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28/11/2012 | FRANCE | N°12-81821

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 novembre 2012, 12-81821


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Romuald X..., partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PAPEETE, en date du 7 février 2012, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre personne non dénommée, des chefs de dégradations et destructions facilitées par l'état d'une personne vulnérable, abattage d'arbres sans autorisation préalable, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

Vu les mémoire en demande,

en défense et les observations complémentaires produits ;

Sur le moyen unique de c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Romuald X..., partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PAPEETE, en date du 7 février 2012, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre personne non dénommée, des chefs de dégradations et destructions facilitées par l'état d'une personne vulnérable, abattage d'arbres sans autorisation préalable, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

Vu les mémoire en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 322-1, 322-3 du code pénal, 555 du code civil, des délibérations n° 58-19 du 7 février 1958 sur le régime des eaux et forêts de la Polynésie-Française et n° 74-96 du 3 juillet 1974 modifiant la précédente, 177, 211, 212, 592 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu entreprise ;

" aux motifs que dès le 26 février 2009, Mme Y... a assigné devant le juge des référés M. Romuald X... pour lui voir faire interdiction d'entreprendre et de continuer tous travaux sur la terre ... ; que, par arrêt du 8 février 2010, la cour d'appel de Papeete a estimé que la contestation par Mme Y... de la qualité de possesseur trentenaire de M. X... était sérieuse, que les travaux et ouvrages réalisés par lui sur la parcelle S 95 l'avaient été sans droit ni titre et constituaient un trouble manifestement illicite et qu'il convenait de faire injonction à M. X... de s'abstenir de réaliser tous travaux, constructions, abattages, défrichements etc... sur la parcelle S 95 de 18 hectares 95 a 14 ca dénommée terre ... lot D ; qu'en l'état des titres de propriété versés aux débats et de cette décision de justice, il ne peut être reproché à M. Henri Z..., agissant pour le compte de la propriétaire Mme Y..., d'avoir détruit ou dégradé des biens appartenant à autrui ; que M. X... ne peut se prétendre victime d'un abattage d'arbres dont les pièces de la procédure ne permettent pas de considérer qu'il en ait été propriétaire, une autorisation ayant par ailleurs été délivrée le 9 avril 2009 à M. Yanis Z..., fils d'Henri Z..., pour abattre 81 arbres sur le lot 595 de la terre ..., justifiant les abattages de quelques arbres réalisés ;

" 1°) alors que l'infraction de destruction ou dégradation de biens appartenant à autrui est caractérisée dès lors qu'ont été détruits des biens qui n'appartenaient pas à l'auteur des faits ; que M. Z..., prétendu locataire du terrain où se trouvaient les travaux, équipements et constructions effectués par M. X..., et qu'il a détruits, n'en était certainement pas propriétaire, et que l'élément matériel de l'infraction était certainement caractérisé ; que la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;

" 2°) alors que l'existence d'un litige entre M. X..., propriétaire des biens et équipements détruits, et Mme Y..., prétendue bailleresse de M. Z..., à propos du terrain litigieux, litige pendant devant la juridiction civile et non encore tranché à la date des faits, loin de faire disparaître l'infraction, en consacre la matérialité, aucun tiers ne pouvant à cette date se prétendre propriétaire des biens et équipements installés sur le terrain par M. X... ; que la cour d'appel a encore violé les textes susvisés ;

" 3°) alors que, en toute hypothèse, à supposer irrégulière ou insuffisante pour parvenir à l'usucapion la possession de M. X... sur le terrain lui-même, cette circonstance ne pouvait en aucun cas constituer un fait justificatif de l'infraction commise par M. Z..., lui-même dépourvu de tout droit de propriété sur les biens en cause ; que pas davantage ne pouvait justifier l'infraction la circonstance que, postérieurement aux faits un arrêt de référé ait interdit à M. X... de poursuivre ses travaux sur le terrain contesté, cette décision n'autorisant pas même après son prononcé, la destruction des ouvrages existants ; que l'infraction restait donc constituée ;

" 4°) alors que, quels que soient les liens juridiques existant entre M. Z... et la prétendue propriétaire, et le prétendu mandat qu'aurait donné cette dernière à M. Z..., celui-ci ne pouvait pas trouver dans ces liens juridiques la moindre justification à la destruction illicite qu'il a personnellement commise ; qu'en prétendant exclure l'infraction par le motif inopérant selon lequel M. Z... agissait « pour le compte » de Mme Y..., la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;

