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15/01/2013 | FRANCE | N°12-10203

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 janvier 2013, 12-10203


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Montpellier, 27 octobre 2011), que, par arrêté du 11 juillet 2001, le préfet de l'Hérault a ordonné la fermeture définitive et la remise en état du site de stockage des déchets ménagers et assimilés de Villeroy situé sur le lido de Sète ; que la communauté d'agglomération du Bassin de Thau (la CABT) a été désignée comme le maître d'ouvrage de la réhabilitation ; qu'elle a, pour procéder à la réhabilitation de ce site fermé, eu recours, entre 2003 et novembre

2005, à des boues de dragages et autres déchets inertes destinés à assurer l'imp...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Montpellier, 27 octobre 2011), que, par arrêté du 11 juillet 2001, le préfet de l'Hérault a ordonné la fermeture définitive et la remise en état du site de stockage des déchets ménagers et assimilés de Villeroy situé sur le lido de Sète ; que la communauté d'agglomération du Bassin de Thau (la CABT) a été désignée comme le maître d'ouvrage de la réhabilitation ; qu'elle a, pour procéder à la réhabilitation de ce site fermé, eu recours, entre 2003 et novembre 2005, à des boues de dragages et autres déchets inertes destinés à assurer l'imperméabilité à l'eau des déchets stockés, en vue d'une revégétalisation du site ; que l'administration des douanes, après contrôle, a notifié à la CABT un avis de manquement aux dispositions prévues par les articles 266 sexies à tercedies du code des douanes eu égard à la réception, pendant la phase de réhabilitation, de déchets inertes taxables ; qu'un avis de mise en recouvrement (AMR) du 24 septembre 2007 fixant l'imposition au titre de la taxe générale sur les activités polluantes (la TGAP) à une certaine somme a été notifié par l'administration des douanes à la CABT le jour même ; que la CABT a contesté cet avis et l'administration des douanes a rejeté le recours gracieux ; que la CABT a fait assigner le directeur régional des douanes de Montpellier, en annulation de l'AMR et de la procédure d'imposition ;

Sur le deuxième moyen :
Attendu que la CABT fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ces demandes alors, selon le moyen :
1°/ que selon l'article 345 du code des douanes, l'avis de mise en recouvrement, qui constitue un titre exécutoire adressé au redevable d'avoir à payer immédiatement les sommes y figurant, doit indiquer le fait générateur de la créance, ainsi que sa nature, son montant et les éléments de sa liquidation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément constaté que l'AMR du 24 septembre 2007, en ce qu'il ne mentionnait pas les éléments de liquidation de la taxe ni ne renvoyait à aucune pièce connue du redevable qui contiendrait les modalités de liquidation, ne répondait pas aux exigences de l'article 345 du code des douanes ; qu'en subordonnant cependant l'annulation de l'AMR à la preuve d'un grief causé par l'irrégularité ainsi constatée, la cour d'appel a ajouté à l'article 345 du code des douanes une condition qu'il ne prévoyait pas, violant ainsi le texte susvisé ;
2°/ que dans ses conclusions d'appel, la CABT soutenait également que l'AMR émis le 24 septembre 2007 ne mentionnait pas même le fait générateur de la créance, pas plus qu'il ne visait le procès-verbal d'infraction, de sorte qu'il était nul pour absence de motivation ; que dès lors, en s'abstenant de rechercher si l'AMR n'encourait pas l'annulation pour défaut de mention de la cause de l'obligation à paiement dont l'exécution était exigée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 345 du code des douanes ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que l'AMR ne mentionne pas les éléments de liquidation de la taxe ni ne renvoie à aucune pièce, connue du redevable, qui contiendrait les modalités de la liquidation, l'arrêt retient que la CABT avait été informée des éléments de la liquidation de la somme réclamée lors de la signification du procès-verbal de constatation d'infraction, visé par l'AMR ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, d'où il ressort que la CABT a été informée du fait générateur de la créance, c'est à bon droit que la cour d'appel a écarté expressément le moyen de nullité de l'AMR ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la CBAT fait encore les mêmes griefs à l'arrêt, ainsi que d'avoir dit qu'elle était redevable de la TGAP alors, selon le moyen :
