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24/01/2013 | FRANCE | N°11-22585

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 24 janvier 2013, 11-22585


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Versailles, 16 juin 2011), que la société OGF (la société) a saisi, le 11 juillet 2005, la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne (la caisse) d'une contestation de la durée des arrêts de travail que celle-ci avait pris en charge à la suite de l'accident du travail dont son salarié, M. X..., avait été victime, le 26 octobre 1998 ; que le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Marne ayant, par jugement définitif d

u 25 mai 2007, fixé la date de consolidation des blessures au 30 avril 19...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Versailles, 16 juin 2011), que la société OGF (la société) a saisi, le 11 juillet 2005, la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne (la caisse) d'une contestation de la durée des arrêts de travail que celle-ci avait pris en charge à la suite de l'accident du travail dont son salarié, M. X..., avait été victime, le 26 octobre 1998 ; que le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Marne ayant, par jugement définitif du 25 mai 2007, fixé la date de consolidation des blessures au 30 avril 1999 et écarté tout lien entre l'accident du travail et les arrêts de travail postérieurs, une caisse régionale d'assurance maladie a rectifié les taux de cotisations accidents du travail notifiés à la société pendant les années 2001 à 2007 ; que la société ayant déduit de ses versements à l'URSSAF de la Marne une somme correspondant au trop versé pendant cette période, l'URSSAF d'Eure-et-Loir a limité la compensation à la période triennale non prescrite, soit du 1er septembre 2004 au 31 décembre 2006, et lui a réclamé le paiement des cotisations de la période antérieure ; que la société, après avoir réglé la somme réclamée, a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande de remboursement en faisant valoir que le délai de prescription avait été interrompu par la saisine de la caisse primaire d'assurance maladie ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que si, en principe l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à l'autre, il en est autrement lorsque deux actions, quoique ayant des causes distinctes, tendent à un seul et même but, de telle sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première ; que lorsque la reconnaissance du caractère indu des cotisations accidents du travail versées par l'employeur nécessite que ce dernier conteste au préalable une décision d'une caisse de sécurité sociale, le délai de prescription de l'action en remboursement des cotisations indues fixées par l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale est nécessairement interrompu par l'exercice du recours contre la décision de la caisse qui a pour but de faire reconnaître le caractère indu des cotisations versées à la suite de cette décision ; qu'au cas présent, le recours exercé par la société OGF, le 11 juillet 2005, devant la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie de Reims tendait à ce que la durée des arrêts de travail pris en charge par la caisse au titre de l'accident du travail de M. X... soit réduite et que, par conséquent, les prestations indues soient écartées du calcul de ces taux de cotisations ; que ce recours de la société OGF avait pour but de faire recalculer ses taux de cotisations modifiés par les prestations indûment prises en charge par la caisse primaire d'assurance maladie et d'obtenir ainsi le remboursement des cotisations indûment versées ; que ce recours avait donc interrompu le cours de la prescription triennale, de sorte que la société OGF était en droit d'obtenir de l'URSSAF le remboursement des cotisations indûment versées postérieurement au 11 juillet 2002 ; qu'en refusant de considérer que le recours formé contre la décision de la caisse qui constituait le fait générateur des cotisations indûment versées avait interrompu le cours de la prescription triennale, la cour d'appel a violé les articles 2244 du code civil, dans sa rédaction en vigueur, L. 243-6 du code de la sécurité sociale et R. 142-1 du code de la sécurité sociale ;
