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30/10/2012 | FRANCE | N°11-23034

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 30 octobre 2012, 11-23034


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 26 mai 2011), que la Banque populaire Val-de-France (la banque) a consenti à M. X... (l'emprunteur) un prêt personnel hypothécaire de 45 000 euros destiné à un apport en compte courant dans la société Agrema (la société) dont il était le gérant, un crédit-relais de 150 000 euros dans l'attente de l'encaissement par la société d'une créance litigieuse sur une société italienne et un prêt immobilier de 100 000 euros ; qu'elle avait également consenti divers

concours à la société ; qu'à la suite de la défaillance de l'emprunteur, la...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 26 mai 2011), que la Banque populaire Val-de-France (la banque) a consenti à M. X... (l'emprunteur) un prêt personnel hypothécaire de 45 000 euros destiné à un apport en compte courant dans la société Agrema (la société) dont il était le gérant, un crédit-relais de 150 000 euros dans l'attente de l'encaissement par la société d'une créance litigieuse sur une société italienne et un prêt immobilier de 100 000 euros ; qu'elle avait également consenti divers concours à la société ; qu'à la suite de la défaillance de l'emprunteur, la banque lui a délivré un commandement valant saisie immobilière et l'a assigné à l'audience d'orientation ; que l'emprunteur a assigné la banque en responsabilité pour rupture abusive des crédits accordés tant à lui-même qu'à la société et pour application sur leurs comptes de frais de forçage, comportements fautifs à l'origine de ses difficultés financières ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'emprunteur fait grief à l'arrêt, statuant sur le préjudice qu'il invoquait à raison du comportement fautif de la banque à l'égard de la société, d'avoir déclaré irrecevables ses demandes, alors, selon le moyen, que la recevabilité d'une action suppose seulement la preuve d'un intérêt ; qu'en subordonnant la recevabilité de l'action de l'emprunteur à la preuve d'un préjudice personnel quand cette condition concernait le fond et ne pouvait être invoquée pour justifier une irrecevabilité, les juges du second degré ont violé les articles 31 et 32 du code de procédure civile, ensemble les articles 12 du même code et 1382 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient, d'un côté, que sauf à méconnaître la règle selon laquelle « nul ne plaide par procureur », l'emprunteur, quelle que soit sa qualité, ne peut se substituer à la société pour intenter en ses lieu et place une action en responsabilité contre la banque de l'entreprise qui lui permettrait d'obtenir réparation d'un préjudice personnel prenant sa source dans celui subi par la société, et de l'autre, que la recevabilité de l'action en responsabilité engagée par un associé à l'encontre d'un cocontractant de la société est subordonnée à l'allégation d'un préjudice personnel et distinct de celui qui pourrait être subi par la société elle-même et qu'en l'espèce, la banque n'a pas commis de faute à l'égard de la société, susceptible d'engendrer un préjudice personnel pour l'emprunteur, de sorte que toutes les demandes fondées sur les relations entre la banque et la société sont irrecevables ; qu'en l'état de ces énonciations et appréciations, la cour d'appel, qui a fait ressortir l'absence d'un intérêt personnel à agir de l'emprunteur, n'a pas subordonné la recevabilité de l'action à la preuve d'un préjudice personnel ; que le moyen manque en fait ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que l'emprunteur fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes au titre du fonctionnement de son compte, alors, selon le moyen, qu'à supposer même que la prescription de cinq ans puisse être appliquée, en toute hypothèse, le titulaire du compte est fondé à exercer une demande en dommages-intérêts à raison de la faute commise par la banque pour n'avoir pas inclus les frais de forçage dans le taux effectif global sans qu'on puisse lui opposer la circonstance qu'en toute hypothèse, en cas de taux effectif global illégal, le taux d'intérêt légal est substitué au taux conventionnel ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir énoncé que la sanction d'un taux effectif global erroné est la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel, l'arrêt relève que cette sanction n'a pas été sollicitée par l'emprunteur ; que par ces motifs, la cour d'appel a, à bon droit, rejeté la demande de dommages-intérêts fondée sur la faute alléguée de la banque pour ne pas avoir inclus des frais dans le taux effectif global ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le deuxième moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente octobre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour M. Jean-Claude X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QUE, statuant sur le préjudice invoqué par Monsieur X... à raison du comportement fautif de la BANQUE POPULAIRE VAL DE France à l'égard de la société AGREMA, il a, infirmant sur ce point le jugement entrepris, déclaré irrecevables les demandes de Monsieur X... (arrêt p. 6, § 5) ;
