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13/11/2012 | FRANCE | N°02-10220

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 novembre 2012, 02-10220


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 10 octobre 2001), que les 12 juillet 1990 et 19 décembre 1991, M. X... (la caution) s'est rendu caution solidaire envers la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Drôme, devenue la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Sud Rhône-Alpes (la caisse), des concours consentis à la société MDR (la société) dont il était le gérant ; que celle-ci ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la caisse, après avo

ir déclaré sa créance, a assigné en paiement la caution qui a recherché sa r...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 10 octobre 2001), que les 12 juillet 1990 et 19 décembre 1991, M. X... (la caution) s'est rendu caution solidaire envers la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Drôme, devenue la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Sud Rhône-Alpes (la caisse), des concours consentis à la société MDR (la société) dont il était le gérant ; que celle-ci ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la caisse, après avoir déclaré sa créance, a assigné en paiement la caution qui a recherché sa responsabilité ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la caisse une certaine somme, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article 455 du code de procédure civile, tout jugement doit être motivé, la contradiction entre les motifs équivalant à une absence de motifs ; que pour débouter M. X... de son action en responsabilité et décider que la caisse n'avait commis aucune faute en ne procédant pas elle-même au recouvrement du chèque, la cour d'appel a relevé, d'une part, que ce chèque avait été "émis à l'ordre de la caisse par la SCI De Tourveon" (la SCI) en paiement de travaux exécutés par la société, d'autre part, qu'il avait été porté par la banque "au crédit du compte de la société bénéficiaire" ; qu'en statuant par ces motifs, la cour d'appel s'est contredite et n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
2°/ qu'en cas de rejet, pour défaut de provision, d'un chèque émis à son ordre, le banquier, porteur et bénéficiaire du chèque, a seul qualité pour exercer, contre le tireur, les droits et actions fondés sur le droit du chèque ; qu'en estimant, néanmoins, afin d'écarter l'action en responsabilité dirigée contre la caisse, que cette dernière, simple porteur et bénéficiaire du chèque, "n'avait pas à faire son affaire de son recouvrement ", de telle sorte qu'elle avait pu régulièrement en contre-passer le montant au débit du compte de la société, la cour d'appel a violé les dispositions combinées des articles 40 du décret loi du 30 octobre 1935 (devenu l'article L. 131-47 du code monétaire et financier) et 1382 du code civil ;
3°/ que le droit, reconnu au banquier, de contre-passer le montant d'un chèque qu'il n'a pu encaisser faute de provision, est justifié par la clause dite "sauf encaissement" présumée chaque fois qu'un chèque est remis au banquier pour recouvrement ou pour escompte, et traduit la créance du banquier contre son client endosseur et signataire ; que l'exercice de ce droit suppose, par hypothèse, que le banquier ait reçu mandat d'encaisser le chèque pour le compte du remettant ou qu'il ait pris cet effet à l'escompte ; qu'en admettant que la caisse avait pu régulièrement contre-passer le montant du chèque au débit du compte de la société, alors qu'elle avait relevé que ledit chèque avait été émis par la SCI à l'ordre de la caisse, ce dont il résultait qu'il n'avait été ni escompté au profit de la société, ni remis à la banque pour encaissement pour le compte de cette société, la cour d'appel n'a pas tiré de ses constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient, et de ce chef a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel ne s'est pas contredite en retenant, d'un côté, que le chèque litigieux avait été émis à l'ordre de la caisse par la SCI en paiement de travaux exécutés par la société, et de l'autre, qu'il avait été porté par la caisse au crédit du compte de la société bénéficiaire, dès lors qu'en utilisant ce terme, elle a nécessairement fait référence au rapport fondamental ;
Attendu, d'autre part, qu'après avoir constaté que la caisse avait porté le montant du chèque au crédit du compte de sa cliente et que, ce chèque étant revenu impayé, elle avait débité ce compte du même montant, l'arrêt retient que la caisse, simple porteur et bénéficiaire du chèque, n'avait pas à faire son affaire de son recouvrement ; que de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que la caisse avait fait l'avance du montant du chèque sous réserve de son encaissement, la cour d'appel a exactement déduit que la banque était fondée à exercer un recours contre sa cliente par voie de contre-passation, sans avoir à recourir contre le tireur du chèque ;
Attendu, enfin, que, dans ses conclusions d'appel, la caution n'a pas contesté l'accord de la société pour faire émettre à l'ordre de la banque le chèque émis en paiement de sa créance de travaux, mais s'est bornée à reprocher à la banque d'avoir procédé à la contre-passation du montant de ce chèque ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Sud Rhône-Alpes la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize novembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. Jean-louis X...

