettre en place le travail de nuit et l'article 1.1 de l'accord d'entreprise relatif à l'aménagement du temps de travail au centre hospitalier SAINT-JEAN DE DIEU.
ALORS encore QU'aux termes de l'article L. 3141-5 du code du travail, sont considérées comme périodes de travail effectif pour la détermination de la durée du congé payé les jours de repos acquis au titre de la réduction du temps de travail ; qu'en considérant que les jours de repos aménagés programmés ne devaient pas être considérés comme périodes de travail effectif, tout en ayant relevé que les jours de repos aménagés étaient destinés à répartir les heures de travail à l'intérieur d'un module de 28 semaines pour atteindre une moyenne de 35 heures hebdomadaires, ce dont il résultait qu'il s'agissait bien de jours de réduction du temps de travail devant être considérés comme du temps de travail effectif, la cour d'appel a violé ensemble l'article L. 3141-5 du code du travail, l'article 5 de l'accord de branche visant à mettre en place le travail de nuit et l'article 1.1 de l'accord d'entreprise relatif à l'aménagement du temps de travail au centre hospitalier SAINT-JEAN DE DIEU.