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12/03/2013 | FRANCE | N°12-11514

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 mars 2013, 12-11514


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 octobre 2011) et les productions, que M. X... était directeur technique et commercial de la société par actions simplifiée Pharmaconsult (la société) dont le président et unique actionnaire était Mme Y... ; qu'il a été licencié pour motif économique le 10 septembre 2004 ; que la société a été ultérieurement mise en liquidation judiciaire ; qu'un arrêt irrévocable du 5 décembre 2007 a fixé au passif de la société les sommes due

s à M. X... au titre de l'intéressement de l'année 2003 et de l'indemnité compensa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 octobre 2011) et les productions, que M. X... était directeur technique et commercial de la société par actions simplifiée Pharmaconsult (la société) dont le président et unique actionnaire était Mme Y... ; qu'il a été licencié pour motif économique le 10 septembre 2004 ; que la société a été ultérieurement mise en liquidation judiciaire ; qu'un arrêt irrévocable du 5 décembre 2007 a fixé au passif de la société les sommes dues à M. X... au titre de l'intéressement de l'année 2003 et de l'indemnité compensatrice de la clause de non-concurrence ; que reprochant à Mme Y... d'avoir commis une faute personnelle détachable de ses fonctions de dirigeant en détournant à son profit les sommes qui auraient dû lui revenir, M. X... l'a fait assigner en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la responsabilité personnelle d'un dirigeant peut être engagée à l'égard des tiers s'il a commis une faute séparable de ses fonctions ; qu'il en est ainsi lorsque, même agissant dans les limites de ses attributions, il commet intentionnellement une faute d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions ; que dès lors, en retenant que le fait que la décision reprochée à Mme Y... ait été prise «au nom et pour le compte de la société», empêchait par principe qu'elle puisse constituer une faute détachable de ses fonctions de dirigeant, la cour d'appel a violé l'article 1850 du code civil, ensemble les articles L. 225-251 et L. 227-8 du code de commerce ;
2°/ que la responsabilité personnelle d'un associé peut être engagée à l'égard des tiers s'il a commis une faute séparable de ses fonctions ; qu'il en est ainsi lorsque, même agissant dans les limites de ses pouvoirs, il commet intentionnellement une faute d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions ; que dès lors, en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si Mme Y... n'avait pas commis une faute détachable de ses fonctions d'associée en votant le 30 juin 2004 une distribution de dividendes à son profit d'un montant de 260 000 euros, accaparant ainsi des sommes qu'elle savait dues à M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
3°/ qu'en cause d'appel, M. X... faisait valoir que Mme Y... avait commis une faute personnelle séparable de ses fonctions, en détournant sciemment à son bénéfice des sommes qu'elle savait être déjà acquises à son salarié au titre de la part variable de sa rémunération pour l'année 2003, et en persistant à l'empêcher de percevoir les sommes dues à ce titre ; qu'elle avait procédé par plusieurs manoeuvres, consistant à opérer une distribution de dividendes à son profit d'un montant de 260 000 euros le 30 juin 2004, à empêcher jusqu'au 19 novembre 2004 son salarié de prendre connaissance des résultats de l'année 2003 – ce que corroborait l'attestation de Mme Z... produite aux débats –, à cesser dès le mois de décembre 2004 toute activité de la société Pharmaconsult, et à refuser pendant deux ans de régler les sommes dues à M. X... ; qu'elle avait agi intentionnellement, connaissant dès le 31 décembre 2003 le montant des sommes dues au titre de la part variable de la rémunération du salarié ; que dès lors, en s'abstenant de rechercher s'il ne résultait pas de l'ensemble de ces éléments que Mme Y..., même agissant dans les limites de ses attributions, avait commis une faute intentionnelle d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions sociales, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1850 du code civil, ensemble les articles L. 225-251 et L. 227-8 du code de commerce ;
