LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois K 11-20. 776 et M 11-20. 984 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. X... et Y... ont été engagés par la société Entreprises Morillon Combot Corvol selon des contrats d'engagement maritime des 10 décembre 2002 et 11 novembre 1996 ; qu'ils ont saisi le tribunal d'instance afin d'obtenir notamment la condamnation de leur employeur au paiement de rappels de salaire ; que le syndicat maritime FO du Littoral Manche-Mer du Nord est intervenu à l'instance ;
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches, du pourvoi de l'employeur et le troisième moyen du pourvoi des salariés et du syndicat :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le moyen unique du pourvoi de l'employeur, pris en sa première branche :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le SMIC terrestre est applicable à compter du 1er mai 2008, alors, selon le moyen, qu'en énonçant, s'agissant de la période postérieure au 1er mai 2008, que les articles D. 742-1 et D. 742-2 du code du travail n'ayant pas été repris dans la codification, il doit être considéré que les dispositions relatives à la détermination du SMIC dans le secteur terrestre sont provisoirement applicables au secteur maritime, quand la recodification du code du travail ayant été effectuée à droit constant et les articles D. 742-1 et D. 742-2 précités du code du travail n'ayant pas été abrogés, mais seulement non repris et, par suite, demeurés en vigueur, ce qui impliquait le maintien de l'application du salaire minimum de croissance maritime, la cour d'appel a violé les textes précités, ensemble l'accord collectif du 16 septembre 1977 signé par l'employeur avec la CGT des gens de mer de Saint-Malo ;
Mais attendu que les dispositions des articles D. 742-1 et D. 742-2 du code du travail, qui n'ont été ni reprises ni transférées lors de la recodification du code du travail, ont été abrogées par l'article 9 du décret n° 2008-244 du 7 mars 2008, faute d'être au nombre de celles maintenues en vigueur par l'article 10 du dit décret ; que la cour d'appel en a exactement déduit que le SMIC terrestre était applicable à compter du 1er mai 2008 ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais, sur le moyen unique du pourvoi de l'employeur, pris en sa cinquième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déterminer la créance des salariés pour la période postérieure au 1er mai 2008, l'arrêt retient que le salaire minimum en espèces garanti est déterminé en déduisant du SMIC les sommes fixées pour évaluer les avantages en nature ; que pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2009, le taux du SMIC légal est de 8, 82 euros ; que pour 208 heures, le salaire de base du salarié est de 1 834, 56 euros (8, 82 X 208), auquel on ajoute l'indemnité mensuelle de nourriture de 478, 33 euros ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui s'est contredite, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Sur le premier moyen du pourvoi des salariés et du syndicat :
Vu les articles L. 3121-41, D. 742-1 et D. 742-2 du code du travail, alors en vigueur ;
Attendu que pour débouter les salariés de leur demande de rappel de salaire pour la période antérieure au 1er mai 2008, l'arrêt retient que selon l'article D. 742-1 ancien, lorsque le contrat d'engagement prévoit qu'il sera nourri par l'armateur, le salaire horaire minimum garanti du marin est égal au salaire minimum de croissance, diminué d'un huitième et selon l'article D. 742-2 du code du travail, lorsque le contrat d'engagement ne prévoit pas qu'il sera nourri par l'armateur, l'indemnité de nourriture allouée aux marins à titre de complément de salaire n'entrera en compte dans le calcul du salaire minimum de croissance calculé comme il est dit à l'article précédent que pour les trois-quarts de sa valeur ; que le premier juge a dès lors retenu à juste titre que les majorations dues au titre des heures supplémentaires devaient tenir compte de ces abattements ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la majoration pour heures supplémentaires doit porter sur le salaire de base réel du salarié et non sur le salaire minimum garanti, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le deuxième moyen du pourvoi des salariés et du syndicat, propre à M. Y... :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt déboute le salarié de ses demandes