LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 octobre 2011), que, le 3 mars 1998, M. X... dit Y... (M. Y...) a signé une convention d'ouverture de compte auprès de la banque Hervet devenue HSBC France (la banque) ; que, reprochant à celle-ci d'avoir effectué, les 18 février et 1er mars 2000, des opérations sans instructions écrites de sa part, M. Y... l'a fait assigner en réparation des pertes réalisées ;
Attendu que M. Y... reproche à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes alors, selon le moyen :
1°/ qu'en vertu de l'article 1147 du code civil, le prestataire de services d'investissement est tenu d'exercer son activité avec la compétence, le soin et la diligence qui s'imposent, au mieux des intérêts de ses clients et de l'intégrité du marché, ainsi que de se conformer à toutes les réglementations applicables à l'exercice de son activité de manière à promouvoir au mieux les intérêts de son client et l'intégrité du marché ; que l'article 2-4-12 du règlement général du conseil des marchés financiers (CMF) applicable en l'espèce, précise que lorsqu'ils exercent une activité de réception et transmission d'ordres pour le compte de tiers, d'exécution d'ordres pour le compte de tiers ou de compensation, les prestataires habilités établissent avec chacun de leurs donneurs d'ordres une convention de services écrite. Les clauses obligatoires contenues dans cette convention sont fixées par une décision du CMF ; que la décision n° 98-28 du CMF prévoit en son article 3 que le contrat doit comporter notamment « les caractéristiques des ordres susceptibles d'être adressés au prestataire habilité », « le mode de transmission des ordres », « le contenu et les modalités d'information du donneur d'ordre sur la réalisation de la prestation », « le délai dont dispose le donneur d'ordre pour contester les conditions d'exécution de la prestation » ; que dès lors, en l'espèce, la cour d'appel qui a relevé que la convention d'ouverture de compte ne comportait aucune stipulation concernant les modalités de transmission des ordres de bourse, et qui n'en a pas déduit la responsabilité de la banque, a violé les textes susvisés ;
2°/ qu'en vertu de l'article 1341 du code civil, la preuve d'un ordre de bourse passé par un client non commerçant doit se faire par écrit, dès lors qu'elle dépasse une valeur de 1 500 euros ; que dès lors en l'espèce, en admettant que la preuve des ordres de bourses avait été faite à l'encontre de M. Y..., alors qu'aucun écrit n'était produit à son encontre et que la valeur dépassait 1 500 euros, la cour d'appel a violé l'article 1341 du code civil ;
3°/ que le silence gardé à la réception d'avis d'opéré ne peut entraîner, selon les circonstances, qu'une présomption d'existence de l'opération, mais n'interdit pas de contester les pouvoirs de la banque pour passer l'ordre au nom de son client ; que dès lors, à supposer que M. Y... ait reçu les bordereaux ou avis d'opéré sans les contester, la cour d'appel ne pouvait pas déduire de cette seule réception sans réserve que la banque n'avait pas outrepassé ses pouvoirs en achetant plus d'actions que ce qui lui était demandé ; qu'en statuant ainsi elle a violé l'article 1134 du code civil ;
4°/ que M. Y... avait insisté dans ses conclusions sur l'incohérence qu'il y aurait eu à passer deux ordres le même jour et à n'en confirmer qu'un par écrit ; que la cour d'appel ne pouvait pas déduire l'ordre verbal de M. Y... de ce qu'il ne confirmait pas systématiquement par écrit, ses ordres verbaux, sans répondre aux conclusions qui soutenaient qu'il n'était pas cohérent de passer deux ordres le même jour pour les mêmes actions, et de n'en confirmer qu'un seul par écrit ; qu'en ne répondant pas à ses conclusions déterminantes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ qu'en se contentant d'affirmer que M. Y... était un opérateur averti parce qu'il passait ses ordres de Londres, pour des opérations ponctuelles, ce qui dénote une connaissance certaine du fonctionnement de la bourse, sans rechercher si au moment de l'ouverture du compte, M. Y... suivait attentivement les évolutions des marchés financiers et en