4°/ qu'en cause d'appel, M. X... faisait valoir que Mme Y... avait commis une faute personnelle séparable de ses fonctions, en détournant sciemment à son bénéfice des sommes que M. X... pouvait revendiquer au titre de l'indemnité de non-concurrence, et en persistant à l'empêcher de percevoir les sommes dues à ce titre ; qu'elle avait procédé par plusieurs manoeuvres, consistant à opérer une distribution de dividendes à son profit d'un montant de 260 000 euros le 30 juin 2004, à empêcher son salarié de prendre connaissance des résultats de l'année 2003 jusqu'au 19 novembre 2004 – soit deux mois après le fait générateur de l'indemnité de non-concurrence –, à cesser dès le mois de décembre 2004 toute activité de la société Pharmaconsult, et à refuser pendant deux ans de régler les sommes dues à M. X... ; qu'elle avait agi intentionnellement, puisqu'elle connaissait pertinemment l'existence de la clause de non-concurrence, et qu'elle savait que le fait générateur de l'indemnité de non-concurrence était intervenu dès le 10 septembre 2004 ; que dès lors, en s'abstenant de rechercher s'il ne résultait pas de l'ensemble de ces éléments que Mme Y... avait commis une faute intentionnelle d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions sociales, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1850 du code civil, ensemble les articles L. 225-251 et L. 227-8 du code de commerce ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt se borne à retenir que la décision de distribution de dividendes, prise au nom et pour le compte de la personne morale, ne constitue pas en elle-même une faute détachable des fonctions de dirigeant, même si elle est intervenue en faveur de l'associée unique ; qu'il ne dit pas que le fait que cette décision soit prise au nom et pour le compte de la personne morale fait obstacle par principe à ce qu'elle puisse constituer une faute du dirigeant détachable de ses fonctions ;
Et attendu, en second lieu, que l'arrêt retient que l'allégation de manoeuvres intentionnelles destinées à dissimuler le bénéfice au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2003 est inopérante, les comptes annuels ayant été déposés au registre du commerce où ils sont consultables par toute personne en formant la demande, peu important qu'ils l'aient été après l'expiration du délai légal ; qu'il retient encore que l'attestation d'une autre salariée faisant état du refus de la comptable de communiquer des informations sur la convention collective ou sur le bilan de l'exercice 2003 à la suite de recommandations de Mme Y... ne suffit pas à constituer une réticence dolosive de nature à caractériser une faute détachable des fonctions de dirigeant, en l'absence de toute demande écrite que M. X... aurait adressée à cette dernière relativement à son intéressement au bénéfice pour l'année 2003 ; qu'en l'état de ces appréciations souveraines desquelles elle a pu déduire que Mme Y... n'avait commis aucune faute détachable de ses fonctions de dirigeant, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche visée par la troisième branche et qui n'avait pas à faire d'autres recherches, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer la somme de 2 500 euros à Mme Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze mars deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour M. X....
L EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté M. X... de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE « M. X... ne se prévaut au titre de la faute qu'il allègue que d'une distribution de dividendes intervenue au profit de l'associée unique, actée par procès-verbal de décision du 30 juin 2004, faisant ressortir, pour l'exercice 2003, une somme totale distribuable de 402.583,76 € qui a été affectée comme suit : 260.000 € en distribution de dividendes, 142.000 € affectés au poste autre réserve, et 583,76 € affectés au poste report à nouveau – soit, comme le soutient l'appelante dans ses dernières écriture, une décision prise au nom et pour le compte de la personne morale, peu important que la société ne comporte qu'une seule personne physique ; qu'aucune faute détachable des fonctions de dirigeant ne saurait dès lors être reprochée à Mme Y..., étant à cet égard observé que l'allégation de manoeuvres intentionnelles destinées à dissimuler le bénéfice au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2003 est inopérante, les comptes annuels ayant été déposés au registre du commerce, où ils sont consultables par toute personne en formant la demande, peu important, en l'espèce, qu'ils l'aient été passé le délai, prévu par l'article L 223-31 du Code de commerce, de six mois à compter de la clôture de l'exercice, soit le 15 novembre 2004 ; que pas davantage l'attestation d'une autre salariée de la pharmacie, versée aux débats par M. X..., faisant état du refus de la comptable de communiquer des informations sur la convention collective ou sur le bilan de l'exercice 2003 à la suite de recommandations de Mme Y..., ne suffit à caractériser une réticence dolosive de nature à caractériser une faute détachable des fonctions de dirigeant, en l'absence de toute demande écrite que M. X... aurait adressée à cette dernière, durant l'année 2004 et jusqu'à la date de son licenciement le 10 septembre 2004, relativement à son intéressement au bénéfice pour l'année 2003 ; qu'aussi, en l'absence de toute faute détachable de ses fonctions de dirigeant, est-ce à tort que les premiers juges ont retenu la responsabilité personnelle de Mme Y... ;que le jugement sera dès lors infirmé en toutes ses dispositions et M. X... débouté de ses demandes» ;
