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15/01/2013 | FRANCE | N°11-27298

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 janvier 2013, 11-27298


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le contrat d'agence commerciale qui liait la société GPG company (la société GPG) à la société Double C commerce concept (la société Double C) ayant pris fin à la suite de la reprise de la représentation par la société GPG qui a refusé d'agréer les cessionnaires dans les droits et obligations nés de ce contrat présentés par la société Double C, celle-ci l'a fait assigner en paiement d'une indemnité de cessation de contrat ; qu'au cours de cette procédure, l'asse

mblée extraordinaire des associés de la société Double C a décidé de clôtur...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le contrat d'agence commerciale qui liait la société GPG company (la société GPG) à la société Double C commerce concept (la société Double C) ayant pris fin à la suite de la reprise de la représentation par la société GPG qui a refusé d'agréer les cessionnaires dans les droits et obligations nés de ce contrat présentés par la société Double C, celle-ci l'a fait assigner en paiement d'une indemnité de cessation de contrat ; qu'au cours de cette procédure, l'assemblée extraordinaire des associés de la société Double C a décidé de clôturer les opérations de liquidation amiable dont cette société faisait alors l'objet et de céder les créances sur la société GPG et sur une société tierce, pour le prix global d'un euro, à ses associés, Mme X...et MM. Cyril et Francis X...(les consorts X...) ; que ceux-ci ayant fait assigner la société GPG en paiement de l'indemnité de cessation de contrat qui avait été allouée à la société Double C, la société GPG leur a notifié son intention d'exercer son droit de retrait litigieux ; que M. Y...a été nommé mandataire ad hoc de la société Double C ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1699 du code civil ;
Attendu que pour rejeter la demande de retrait litigieux de la société GPG et la condamner à payer aux consorts X...une certaine somme à titre d'indemnité de cessation de contrat avec intérêts, l'arrêt retient que cette société, qui a formé une demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel résultant de la rupture du contrat et sollicité leur compensation avec l'indemnité qui serait allouée à la société Double C, ne peut exercer ce droit de retrait lequel est réservé au défendeur à l'instance qui conteste le droit litigieux ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la société Double C ayant engagé une action en paiement d'une indemnité de cessation du contrat à l'encontre de la société GPG, celle-ci s'y était opposée par des moyens tendant au rejet comme non justifiée de la prétention de la partie adverse et avait sollicité subsidiairement des dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant pour elle des atermoiements de l'agent dans la présentation d'un successeur, de sorte qu'elle avait la qualité de défendeur à l'instance en contestation du droit litigieux, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1699 du code civil ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient encore que la société Double C ayant cédé deux créances pour un prix global unique, la créance cédée aux consorts X...n'a pas de prix ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que la cession en bloc de plusieurs créances ne fait pas obstacle à l'exercice du droit de retrait litigieux à l'égard d'une créance qui y est incluse si son prix est déterminable, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si la part correspondant à la créance litigieuse dans le prix de cession global était déterminable, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 1699 du code civil ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient encore que la cession de créances, dont le but était de céder les procédures en cours aux associés de la société Double C afin de clôturer la liquidation amiable de cette société, est intervenue sans intention spéculative des parties ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'exercice du droit de retrait litigieux n'est pas subordonné à l'existence d'une intention spéculative des parties à la cession de créance, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen, pris en sa cinquième branche :
Vu l'article 1699 du code civil ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient enfin que la cession de créance en cause n'est que l'accessoire des opérations de liquidation amiable de la société Double C ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la créance litigieuse était l'accessoire inséparable d'un droit principal, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de retrait de droit litigieux de la société GPG Company et l'a condamnée à payer à Mme X...et à MM. Francis et Cyril X...la somme de 98 488 euros au titre de l'indemnité de fin de contrat avec intérêts au taux légal à compter de la demande du 30 avril 2009, l'arrêt rendu le 29 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'‘ appel de Paris, autrement composée ;

Condamne Mme X...et MM. Francis et Cyril X...
aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer la somme globale de 2 500 euros à la société GPG Company et rejette leur demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société GPG Company