tendant à l'annulation de la mise à pied disciplinaire qui lui avait été infligée le 9 juillet 2010 et au paiement de rappels de salaire ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du salarié qui invoquait l'irrégularité de la procédure disciplinaire en raison d'une composition de la commission de discipline contraire aux dispositions de la convention collective nationale des personnels navigants d'exécution des entreprises de remorquage, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute les salariés de leur demande de rappel de salaires pour la période antérieure au 1er mai 2008, invite les parties à calculer, sur les bases retenues par l'arrêt les sommes dues à MM. X... et Y... au titre des rappels de salaire sur le SMIC pour les cent cinquante-deux premières heures et de la majoration pour heures supplémentaires, outres les congés payés afférents, et déboute M. Y... de ses demandes tendant à l'annulation de la mise à pied disciplinaire qui lui avait été infligée le 9 juillet 2010 et au paiement de rappels de salaire, l'arrêt rendu le 10 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la société Entreprise Morillon Combot Corvol aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Entreprise Morillon Combot Corvol à payer à MM. X... et Y... et au syndicat maritime FO du Littoral Manche-Mer du Nord, la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi n° K 11-20. 776 par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, la SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat aux Conseils, pour la société Entreprise Morillon Combot Corvol
La SNC ENTREPRISES MORILLON COMBOT CORVOL reproche à la Cour d'appel d'AVOIR, par infirmation du jugement entrepris, « dit que le SMIC terrestre est applicable à compter du 1er mai 2008 et invite les parties à calculer, sur les bases retenues par l'arrêt, les sommes dues à MM. X... et Y... au titre des rappels de salaire sur le SMIC pour les 152 premières heures et de la majoration pour heures supplémentaires, outre les congés payés afférents » et « ordonné à la société EMCC de remettre des bulletins de paie rectifiés à MM. X... et Y... (…) ».
AUX MOTIFS QUE « sur le rappel de salaire à compter du 1er mai 2008 : les appelants soutiennent que les articles D. 742-1 et D. 742-2 ont été abrogés à compter du 1er mai 2008 à l'occasion de la recodification du code du travail et revendiquent l'application du SMIC de droit commun ; la circulaire DGT 2008/ 05 du 8 avril 2008 précise que certaines « dispositions de l'ancien code du travail (…) n'ont pas été codifiées dans le nouveau code, soit parce qu'elles renvoient à des dispositifs qui n'existent plus mais dont certains publics peuvent encore bénéficier, soit parce qu'elles ont vocation à être codifiées prochainement dans un nouveau code à paraître » (…) Ces articles resteront en vigueur jusqu'à leur codification dans le code concerné. Ces articles sont désignés comme « non repris » dans les tables de correspondance. Ils doivent être cités sous leur appellation antérieure (« article L … du code du travail (ancien) » ; les articles D. 742-1 et D. 742-2 n'ayant pas été repris dans la codification, il doit être considéré que les dispositions relatives à la détermination du SMIC dans le secteur terrestre sont provisoirement applicables au secteur maritime, comme l'indique au demeurant l'avis du ministère de l'écologie du 19 juillet 2010 ; en outre, il convient de prendre en compte les exigences de la convention du travail maritime de 2006 et de la convention n° 188 sur le travail dans la pêche de l'OIT en matière de nourriture et de logement des gens de mer, dont l'article 27 prévoit que la nourriture et l'eau potable doivent être fournies par l'armateur à la pêche, sans frais pour le pêcheur ; l'article 72 du code du travail maritime précise, quant à lui, que les marins ont droit à la nourriture ou à une allocation équivalente pendant toute la durée de leur inscription au rôle d'équipage ; l'article 26 du code du travail maritime prévoit la possibilité d'un mode forfaitaire de rémunération du travail supplémentaire par conventions ou accords collectifs ; l'accord collectif du 16 septembre 1977 signé par la société EMCC et la confédération générale du travail des gens de mer de SAINT-MALO prévoit que « l'armateur est tenu d'assurer au marin un salaire basé sur 48 heures de travail par semaine (soit 208 heures par mois) », disposition reprise par l'accord du 15 janvier 1988 et signé par la direction des sociétés EMCC et ARMOR et les marins eux-mêmes ; les bulletins de paie de M. X... indiquent un salaire mensuel de base de 208 heures avec un taux unique de 7, 64 € (soit 1. 