1°/ que dans ses conclusions d'appel, la CABT soutenait qu'elle n'était pas redevable de la TGAP au sens de l'article 266 sexies, § I, 1° du code des douanes, dès lors que le site de la décharge d'ordures ménagères litigieuse avait été fermé, avant même sa création, par arrêté préfectoral du 11 juillet 2001, dans le but d'être réhabilité, de sorte qu'elle n'avait pas la qualité d'exploitant requise par le texte ; que la CABT invoquait à cet égard une réponse ministérielle du 24 juin 2010, qu'elle produisait aux débats , affirmant que la TGAP ne s'appliquait qu'aux déchets réceptionnés dans une installation de stockage de déchets ménagers et assimilés en exploitation et qu'elle ne concernait donc pas les sites fermés ; que dès lors, en omettant de s'expliquer sur le moyen tiré de la réponse ministérielle invoquée excluant du champ d'application de la TGAP les installations de stockage de déchets ménagers fermées en vue de leur réhabilitation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 266 sexies, § I, 1° du code des douanes ;
2°/ que le fait générateur de la TGAP est la réception des déchets par l'exploitant de l'installation de stockage des déchets ménagers ; qu'en l'espèce, comme le soutenait la CABT dans ses conclusions d'appel, il ne pouvait y avoir réception juridique des déchets, au sens de l'article 266 septies, § 1 du code des douanes, dès lors qu'il était constant qu'elle s'était procuré les matériaux nécessaires à la réhabilitation de la décharge à l'extérieur de celle-ci et qu'elle en avait assuré le transport à ses frais ; qu'en décidant cependant qu'il n'était pas discutable que les déchets inertes avaient bien été réceptionnés sur le site de stockage en phase de réhabilitation puisqu'ils en avaient franchi la grille, sans qu'il soit besoin derechercher l'identité de celui qui les y a acheminés, la réception devant s'entendre de l'acte par lequel une personne qui a commandé une marchandise ou des travaux, reconnaît que leur qualité est conforme à ses attentes, ce qui était le cas en l'espèce, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;

3°/ que la TGAP prévue par les articles 266 sexies et suivants du code des douanes a pour objet de mettre en oeuvre le principe «pollueur-payeur», en mettant à la charge des responsables d'activités polluantes le coût de l'élimination des déchets générés par ces activités ; qu'en l'espèce, la CABT soutenait que dès lors que le site de la décharge d'ordures ménagères litigieuse avait été fermé, avant même sa création, par arrêté préfectoral du 11 juillet 2001, dans le but d'être réhabilité, il lui était impossible de répercuter la taxe sur les apporteurs ou producteurs de déchets inertes, de sorte qu'en violation du principe «pollueur payeur», faute de répercussion, le payeur de la TGAP serait la personne chargée de la dépollution et non le pollueur ; que dès lors, en retenant que le fait que la CABT ne puisse pas, pendant la phase de réhabilitation du site, répercuter le coût des déchets sur les pollueurs n'ôtait pas à la CABT sa qualité de redevable puisque la répercussion du coût n'était pas une condition de l'assujettissement à la TGAP, la cour d'appel a violé le principe pollueur-payeur, ensemble l'article 266 sexies du code des douanes ;
4°/ qu'un contribuable est en droit d'opposer à l'administration douanière sa doctrine administrative ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, la CABT se prévalait du Bulletin officiel des douanes n° 6689 du 28 novembre 2006 et d'une réponse ministérielle du 29 novembre 2007 selon laquelle ne sont pas des «déchets» soumis à la TGAP, les matériaux inertes récupérés dans le but d'être utilisés à des fins de réhabilitation de la décharge, comme c'était le cas en l'espèce, et non à des fins de stockage, ces matériaux n'étant pas destinés à l'abandon ; qu'elle en déduisait que l'administration des douanes étant tenue par sa propre doctrine, aucun avis de mise en recouvrement ne pouvait être émis à son encontre ; que dès lors, en se bornant à affirmer, pour dire la CABT redevable de la TGAP, que la finalité utilitaire qui était réservée aux matériaux litigieux était sans effet sur leur qualité de déchet sauf s'ils avaient été acquis à titre onéreux, ce qui n'était pas allégué en l'espèce, sans s'expliquer sur la doctrine contraire del'administration des douanes dûment invoquée par la CABT, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 345 bis et 266 sexies du code des douanes ;