2°/ que la caisse primaire d'assurance maladie, la caisse régionale d'assurance maladie, devenue la CARSAT, et l'URSSAF sont les composantes d'un même service public de la sécurité sociale dotées au sein de la branche "accidents du travail et maladies professionnelles" d'attributions légales complémentaires ; que l'URSSAF n'est pas un tiers par rapport aux caisses de sécurité sociale et n'en est que le mandataire légal substitué aux caisses pour le recouvrement des cotisations sociales ; qu'il en résulte que l'action exercée par une entreprise à l'encontre d'une décision de la caisse primaire d'assurance maladie, occasionnant des dépenses imputées sur le compte employeur et prises en compte pour le calcul de ces taux de cotisations, interrompt le cours de la prescription tant à l'égard des décisions de la CARSAT relatives à la détermination des taux de cotisations impactées par ses dépenses, qu'à l'égard des versements à l'URSSAF de cotisations calculées à partir de ces taux ; qu'en estimant que l'action exercée par la société OGF contre la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne n'avait pas interrompu le cours de la prescription, aux motifs que l'URSSAF est une "entité juridiquement autonome de caisses" et que la caisse primaire d'assurance maladie "ne dispose d'aucun pouvoir d'injonction ni à l'égard de la caisse régionale d'assurance maladie chargée de déterminer les taux de cotisations accidents du travail, ni à l'égard de l'URSSAF chargée d'en assurer le recouvrement", la cour d'appel s'est fondée sur des motifs inopérants, en violation des articles L. 213-1 et L. 243-6 du code de la sécurité sociale, ensemble de l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur ;
3°/ que l'article D. 242-6-3 avant-dernier alinéa du code de la sécurité sociale dispose que "l'ensemble des dépenses constituant la valeur du risque est pris en compte par les caisses primaires d'assurance maladie dès que ces dépenses leur ont été communiquées par les caisses primaires sans préjudice des décisions ultérieures" ; qu'il résulte de ce texte que l'exercice par l'employeur d'un recours à l'encontre de la décision de la caisse primaire n'est susceptible d'avoir aucune incidence immédiate sur la détermination du taux de cotisations accidents du travail par la caisse régionale et, par conséquent, sur le montant des cotisations à verser à l'URSSAF ; que, seule une décision de justice remettant en cause la décision de la CPAM est susceptible de produire des effets à l'égard de détermination du taux de cotisations accidents du travail par la caisse régionale et donc sur le montant des cotisations à verser à l'URSSAF ; qu'en outre, aucun texte ne fait obligation à l'employeur qui forme un recours contre la décision de la caisse primaire ayant occasionné des dépenses d'en informer la caisse régionale ; qu'en reprochant à la société OGF de ne pas avoir informé la caisse régionale de son recours exercé à l'encontre de la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne, la cour d'appel s'est fondée sur un motif erroné en violation des articles L. 243-6 et D. 242-6-3, dans sa rédaction alors en vigueur, du code de la sécurité sociale, ensemble de l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur ;
4°/ que l'employeur est légalement tenu de verser à l'URSSAF à échéance les cotisations accident du travail au taux qui lui a été notifié par la CARSAT, sous peine de verser d'importantes pénalités ; qu'il ne peut exercer de recours ni contre la décision de notification de taux de la CARSAT, ni contre le versement de cotisations à l'URSSAF tant qu'il n'a pas obtenu la remise en cause de la décision de la caisse primaire d'assurance maladie ayant généré des dépenses prises en compte pour le calcul de son taux de cotisations accidents du travail ; qu'au cas présent, avant d'être en mesure de faire valoir ses droits auprès de l'URSSAF d''Eure-et-Loir, la société OGF avait dû saisir la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie de Reims d'un recours contre la décision de cet organisme ayant généré des dépenses ; qu'elle a ensuite attendu deux mois pour se prévaloir d'une décision implicite de rejet et pouvoir saisir le tribunal des affaires de sécurité sociale ; que ce dernier a alors mis 21 mois pour statuer sur son recours ; qu'ayant obtenu un jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale faisant droit à son recours, elle avait alors dû solliciter immédiatement la CARSAT en vue d'une révision des taux de cotisations impactés par la décision de la caisse primaire d'assurance maladie et