589, 12 € par mois) et ne font ainsi pas apparaître la majoration pour heures supplémentaires, contrairement aux allégations de l'employeur ; dans leurs calculs, les salariés se fondent sur les règles du code du travail ; il s'ensuit que, lorsque la rémunération d'un salarié est, ; de manière habituelle, constituée par la fourniture de la nourriture et du logement ou d'autres avantages en nature, il y a lieu de lui assurer un minimum en espèces ; ce salaire minimum en espèces garanti est déterminé en déduisant du SMIC les sommes fixées pour évaluer les avantages en nature ; par application de la réglementation sur les heures supplémentaires, le salarié a ainsi accompli par mois 152 heures au taux normal, 35 heures supplémentaires majorées à 25 % et 21 heures majorées à 50 % ; pour le paiement du différentiel sur les heures supplémentaires, il convient de prendre la base de calcul fournie par le salarié pour l'année 2004 et indiquée de la façon suivante : «- M. X... a perçu un salaire de base de 1. 362, 40 € pour 208 heures ainsi qu'une indemnité mensuelle de nourriture de 454, 77 € soit un total de 1. 817, 17 pour 208 heures ; sa rémunération horaire était donc de 8, 74 € ; ainsi, une heure majorée à 25 % est égale à 10, 93 € et à 13, 11 € pour une heure majorée à 50 % ;- Pour 12 mois, il faut donc calculer le différentiel entre ce que le salarié a perçu et ce qu'il aurait dû percevoir du fait de la majoration pour heures supplémentaires soit (10, 93 €-8, 74 €) x 35 = 76, 65 e ; (13, 11 – 8, 74 €) x 21 = 91, 77 € ; il s'ensuit qu'il peut prétendre à la somme de 2. 021, 04 € (76, 65 + 91, 77 x 12) au titre de la majoration pour heures supplémentaires pour l'année 2004 ; il convient d'appliquer cette méthode de calcul aux heures supplémentaires effectuées à compter de mai 2008, en faisant toutefois application du taux du SMIC terrestre et non plus maritime, les articles D. 742-1 et D. 742-2 du code du travail n'ayant pas été repris à la suite de la recodification ; pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2009, le taux du SMIC légal est de 8, 82 € ; ainsi, pour 208 heures, le salaire de base du salarié est de 1. 834, 56 € (8, 82 x 208), auquel on ajoute l'indemnité mensuelle de nourriture de 478, 33 € ; ainsi, M. X... a perçu une rémunération de 2. 312, 89 € pour 208 heures, soit un taux horaire de 11, 11 € (2. 312, 89/ 208) ; il s'ensuit qu'il peut prétendre à des heures majorées à 25 % égales à 13, 88 € et des heures majorées à 50 % égales à 16, 66 € soit pour 12 mois à une somme totale de 4. 833, 36 € au titre des majorations pour heures supplémentaires : (13, 88 €-7, 73 €) x 35 = 215, 25 € sur 12 mois ; (16, 66 € – 7, 73 €) x 21 = 187, 53 € sur 12 mois ; il convient donc d'inviter les parties, à partir de ces bases, à calculer les sommes dues à MM. X... et Y... au titre de la majoration pour heures supplémentaires ; en outre, compte tenu de l'application du SMIC terrestre, il y a lieu d'accorder aux salariés un rappel de salaire sur le SMIC mensuel pour les 152 premières heures ; sur les congés payés, la cour fait sienne la motivation du tribunal d'instance, sauf à accorder aux salariés un rappel de congés payés sur les rappels de SMIC terrestre et de majoration pour heures supplémentaires pour la période à compter du 1er mai 2008 (…) »,
ALORS QUE 1°) en énonçant, s'agissant de la période d'exécution du contrat de travail postérieure au 1er mai 2008, que « les articles D. 742-1 et D. 742-2 du Code du travail n'ayant pas été repris dans la codification, il doit être considéré que les dispositions relatives à la détermination du SMIC dans le secteur terrestre sont provisoirement applicables au secteur maritime », quand la recodification du Code du travail ayant été effectuée à droit constant et les articles D. 742-1 et D. 742-2 précités du Code du travail n'ayant pas été abrogés mais seulement non repris et, par suite, demeurés en vigueur, ce qui impliquait le maintien de l'application du salaire minimum de croissance maritime, la Cour d'appel a violé les textes précités, ensemble l'accord collectif du 16 septembre 1977 signé par l'employeur avec la CGT des gens de mer de Saint-Malo.