Mais attendu, de première part, que la doctrine administrative invoquée ne peut être opposée à une créance née antérieurement ; qu'ayant retenu que la fermeture, même définitive, d'un site de stockage des déchets ménagers et assimilés en vue de la réalisation d'une opération de réhabilitation du site ne fait pas perdre au maître d'ouvrage de la réhabilitation sa qualité d'exploitant du site, la phase de réhabilitation constituant l'ultime phase d'exploitation de ce site, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Attendu, de deuxième part, qu'ayant retenu que les déchets inertes avaient été réceptionnés par la CABT sur le site de stockage en phase de réhabilitation puisqu'ils en avaient franchi la grille, la cour d'appel a exactement qualifié cette réception de réception juridique par l'exploitant au sens de l'article 266 sexies, I, 1 du code des douanes ;
Attendu, de troisième part, que, par motifs adoptés, la cour d'appel a exactement retenu que le fait que la CABT ne puisse pas, pendant la phase de réhabilitation du site, répercuter la taxe sur le pollueur apparaît indifférent dès lors que le législateur n'a pas fait de cette répercussion une condition de l'assujettissement mais l'a seulement instaurée comme une faculté offerte à l'assujetti ;
Attendu, enfin, que la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit par arrêt du 1er mars 2007 (C-176/05) que la notion de déchet au sens de l'article 1er de la directive n° 1975/442 du 15 juillet 1975 relative aux déchets ne doit pas s'entendre comme excluant les substances et objets susceptibles de réutilisation économique et ne présuppose pas, dans le chef du détenteur qui se défait d'une substance ou d'un objet, l'intention d'exclure toute réutilisation économique de cette substance ou de cet objet par d'autres personnes ; qu'ayant constaté que du moment qu'ils ont été abandonnés à l'origine, les déchets réceptionnés ont pris la qualité de déchets et que la finalité utilitaire qui leur est réservée est sans effet sur cette qualité, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et attendu que le premier moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la CABT aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à l'administration des douanes la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour la communauté d'agglomération du Bassin de Thau (CABT).
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de nullité de l'avis de mise en recouvrement n° 292/07/87 du 24 septembre 2007 formée par la Communauté d'Agglomération du Bassin de Thau (CABT), ainsi que sa demande de nullité de la procédure d'imposition ;
AUX MOTIFS QUE, I) Sur le droit d'être entendu il résulte de l'article 67 A du code des douanes, issu de la loi n°2009-1674 du 30 décembre 2009 que « Sous réserve des dispositions de l'article 67 B, toute décision prise en application du code des douanes communautaire et de ses dispositions d'application, lorsqu'elle est défavorable ou lorsqu'elle notifie une dette douanière telle que définie à l'article 4, paragraphe 9, du code des douanes communautaire, est précédée de l'envoi ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaître ses observations dans un délai de trente jours à compter de la notification ou de la remise de ce document ». L'article 67 B précise que « lorsque la décision envisagée porte sur la notification d'une dette douanière à la suite d'un contrôle douanier, la communication des motifs mentionnée à l'article 67 A, peut être faite oralement par tout agent des douanes. La personne concernée est invitée à faire connaître immédiatement ses observations, de la même manière. Elle est informée qu'elle peut demander à bénéficier d'une communication écrite dans les conditions prévues au même article 67 A». Mais l'article 67 D précise que « Le présent chapitre ne s'applique pas : « e) Aux avis de mise en recouvrement notifiés conformément à l'article 345 du présent code aux fins de recouvrement des créances impayées à l'échéance, à l'exception de celles qui ont été constatées à la suite d'une infraction au même code ». En l'espèce, un avis de début de vérification a été délivré par les douanes à la CABT le 12 juin 2006 mentionnant comme objet : « contrôle des installations assujetties à la taxe générale sur les activités polluantes (article 266 sexies et suivants du code des douanes) » suivi d'un premier procès-verbal de constat en date du même jour. Le représentant de la CABT a ensuite été convoqué le 1er septembre 2006 pour se voir notifier un procès-verbal de constat n°2 daté du 7 septembre 2006 suivi d'un procès-verbal n°5 le 19 octobre 2006. Les procès-verbaux susvisés n°1, 2 et 5 ont consisté principalement en des demandes de communication de pièces et d'informations orales de la part des douanes