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société GPG COMPANY de sa demande de retrait de droit litigieux édicté par l'article 1699 du Code civil et, en conséquence, d'AVOIR condamné cette société à payer à Monsieur Francis X..., Madame Marie-Claire X...et Monsieur Cyril X...la somme de 98 488 euros au titre de l'indemnité de fin de contrat avec les intérêts au taux légal à compter de la demande du 30 avril 2009 et la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'« il convient de rappeler que lors de l'assemblée générale des associés de la SARL Double C du 23 décembre 2009 les consorts X..., associés, ont accepté les comptes de liquidation et la cession à leur profit des procédures en cours. Les consorts X...sont donc recevables, sur le fondement de cette cession de la créance litigieuse à l'encontre de la SARL GPG, dont la validité et l'opposabilité à l'encontre de l'appelante ne peuvent être contestées, à présenter des demandes à l'encontre de cette dernière dans le cadre de la présente procédure. Aux termes de l'article 1699 du code civil, " celui contre lequel on a cédé un droit litigieux peut s'en faire tenir quitte par le cessionnaire, en lui remboursant le prix de la cession avec les frais et loyaux coûts, et avec les intérêts à compter du jour où le cessionnaire a payé le prix de la cession à lui faite ". La SARL GPG soutient que la créance dont se prévalent les consorts X...à son encontre constitue bien un droit litigieux qui leur a été cédé par la SARL Double C pour la somme d'un euro et, qu'en application de l'article précité, il doit lui être donné acte :- de ce qu'elle a notifié aux consorts X..., le 4 août 2010, par voie de conclusions et à titre principal, dans le cadre de la procédure de référé, une offre de retrait litigieux portant sur la créance litigieuse invoquée par la SARL Double C à son encontre et qui leur a été cédée le 23 décembre 2009,- du paiement de la somme d'un euro, au titre du remboursement du prix réel de cession de cette créance litigieuse, et du paiement de la somme d'un centime, correspondant aux intérêts sur ce prix de cession du 23 décembre 2009 au 5 août 2010, paiement en deniers ou quittance, par chèque bancaire Crédit du Nord n° ... émis le 23 juillet 2010 libellé à l'ordre de la CARPA et remis à la barre. Elle estime que, nonobstant le refus par le conseil des consorts X...de ce chèque, le retrait litigieux est bien intervenu le 4 août 2010 et qu'il s'ensuit qu'elle est rétroactivement restituée dans le droit litigieux et que les consorts X...sont réputés n'avoir jamais été titulaires de ce droit litigieux, de sorte qu'ils sont irrecevables en leurs prétentions. Cependant, le retrait litigieux, institution dont le caractère exceptionnel impose une interprétation stricte, ne peut être exercé que par un défendeur à l'instance qui conteste le droit litigieux. Ce droit au retrait litigieux est refusé au débiteur, demandeur reconventionnel, ce qui est le cas de la SARL GPG qui, assignée le 30 avril 2009 en paiement d'une indemnité de cessation de contrat, a demandé reconventionnellement la condamnation de la SARL Double C à lui payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel résultant de la rupture du contrat d'agent commercial et la compensation de ces dommages et intérêts avec l'indemnisation qui serait allouée à la SARL Double C. Au surplus, le droit de retrait ne peut s'exercer que si la créance a un prix, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, la résolution n° 2 de l'assemblée générale extraordinaire des associés de la SARL Double C du 23 décembre 2009 ayant cédé aux consorts X...les procédures " engagées à l'encontre de G. P. G. Company devant le tribunal de commerce de Bobigny et d'I. C. D. à venir devant le tribunal de commerce de Paris ", de sorte qu'aucun prix n'a été fixé pour la procédure concernant la SARL GPG. En outre, il faut relever que, manifestement, cette cession est intervenue sans aucune intention spéculative, le but poursuivi étant de céder les procédures en cours aux associés afin de pouvoir prononcer la clôture définitive de la liquidation amiable de la SARL Double C. Cela ressort clairement du procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2009 qui mentionne : " compte tenu des délais de procédure, l'assemblée générale des associés décide de céder les créances de la société Double C Commerce Concept pour le prix de 1 € à ses trois associés à charge pour eux de faire leur affaire personnelle de la poursuite des actions sous leur propre responsabilité, a charge de régulariser les opérations sur le plan fiscal à l'issue desdites procédures ". Enfin, le retrait ne peut avoir lieu que si le droit litigieux constitue l'élément principal de la cession. Or, en l'espèce l'objet de l'assemblée générale était d'accepter les opérations de liquidation el de prononcer la liquidation définitive de la SARL Double C, la cession des deux procédures en cours dont celle à l'encontre de la SARL GPG, n'était que l'accessoire des opérations de liquidation. Ces seuls motifs suffisent à écarter la possibilité pour la SARL GPG de se prévaloir d'un retrait litigieux. Dans ces conditions, les demandes des consorts X...sont recevables et il convient de les examiner » ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE « le caractère litigieux de la créance est incontestable du fait de la procédure en cours devant la Cour d'Appel et que cette créance a bien été cédée pour le prix de 1 euro ; Attendu que, sur