ALORS QUE 2°), en énonçant, s'agissant de la période d'exécution du contrat de travail postérieure au 1er mai 2008, qu'« il convient de prendre en compte les exigences de la convention du travail maritime de 2006, sans s'expliquer autrement sur les dispositions qu'elle jugeait applicables à l'espèce, la Cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles D. 742-1 et D. 742-2 du Code du travail, ensemble l'accord collectif du 16 septembre 1977 signé par l'employeur avec la CGT des gens de mer de Saint-Malo.
ALORS QUE 3°) en énonçant, s'agissant de la période d'exécution du contrat de travail postérieure au 1er mai 2008, qu'« il convient de prendre en compte (…) la convention n° 188 sur le travail dans la pêche de l'OIT en matière de nourriture et de logement des gens de mer », quand cette convention n'est applicable qu'aux entreprises du secteur de la pêche, sans constater que l'employeur aurait figuré au nombre de ceux-ci, ce qui au surplus n'est pas le cas, la Cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles D. 742-1 et D. 742-2 du Code du travail, ensemble l'accord collectif du 16 septembre 1977 signé par l'employeur avec la CGT des gens de mer de Saint-Malo.
ALORS QUE 4°) en énonçant, s'agissant de la période d'exécution du contrat de travail postérieure au 1er mai 2008, que « les bulletins de paie de M. X... indiquent un salaire mensuel de base de 208 heures avec un taux unique de 7, 64 € (soit 1. 589, 12 € par mois) et ne font ainsi pas apparaître la majoration pour heures supplémentaires, contrairement aux allégations de l'employeur », quand la mention précitée suffisait à assurer la régularité des bulletins de paie, dès lors qu'ils indiquaient la nature et le volume du forfait mensuel de 208 heures convenu avec le salarié et donnant lieu à une rémunération forfaitaire intégrant les majorations pour heures supplémentaires forfaitisées, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil, D. 742-1 et D. 742-2 du Code du travail, ensemble l'accord collectif du 16 septembre 1977 signé par l'employeur avec la CGT des gens de mer de Saint-Malo.