ALORS, DE PREMIERE PART, QUE la responsabilité personnelle d'un dirigeant peut être engagée à l'égard des tiers s'il a commis une faute séparable de ses fonctions ; qu'il en est ainsi lorsque, même agissant dans les limites de ses attributions, il commet intentionnellement une faute d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions ;que dès lors, en retenant que le fait que la décision reprochée à Mme Y... ait été prise «au nom et pour le compte de la société», empêchait par principe qu'elle puisse constituer une faute détachable de ses fonctions de dirigeant, la Cour d'appel a violé l'article 1850 du Code civil, ensemble les articles L 225-251 et L 227-8 du Code de commerce ;
ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE la responsabilité personnelle d'un associé peut être engagée à l'égard des tiers s'il a commis une faute séparable de ses fonctions ; qu'il en est ainsi lorsque, même agissant dans les limites de ses pouvoirs, il commet intentionnellement une faute d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions ;que dès lors, en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si Mme Y... n'avait pas commis une faute détachable de ses fonctions d'associée en votant le 30 juin 2004 une distribution de dividendes à son profit d'un montant de 260.000 €, accaparant ainsi des sommes qu'elle savait dues à M. X..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QU'en cause d'appel, M. X... faisait valoir que Mme Y... avait commis une faute personnelle séparable de ses fonctions, en détournant sciemment à son bénéfice des sommes qu'elle savait être déjà acquises à son salarié au titre de la part variable de sa rémunération pour l'année 2003, et en persistant à l'empêcher de percevoir les sommes dues à ce titre ; qu'elle avait procédé par plusieurs manoeuvres, consistant à opérer une distribution de dividendes à son profit d'un montant de 260.000 € le 30 juin 2004, à empêcher jusqu'au 19 novembre 2004 son salarié de prendre connaissance des résultats de l'année 2003 – ce que corroborait l'attestation de Mme Z... produite aux débats (production n° 5) –, à cesser dès le mois de décembre 2004 toute activité de la société PHARMACONSULT, et à refuser pendant deux ans de régler les sommes dues à M. X... ; qu'elle avait agi intentionnellement, connaissant dès le 31 décembre 2003 le montant des sommes dues au titre de la part variable de la rémunération du salarié ; que dès lors, qu'en s'abstenant de rechercher s'il ne résultait pas de l'ensemble de ces éléments que Mme Y..., même agissant dans les limites de ses attributions, avait commis une faute intentionnelle d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions sociales, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1850 du Code civil, ensemble les articles L 225-251 et L 227-8 du Code de commerce ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QU'en cause d'appel, M. X... faisait valoir que Mme Y... avait commis une faute personnelle séparable de ses fonctions, en détournant sciemment à son bénéfice des sommes que M. X... pouvait revendiquer au titre de l'indemnité de non-concurrence, et en persistant à l'empêcher de percevoir les sommes dues à ce titre ; qu'elle avait procédé par plusieurs manoeuvres, consistant à opérer une distribution de dividendes à son profit d'un montant de 260.000 € le 30 juin 2004, à empêcher son salarié de prendre connaissance des résultats de l'année 2003 jusqu'au 19 novembre 2004 – soit deux mois après le fait générateur de l'indemnité de non-concurrence –, à cesser dès le mois de décembre 2004 toute activité de la société PHARMACONSULT, et à refuser pendant deux ans de régler les sommes dues à M. X... ; qu'elle avait agi intentionnellement, puisqu'elle connaissait pertinemment l'existence de la clause de non-concurrence, et que le fait générateur de l'indemnité de non-concurrence était intervenu dès le 10 septembre 2004 ; que dès lors, en s'abstenant de rechercher s'il ne résultait pas de l'ensemble de ces éléments que Mme Y... avait commis une faute intentionnelle d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions sociales, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1850 du Code civil, ensemble les articles L 225-251 et L 227-8 du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-11514
Date de la décision : 12/03/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 25 octobre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 mar. 2013, pourvoi n°12-11514


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.11514
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