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné, en deniers ou quittance, M. X... à payer à la CRCAM Sud Rhône Alpes la somme de 794.399, 47 francs (121.105, 42 Euros) arrêtée au 12 mai 1998, outre les intérêts au taux contractuel échus à compter de cette date avec capitalisation de ces intérêts dans les conditions légales à compter du 10 août 2001, date de la demande ;
Aux motifs que « sur le paiement du chèque émis par la SCI De Tourveon à l'ordre de la CRCAM de la Drôme, le montant de ce chèque (558. 498, 38 francs) émis à l'ordre de la CRCAM par la SCI De Tourveon en paiement des travaux exécutés par la société MDR a été porté par la banque au crédit du compte de la société bénéficiaire. Mais il est revenu impayé, si bien que la CRCAM a redébité son montant sur le compte de la Sté MDR le 7 janvier 1992. Celle-ci reproche à la banque de n'avoir pas agi en recouvrement auprès de la SCI De Tourveon, ultérieurement placée en liquidation judiciaire et de ne lui avoir pas davantage restitué le chèque impayé (avant décembre 1992), ce qui l'aurait privée de toute possibilité de recouvrer sa créance. Mais la possession du chèque revenu impayé ne constituait nullement un préalable à une action en paiement de sa créance contractuelle par la Sté MDR, alors surtout que cette dernière était parfaitement informée de l'incident bancaire. En effet, la remise d'un chèque, simple instrument de paiement, ne vaut pas cession de créance. Et la CRCAM, simple porteur et bénéficiaire du chèque, qui n'avait pas à faire son affaire du recouvrement, ne peut voir sa responsabilité engagée. C'est en faisant une fausse application du droit que le Tribunal a estimé que la CRCAM n'aurait pas dû débiter le compte de la Sté MDR et qu'il a déduit la somme de 558. 498, 38 francs de la créance de la banque contre la caution » ;
Alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 455 du Nouveau Code de procédure civile, tout jugement doit être motivé, la contradiction entre les motifs équivalant à une absence de motifs ; que pour débouter M. X... de son action en responsabilité et décider que la CRCAM n'avait commis aucune faute en ne procédant pas elle-même au recouvrement du chèque, la Cour d'appel a relevé, d'une part, que ce chèque avait été " émis à l'ordre de la CRCAMpar la SCI De Tourveon " en paiement de travaux exécutés par la Sté MDR , d'autre part, qu'il avait été porté par la banque « au crédit du compte de la société bénéficiaire » ; qu'en statuant par ces motifs, la Cour d'appel s'est contredite et n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Alors, d'autre part, qu'en cas de rejet, pour défaut de provision, d'un chèque émis à son ordre, le banquier, porteur et bénéficiaire du chèque, a seul qualité pour exercer, contre le tireur, les droits et actions fondés sur le droit du chèque ; qu'en estimant, néanmoins, afin d'écarter l'action en responsabilité dirigée contre la CRCAM, que cette dernière, simple porteur et bénéficiaire du chèque, « n'avait pas à faire son agaire de son recouvrement », de telle sorte qu'elle avait pu régulièrement en contre-passer le montant au débit du compte de la société MDR, la Cour d'appel a violé les dispositions combinées des articles 40 du Décret loi du 30 octobre 1935 (devenu l'article L. 131-47 du Code monétaire et financier) et 1382 du Code civil ;
Alors, enfin, et en tout état de cause, que le droit, reconnu au banquier, de contre-passer le montant d'un chèque qu'il n'a pu encaisser faute de provision, est justifié par la clause dite "sauf encaissement" présumée chaque fois qu'un chèque est remis au banquier pour recouvrement ou pour escompte, et traduit la créance du banquier contre son client endosseur et signataire ; que l'exercice de ce droit suppose, par hypothèse, que le banquier ait reçu mandat d'encaisser le chèque pour le compte du remettant ou qu'il ait pris cet effet à l'escompte ; qu'en admettant que la CRCAM avait pu régulièrement contre-passer le montant du chèque au débit du compte de la société MDR, alors qu'elle avait relevé que ledit chèque avait été émis par la société De Tourveon à l'ordre de la CRCAM, ce dont il résultait qu'il n'avait été ni escompté au profit de la Sté MDR, ni remis à la banque pour encaissement pour le compte de cette société, la Cour d'appel n'a pas tiré de ses constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient, et de ce chef violé l'article 1 134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 02-10220
Date de la décision : 13/11/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

BANQUE - Chèque - Transmission - Avance sur encaissement - Chèque impayé - Contre-passation - Conditions - Recours contre le tireur du chèque - Nécessité (non)

Après avoir constaté qu'une caisse avait porté au crédit du compte de sa cliente le montant d'un chèque, libellé à son ordre mais correspondant au paiement de travaux effectués par cette dernière, puis, ce chèque étant revenu impayé, avait débité le compte du même montant, et retenu que la caisse, simple porteur et bénéficiaire du chèque n'avait pas à faire son affaire de son recouvrement, faisant ainsi ressortir qu'elle avait fait l'avance du montant du chèque sous réserve de son encaissement, une cour d'appel a exactement déduit que la caisse était fondée à exercer un recours contre sa cliente par voie de contre-passation, sans avoir à recourir contre le tireur du chèque


Références :

article 40 du décret-loi du 30 octobre 1935, devenu l'article L. 131-47 du code monétaire et financier

article 1382 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 10 octobre 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 13 nov. 2012, pourvoi n°02-10220, Bull. civ. 2012, IV, n° 204
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, IV, n° 204

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : Mme Bonhomme
Rapporteur ?: Mme Canivet-Beuzit
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:02.10220
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