ALORS QUE 5°), en fixant les rappels de salaire au moyen d'un calcul ajoutant au salaire minimum de croissance l'indemnité mensuelle de nourriture, quand elle aurait dû déduire celle-ci de celui-là, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et D. 3231-9 du Code du travail,
Moyens produits au pourvoi n° M 11-20. 984 par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X... et autres
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... et Monsieur Y... de leurs demandes en paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires majorées, outre les congés payés afférents, pour la période antérieure au 1er mai 2008, et à la remise de bulletins de paie rectifiés ;
AUX MOTIFS QUE sur le rappel de salaire à titre de majoration pour heures supplémentaires, les salariés soutiennent qu'aucun accord d'entreprise n'a été conclu au sein de la société EMCC de sorte que c'est le droit commun qui s'applique, et que la lecture des bulletins de salaire ne fait apparaître aucune heure supplémentaire majorée ; qu'ils sollicitent l'application du SMIC terrestre à compter du 1er mai 2008 ; que la société réplique que les heures supplémentaires ont été réglées avec majoration de salaire car elles ont été intégrées à leur rémunération de base qui a pris la forme d'une rémunération forfaitaire, modalité admise par la jurisprudence et consacrée par la loi ; que sur le rappel de salaire jusqu'au 1er mai 2008, selon l'article 26 du code du travail maritime, modifié par la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003, la rémunération du travail est fixée par le contrat d'engagement, dans le cadre des conventions ou accords collectifs applicables ; que les dispositions de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail sont applicables aux entreprises d'armement maritime ; que l'article 26, dernier alinéa, du code du travail maritime prévoit la possibilité d'un mode forfaitaire de rémunération du travail supplémentaire par conventions ou accords collectifs ; qu'un protocole d'accord a été signé le 16 septembre 1977 par un représentant du syndicat CGT des gens de mer, confirmé par un accord du 15 janvier 1988 prévoyant un forfait mensuel de 208 heures par mois ; que les contrats d'engagement maritime stipulent une rémunération mensuelle brute sur la base d'un horaire de 208 heures par mois ainsi que des indemnités de nourriture et de logement ; que l'article D. 3231-9 du Code de travail prévoit que lorsque la rémunération d'un salarié est, de manière habituelle, constituée, pour partie, par la fourniture de la nourriture et du logement ou d'autres avantages en nature, le salaire minimum en espèces garanti est déterminé en déduisant du salaire minimum de croissance les sommes fixées pour évaluer l'avantage en nature ; que selon l'article D. 742-1 ancien, lorsque le contrat d'engagement prévoit qu'il sera nourri par l'armateur, le salaire horaire minimum garanti du marin est égal au salaire minimum de croissance, diminué d'un huitième et selon l'article D. 742-2, lorsque le contrat d'engagement ne prévoit pas qu'il sera nourri par l'armateur, l'indemnité de nourriture allouée aux marins à titre de complément de salaire n'entrera en compte dans le calcul du salaire minimum de croissance calculé comme il est dit à l'article précédent que pour les trois quarts de sa valeur ; que le premier juge a dès lors retenu à juste titre que les majorations dues au titre des heures supplémentaires devaient tenir compte de ces abattements ; que la cour adopte ses calculs qui font apparaître que les salaires bruts forfaitaires étaient de 1. 589, 11 € c'est-à-dire supérieurs aux minima garantis en l'absence de forfaitisation ;
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE sur la demande en paiement de rappel d'heures supplémentaires et indemnité compensatrice de congés payés afférente, aux termes de l'article 1er du Code du travail maritime, tout contrat d'engagement entre un armateur et un marin et les conditions de travail des marins à bord des navires sont régis par des lois particulières, notamment le Code du travail maritime ; que le croit commun s'applique néanmoins aux marins lorsque la situation n'est régie par aucune loi particulière ; qu'aux termes de l'article 26 du Code du travail maritime, modifié par la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003, la rémunération du travail est fixée par le contrat d'engagement, dans le cadre des conventions ou accords collectifs