avait obtenu cette décision au bout de trois mois ; qu'au total, entre l'introduction de son recours devant la commission de recours amiable de la le 11 juillet 2005 et l'obtention de la révision de ses taux de cotisations par la CARSAT le 22 août 2007, la société OGF a dû attendre plus de deux ans avant d'être en mesure de justifier du caractère indu des cotisations versées depuis 2002 au titre de l'accident de M. X... ; qu'en estimant que le délai de prescription de l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale avait néanmoins continué à courir au cours de cette période, la cour d'appel a privé la société OGF de toute possibilité effective de récupérer des sommes indûment versées pendant plus de deux ans en violation des articles 1er du Protocole additionnel n 1 et 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu, en premier lieu, que la société n'avait pas soutenu, devant les juges du fond, que l'application de la prescription triennale la privait de toute possibilité effective de récupérer des sommes indûment versées pendant plus de deux ans en violation des articles 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 1er du Protocole additionnel n° 1 à ladite Convention ;
Et attendu, en second lieu, qu'après avoir énoncé que, selon l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale, la demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle les cotisations ont été acquittées et relevé que les taux majorés de cotisations accidents du travail avaient été notifiés annuellement à la société avec la mention des délais de recours, sans qu'il soit soutenu que ceux-ci aient été exercés, c'est à bon droit que la cour d'appel a, par ces seuls motifs, décidé qu'aucun élément ne permettait de fixer le point de départ du délai de prescription à une autre date que celle prévue par le texte précité et que la saisine de la caisse primaire, organisme social distinct de l'union de recouvrement n'était pas de nature à interrompre ce délai ;
D'où il suit que le moyen, nouveau, mélangé de fait et de droit dans sa quatrième branche, et comme tel irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société OGF aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à l'URSSAF d'Eure-et-Loir la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre janvier deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société OGF.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré mal fondé le recours de la société OGF contre la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF de l'EURE ET LOIR du 13 octobre 2008, d'AVOIR confirmé la décision rendue par la commission de recours amiable de l'URSSAF de l'EURE ET LOIR le 13 octobre 2008 en ce qu'elle a déclaré opposable à la société OGF la prescription triennale portant sur les cotisations accidents du travail indûment versées au titre de l'accident du travail de Monsieur X... avant le 1er septembre 2004 et d'AVOIR débouté la société OGF de sa demande de remboursement de la somme de 7.678 € correspondant à l'excédent de cotisations indûment versées au titre de l'accident du travail de Monsieur X... pour la période du 11 juillet 2002 au 31 août 2004 ;
AUX MOTIFS QU'« à la suite de la contestation par la société OGF de la date de consolidation l'accident du travail dont son salarié, Monsieur Jacky X..., a été victime le 26 octobre 1998, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Marne, par un jugement du 25 mai 2007, a modifié cette date de la consolidation des lésions initialement fixée au 23 mars 2000 pour retenir celle du 30 avril 1999 ; Qu'à la suite de ce jugement, la société OGF a demandé la rectification des taux accidents du travail à la caisse régionale d'assurance maladie du Nord Est qui, par courrier du 23 août 2007, lui a adressé les taux accidents du travail rectifiés ; Que la société OGF a procédé à la régularisation des cotisations accidents du travail qu' elle estimait avoir indûment payées sur les cotisations courantes de septembre 2007 pour un montant de 12 779 € ; Que l'URSSAF d'Eure et Loir a validé cette régularisation, sauf à en limiter les effets aux seules cotisations versées au titres de la période du 1er septembre 2004 au 31 décembre 2006 et a demandé à la société OGF de procéder au règlement de la somme de 8 672 € correspondant aux cotisations de la période du 11 juillet 2002 au 31 août 2004 dont le remboursement ne pouvait plus être obtenu pour cause