parfois au regard des éléments transmis antérieurement. A cette occasion, les douanes ont posé pas moins de 57 questions au directeur général des services techniques de la CABT qui a pu y répondre sur le champ ou différer sa réponse afin de disposer du temps nécessaire pour le recueil d'informations complémentaires. Les éléments permettant précisément l'identification des infractions et leur liquidation apparaissent de façon explicite dans le procès-verbal d'infraction n°6 et ses annexes 1 et 2 toutes paraphées par le directeur. Ce procès-verbal, conformément aux exigences des articles précités, a été notifié le 7 septembre 2007 à la CABT, soit antérieurement à l'avis de mise en recouvrement. Jean-Louis X... en sa qualité de directeur général des services techniques de CABT a été convoqué à cette fin dans les bureaux du service des douanes par télécopie du 30 juillet 2007. La CABT a donc bénéficié d'un délai suffisant, supérieur à un mois, pour préparer sa défense et présenter utilement ses observations entre sa convocation du 30 juillet 2007 et la date de notification de l'infraction du 7 septembre 2007 étant précisé que le procès-verbal d'infraction constituait l'aboutissement d'une procédure contradictoire ayant duré au total plus d'un an. Les prescriptions des articles susvisés ont donc été respectées sans que la CABT ne rapporte la preuve d'un grief persistant. Le moyen tiré d'une méconnaissance du droit à être entendu sera rejeté ;
1) ALORS, D'UNE PART, QUE le destinataire d'un avis de mise en recouvrement (AMR) doit avoir été mis en mesure, avant sa délivrance, de faire connaître son point de vue, en connaissance cause et dans un délai raisonnable, à l'administration douanière, compte tenu de la durée de la procédure d'instruction ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que, bien que la procédure de vérification eût débuté le 12 juin 2006, les éléments permettant précisément l'identification des infractions reprochées à la Communauté d'agglomération et leur liquidation n'étaient apparus que dans le procès-verbal d'infraction du 7 septembre 2007 (n° 6), antérieur de seulement 17 jours à l'AMR émis le 24 septembre 2007 ; qu'il en résultait qu'avant la délivrance de l'AMR, l'exposante n'avait pas bénéficié d'un délai raisonnable pour faire connaître son point de vue, en connaissance de cause, l'administration douanière ne l'ayant informée de l'objet des infractions poursuivies qu'après 14 mois d'enquête, en toute fin d'instruction ; que dès lors, en refusant d'annuler l'avis de mise en recouvrement litigieux, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation du principe du respect des droits de la défense ;
2) ALORS, D'AUTRE PART, QU'en affirmant que la Communauté d'agglomération avait bénéficié d'un délai suffisant, supérieur à un mois, pour préparer sa défense et présenter utilement ses observations entre sa convocation du 30 juillet 2007 et la date de notification de l'infraction du 7 septembre 2007, tout en constatant que les éléments permettant l'identification de l'infraction n'apparaissaient que dans le procès-verbal de notification d'infraction du 7 septembre 2007 (n° 6), ce qui excluait la possibilité d'un exercice concret et suffisant des droits de la défense avant cette date, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, en violation, à nouveau, du principe du respect des droits de la défense ;
3) ALORS, EN OUTRE, QU'en se bornant à affirmer que le procès-verbal d'infraction constituait l'aboutissement d'une procédure contradictoire ayant duré au total plus d'un an, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, dès lors que selon les propres constatations de l'arrêt, les procès-verbaux de constat (1, 2 et 5) dressés par l'administration des douanes au cours de l'instruction débutée le 12 juin 2006 n'avaient consisté qu'en des demandes de communications de pièces et d'informations orales et que seul le procès-verbal de notification d'infraction en date du 7 septembre 2007 (n° 6) contenait les éléments permettant l'identification de l'infraction poursuivie et sa liquidation ; qu'elle a ainsi privé sa décision de base légale au regard du principe du respect des droits de la défense.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de nullité de l'avis de mise en recouvrement n° 292/07/87 du 24 septembre 2007 formée par la Communauté d'Agglomération du Bassin de Thau, ainsi que sa demande de nullité de la procédure d'imposition ;