applicables ; que les dispositions du I et des trois premiers alinéas du II des articles L. 3121-20 à L. 3121-25 et L. 3122-1 du code du travail sont applicables aux marins salariés des entreprises d'armement maritime ; que les dispositions du V de l'article 5 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail sont applicables aux entreprises d'armement maritime ; qu'un mode forfaitaire de rémunération du travail supplémentaire peut être prévu par convention ou accord collectif ; que suivant un accord d'entreprise du 16 septembre 1977, réitéré le 15 janvier 1988 (dont le signataire représentant les marins de l'entreprise EMCC est identifiable et dont il n'est pas démontré qu'il n'avait pas qualité à les représenter), une rémunération mensuelle au forfait de 208 heures a été convenue ; qu'aux termes de l'article L. 3121-40 du Code du travail, à défaut de convention ou d'accord collectif étendu ou d'accord d'entreprise ou d'établissement, des conventions de forfait en heure ne peuvent être établies que sur la base hebdomadaire ou mensuelle ; qu'enfin, l'article L. 3121-41 du même Code prévoit que la rémunération du salarié ayant conclu une convention de forfait en heures est au moins égale à la rémunération minimale applicable dans l'entreprise pour le nombre d'heures correspondant à son forfait, augmentée des majorations pour heures supplémentaires prévues à l'article L. 3121-22 ; qu'en l'espèce, les contrats d'engagement de Messieurs X... et Y... stipulent clairement qu'ils percevront une rémunération mensuelle brute de... sur la base d'un horaire légal de 208 heures par mois ainsi que les indemnités de nourriture et de logement (Paragraphe 5) ; qu'il faut cependant encore tenir compte des règles particulières à l'intégration de l'avantage nourriture dans le salaire minimum prévue par l'article D. 3231-9 du Code du travail ; qu'il résulte des articles D. 742-1 et D. 742-2 de l'ancien Code du travail que le salaire horaire minimum garanti du marin comporte deux éléments : le salaire en espèces et un complément de salaire représentatif soit de la fourniture gratuite de la nourriture, soit du versement d'une indemnité de nourriture de sorte que le SMIC des Inscrits Maritimes doit être calculé selon le SMIC légal dont à déduire les abattements pour nourriture ou indemnité de nourriture selon le mode de calcul suivant : SMIC IM = SMIC légal- (l/ 8 x 3/ 4 de l'indemnité de nourriture) que dès lors, les majorations dues au titre des heures supplémentaires doivent tenir compte de ces abattements ; que dans ces conditions, au 1er janvier 2009, alors que le SMIC légal horaire brut était de 8, 71 €, l'indemnité de nourriture fixée à 15, 65 €, il s'en déduit que le SMIC IM horaire est de 7, 24 € selon le mode de calcul ci-dessus rapporté ; que le forfait mensuel de 208 heures, soit 48 heures par semaine, se décompose de la manière suivante : 35 heures x 7, 24 € x (35 x 52/ 12) 4 heures x 7, 24 € x (4 x 52/ 12) soit de la 36ème à 39ème payées au taux horaire de base contre 2, 5 jours de repos compensateur 8 heures majorées à 25 % : 8 x 7, 24 € x 125 % x (8 x 52/ 12) 1 heure majorée à 50 % : 1 x 7, 24 € x 150 % x (l x 52/ 12) soit un total de 1583, 62 € représentant la rémunération minimale garantie en application des articles L. 3121-41 et L. 3121-22 précités ; qu'or, l'examen des fiches de paie des marins correspondantes révèlent que les salaires bruts forfaitaires étaient de 1589, 11 €, soit supérieurs aux minima garantis en l'absence de forfaitisation ; que dans ces conditions, Vincent X... et Walter Y... seront déboutés de ce chef de demande ;
ALORS QU'aux termes de l'article L. 3121-41 du code du travail, lorsqu'une convention de forfait en heures a été conclue avec un salarié, la rémunération afférente au forfait est au moins égale à la rémunération que le salarié recevrait compte tenu du salaire minimum conventionnel applicable dans l'entreprise et des majorations pour heures supplémentaires prévues à l'article L. 3121-22 du même code ; que, par ailleurs, l'ancien article D. 742-1 du code du travail (abrogé le 1er mai 2008), disposait que lorsque le contrat d'engagement prévoyait qu'il serait nourri par l'armateur, le salaire horaire minimum garanti du marin était égal au salaire minimum de croissance, diminué d'un huitième, et l'ancien article D. 742-2 (également abrogé le 1er mai 2008), disposait que lorsque le contrat d'engagement ne prévoyait pas qu'il serait nourri par