connaissait les risques, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que si la convention de compte-titre doit faire l'objet d'un écrit précisant notamment les modalités de transmission des ordres, le non-respect de cette exigence ne constitue pas, en lui-même, un fait engageant la responsabilité de l'intermédiaire ; qu'ayant retenu, par une appréciation rendue nécessaire par le silence de la convention d'ouverture de compte, que si celle-ci ne comportait aucune stipulation concernant les modalités de transmission des ordres de bourse, l'usage des parties était que les ordres soient passés par téléphone et qu'ils n'étaient pas systématiquement confirmés par écrit, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait sans encourir le grief de la première branche ;
Attendu, en deuxième lieu, qu'ayant relevé que M. Y... ne mentionnait pas dans ses écritures ne pas avoir reçu les bordereaux d'exécution des opérations litigieuses, pas plus qu'il n'en avait contesté le contenu, et qu'il ne contestait pas avoir reçu le relevé de son portefeuille-titres au 31 décembre 2000, lequel indiquait clairement le nombre d'actions acquises, ce qui n'avait alors entraîné aucune protestation de sa part, la cour d'appel, qui n'a pas dit que la preuve des ordres était faite, a pu en déduire, sans être tenue de suivre M. Y... dans le détail de son argumentation, que celui-ci ne rapportait pas la preuve, qui lui incombait, de l'absence d'ordre d'achat ;
Et attendu, enfin, que les opérations en cause ne présentant pas de caractère spéculatif, et la banque n'étant dès lors pas susceptible d'être tenue d'un devoir de mise en garde, la cinquième branche critique un motif surabondant ;
D'où il suit que le moyen qui manque en fait en sa deuxième branche et ne peut être accueilli en sa cinquième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... dit Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer la somme de 2 500 euros à la société HSBC France et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze février deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour M. Eric X... dit Y...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Eric X... dit Y... de son action en responsabilité contre la banque HSBC-HERVET, et de sa demande à ce que celle-ci lui paye la somme de 74. 292, 95 euros, outre intérêts ;
Aux motifs qu'« il est constant que la convention d ‘ ouverture de compte du 3 mars 1998 ne comporte aucune stipulation concernant les modalités de transmission des ordres de bourse ; que HSBC est fondée à soutenir que l'usage des parties, s'agissant de surcroît d'un investisseur averti, était que les ordres étaient passés par téléphone, et qu'ils n'étaient pas systématiquement confirmés par écrit ; qu'à cet égard, l'examen des copies des extraits de compte de M. Y... fait apparaître des opérations bancaires qui, même si elles n'étaient que ponctuelles, dénotent de la part de leur initiateur une connaissance certaine du fonctionnement de la bourse et du marché des changes ; que M. Y..., dirigeant de sociétés résidant à Londres lors des faits litigieux, passait des ordres de bourse à la banque, à partir de cette ville, ainsi qu'il ressort des lettres qu'il produit ; que le fait d'avoir confirmé par écrit certains ordres (c'est bien volontiers que je vous confirme … j'en profite pour vous confirmer …) implique que ceux-ci avaient été passés préalablement par voie verbale ; que cependant, il n'est pas patent à partir de ces courriers et des pièces versées aux débats, que la confirmation écrite par M. Y... de ses instructions verbales ait été systématique ; qu'il allègue ne s'être aperçu qu'à son retour de l'étranger, que la banque ne lui avait pas adressé ses relevés de compte de février et mars 2000 ; que toute transaction boursière donne lieu à l'envoi d'un bordereau d'exécution ; que M. Y... ne mentionne nullement dans ses écritures ne pas avoir reçu ces bordereaux, pas plus, comme le fait remarquer à juste titre HSBC, qu'il n'en a contesté le contenu ; au surplus, que M. Y... ne conteste pas avoir reçu le relevé de son portefeuille titres au 31 décembre 2000 (pièce 4. 6) ; que celui-ci indique de manière claire le nombre d'actions ACTIVCARD, soit 2950 actions, ce qui n'a alors entraîné aucune protestation de sa part ; qu'au regard de ces éléments, HSBC est fondée à soutenir que l'intéressé ne démontre pas l'absence d'ordre d'achat ; » (cf arrêt p. 4)