de prescription ; Que pour débouter la société OGF de sa demande de remboursement de cotisations indûment versées entre le 11 juillet 2002 et le 31 août 2004, les premiers juges ont considéré quel le délai de prescription de l'article L.243-6 du code de la sécurité sociale qui est d'ordre public devait s'appliquer ; Que selon l'article L.243.6 du code de la sécurité sociale, la demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées ; Que la prescription court à compter du jour où celui contre lequel on l'invoque a pu valablement agir ; Que pour s'opposer à l'application de la prescription la société OGF soutient que l'URSSAF est la mandataire légale des Caisses de sécurité sociale et qu'à ce titre, elle ne peut ignorer les recours introduits par l'employeur à l'encontre des caisses primaires d'assurance maladie et des caisses régionales d'assurance maladie pour contester la valeur du risque ; Que par application de l'article L.213-1 du code de la sécurité sociale l'URSSAF, qui est la mandataire légale des caisses de sécurité sociale, n'est pas un tiers par rapport à celles-ci mais leur est substituée pour le recouvrement ou le remboursement des cotisations de sécurité sociale ; Qu'à ce titre elle procède au recouvrement des cotisations accidents du travail en fonction des taux de cotisation notifiés à l' employeur par la caisse régionale d'assurance maladie ; Qu'en effet selon l'article D.243-6-3 in fine l'ensemble des dépenses constituant la valeur du risque est pris en compte par les caisses régionales d'assurance maladie dès que ces dépenses leur ont été communiquées par les caisses primaires sans préjudice des décisions ultérieures ; Que si le jugement rendu le 25 mai 2007 a effectivement permis à la société OGF d'obtenir la révision des taux de cotisation pour les années 2001 à 2007, il n'est pas établi que la caisse régionale d'assurance maladie d'Ile-de-France a été informée du recours engagé par cette dernière à l'encontre de la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne susceptible d'avoir des répercussion sur le taux de cotisation accidents du travail ; Que la caisse primaire d'assurance maladie, défenderesse au recours de la société OGF ne dispose d'aucun pouvoir d'injonction ni à l'égard de la caisse régionale d'assurance maladie chargée de déterminer les taux de cotisation accidents du travail, ni à l'égard de l'URSSAF chargée d'en assurer le recouvrement ; Que c'est en conséquence à tort que la société OGF soutient que l'URSSAF, en sa qualité de mandataire légal ne peut méconnaître les recours introduits pas l'employeur auprès des caisses primaires d'assurance maladie ; Que par ailleurs les taux majorés de cotisations accidents du travail ont été notifiés annuellement à la société OGF, à la suite notamment de l'accident de Monsieur X..., à compter de 2000 avec la mention des délais de recours ; Qu'en dépit de la lettre circulaire du 10 juin 2009, qui n'était pas applicable à la date de la décision de l'URSSAF et qui n'a pas de valeur normative, aucun obstacle n'a empêché la société OGF d'aviser la caisse régionale d'assurance maladie du recours formé à l'encontre de la date de consolidation de cet accident susceptible d'entraîner une rectification rétroactive des taux de cotisations accidents du travail ; Qu'il s'en suit qu'aucun élément ne permet de fixer le point de départ du délai de prescription a une date autre que celle prévue par le texte susmentionné, de sorte qu'ainsi que l'ont exactement décidé les premiers juges la réclamation de la société OGF ne pouvait pas être accueillie » ;
AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur la prescription triennale opposée par l'URSSAF : Aux termes de l'article 213-1 1° du Code de la Sécurité Sociale, les URSSAF assurent le recouvrement des cotisations d'assurances sociales, d'accidents du travail, d'allocations familiales dues par les employeurs au titre des travailleurs salariés ou assimilés, par les assurés volontaires et par les assurés personnels. Il en résulte que l'URSSAF, qui se substitue aux Caisses de Sécurité Sociale, intervient en qualité de mandataire légal des organismes de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations et n'est pas un tiers par rapport à ceux-ci. Il est toutefois admis que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie ne dispose d'aucun pouvoir d'injonction tant à l'égard de la Caisse Régionale d'Assurance