AUX MOTIFS QUE, II) Sur la validité de l'avis de mise en recouvrement : 1) sur les manquements aux dispositions de l'article 345 du Code des douanes : Il résulte des dispositions de l'article 345 du Code des douanes dans sa rédaction issue de la loi du 31 décembre 2002 que "les créances de toute nature constatées et recouvrées par l'administration des douanes font l'objet d'un avis de mise en recouvrement sous réserve, le cas échéant, de la saisine du juge judiciaire. L'avis de mise en recouvrement est signé et rendu exécutoire par le directeur régional des douanes ou le comptable des douanes ainsi que, sous l'autorité et la responsabilité de ce dernier, par un agent ayant au moins le grade de contrôleur. L'avis de mise en recouvrement indique le fait générateur de la créance ainsi que sa nature, son montant et les éléments de sa liquidation. Une copie est notifiée au redevable. Les recours prévus aux articles 346 et 347 ne suspendent pas l'exécution de l'avis de mise en recouvrement". En l'espèce, l'avis de mise en recouvrement critiqué n°292/07/87, en date du 24 septembre 2007, comprend une colonne intitulée "désignation des créances, fait générateur, nature, montant et éléments de liquidation", au sein de laquelle les douanes indiquent : « taxe générale sur les activités polluantes », « liquidation d'office n° 17/SRE », « affaire contentieuse n°07-00279 ». Dans la colonne suivante est mentionné le montant de la somme liquidée s'élevant à 1.947.972 €. Ainsi l'avis de mise en recouvrement ne contient pas les éléments de liquidation de la taxe à laquelle la CABT a été assujettie. Cependant, un avis de mise en recouvrement qui ne contient pas les éléments de liquidation de la taxe n'encourt pas ipso facto la nullité s'il renvoie expressément, dans son libellé, au procès-verbal de constatation d'infraction ou à toute autre pièce contenant les éléments de liquidation de la taxe ou s'y référant expressément, à la condition toutefois que ces pièces de renvoi ou de référence aient été portées à la connaissance du redevable. En l'occurrence, l'avis de mise en recouvrement renvoie non pas au procès-verbal de constatation d'infraction n° 6 régulièrement notifié à la CABT le 7 septembre 2007 et contenant les éléments de liquidation mais à l'avis de liquidation d'office n° 17/SRE (pièce 24 des douanes). Cet avis de liquidation, extrêmement succinct, ne contient en lui même aucune information relative aux modalités de liquidation de la taxe en dehors de la somme due, mais il renvoie au procès-verbal de constatation d'infraction n° 6 du 7 septembre 2007. Cependant, et contrairement à leurs affirmations, les douanes n'établissent nullement avoir remis à la CABT cet avis de liquidation d'office n°17/SRE du 7 septembre 2007. En effet, l'examen de l'avis de liquidation d'office montre qu'il ne comporte aucune signature ou paraphe du représentant de la CABT ni aucun accusé de réception postal ou électronique établissant la réalité d'un envoi à la CABT, alors que celle-ci ne reconnaît pas l'avoir reçu. Enfin, le renvoi dans l'avis de mise en recouvrement à l'affaire contentieuse n° 07-000279, est inopérant, ce numéro ne correspondant ni à celui du procès-verbal d'infraction n°6 du 7 septembre 2007 ni à l'avis de liquidation d'office n° 17/SRE du même jour. L'avis de mise en recouvrement en ce qu'il ne mentionne pas les éléments de liquidation de la taxe ni ne renvoie à aucune pièce, connue du redevable, qui contiendrait les modalités de la liquidation, ne répond pas aux exigences de l'article 345 précité. Toutefois, s'agissant du grief, il est vain pour la CABT de venir prétendre avoir été dans l'incapacité de vérifier le bien fondé des éléments de liquidation de la taxe générale sur les activités polluantes à laquelle elle s'est trouvée assujettie, dès lors qu'elle a été parfaitement informée lors de la notification du procès-verbal de constat d'infraction n° 6 du 7 septembre 2007 : - des éléments constitutifs de l'infraction et des modalités de liquidation de la taxe ; - de l'édition possible, en application des dispositions de l'article 345 du code des douanes, d'un avis de mise en recouvrement, faute par elle de s'acquitter du montant de la taxe dans le délai de 10 jours. La CABT ne pouvait ignorer dans ce contexte que l'avis de mise en recouvrement en date du 24 septembre 2007 était consécutif au défaut de paiement de la taxe dans le délai de 10 jours, tel que cela avait été rappelé à son directeur général des services techniques lors de la notification du procès-verbal du 7 septembre 2007, paraphé par lui sur toutes ses pages et annexes. Le moyen tiré de la nullité de l'avis de mise en recouvrement pour manquements aux prescriptions de l'article 345 précité sera rejeté.