ces bases, GPG demande l'application de l'article 1699 du Code Civil qui lui permet d'être quitte de ce droit en remboursant le prix de cession soit 1 euro plus frais et intérêts ; Attendu que l'article 1699 du Code Civil précise bien qu'il s'agit de rembourser le prix réel de la cession y compris les frais ; Que force est de constater que le prix réel est constitué par 1 euro symbolique mais aussi sur la procédure en cours, qu'elle n'est pas chiffrée alors que le résultat de cette procédure peut être la confirmation du jugement par la Cour d'Appel ou son infirmation, et qui en résulterait en cas de confirmation un gain important pour GPG. Qu'ainsi il n'est pas possible de dire que le prix est certain. Qu'en conséquence le seul fait de prix indéterminé, ne permet pas de faire droit à la demande de retrait litigieux » ;
1. ALORS QUE le droit de retrait litigieux peut être exercé par le débiteur cédé qui est défendeur à l'instance dans laquelle le cédant lui réclame paiement de la créance litigieuse, peu important que ce débiteur formule une demande reconventionnelle, dès lors que celle-ci tend à obtenir la condamnation du cédant à lui payer des dommages et intérêts venant se compenser avec ceux qui seraient alloués à ce dernier au titre de la demande initiale ; qu'en l'espèce, en refusant l'exercice de ce droit de retrait à la société GPG COMPANY, défenderesse à l'instance en paiement d'une indemnité de cessation de contrat, au prétexte que cette société avait demandé reconventionnellement la condamnation du cédant à lui payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la rupture dudit contrat et la compensation de ces dommages et intérêts avec ceux qui seraient alloués au cédant, la Cour d'appel a violé l'article 1699 du Code civil ;
2. ALORS QUE la cession en bloc de plusieurs créances ne fait pas obstacle à l'exercice du droit de retrait litigieux à l'égard d'une créance qui y est incluse, dès lors que le débiteur cédé sollicite la communication du prix de la créance en cause permettant de déterminer sa quote-part dans ce prix ; que l'arrêt a retenu que la société DOUBLE C avait cédé deux créances pour un prix unique, pour en déduire que la créance cédée aux consorts X...n'avait pas de prix, de sorte que l'exercice du droit de retrait devait être refusé ; qu'en statuant ainsi, quand il lui appartenait, comme il le lui était demandé, de déterminer la part correspondant à la créance litigieuse dans le prix de cession global, la Cour d'appel a violé l'article 1699 du Code civil ;
3. ALORS QUE le droit de retrait litigieux peut être exercé par le débiteur cédé en payant au cessionnaire le prix qu'il a acquitté au cédant, peu important l'absence d'intention spéculative des parties à la cession ; qu'en se fondant sur la circonstance que la cession en cause était intervenue sans intention spéculative, pour refuser au débiteur cédé l'exercice du droit de retrait litigieux, la Cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne pose pas, a violé l'article 1699 du Code civil ;
4. ALORS en toute hypothèse QU'à supposer même que l'exercice du droit de retrait litigieux soit subordonné à l'existence d'une intention spéculative des parties à la cession, il ressortait des constatations de l'arrêt attaqué que la créance en cause avait été cédée aux associés de la société DOUBLE C « à charge pour eux de faire leur affaire personnelle de la poursuite des actions sous leur propre responsabilité, à charge de régulariser les opérations sur le plan fiscal à l'issue desdites procédures » ; que, par suite, cette cession était assortie d'obligations mises à la charge des cessionnaires dont découlait le caractère spéculatif de la cession ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1699 du Code civil ;
5. ALORS QUE l'exercice du droit de retrait litigieux n'est exclu que si le droit litigieux était l'accessoire inséparable d'un droit principal ; que l'arrêt a affirmé que la cession de la créance en cause n'était que l'accessoire des opérations de liquidation amiable de la société DOUBLE C, dès lors que l'objet de l'assemblée générale de cette société était d'accepter les opérations de liquidation et de prononcer la liquidation définitive de cette société, pour en déduire l'impossibilité, pour la société GPG COMPANY, de se prévaloir d'un retrait litigieux ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la créance litigieuse était l'accessoire inséparable d'un droit principal, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1699 du Code civil ;
6. ALORS QUE l'exercice du droit de retrait litigieux implique seulement que la cession de créance en cause ait fait l'objet d'un prix déterminable, peu important le montant de la créance tel qu'il aurait pu être ultérieurement fixé par le juge ; qu'à supposer adoptés sur ce point les motifs des premiers Juges, l'arrêt attaqué, pour écarter le retrait, aurait affirmé que le prix de la cession était indéterminé, dès lors que la procédure en cours « n'est pas chiffrée alors que le résultat de cette procédure peut être la confirmation du jugement par la Cour d'Appel ou son infirmation, et qui en résulterait en cas de confirmation un gain important pour GPG » (cf. jugement du 25 janvier 2011, p. 10, al. 2) ; qu'en statuant ainsi, quand seule importait, pour l'exercice du droit de retrait, l'existence d'un prix de cession, fût-il d'un euro, la Cour d'appel a violé l'article 1699 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
, invoqué à titre subsidiaire