Maladie chargée de déterminer les taux de cotisation accidents de travail et maladies professionnelles qu'à l'égard de l'URSSAF chargée d'en assurer le recouvrement ; Néanmoins, l'article 243-6 du même Code stipule que la demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées. Ainsi, en aucune façon, le point de départ du délai de prescription ne peut être fixé par référence à la date d'échéance ou d'exigibilité des cotisations, ou bien à la date à laquelle l'employeur a eu connaissance du caractère indu des cotisations. Enfin, si l'usage peut être reconnu comme une source de droit, lorsqu'il est établi de manière constante et s'inscrit dans la durée, il appartient à celui qui l'invoque de rapporter la preuve de son existence. En l'espèce, il est constant que la société OGF a contesté pour la première fois l'opposabilité de l'accident de travail survenu à l'un de ses salariés, Monsieur X..., le 26 octobre 1998 devant la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Reims le 11 juillet 2005 puis devant le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Marne le 22 août 2005. La société OGF ayant obtenu gain de cause par jugement définitif en date du 25 mai 2007, en ce que le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Marne a écarté le caractère professionnel des arrêts de travail et de soins délivrés à Monsieur X... entre le 1er mai 1999 et le 23 mars 2000 tout en fixant la date de consolidation des blessures au 30 avril 1999, la Caisse Régionale d'Assurance Maladie lui a notifié le 23 août 2007 une rectification à la baisse de son taux de cotisations accident de travail au titre des années 2001 à 2007. C'est ainsi que la société OGF entend par la voie de la répétition de l'indu obtenir le remboursement auprès de l'URSSAF d'Eure et Loir des cotisations générées par l'accident de travail de Monsieur X... qu'elle a indûment versées postérieurement au 11 juillet 2002, la prescription de trois ans prévue en la matière ayant été interrompue selon elle par il son recours gracieux exercé à l'encontre de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Reims le 11 juillet 2005. S'il est admis que l'URSSAF n'est pas un tiers par rapport aux organismes de sécurité sociale, en ce que cette dernière intervient en qualité de mandataire légal de ceux-ci dans le recouvrement des cotisations d'accidents de travail, il n'en demeure pas moins que les règles de prescription sont d'ordre public, si bien qu'elles doivent s'appliquer en tout état de cause chaque fois que la prescription est encourue, et ce sans que l'organisme mandant ou mandataire ne puisse les remettre en cause. En effet, si l'URSSAF se substitue aux organismes de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations d'accidents du travail, force est de rappeler que cette dernière est dotée d'une personnalité juridique autonome, de telle sorte que les Caisses de Sécurité Sociale ne disposent d'aucun pouvoir d'injonction à son égard et que l'URSSAF est habilitée à ester en justice. Surtout, le principe de sécurité juridique justifie que les règles de prescription soient opposables tant aux Caisses et URSSAF qu'aux employeurs, afin d'éviter tout arbitraire ou favoritisme. La société OGF reconnaît aux termes de ses observations avoir reçu notification des taux annuels de cotisations fixés par la Caisse Régionale d'Assurance Maladie à la suite de l'accident dont a été victime Monsieur X... et s'être acquittée de l'intégralité des cotisations générées par cet accident de travail de 2000 à 2007. Par suite, la société OGF était parfaitement en mesure de poursuivre, à compter de leurs versements et dans la limite du délai de prescription de l'action en répétition, le remboursement des cotisations accidents de travail qu'elle estimait avoir indûment payées auprès de l'URSSAF entre 2001 et 2007. Or, alors même qu'aucun élément tendant à démontrer l'impossibilité pour l'employeur d'agir en contestation de l'opposabilité de l'accident de travail de Monsieur X... survenu le 26 octobre 1998 n'est produit aux débats, la société OGF n'a saisi pour la première fois la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie sur ce point que le 11 juillet 2005, soit près de 7 années après, et l'URSSAF au mois de septembre 2007, soit près de 9 années après. En ne formulant auprès de l'URSSAF d'Eure et Loir une demande de remboursement des cotisations indûment versées au titre de l'accident