" 5°) alors qu'en l'absence de toute décision définitive attribuant le terrain à quelqu'un d'autre que M. X..., et décidant du sort des travaux et ouvrages qu'il avait réalisés paisiblement jusqu'à la protestation élevée en février 2009, la propriétaire prétendue ne pouvait, directement ou par personne interposée, détruire ou faire détruire ces travaux et ouvrages ; que la chambre de l'instruction a encore violé les textes précités ;

" 6° alors qu'en outre, s'agissant de la question de l'autorisation d'abattre des arbres qui est strictement encadrée en Polynésie sous peine de sanctions, ainsi que l'a fait valoir M. X..., l'autorisation qui a été délivrée à M. Yanis Z..., fils de M. Henri Z..., le 9 avril 2009, est, en toute hypothèse postérieure aux faits commis, non par M. Yanis Z... mais par M. Henri Z..., courant mars 2009 et ne peut donc faire disparaître l'infraction consistant à avoir abattu des arbres sans en avoir fait la déclaration préalable et sans y avoir été autorisé au sens des textes susvisés ; qu'ainsi l'arrêt attaqué a privé sa décision de motif " ;

Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. X..., qui soutenait avoir acquis une parcelle de terre de Mme Y..., par acte du 6 septembre 1972, a porté plainte et s'est constitué partie civile contre M. Henri Z... des chefs de dégradations et destructions facilitées par l'état d'une personne vulnérable, abattage d'arbres sans autorisation préalable, en reprochant à cette personne d'avoir détruit, sur cette parcelle, des édifices, un portail, des clôtures, des piquets de bornage et d'y avoir abattu des arbres, faits commis les 13 mars, 27 mars et 16 avril 2009 ; que Mme Y..., qui soutenait que l'acte de vente ne portait pas sur cette partie non cadastrée du terrain qu'elle avait donnée en location à M. Z..., a assigné M. X..., en référé, le 26 février 2009 pour lui faire interdiction d'entreprendre et de continuer tous travaux ; que par arrêt du 8 février 2010, la cour d'appel a jugé que sa contestation de la qualité de possesseur trentenaire de M. X... était sérieuse, que les ouvrages réalisés sur la parcelle l'avaient été sans droit ni titre et constituaient un trouble manifestement illicite, et a fait injonction à celui-ci de s'abstenir de réaliser tous nouveaux travaux ;

Attendu que, pour écarter les articulations du mémoire de la partie civile qui faisaient valoir qu'il avait légitimement cru, en dépit du silence de l'acte, que cette parcelle faisait partie de la vente, qu'il s'était comporté en propriétaire depuis plus de trente ans et que Mme Y... n'avait pas revendiqué cette terre avant 2008, la chambre de l'instruction énonce, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu, qu'en l'état des titres de propriété versés aux débats et de l'arrêt du 8 février 2008, il ne peut être reproché à M. Z... agissant pour le compte de la propriétaire, Mme Y..., d'avoir détruit ou dégradé des biens appartenant à autrui ; que la chambre de l'instruction ajoute que M. X... ne peut se prétendre victime d'un abattage d'arbres dont les pièces de la procédure ne permettent pas de considérer qu'il en est le propriétaire, une autorisation d'abattage ayant par ailleurs été délivrée le 9 avril 2009 au fils de M. Z... ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la juridiction civile avait été saisie au fond, et alors que la procédure d'information était suspendue tant que cette juridiction n'avait pas définitivement statué sur la question préjudicielle de propriété immobilière, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Papeete, en date du 7 février 2012, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Papeete, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT n'y avoir lieu à application, au profit de M. Henri Z..., de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Papeete et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Moreau conseiller rapporteur, M. Pometan conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-81821
Date de la décision : 28/11/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - Arrêts - Arrêts de non-lieu - Nullité - Insuffisance de motifs - Cas - Information suspendue en raison d'une question préjudicielle de propriété immobilière

Ne justifie pas sa décision de non-lieu l'arrêt d'une chambre de l'instruction qui statue sans rechercher si la juridiction civile, saisie d'abord en référé, avait ensuite statué au fond, alors que l'information judiciaire ouverte du chef de dégradations volontaires était suspendue tant que la juridiction civile ne s'était pas prononcée sur la question préjudicielle de propriété immobilière


Références :

article 593 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Papeete, 07 février 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 nov. 2012, pourvoi n°12-81821, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Sassoust
Rapporteur ?: M. Moreau
Avocat(s) : Me Carbonnier, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:12.81821
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