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société GPG COMPANY à payer à Monsieur Francis X..., Madame Marie-Claire X...et Monsieur Cyril X...la somme de 98 488 euros au titre de l'indemnité de fin de contrat avec les intérêts au taux légal à compter de la demande du 30 avril 2009, d'AVOIR débouté la société GPG COMPANY de sa demande tendant à voir condamner la société DOUBLE C à lui verser la somme de 179 394 euros hors taxe à titre de dommages et intérêts et d'AVOIR condamné la société GPG COMPANY à payer aux consorts X...la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « la SARL GPG soutient à tort que la SARL Double C a cessé son contrat d'agent commercial et que donc, en application de l'article L 134-13 du code de commerce, elle ne peut prétendre à la réparation prévue à l'article L 134-12 du même code. Or, la SARL Double C n'a jamais informé la SARL GPG qu'elle entendait mettre fin à son contrat d'agent mais a simplement indiqué qu'elle entendait cesser son activité et céder ledit contrat d'agent. C'est ainsi qu'elle écrivait en recommandé avec accusé de réception à son mandant le 29 septembre 2008 : " Par la présente je vous fais part de la cessation de notre activité d'agence commerciale à la fin de l'année 2008. Afin de respecter la cession et transmission de notre contrat, dans un premier temps nous vous demandons, si vous désirez exercer votre droit de préemption ; suite à votre réponse dans un délai raisonnable nous vous confirmerons les noms des acquéreurs pour acceptation des successeurs. La cession de la carte a été fixée à 100 000 €, somme acceptée à ce jour par les acquéreurs ". Il résulte des éléments du dossier et notamment des divers courriers échangés entre les parties entre septembre 2008 et janvier 2009 que la SARL Double C a présenté deux candidats à la SARL GPG. Par un second courrier recommandé avec accusé de réception en date du 4 janvier 2008 elle a réitéré sa demande en ces termes : " En date du 29. 09. 2008..... nous vous avons demandé, suite à la cession de notre contrat, si vous désirez exercer votre droit de préemption ; or à ce jour vous n'avez toujours pas répondu ". Puis par courrier de son conseil en date du 26 janvier 2009 elle lui a demandé de prendre position sur l'agrément du deuxième candidat présenté, à défaut de quoi elle sollicitait le paiement d'une indemnité de fin de contrat. Il est donc acquis que la société Double C n'a jamais mis fin de son propre chef à son contrat d'agent commercial, l'exclusion du droit à indemnité compensatrice ne pouvant résulter d'une cessation d'activité mais seulement d'une cessation du contrat, qui n'existe pas en l'espèce. Les consorts X...peuvent donc prétendre à une indemnité compensatrice de fin de contrat en application de l'article L. 134-12 du code de commerce. La SARL GPG a en effet eu une attitude déloyale à l'égard de son agent commercial en tardant à l'informer de son refus d'agréer les candidats proposés et de sa volonté de reprendre la marque " Doc Martens " en gestion directe alors qu'elle savait depuis le courrier du 29 septembre 2008 susvisé que la cessation d'activité de la SARL Double C était prévue pour le 31 décembre 2008. La société Double C a été maintenue entre fin septembre et fin décembre 2008 dans l'expectative de la position de son mandant, celui-ci ne répondant que tardivement à ses courriels et faisant en sorte de mettre en échec le droit de présentation de celui-ci, aboutissant à priver celle-ci de son pouvoir de présentation et du potentiel de commissions généré par son activité et à s'approprier gratuitement la part de marché que l'agent commercial avait développé. En outre, la SARL GPG n'avait pas de motifs légitimes et sérieux pour refuser les successeurs présentés, la société ASSA, représentant avec succès une autre marque connue de chaussures, Bensimon, et Monsieur Patrick A..., sous agent de la société ASSA, ayant également compétence dans le domaine concerné. Il est clair que dès la notification de la cessation d'activité