AUX MOTIFS QUE TOUT D'ABORD QU' « en premier lieu, que sauf à méconnaître la règle selon laquelle « nul ne plaide par procureur », Monsieur X..., quelle que soit sa qualité, ne peut se substituer à la société AGREMA pour intenter en ses lieu et place une action en responsabilité contre la banque de l'entreprise qui lui permettrait d'obtenir réparation d'un préjudice personnel prenant sa source dans le préjudice subi par la société ; qu'en second lieu, l'action oblique prévue par l'article 1166 du code civil suppose la carence du débiteur et a pour objet de faire réintégrer dans le patrimoine de ce dernier les sommes dont le paiement est réclamé par le jeu de cette action, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; qu'enfin, au regard des articles 1382 du code civil et 31 du code de procédure civile, la recevabilité de l'action en responsabilité engagée par un associé à l'encontre d'un cocontractant de la société est subordonnée à l'allégation d'un préjudice personnel et distinct de celui qui pourrait être subi par la société elle-même » ;
ET AUX MOTIFS ENSUITE QU' « en l'occurrence, la BPVF a notifié, le 18 avril 2006, à la société AGREMA, la dénonciation de son autorisation de découvert de 10.000 €, avec effet au 30 juin 2006, en lui indiquant que d'ici cette date elle devait veiller au strict respect de la limite impartie ; qu'en l'absence de disposition légale particulière à cette époque, toute partie à un contrat à durée indéterminée peut, sans avoir à motiver sa décision, mettre fin unilatéralement à celui-ci, sauf à engager sa responsabilité en cas d'abus ; que la décision de la banque, assortie du délai de préavis édicté par l'article L.313-12du code monétaire et financier, ne procède ni d'un motif illégitime ni d'une volonté de nuire dès lors que la BPVF, qui avait consenti ses concours à Monsieur X... ou à sa société dans l'attente de l'encaissement de créances litigieuses sur une société italienne a été lassée par l'absence de versement des fonds au bout de plusieurs années, malgré les décisions favorables de juridictions italiennes ; que si le dernier virement permanent de 1.500 € de la société AGREMA à Monsieur X... a été effectué le 3 avril 2006, c'est que la situation du compte de cette société n'en a pas permis l'exécution ultérieure, le solde étant débiteur de 9.582 € le 4 mai 2006 et de 10.309 € le 2 juin 2006, et étant resté négatif après l'expiration de l'autorisation de découvert ; qu'il résulte de ce qui précède que la BPVF n'a pas commis de faute à l'égard de la société AGREMA, susceptible d'engendrer un préjudice personnel pour Monsieur X..., de sorte que toutes les demandes fondées sur les relations entre la BPVF et la société AGREMA sont irrecevables » ;
ALORS QUE, la recevabilité d'une action suppose seulement la preuve d'un intérêt ; qu'en subordonnant la recevabilité de l'action de Monsieur X... à la preuve d'un préjudice personnel quand cette condition concernait le fond et ne pouvait être invoquée pour justifier une irrecevabilité, les juges du second degré ont violé les articles 31 et 32 du Code de procédure civile, ensemble les articles 12 du même Code et 1382 du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QUE, statuant sur le préjudice invoqué par Monsieur X... à raison du comportement fautif de la BANQUE POPULAIRE VAL DE France à l'égard de la société AGREMA, il a, infirmant sur ce point le jugement entrepris, déclaré irrecevables les demandes de Monsieur X... (arrêt p. 6, § 5) ;
AUX MOTIFS QUE TOUT D'ABORD QU' « en premier lieu, que sauf à méconnaître la règle selon laquelle « nul ne plaide par procureur », Monsieur X..., quelle que soit sa qualité, ne peut se substituer à la société AGREMA pour intenter en ses lieu et place une action en responsabilité contre la banque de l'entreprise qui lui permettrait d'obtenir réparation d'un préjudice personnel prenant sa source dans le préjudice subi par la société ; qu'en second lieu, l'action oblique prévue par l'article 1166 du code civil suppose la carence du débiteur et a pour objet de faire réintégrer dans le patrimoine de ce dernier les sommes dont le paiement est réclamé par le jeu de cette action, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; qu'enfin, au regard des articles 1382 du code civil et 31 du code de procédure civile, la recevabilité de l'action en responsabilité engagée par un associé à l'encontre d'un cocontractant de la société est subordonnée à l'allégation d'un préjudice personnel et distinct de celui qui pourrait être subi par la société elle-même » ;
ET AUX MOTIFS ENSUITE QU' « en l'occurrence, la BPVF a notifié, le 18 avril 2006, à la société AGREMA, la dénonciation de son autorisation de découvert de 10.000 €, avec effet au 30 juin 2006, en lui indiquant que d'ici cette date elle devait veiller au strict respect de la limite impartie ; qu'en l'absence de disposition légale particulière à cette époque, toute partie à un contrat à durée indéterminée peut, sans avoir à motiver sa décision, mettre fin unilatéralement à celui-ci, sauf à engager sa responsabilité en cas d'abus ; que la décision de la banque, assortie du délai de préavis édicté par l'article L.313-12du code monétaire et financier, ne procède ni d'un motif illégitime ni d'une volonté de nuire dès lors que la BPVF, qui avait consenti ses concours à Monsieur X... ou à sa société dans l'attente de l'encaissement de créances litigieuses sur une société italienne a été lassée par l'absence de versement des fonds au bout de plusieurs années, malgré les décisions favorables de juridictions italiennes ; que si le dernier virement permanent de 1.500 € de la société AGREMA à Monsieur X... a été effectué le 3 avril 2006, c'est que la situation du compte de cette société n'en a pas permis l'exécution ultérieure, le solde étant débiteur de 9.582 € le 4 mai 2006 et de 10.309 € le 2 juin 2006, et étant resté négatif après l'expiration de l'autorisation de découvert ; qu'il résulte de ce qui précède que la BPVF n'a pas commis de faute à l'égard de la société AGREMA, susceptible d'engendrer un préjudice personnel pour Monsieur X..., de sorte que toutes les demandes fondées sur les relations entre la BPVF et la société AGREMA sont irrecevables » ;