l'armateur, l'indemnité de nourriture allouée au marin à titre de complément de salaire n'entrerait en compte dans le calcul du salaire minimum de croissance calculé comme il est dit à l'article D. 742-1 que pour les trois quarts de sa valeur ; que si ces deux articles prévoyaient ainsi que pour fixer la valeur du salaire minimum du marin, il convenait d'appliquer au SMIC l'un de ces abattements, il ne résultait nullement de ces deux textes que les majorations dues au titre des heures supplémentaires s'appliquaient au salaire minimum maritime tel que déterminé auxdits articles D. 742-1 et D. 742-2, c'est-à-dire en tenant compte des abattements effectués pour nourriture ou indemnité de nourriture sur le SMIC ; que les exposants faisaient précisément valoir dans leurs écritures d'appel qu'il ne devait pas être tenu compte de ces abattements afin de vérifier si la rémunération qu'ils avaient perçue sous un mode forfaitaire était au moins égale à la rémunération qu'ils auraient reçue compte tenu du salaire minimum conventionnel applicable et des majorations légales pour heures supplémentaires, compte tenu notamment de la diminution de la durée légale du travail ; que pour débouter Messieurs X... et Y... de leur demande en paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires majorées pour la période antérieure au 1er mai 2008, la Cour d'appel a estimé qu'au vu des articles D. 742-1 et D. 742-2 précités, « le premier juge avait retenu à juste titre que les majorations dues au titre des heures supplémentaires devaient tenir compte de ces abattements » ; qu'en statuant de la sorte, la Cour d'appel a violé les articles D. 742-1, D. 742-2 anciens, et L. 3121-41 nouveau du code du travail ;
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Y... de ses demandes tendant à l'annulation de la mise à pied disciplinaire qui lui avait été infligée le 9 juillet 2010 et à la condamnation de la société EMCC à payer au salarié la somme de 2. 809, 51 euros à titre de rappel de salaire, outre 280, 95 euros au titre des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE sur l'annulation d'une mise à pied infligée à M. Y..., le 9 juillet 2010, M. Y... a été mis à pied pour avoir refusé de prendre son poste au motif qu'il n'avait pas reçu sa nouvelle paire de chaussures de sécurité " Jalatte " alors que la société lui avait proposé deux paires de chaussures neuves qu'il a refusé d'essayer ; que l'employeur a en effet fourni au salarié une paire de chaussures de sécurité Cofra taille 44 ainsi qu'une paire de bottes Jallate taille 46 ; que M. Y... était donc à même de porter des chaussures de sécurité ; que par ailleurs, en 2009, il avait été seulement mandaté par certains salariés et non par une organisation syndicale représentative dans la branche pour négocier et signer un projet d'accord collectif ; que la sanction est régulière et justifiée ;
ALORS QUE Monsieur Y... soulignait dans ses écritures d'appel qu'il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir porté de chaussures de sécurité le 15 juin 2010, puisqu'il n'en disposait pas, l'employeur s'étant borné à lui fournir pour l'année 2010 des bottes de cuir fourrées « JALATTE » ; qu'il résultait en outre du compte rendu de la commission disciplinaire du 28 juin 2010, que le salarié produisait, qu'il chaussait du 46 et que les seules chaussures de sécurité qui lui avaient été proposées lors de l'incident étaient de taille 44 ; que toutefois, pour dire que la sanction était fondée, la Cour d'appel a retenu que « la société avait proposé à Monsieur Y... deux paires de chaussures neuves qu'il avait refusé d'essayer », « l'employeur ayant en effet fourni au salarié une paire de chaussures de sécurité Cofra taille 44 ainsi qu'une paire de bottes Jallate taille 46 » ; qu'en se déterminant de la sorte, sans rechercher comme elle l'y était invitée si les « bottes Jallate taille 46 » ainsi proposées à Monsieur Y... avaient la nature de chaussures de sécurité, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1331-1 du code du travail ;