de la SARL Double C, la SARL GPG a eu la volonté de reprendre la marque " Doc Martens " en gestion directe et de refuser son agrément à tout successeur dans le contrat de mandat d'agent commercial, ce dont elle avait certes la possibilité mais à la condition de régler l'indemnité due à son agent commercial, obligation qu'elle a manifestement tenté de contourner. La rupture du contrat d'agent commercial est donc imputable à la SARL GPG qui doit indemniser les consorts X..., venant aux droits de la SARL Double C, du préjudice résultant de cette rupture. La SARL GPG ne saurait soutenir que la SARL Double C, respectivement les consorts X..., n'aurait subi qu'un préjudice virtuel dès lors qu'elle avait décidé de cesser toute activité de sorte qu'elle ne pourrait prétendre à aucune indemnité. En effet, la valeur patrimoniale du contrat d'agent commercial et sa cessibilité sont légalement protégées, sauf si la cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. L'agent n'a pas à apporter de preuve particulière du préjudice subi car la cessation de son contrat est à elle seule constitutive du préjudice puisqu'elle fait perdre à celui-ci la valeur de ce contrat. Il est d'usage de calculer l'indemnité de cessation du contrat sur la base de la moyenne des trois dernières années d'exercice normal du contrat, cette moyenne s'établissant à la somme de 49. 244 € (52. 629 € en 2006, 39. 328 € en2007 et 55. 774 € en 2008). Compte tenu de la durée de cinq ans du mandat d'agent commercial et des circonstances de la rupture, l'indemnité habituellement retenue correspondant à deux années d'exercice du mandat, est appropriée. Il convient donc d'allouer aux consorts X...une indemnité de 98. 488 €. Ce montant doit être assorti des intérêts au taux légal à compter de la demande du 30 avril 2009. Les consorts X...sont suffisamment indemnisés par l'octroi de l'indemnité de fin de mandat susvisée et ne saurait se prévaloir d'un quelconque préjudice supplémentaire. Ils doivent être déboutés de leur demande en paiement d'une somme supplémentaire de 10. 000 € à titre de dommages et intérêts.- Sur les autres demandes : Compte tenu de la motivation développée ci-dessus, la SARL CPG ne saurait réclamer des dommages et intérêts en réparation d'un préjudice matériel qu'elle aurait subi du fait de la rupture du contrat d'agent commercial qui lui est imputable. Elle doit être déboutée de toutes ses demandes plus amples ou contraires. L'équité commande d'allouer aux consorts X...une indemnité de 8. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile » ;
1. ALORS QU'il appartient à l'agent commercial qui prend l'initiative de cesser d'exécuter son contrat, qu'il envisage de céder, de transmettre au mandant les noms des candidats à la reprise du contrat en temps utile, afin que le mandant puisse se prononcer sur leur agrément avant la cessation d'activité ; qu'en affirmant que la société GPG COMPANY avait eu une attitude déloyale à l'égard de son agent commercial, la société DOUBLE C, en tardant à l'informer de son refus d'agréer les candidats proposés et de sa volonté de reprendre la marque « Doc Martens » en gestion directe cependant qu'elle savait, depuis le 29 septembre 2008, que la cessation d'activité dont son agent avait pris l'initiative, était prévue pour le 31 décembre 2008, sans vérifier, comme elle y était invitée, si la société GPG COMPANY avait bénéficié du temps utile pour se prononcer sur les candidatures proposées, dont il n'était pas contesté que la première ne l'avait été que le 8 décembre 2008, et la seconde, après expiration du contrat, le 2 janvier 2009, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce ;
2. ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les termes du litige tels qu'ils résultent des conclusions des parties ; qu'en l'espèce, il était constant que les successeurs présentés par l'agent commercial étaient la société ASSA, d'une part, Monsieur et Madame Z..., d'autre part ; qu'en affirmant que lesdits successeurs étaient la société ASSA et Monsieur Patrick A..., pour en déduire que la société GPG COMPANY n'avait pas de motifs légitimes et sérieux pour refuser leur candidature, la Cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;