ALORS, PREMIEREMENT, QUE, à supposer même que la question de la recevabilité de l'action puisse être tranchée sur la base de constatations touchant au fond, en toute hypothèse, Monsieur X... se prévalait, non seulement de la rupture abusive des relations entre la banque et l'entreprise, mais également des pratiques fautives de la banque, notamment en ce qui concerne les frais de forçage et commissions indues, à l'égard de la société AGREMA (conclusions du 6 avril 2011, p. 21 à 38) ; qu'en se bornant à évoquer la rupture des relations entre la banque et l'entreprise, les juges du fond ont en tout état de cause privé leur décision de base légale au regard des articles 31 et 32 du Code de procédure civile, ensemble au regard de l'article 1382 du Code civil ;
ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, et s'agissant de la rupture des relations, Monsieur X... faisait valoir que la banque avait méconnu ses engagements dans la mesure où ils avaient été accordés en considération des procédures italiennes, sachant qu'en raison de ces procédures et de sa situation générale, la société AGREMA a pu très vite apurer ses comptes comme la banque elle-même l'a reconnu dans une lettre du 11 janvier 2007 (conclusions du 6 avril 2011, p. 40 et 41) ; que faute de s'être expliqués sur ce point, pour déterminer si la rupture n'avait pas été abusive, les juges du fond ont de nouveau entaché leur décision d'un défaut de base légale au regard des articles 31 et 32 du Code de procédure civile, ensemble au regard de l'article 1382 du Code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen encourt la censure ;
EN CE QU'il a rejeté les demandes formées par Monsieur X... au titre du fonctionnement de son compte ;
AUX MOTIFS QUE « les frais prélevés par une banque à l'occasion de chaque opération effectuée au-delà du découvert autorisé, intitulés « frais de forçage » doivent être inclus dans l'assiette du taux effectif global (TEG), dans la mesure où la rémunération d'une telle prestation n'est pas indépendante de l'opération de crédit complémentaire résultant de l'enregistrement comptable d'une transaction excédant l'autorisation ; que les TEG calculés par la BPVF excluent manifestement ces commissions et peuvent donc s'avérer usuraires ; que, toutefois, la prescription quinquennale de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel engagée par le débiteur en raison d'une erreur affectant le TEG court, dans le cas d'un découvert, à réception de chacun des écrits indiquant ou devant indiquer le TEG appliqué ; que s'agissant d'une demande présentée pour la première fois par conclusions d'appel du 2 juin 2010, la contestation des TEG antérieurs au 2 juin 2005 est prescrite ; que, surtout, la sanction d'un TEG erroné est la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel, ou la restitution des perceptions excessives en cas de taux usuraire, ce qui n'est pas sollicité par l'appelant, et non la restitution des frais et accessoires liés au compte ; que sur le fondement de l'erreur dans le calcul du TEG, la demande de remboursement des frais et commissions sera également rejetée » ;
ALORS QUE, à supposer même que la prescription de cinq ans puisse être appliquée, en toute hypothèse, le titulaire du compte est fondé à exercer une demande en dommages et intérêts à raison de la faute commise par la banque pour n'avoir pas inclus les frais de forçage dans le TEG sans qu'on puisse lui opposer la circonstance qu'en toute hypothèse, en cas de TEG illégal, le taux d'intérêt légal est substitué au taux conventionnel ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-23034
Date de la décision : 30/10/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

INTERETS - Intérêts conventionnels - Taux - Taux effectif global - Mention erronée - Sanction - Substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel - Défaut de demande par l'emprunteur - Portée

PRET - Prêt d'argent - Intérêts - Taux - Taux effectif global - Mention - Mention erronée - Sanction - Détermination

La sanction d'un taux effectif global erroné est la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel. Dès lors que cette sanction n'a pas été sollicitée par l'emprunteur, une cour d'appel rejette, à bon droit, sa demande de dommages-intérêts fondée sur la faute alléguée de la banque pour ne pas avoir inclus des frais dans le taux effectif global


Références :

article 1382 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 26 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 30 oct. 2012, pourvoi n°11-23034, Bull. civ. 2012, IV, n° 197
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, IV, n° 197

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : Mme Pénichon
Rapporteur ?: Mme Robert-Nicoud
Avocat(s) : Me Bouthors, Me Foussard

Origine de la décision
Date de l'import : 11/09/2013
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.23034
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