Alors, d'une part, qu'en vertu de l'article 1147 du code civil, le prestataire de services d'investissement est tenu d'exercer son activité avec la compétence, le soin et la diligence qui s'imposent, au mieux des intérêts de ses clients et de l'intégrité du marché, ainsi que de se conformer à toutes les réglementations applicables à l'exercice de son activité de manière à promouvoir au mieux les intérêts de son client et l'intégrité du marché ; que l'article 2-4-12 du Règlement général du Conseil des marchés financiers applicable en l'espèce, précise que lorsqu'ils exercent une activité de réception et transmission d'ordres pour le compte de tiers, d'exécution d'ordres pour le compte de tiers ou de compensation, les prestataires habilités établissent avec chacun de leurs donneurs d'ordres une convention de services écrite. Les clauses obligatoires contenues dans cette convention sont fixées par une décision du Conseil des Marchés Financiers. ; que la décision n° 98-28 du Conseil des marchés financiers prévoit en son article 3 que le contrat doit comporter notamment « les caractéristiques des ordres susceptibles d'être adressés au prestataire habilité », « le mode de transmission des ordres », « le contenu et les modalités d'information du donneur d'ordre sur la réalisation de la prestation », « le délai dont dispose le donneur d'ordre pour contester les conditions d'exécution de la prestation » ; que dès lors, en l'espèce, la Cour d'appel qui a relevé que la convention d'ouverture de compte ne comportait aucune stipulation concernant les modalités de transmission des ordres de bourse, et qui n'en a pas déduit la responsabilité de la banque, a violé les textes susvisés ;
Alors, d'autre part, qu'en vertu de l'article 1341 du code civil, la preuve d'un ordre de bourse passé par un client non commerçant doit se faire par écrit, dès lors qu'elle dépasse une valeur de 1500 euros ; que dès lors en l'espèce, en admettant que la preuve des ordres de bourses avait été faite à l'encontre de M. Y..., alors qu'aucun écrit n'était produit à son encontre et que la valeur dépassait 1500 euros, la Cour d'appel a violé l'article 1341 du code civil ;
Alors de troisième part qu'en tout état de cause, le silence gardé à la réception d'avis d'opéré ne peut entraîner, selon les circonstances, qu'une présomption d'existence de l'opération, mais n'interdit pas de contester les pouvoirs de la banque pour passer l'ordre au nom de son client ; que dès lors, à supposer que M. Y... ait reçu les bordereaux ou avis d'opéré sans les contester, la Cour d'appel ne pouvait pas déduire de cette seule réception sans réserve qu'HSBC n'avait pas outrepassé ses pouvoirs en achetant plus d'actions que ce qui lui était demandé ; qu'en statuant ainsi elle a violé l'article 1134 du code civil Alors de quatrième part, M. Y... avait insisté dans ses conclusions sur l'incohérence qu'il y aurait eu à passer deux ordres le même jour et à n'en confirmer qu'un par écrit ; que la Cour d'appel ne pouvait pas déduire l'ordre verbal de M. Y... de ce qu'il ne confirmait pas systématiquement par écrit, ses ordres verbaux, sans répondre aux conclusions qui soutenaient qu'il n'était pas cohérent de passer deux ordres le même jour pour les mêmes actions, et de n'en confirmer qu'un seul par écrit ; qu'en ne répondant pas à ses conclusions déterminantes, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
Alors enfin, qu'en tout état de cause, en se contentant d'affirmer que M. Y... était un opérateur averti parce qu'il passait ses ordres de Londres, pour des opérations ponctuelles, ce qui dénote une connaissance certaine du fonctionnement de la bourse, sans rechercher si au moment de l'ouverture du compte, M. Y... suivait attentivement les évolutions des marchés financiers et en connaissait les risques, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.