3. ALORS QUE dans ses conclusions récapitulatives (p. 36-37), la société GPG COMPANY soutenait qu'elle avait des raisons sérieuses et objectives de refuser d'agréer la société ASSA à la cession du contrat d'agence commerciale, dès lors que son gérant ne démontrait pas une expérience personnelle et récente de la distribution de chaussures de type « Dr. Martens » en région Sud-Ouest et que le gérant de cette société, Monsieur B..., avait engagé en 2004 une procédure prud'homale à l'encontre la société GPG, ce qui avait pu légitimement alimenter sa défiance ; qu'en se bornant à affirmer que la société GPG n'avait pas de motifs légitimes et sérieux pour refuser son agrément à la société ASSA, au prétexte que celle-ci représentait la marque BENSIMON, sans répondre à ce moyen péremptoire, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
4. ALORS QUE les raisons sérieuses et objectives qui autorisent le mandant à refuser l'agrément d'un candidat à la cession du contrat d'agence commerciale s'apprécient en fonction des éléments connus à la date à laquelle cette candidature est présentée ; qu'en l'espèce, pour soutenir que la société ASSA disposait des compétences nécessaires pour représenter le mandant, les consorts X...alléguaient dans leurs conclusions signifiées le 24 mai 2011 (p. 18, al. 1er) que cette société « représente aujourd'hui dans son secteur la marque très connue de chaussures BENSIMON » ; qu'en affirmant que la société GPG COMPANY n'avait pas de motifs légitimes et sérieux pour refuser la candidature de la société ASSA, représentant avec succès la marque BENSIMON, sans vérifier, comme elle y était invitée, si la société ASSA assurait déjà la représentation de cette marque à la date à laquelle cette candidature était présentée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce ;
5. ALORS QUE le juge ne saurait procéder par voie de simple affirmation ; qu'en énonçant « qu'il est clair que dès la notification de la cessation d'activité de la SARL Double C, la SARL GPG a eu la volonté de reprendre la marque " Doc Martens " en gestion directe et de refuser son agrément à tout successeur dans le contrat de mandat d'agent commercial » (arrêt, p. 10, al. 7), sans préciser autrement les éléments sur lesquels elle fondait cette simple affirmation, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-27298
Date de la décision : 15/01/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CESSION DE CREANCE - Retrait litigieux - Conditions - Qualité du retrayant - Défendeur à l'instance qui conteste le droit litigieux - Condition suffisante

CESSION DE CREANCE - Retrait litigieux - Conditions - Qualité du retrayant - Défendeur à l'instance qui conteste le droit litigieux - Obstacle - Demande reconventionnelle (non)

Viole l'article 1699 du code civil, la cour d'appel qui retient que le retrayant, qui a formé une demande reconventionnelle et sollicité la compensation entre les créances en cause, ne peut exercer le droit de retrait prévu par ce texte, lequel est réservé au défendeur à l'instance qui conteste le droit litigieux, alors que ce retrayant s'était opposé à la prétention adverse par une défense au fond et avait sollicité à titre subsidiaire des dommages-intérêts, de sorte qu'il avait la qualité de défendeur à l'instance en contestation du droit litigieux


Références :

article 1699 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 septembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 jan. 2013, pourvoi n°11-27298, Bull. civ. 2013, IV, n° 3
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, IV, n° 3

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : Mme Batut
Rapporteur ?: Mme Laporte
Avocat(s) : SCP Gaschignard, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.27298
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