LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 juin 2011), que M. X... et Mme Y... ont acquis, durant leur concubinage, un bien immobilier en indivision ; que, suite à leur séparation, Mme Y... a fait assigner, par acte du 23 février 2009, son concubin en licitation-partage de l'immeuble ; que, par jugement du 22 juin 2010, le tribunal de grande instance de Créteil a notamment ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation, partage, la licitation de l'immeuble et dit Mme Y... redevable à l'indivision d'une indemnité d'occupation mensuelle ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de limiter le versement de l'indemnité d'occupation de juin 2006 à juin 2008 ;
Attendu qu'ayant relevé que Mme Y... avait quitté le bien indivis suite à l'agression grave dont elle avait été victime dans la nuit du 28 au 29 juin 2008 de la part de M. X..., condamné pour ces faits, la cour d'appel, par une appréciation souveraine, a estimé que Mme Y... n'était plus redevable d'une indemnité d'occupation à partir de juin 2008 ; que le moyen, qui vise dans sa seconde branche des motifs surabondants, n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept novembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour M. Eric X...
IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit que l'indemnité d'occupation dont Madame Caroline Y... était redevable envers l'indivision pour la période entre juin 2006 et juin 2008 s'élevait à la somme de 40. 800 € et d'avoir débouté en conséquence Monsieur X... de sa demande d'indemnité d'occupation du mois de juillet 2008 jusqu'à la vente du bien indivis.
- AU MOTIF QUE sur l'indemnité d'occupation afférente à la période de juin 2006 à juin 2008, que l'article 815-9 du code civil dispose que l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire redevable d'une indemnité ; Que Madame Y..., qui ne conteste pas avoir, après sa séparation d'avec Monsieur X... en juin 2006, occupé seule l'immeuble indivis jusqu'en juin 2008, estime cependant n'être redevable d'aucune indemnité d'occupation pour cette période ; qu'elle invoque à cet effet une convention implicite passée avec Monsieur X... qui n'aurait pas, durant cette période, versé la contribution de 600 euros par mois à l'entretien et l'éducation de l'enfant commun Nicolas à laquelle il s'était engagé aux termes d'un protocole du 2 avril 2007 ; qu'outre ce protocole, elle verse aux débats une lettre du conseil de Monsieur X... du 4 février 2008 indiquant « s'agissant de la pension alimentaire qui y est définie, elle se compense largement avec l'indemnité d'occupation que Madame Y... devrait verser à Monsieur X... (...) de sorte que ce dernier reste créancier à son égard » ; Que Monsieur X... conteste l'existence d'une telle convention tacite et se prévaut d'une lettre du conseil de Madame Y... à son propre conseil du 12 août 2008 lui adressant un RIB de cette dernière « de façon à permettre à son client de s'acquitter de la contribution alimentaire dont il est redevable pour l'entretien et l'éducation de Nicolas depuis le 2 avril 2007, date de signature de la convention régularisée entre les parties » ; Considérant que, sans caractériser l'existence d'une convention passée entre les parties qui dispenserait Madame Y... du paiement de toute indemnité d'occupation, la circonstance que Madame Y... réclame le paiement de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant commun prévue au protocole alors qu'elle vient de quitter l'immeuble indivis et que Monsieur X..., qui ne le conteste pas, se soit, à compter de ce moment, acquitté de son obligation, tend au contraire à corroborer l'existence d'un accord tacite entre les parties, évoqué par le conseil de Monsieur X..., pour opérer une compensation entre les deux dettes ; Que, si la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant commun, dont le principe et le montant ont été arrêtés par les parties à la somme de 600 euros par mois le 2 avril 2007, sans rétroactivité, ne peut strictement se compenser avec l'indemnité d'occupation dont Madame Y... est redevable, envers l'indivision, à compter du mois de juin 2006, il convient de dire que, dans l'établissement des comptes entre les parties, il devra être tenu compte de la créance de Madame Y... à ce titre pour un montant de 8. 