1) ALORS, D'UNE PART, QUE selon l'article 345 du Code des douanes, l'avis de mise en recouvrement, qui constitue un titre exécutoire adressé au redevable d'avoir à payer immédiatement les sommes y figurant, doit indiquer le fait générateur de la créance, ainsi que sa nature, son montant et les éléments de sa liquidation ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a expressément constaté que l'AMR du 24 septembre 2007, en ce qu'il ne mentionnait pas les éléments de liquidation de la taxe ni ne renvoyait à aucune pièce connue du redevable qui contiendrait les modalités de liquidation, ne répondait pas aux exigences de l'article 345 du Code des douanes ; qu'en subordonnant cependant l'annulation de l'AMR à la preuve d'un grief causé par l'irrégularité ainsi constatée, la Cour d'appel a ajouté à l'article 345 du Code des douanes une condition qu'il ne prévoyait pas, violant ainsi le texte susvisé ;
2) ALORS, D'AUTRE PART, QUE dans ses conclusions d'appel, l'exposante soutenait également que l'AMR émis le 24 septembre 2007 ne mentionnait pas même le fait générateur de la créance, pas plus qu'il ne visait le procès-verbal d'infraction, de sorte qu'il était nul pour absence de motivation ; que dès lors, en s'abstenant de rechercher si l'AMR n'encourait pas l'annulation pour défaut de mention de la cause de l'obligation à paiement dont l'exécution était exigée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 345 du Code des douanes.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de nullité de l'avis de mise en recouvrement n° 292/07/87 du 24 septembre 2007 formée par la Communauté d'Agglomération du Bassin de Thau, ainsi que sa demande de nullité de la procédure d'imposition, et d'avoir dit que la Communauté d'Agglomération du Bassin de Thau était redevable de la TGAP sur les quantités de déchets inertes réceptionnés dans le CSDU de Classe 2 de Villeroy ;
AUX MOTIFS QUE, 2) Sur les conditions d'assujettissement à la taxe générale sur les activités polluantes : La taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) a été créée par la loi de finances pour 1999 (loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998) en vue de regrouper diverses taxes qui existaient jusque là. Elle a été codifiée dans les articles 266 sexies et suivants du Code des douanes (titre X «Taxes diverses perçues par les douanes », chapitre I « Taxes intérieures »), cette administration ayant été chargée de son recouvrement. L'article 266 sexies expose le principe de cette taxe et énonce ses redevables. Il est ainsi libellé : « I. Il est institué une taxe générale sur les activités polluantes qui est due par les personnes physiques ou morales suivantes: 1. Tout exploitant d'une installation de stockage de déchets ménagers et assimilés... 2. Etc... (suivent d'autres assujettis) ». Cet article contient un paragraphe II excluant de cette taxe certaines personnes physiques ou morales et certaines activités (paragraphe ne concernant pas la présente affaire). L'article 266 septies dudit Code énonce le fait générateur de la taxe. Il est ainsi libellé : « Le fait générateur de la taxe mentionné à l'article. 266 sexies est constitué par : 1. La réception des déchets par les exploitants mentionnés au n° 1 I de l'article 266 sexies ; 2. Le transfert etc... (la suite ne concerne pas la présente affaire) ». L'article 266 octies régissant l'assiette de cette taxe est ainsi libellé «La taxe mentionnée à l'article 266 sexies est assise sur : 1. Le poids des déchets reçus... (les autres alinéas ne concernant pas la présente affaire) ». Par ailleurs la loi de finances pour 2003 (loi n° 2002-l57 du 30 décembre 2002) a ajouté à l'article sexies précité un paragraphe III ainsi libellé : «Sont exonérés de la taxe mentionnée au I, dans la limite de 20 % de la quantité annuelle totale de déchets reçus par installation, les réceptions de matériaux ou déchets inertes. Sont considérés comme déchets inertes les déchets qui ne se décomposent pas, ne brûlent pas et ne produisent aucune autre réaction physique ou chimique, ne sont pas biodégradables et ne détériorent pas d'autres matières avec lesquelles ils entrent en contact d'une manière susceptible d'entraîner une pollution de l'environnement ou de nuire à la santé humaine ». Par des motifs suffisants et pertinents que la cour adopte, le premier juge a considéré que les moyens soulevés par la CABT pour tenter d'échapper à l'imposition étaient infondés. En effet, la fermeture, même définitive, d'un site de stockage des déchets ménagers et assimilés en vue de la réalisation d'une opération de réhabilitation du site ne fait pas perdre au maître d'ouvrage de la réhabilitation sa qualité d'exploitant du site, la phase de réhabilitation constituant l'ultime phase d'exploitation du site. De même, le fait que la CABT ne puisse pas, pendant cette phase de réhabilitation du site, répercuter le coût des déchets sur les pollueurs n'ôte pas à la CABT sa qualité de redevable puisque la répercussion du coût n'est pas une condition de l'assujettissement et qu'il existe des moyens légaux pour le maître d'ouvrage d'une réhabilitation d'échapper à l'impôt tels que l'achat des déchets utilisés ou le recours à des matériaux ne constituant pas des déchets taxables. Par ailleurs, il n'est pas discutable que les déchets inertes ont bien été réceptionnés sur le site de stockage en phase de réhabilitation puisqu'ils en ont franchi la grille, sans qu'il soit besoin de rechercher l'identité de celui qui les y a acheminés, la réception devant s'entendre de l'acte par lequel une personne qui a commandé une marchandise ou des travaux, reconnaît que leur qualité est conforme à ses attentes, ce qui était le cas en l'espèce. Enfin, peu importe de savoir qui du cocontractant ou de l'exploitant a abandonné les déchets réceptionnés pendant la phase de réhabilitation, du moment qu'ils ont été abandonnés à l'origine, ils ont pris la qualité de déchets. La finalité utilitaire qui leur est réservée est sans effet sur leur qualité de déchets sauf s'ils ont été acquis à titre onéreux et pour un prix non dérisoire, ce qui n'est pas allégué en l'espèce. La CABT sera en conséquence déboutée de l'intégralité de ses prétentions et le jugement confirmé dans toutes ses dispositions ;
1) ALORS, D'UNE PART, QUE dans ses conclusions d'appel, la Communauté d'agglomération du bassin de Thau soutenait qu'elle n'était pas redevable de la TGAP au sens de l'article 266 sexies, § I, 1° du Code des douanes, dès lors que le site de la décharge d'ordures ménagères litigieuse avait été fermé, avant même sa création, par arrêté préfectoral du 11 juillet 2001, dans le but d'être réhabilité, de sorte qu'elle n'avait pas la qualité d'exploitant requise par le texte ; que l'exposante invoquait à cet égard une réponse ministérielle du 24 juin 2010, qu'elle produisait aux débats (pièce n° 17), affirmant que la TGAP ne s'appliquait qu'aux déchets réceptionnés dans une installation de stockage de déchets ménagers et assimilés en exploitation et qu'elle ne concernait donc pas les sites fermés ; que dès lors, en omettant de s'expliquer sur le moyen tiré de la réponse ministérielle invoquée excluant du champ d'application de la TGAP les installations de stockage de déchets ménagers fermées en vue de leur réhabilitation, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 266 sexies, § I, 1° du Code des douanes ;
2) ALORS, D'AUTRE PART, QUE le fait générateur de la TGAP est la réception des déchets par l'exploitant de l'installation de stockage des déchets ménagers ; qu'en l'espèce, comme le soutenait l'exposante dans ses conclusions d'appel, il ne pouvait y avoir réception juridique des déchets, au sens de l'article 266 septies, § 1 du Code des douanes, dès lors qu'il était constant qu'elle s'était procuré les matériaux nécessaires à la réhabilitation de la décharge à l'extérieur de celle-ci et qu'elle en avait assuré le transport à ses frais ; qu'en décidant cependant qu'il n'était pas discutable que les déchets inertes avaient bien été réceptionnés sur le site de stockage en phase de réhabilitation puisqu'ils en avaient franchi la grille, sans qu'il soit besoin de rechercher l'identité de celui qui les y a acheminés, la réception devant s'entendre de l'acte par lequel une personne qui a commandé une marchandise ou des travaux, reconnaît que leur qualité est conforme à ses attentes, ce qui était le cas en l'espèce, la Cour d'appel a violé l'article susvisé ;