ALORS encore QUE la consultation d'un organisme chargé, en vertu d'une disposition conventionnelle ou du règlement intérieur d'une entreprise, de donner un avis sur la mesure disciplinaire envisagée par l'employeur constitue pour le salarié une garantie de fond, de sorte que la sanction disciplinaire prononcée sans que cette consultation ait été préalablement effectuée est entachée de nullité ; que telle sanction est également irrégulière lorsque l'instance qui se réunit n'est pas composée conformément aux prescriptions conventionnelles ; qu'il résulte des articles 50 et 51 de la convention collective APERMA que les conséquences pécuniaires d'une suspension de service-ou mise à pied-ne sont applicables qu'après avis de la commission de discipline, qui doit comporter deux délégués du personnel d'exécution de l'entreprise ; qu'à cet égard, Monsieur Y... faisait valoir dans ses conclusions d'appel que la mise à pied disciplinaire dont il avait fait l'objet du 12 au 16 juillet 2010, suspension accompagnée d'une retenue sur son salaire, avait été prononcée après avis d'une commission de discipline qui ne comptait pas de délégué du personnel d'exécution, en violation des dispositions conventionnelles ; que néanmoins, la Cour d'appel a retenu que cette sanction était régulière et justifiée, et débouté Monsieur Y... de ses demandes à ce titre, sans vérifier si la commission de discipline qui s'était prononcée était composée de deux délégués du personnel d'exécution de l'entreprise ; qu'en se déterminant ainsi, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 50 et 51 de la convention collective nationale des personnels navigants d'exécution des entreprises de remorquage, L. 1331-1 et L. 1332-2 du code du travail ;
ALORS à tout le moins QU'en omettant de répondre à ce moyen précis des écritures de Monsieur Y..., la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS aussi QUE si l'employeur, qui a mis à pied un salarié à titre conservatoire et l'a convoqué à un entretien préalable à un licenciement, peut renoncer au licenciement et prononcer une mise à pied disciplinaire, la durée de la mise à pied conservatoire déjà effectuée doit alors s'imputer sur la durée de la mise à pied disciplinaire ; que Monsieur Y... faisait valoir dans ses écritures d'appel que la mise à pied disciplinaire dont il avait fait l'objet du 12 au 16 juillet 2010, et sa mise à pied conservatoire préalable, notifiée par lettre du 16 juin, avaient été accompagnées de retenues sur salaire portant sur 19 jours, égales à 2. 809, 51 euros, ainsi que cela ressortait des bulletins de paie des mois de juin et juillet 2010 qu'il produisait, et il en sollicitait le remboursement ; que dès lors, et même à supposer la mise à pied disciplinaire de Monsieur Y... justifiée, il incombait à la Cour d'appel de rechercher si les retenues de salaire ainsi pratiquées par la société EMCC étaient fondées ; qu'en omettant de procéder à cette recherche, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1331-1 et L. 1332-3 du code du travail ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... et Monsieur Y... de leur demande en paiement de dommages et intérêts pour violation des dispositions relatives aux conditions de logement à bord du navire ;
AUX MOTIFS QUE sur l'obligation de logement de l'armateur, la commission régionale de sécurité de la direction des affaires maritimes, lors d'un contrôle le 10 février 2010, n'a formulé aucune observation sur les conditions d'hygiène et d'habitabilité du COMBATTANT ; que les photos produites par les salariés ne sont pas de nature à remettre en cause les conclusions de cette commission ;
ALORS QUE Monsieur X... et Monsieur Y... sollicitaient le paiement de dommages et intérêts pour violation de l'article 78 du code du travail maritime et des dispositions de la convention collective APERMA relatives aux conditions de logement à bord, faisant valoir que du fait de l'absence d'un nombre suffisant de couchettes, ils étaient contraints de dormir dans un sac de couchage sur le sol de la passerelle lorsqu'ils étaient en mer, ou dans leur voiture lorsque leur navire effectuait un chantier – l'indemnité de 17 euros alors versée par l'employeur étant insuffisante pour leur permettre de louer une chambre d'hôtel ; que la Cour d'appel a débouté les salariés de leur demande au seul motif que la commission régionale de sécurité de la direction des affaires maritimes n'avait formulé aucune observation sur les conditions d'hygiène et d'habitabilité du COMBATTANT lors de son contrôle du 10 février 2010 ; qu'en omettant de rechercher s'il en était de même préalablement au contrôle intervenu le 10 février 2010, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, de l'article 78 du code du travail maritime et des dispositions de la convention collective APERMA relatives aux conditions de logement à bord des navires ;