400 euros (600 x 14) ; Que l'indemnité mensuelle d'occupation ayant été justement fixée par le premier juge à 1. 700 euros eu égard aux estimations immobilières versées au débat et à la description du bien, l'indemnité dont Madame Y... est redevable envers l'indivision pour la période de juin 2006 à juin 2008 s'élève à la somme de 40. 800 euros, à revenir pour moitié à son co-indivisaire ; Qu'il convient de confirmer le jugement de ce chef, sauf à ajouter qu'une compensation devra être opérée entre l'indemnité d'occupation dont Madame Y... est redevable et sa créance au titre de la contribution du père à l'entretien et à l'éducation de l'enfant commun ; Considérant sur l'indemnité d'occupation pour la période de juin 2008 à la vente du bien que Madame Y... affirme avoir quitté le bien indivis à la suite de l'agression grave dont elle a été victime, dans la nuit du 28 au 29 juin 2008, de la part de Monsieur X..., qui, depuis 2005, n'avait cessé de faire preuve de violences à son égard ; qu'elle verse notamment aux débats l'arrêt de cette cour du 16 juin 2010 condamnant Monsieur X... à la peine de 4 mois d'emprisonnement avec sursis pour violences exercées sur sa personne le 22 septembre 2007, le jugement du tribunal correctionnel de Paris du 29 juillet 2008 le condamnant à la peine de 12 mois d'emprisonnement, dont six mois assortis du sursis avec mise à l'épreuve pendant deux ans, pour les faits de violences, violation de domicile, menaces et voies de fait en date des 28 et 29 juin 2008 ainsi qu'un constat d'huissier dressé le 29 juillet 2008 et attestant de ce que le pavillon était libre ; Que, se prévalant néanmoins de ce qu'elle était toujours domiciliée à l'adresse du bien indivis et s'était formellement opposée, par l'intermédiaire de son avocat à ce qu'il prenne possession du bien, Monsieur X... estime que Madame Y... demeure redevable, pour cette période, d'une indemnité d'occupation ; Considérant, cependant, que, d'abord, l'indivisaire domicilié dans un immeuble indivis, mais n'y résidant pas, n'en a pas la jouissance privative et n'est donc pas redevable d'une indemnité d'occupation ; que, ensuite, l'opposition de Madame Y... à ce que son ex concubin prenne possession de l'immeuble était justifiée par le comportement de violence inadmissible de celui-ci et par la crainte de le voir faire obstacle à la licitation du bien, de sorte que Madame Y... ne saurait être déclarée redevable d'une indemnité d'occupation pour la période considérée ; Que le jugement doit être confirmé de ce chef
-ALORS QUE D'UNE PART l'indemnité d'occupation, contrepartie du droit de jouir privativement, est due même en l'absence d'occupation effective des lieux ; qu'en se fondant sur la seule absence d'occupation de la maison située ... à SUCY EN BRIE par Madame Y..., qui continuait cependant à y être domiciliée, pour la décharger à compter du mois de juillet 2008 jusqu'à la vente du bien indivis de l'indemnité qu'elle devait du fait de la jouissance privative de cette maison, la Cour d'appel a violé l'article 815-9 du Code civil ;
- ALORS QUE D'AUTRE PART la jouissance privative d'un bien indivis résulte de l'impossibilité de droit ou de fait pour les co-indivisaires d'user de la chose ; qu'en rejetant la demande en paiement d'une indemnité pour l'occupation de la maison indivise par Madame Y... à compter du mois de juillet 2008 tout en constatant que cette dernière était toujours domiciliée à l'adresse du bien indivis et s'était formellement opposée par l'intermédiaire de son avocat à ce que Monsieur X... prenne possession des lieux, empêchant ainsi que l'immeuble soit occupé concurremment de telle sorte que Madame Y... avait seule la faculté de jouir privativement de la maison indivise, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 815-9 du Code civil.