3) ALORS, EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, QUE la TGAP prévue par les articles 266 sexies et suivants du Code des douanes a pour objet de mettre en oeuvre le principe « pollueur-payeur », en mettant à la charge des responsables d'activités polluantes le coût de l'élimination des déchets générés par ces activités ; qu'en l'espèce, l'exposante soutenait que dès lors que le site de la décharge d'ordures ménagères litigieuse avait été fermé, avant même sa création, par arrêté préfectoral du 11 juillet 2001, dans le but d'être réhabilité, il lui était impossible de répercuter la taxe sur les apporteurs ou producteurs de déchets inertes, de sorte qu'en violation du principe « pollueurpayeur », faute de répercussion, le payeur de la TGAP serait la personne chargée de la dépollution et non le pollueur ; que dès lors, en retenant que le fait que la CABT ne puisse pas, pendant la phase de réhabilitation du site, répercuter le coût des déchets sur les pollueurs n'ôtait pas à la CABT sa qualité de redevable puisque la répercussion du coût n'était pas une condition de l'assujettissement à la TGAP, la Cour d'appel a violé le principe pollueur-payeur, ensemble l'article 266 sexies du Code des douanes ;
4) ALORS, ENFIN, QU'un contribuable est en droit d'opposer à l'administration douanière sa doctrine administrative ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, la Communauté d'agglomération du bassin de Thau se prévalait du Bulletin officiel des douanes n° 6689 du 28 novembre 2006 et d'une réponse ministérielle du 29 novembre 2007 selon laquelle ne sont pas des « déchets » soumis à la TGAP, les matériaux inertes récupérés dans le but d'être utilisés à des fins de réhabilitation de la décharge, comme c'était le cas en l'espèce, et non à des fins de stockage, ces matériaux n'étant pas destinés à l'abandon ; qu'elle en déduisait que l'administration des douanes étant tenue par sa propre doctrine, aucun avis de mise en recouvrement ne pouvait être émis à son encontre ; que dès lors, en se bornant à affirmer, pour dire la Communauté d'agglomération du bassin de Thau redevable de la TGAP, que la finalité utilitaire qui était réservée aux matériaux litigieux était sans effet sur leur qualité de déchet sauf s'ils avaient été acquis à titre onéreux, ce qui n'était pas allégué en l'espèce, sans s'expliquer sur la doctrine contraire de l'administration des douanes dûment invoquée par l'exposante, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 345 bis et 266 sexies du Code des douanes.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-10203
Date de la décision : 15/01/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

DOUANES - Taxes diverses perçues par la douane - Taxe générale sur les activités polluantes - Redevable - Notion de déchets - Finalité utilitaire - Absence d'influence

La Cour de justice des Communautés européennes ayant dit pour droit par arrêt du 1er mars 2007 (C-176/05) que la notion de déchet au sens de l'article 1er de la directive n° 1975/442 du 15 juillet 1975 relative aux déchets ne doit pas s'entendre comme excluant les substances et objets susceptibles de réutilisation économique et ne présuppose pas, dans le chef du détenteur qui s'en défait, l'intention d'exclure toute réutilisation économique de cette substance ou de cet objet par d'autres personnes, une cour d'appel justifie légalement sa décision en retenant que les déchets, abandonnés à l'origine et réceptionnés, ont pris la qualité de déchets, la finalité utilitaire qui leur est réservée étant sans effet sur cette qualité


Références :

Sur le numéro 1 : article 345 du code des douanes
Sur le numéro 2 : article 266 sexies, I, 1, du code des douanes
Sur le numéro 3 : article 266 septies, 1, du code des douanes
Sur le numéro 4 : article 266 sexies, I, 1, du code des douanes

article 1er de la directive n° 1975/442 du 15 juillet 1975

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 27 octobre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 jan. 2013, pourvoi n°12-10203, Bull. civ. 2013, IV, n° 6
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, IV, n° 6

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : Mme Batut
Rapporteur ?: Mme Pezard
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.10203
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