de travail dont a été victime Monsieur X... qu'au mois de septembre 2007, la société OGF ne saurait remettre en cause la prescription des cotisations acquittées à tort avant le 1er septembre 2004 eu égard au délai de prescription de trois ans prévu en la matière. Contrairement à ce que prétend la société OGF, le fait pour elle d'avoir exercé un recours gracieux le 11 juillet 2005 suivi d'un recours contentieux le 22 août 2005 à l'encontre de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie, aux fins de contester l'opposabilité de l'accident de travail survenu à Monsieur X..., n'est pas de nature à interrompre le délai de prescription prévu en matière de cotisations accidents de travail. En effet, seule une demande de remboursement formulée auprès de l'URSSAF elle-même, laquelle est une entité juridiquement autonome des Caisses habilitée en tant que telle à ester en justice, est de nature à interrompre la prescription ainsi que les délais pour agir. Il est constant en la cause que l'URSSAF d'Eure et Loir admet que la société OGF n'a formulé sa demande de remboursement auprès de ses services qu'en septembre 2007, et ce en prenant l'initiative de déduire les cotisations indûment versées au titre de l'accident de Monsieur X... au cours des années. 2001 à 2007 sur ses cotisations dues en septembre 2007. Or, il ressort de ce qui précède que la société OGF n'était fondée à remboursement des cotisations indûment versées qu'au cours des trois ans demande de remboursement formulée auprès de l'URSSAF elle-même. Le délai de prescription qui est d'ordre public doit s'appliquer à tous, quelles que soient les circonstances qui ont conduit la société OGF à verser des cotisations par erreur et peu important que cette dernière n'a découvert le caractère erroné des règlements effectués à l'issue de l'action en justice exercée à l'encontre de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie lui déclarant inopposable l'accident de travail pour lequel les cotisations étaient versées. Il appartenait à la société OGF, qui avait connaissance de son taux annuel de cotisations accidents de travail et maladies professionnelles fixé par la Caisse Régionale d'Assurance Maladie et qui s'est acquittée de l'intégralité des cotisations générées par l'accident de Monsieur X... entre 2001 et 2007, de contester l'opposabilité de l'accident de travail de Monsieur X... et de poursuivre, à compter de leurs versements et dans la limite délai de prescription de l'action en répétition, le remboursement des cotisations qu'elle estimait avoir indûment payées auprès de l'URSSAF, Enfin, la société OGF affirme qu'il est d'usage pour les URSSAF de rembourser les cotisations accidents de travail indûment versées par les employeurs suite à la rectification du taux applicable sans leur opposer la prescription de trois ans. Or, force est de constater que la société OGF ne verse aux débats aucun élément de nature à étayer ses allégations et tendant à démontrer une telle pratique par une URSSAF quelconque et encore moins par l'URSSAF d'Eure et Loir (décision antérieure, circulaire interne, lettre d'information…). De même, en ne faisant qu'appliquer des règles de prescription qui sont d'ordre public et qui s'imposent à tous, la société OGF ne saurait prétendre que l'URSSAF d'Eure et Loir s'est montrée déloyale à son égard, notamment en changeant sa pratique ou en l'adaptant selon la qualité du cotisant. Par conséquent. il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'URSSAF d'Eure et Loir a fait une juste application des textes législatifs et réglementaires en vigueur en refusant de rembourser à la société OGF les cotisations indûment versées au titre de l'accident de travail de Monsieur X... antérieurement au 1er septembre 2004, la société OGF n'ayant formulé sa demande de remboursement auprès de l'URSSAF qu'au mois de septembre 2007 et l'action exercée par cette dernière à l'encontre de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie: n:étant pas de nature à interrompre le délai de prescription courant à l'égard des cotisations accidents de travail recouvrées par l'URSSAF. La prescription triennale étant opposable à la société OGF pour les cotisations acquittées à tort avant le 1er septembre 2004, la société OGF sera déboutée de l'ensemble de ses demandes, en ce compris sa demande formulée au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile. » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE si, en principe l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à l'autre, il en est autrement lorsque deux actions, quoique ayant des causes distinctes, tendent à un seul et même but, de telle sorte que la deuxième est virtuellement comprise dans la première ; que lorsque la reconnaissance du caractère indu des cotisations accidents du travail versées par l'employeur nécessite que ce dernier conteste au préalable une décision d'une caisse de sécurité sociale, le délai de prescription de l'action en remboursement des cotisations indues fixées par l'article L. 243-6 du Code de la sécurité sociale est nécessairement interrompu par l'exercice du recours contre la décision de la caisse qui a pour but de faire reconnaître le caractère indu des cotisations versées à la suite de cette décision ; qu'au cas présent, le recours exercé par la société OGF, le 11 juillet 2005, devant la Commission de Recours Amiable de la CPAM de REIMS tendait à ce que la durée des arrêts de travail pris en charge par la CPAM au titre de l'accident du travail de Monsieur X... soit réduite et que, par conséquent, les prestations indues soient écartées du calcul de ces taux de cotisations ; que ce recours de la société OGF avait pour but de faire recalculer ses taux de cotisations modifiés par les prestations indûment prises en charge par la CPAM et d'obtenir ainsi le remboursement des cotisations indûment versées ; que ce recours avait donc interrompu le cours de la prescription triennale, de sorte que la société OGF était en droit d'obtenir de l'URSSAF le remboursement des cotisations indûment versées postérieurement au 11 juillet 2002 ; qu'en refusant de considérer que le recours formé contre la décision de la CPAM qui constituait le fait générateur des cotisations indûment versées avait interrompu le cours de la prescription triennale, la cour d'appel a violé les articles 2244 du Code civil, dans sa rédaction en vigueur, L. 243-6 du Code de la sécurité sociale et R. 142-1 du Code de la sécurité sociale ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la CPAM, la CARSAT et l'URSSAF sont les composantes d'un même service public de la sécurité sociale dotées au sein de la branche « accidents du travail et maladies professionnelles » d'attributions légales complémentaires ; que l'URSSAF n'est pas un tiers par rapport aux caisses de sécurité sociale et n'en est que le mandataire légal substitué aux caisses pour le recouvrement des cotisations sociales ; qu'il en résulte que l'action exercée par une entreprise à l'encontre d'une décision de la CPAM, occasionnant des dépenses imputées sur le compte employeur et prises en compte pour le calcul de ces taux de cotisations, interrompt le cours de la prescription tant à l'égard des décisions de la CARSAT relatives à la détermination des taux de cotisations impactées par ses dépenses, qu'à l'égard des versements à l'URSSAF de cotisations calculées à partir de ces taux ; qu'en estimant que l'action exercée par la société OGF contre la décision de la CPAM de la MARNE n'avait pas interrompu le cours de la prescription, aux motifs que l'URSSAF est une « entité juridiquement autonome de caisses » (Jugement p. 7) et que la CPAM « ne dispose d'aucun pouvoir d'injonction ni à l'égard de la caisse régionale d'assurance maladie chargée de déterminer les taux de cotisations accidents du travail, ni à l'égard de l'URSSAF chargée d'en assurer le recouvrement » (Arrêt p. 4), la cour d'appel s'est fondée sur des motifs radicalement inopérants, en violation des articles L. 213-1 et L. 243-6 du Code de la sécurité sociale, ensemble de l'article 2244 du Code civil dans sa rédaction alors en vigueur ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE l'article D. 242-6-3 avant-dernier alinéa du Code de la sécurité sociale dispose que « l'ensemble des dépenses constituant la valeur du risque est pris en compte par les caisses primaires d'assurance maladie dès que ces dépenses leur ont été communiquées par les caisses primaires sans préjudice des décisions ultérieures » ; qu'il résulte de ce texte que l'exercice par l'employeur d'un recours à l'encontre de la décision de la caisse primaire n'est susceptible d'avoir aucune incidence immédiate sur la détermination du taux de cotisations accidents du travail par la caisse régionale et, par conséquent, sur le montant des cotisations à verser à l'URSSAF ; que, seule une décision de justice remettant en cause la décision de la CPAM est susceptible de produire des effets à l'égard de détermination du taux de cotisations accidents du travail par la caisse régionale et donc sur le montant des cotisations à verser à l'URSSAF ; qu'en outre, aucun texte ne fait obligation à l'employeur qui forme un recours contre la décision de la caisse primaire ayant occasionné des dépenses d'en informer la caisse régionale ; qu'en reprochant à la société OGF de ne pas avoir informé la caisse régionale de son recours exercé à l'encontre de la décision de la CPAM de la MARNE, la cour d'appel s'est fondée sur un motif erroné en violation des articles L. 243-6 et D. 242-6-3, dans sa rédaction alors en vigueur, du Code de la sécurité sociale, ensemble de l'article 2244 du Code civil dans sa rédaction alors en vigueur ;
ALORS, ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHESE, QUE l'employeur est légalement tenu de verser à l'URSSAF à échéance les cotisations accident du travail au taux qui lui a été notifié par la CARSAT, sous peine de verser d'importantes pénalités ; qu'il ne peut exercer de recours ni contre la décision de notification de taux de la CARSAT, ni contre le versement de cotisations à l'URSSAF tant qu'il n'a pas obtenu la remise en cause de la décision de la CPAM ayant généré des dépenses prises en compte pour le calcul de son taux de cotisations accidents du travail ; qu'au cas présent, avant d'être en mesure de faire valoir ses droits auprès de l'URSSAF de l'EURE ET LOIR, la société OGF avait dû saisir la commission de recours amiable de la CPAM de REIMS d'un recours contre la décision de cet organisme ayant généré des dépenses ; qu'elle a ensuite attendu deux mois pour se prévaloir d'une décision implicite de rejet et pouvoir saisir le TASS ; que le TASS a alors mis 21 mois pour statuer sur son recours ; qu'ayant obtenu un jugement du TASS faisant droit à son recours, elle avait alors dû solliciter immédiatement la CARSAT en vue d'une révision des taux de cotisations impactés par la décision de la CPAM et avait obtenu cette décision au bout de trois mois ; qu'au total, entre l'introduction de son recours devant la commission de recours amiable de la CPAM le 11 juillet 2005 et l'obtention de la révision de ses taux de cotisations par la CARSAT le 22 août 2007, la société OGF a dû attendre plus de deux ans avant d'être en mesure de justifier du caractère indu des cotisations versées depuis 2002 au titre de l'accident de Monsieur X... ; qu'en estimant que le délai de prescription de l'article L. 243-6 du Code de la sécurité sociale avait néanmoins continué à courir au cours de cette période, la cour d'appel a privé la société OGF de toute possibilité effective de récupérer des sommes indûment versées pendant plus de deux ans en violation des articles 1er du Protocole additionnel n°1 et 6-1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-22585
Date de la décision : 24/01/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE - Cotisations - Paiement indu - Action en répétition - Prescription - Interruption - Acte interruptif - Saisine de la caisse primaire d'assurance maladie (non)

Après avoir énoncé que, selon l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale, la demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle les cotisations ont été acquittées et relevé que les taux majorés de cotisations accidents du travail avaient été notifiés annuellement à la société avec la mention des délais de recours, sans qu'il soit soutenu que ceux-ci aient été exercés, c'est à bon droit qu'une cour d'appel a décidé qu'aucun élément ne permettait de fixer le point de départ du délai de prescription à une autre date que celle prévue par ce texte et que la saisine de la caisse primaire, organisme social distinct de l'union de recouvrement n'était pas de nature à interrompre ce délai


Références :

article L. 243-6 du code de la sécurité sociale

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 16 juin 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 24 jan. 2013, pourvoi n°11-22585, Bull. civ. 2013, II, n° 12
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, II, n° 12

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : Mme Lapasset
Rapporteur ?: M. Salomon
Avocat(s) : SCP Boutet, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.22585
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