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23/10/2012 | FRANCE | N°11-23599

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 23 octobre 2012, 11-23599


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu les articles 33 et 36 du code de l'industrie cinématographique dans leur rédaction applicable en la cause ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que sauf dispositions contraires portées au contrat et inscrites au registre public du cinéma et de l'audiovisuel, le bénéficiaire d'une délégation ou d'une cession, en propriété ou à titre de garantie, de tout ou partie des produits présents et à venir d'une oeuvre cinématographique régulièrem

ent inscrite audit registre, encaisse seul et directement, à concurrence de ses ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu les articles 33 et 36 du code de l'industrie cinématographique dans leur rédaction applicable en la cause ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que sauf dispositions contraires portées au contrat et inscrites au registre public du cinéma et de l'audiovisuel, le bénéficiaire d'une délégation ou d'une cession, en propriété ou à titre de garantie, de tout ou partie des produits présents et à venir d'une oeuvre cinématographique régulièrement inscrite audit registre, encaisse seul et directement, à concurrence de ses droits et suivant l'ordre de son inscription, le montant des produits de cette oeuvre, de quelque nature qu'ils soient, et ce sans qu'il soit besoin de signification aux débiteurs cédés qui seront valablement libérés entre ses mains ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Natexis Coficiné aujourd'hui dénommée Natixis Coficiné, agissant en tant que chef de file d'un pool bancaire, a consenti à la société Tvor un crédit garanti par la cession de l'intégralité des produits devant revenir à celle-ci au titre de l'exploitation télévisuelle en France de divers films ; que cette garantie a été inscrite au registre public du cinéma et de l'audiovisuel ; que la société Tvor a cédé les droits de diffusion de trois films à la société France 3 qui s'est acquittée du prix de cession entre ses mains ; que la société Natixis Coficiné, soutenant que ce règlement était intervenu en violation de ses droits, a demandé que la société France 3 soit condamnée à lui payer la même somme ;
Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt, après avoir énoncé que si la publication au registre public du cinéma et de l'audiovisuel rend la délégation ou la cession opposable aux tiers sans qu'il soit besoin d'une notification, cette opposabilité ne vaut que pour les délégations ou cessions publiées, de sorte qu'une délégation ou une cession sur un débiteur ne figurant pas dans la publication ne lui est pas opposable, sauf notification directe à ce débiteur avant qu'il ait réglé, relève que l'acte publié portait sur les créances détenues par la société Tvor à l'encontre de la société France Télévisions et retient que les sociétés France Télévisions et France 3 constituant, à l'époque de la cession, deux personnes morales distinctes aux patrimoines distincts, la dette de l'une ne pouvait être celle de l'autre et que la société Natixis Coficiné n'ayant pas notifié à la société France 3 l'acquisition des droits de la société Tvor avant que la première ne paie entre les mains de la seconde, la société France 3 s'était valablement libérée entre les mains de la société Tvor ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans constater que l'acte publié au registre public du cinéma et de l'audiovisuel excluait expressément de son assiette les recettes issues de la cession des droits de diffusion intervenue au profit de la société France 3, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 juin 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société France Télévisions aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Natixis Coficiné la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour la société Natixis Coficiné
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la société NATIXIS COFICINE de sa demande en paiement envers la société France Télévisions et d'AVOIR condamné la société NATIXIS COFICINE à payer à la société France Télévisions la somme de 187.037,41 euros avec les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 16 mars 2009 ;
AUX MOTIFS QU'il est démontré qu'en date du 23 mars 2006, la société NATEXIS COFICINE, depuis dénommée NATIXIS COFICINE, a fait publier au Registre public du cinéma et de l'audiovisuel tenu par le Centre national de la Cinématographie conformément aux dispositions du Code de l'industrie cinématographique, Partie législative, Livre 1er, Titre II, alors en vigueur (depuis le 15 juin 2010, Code du cinéma et de l'image animée, Partie législative, Livre 1er, Titre I), sous les n° RPCA 33.302, 43.609 et 45.915, l'acte de cession de créance passé le 17 février 2006 entre cet établissement de crédit et la société TVOR, laquelle a cédé à la première « a) la créance de EUR 138.000 HT plus TVA détenue à l'encontre de France Télévisions la Cour souligne au titre des droits de diffusion télévisuelle des films « Libera amore mio », « Marisa la Civetta », « Bubu di Montparnasse » ; b) la créance de EUR 38.000 HT plus TVA détenue à l'encontre de France Télévisions la Cour souligne au titre des droits de diffusion télévisuelle du film « l'Incompris » » ; qu'il est expressément mentionné en tête de l'acte publié que l'inscription n'est pas requise pour le film « Marisa la Civetta », non inscrit au registre ; qu'il est en outre constant que le litige ne concerne pas les droits afférents à l'exploitation du film « l'Incompris » ; que la publication au Registre public du cinéma et de l'audiovisuel des délégations et cessions, en pleine propriété ou à titre de garantie, de tout ou partie des produits présents ou à venir d'une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle est opposable aux tiers, sans qu'il soit besoin d'une notification ; que, en revanche, conformément à l'article 33, dernier alinéa, du Code de l'industrie cinématographique alors en vigueur (aujourd'hui article L. 123-1, dernier alinéa, du Code du cinéma et de l'image animée), cette opposabilité ne vaut que pour les délégations et cessions publiées, de sorte qu'une délégation ou cession de créance sur un débiteur ne figurant pas dans la publication ne lui est pas opposable, sauf notification directe à ce débiteur avant qu'il n'ait réglé ; que les société France Télévisions et France 3 ont constitué jusqu'à la dissolution de la seconde, intervenue le 1er janvier 2009, date d'entrée en vigueur des dispositions de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relatives à la fusion des sociétés de l'audiovisuel public, deux personnes morales différentes, aux patrimoines distincts, de sorte que la dette de l'une ne pouvait être celle de l'autre ; que la société NATIXIS COFICINE ne soutient pas que la société TVOR ait été créancière de la société France Télévisions, ce qu'au demeurant, aucune pièce versée aux débats n'est de nature à démontrer ; qu'en conséquence, en réglant la société TVOR, la société France 3 n'a nullement payé en méconnaissance de la publicité réalisée au Registre public des délégations et cessions, qui ne faisait pas apparaître que le bénéficiaire du règlement avait cédé sa créance à un tiers ; que, de plus, rien ne faisait obstacle à l'existence d'une créance différente de la société TVOR sur la société France Télévisions, alors que l'acquisition de droits de diffusion télévisuelle entrait dans l'objet de cette dernière société et que la cession publiée au Registre public ne faisait pas état de droits exclusifs ; que la société NATIXIS COFICINE n'a pas notifié à la société France 3 l'acquisition des droits de la société TVOR avant le règlement de celle-ci par la première ; qu'il est, au contraire, établi que la société France 3 a payé son créancier TVOR le 25 juin 2006, donc antérieurement à la notification à elle faite de la cession par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 juillet 2006 ; que la notification de la cession faite par la société NATIXIS COFICINE à la société France Télévision le 23 février 2006 est inefficace, pour n'avoir pas été faite au débiteur ; qu'il se déduit de ces constatations que la société France 3 s'est valablement libérée de sa dette envers la société TVOR, d'où il suit que la demande de la société NATIXIS COFICINE contre la société France Télévisons, venant aux droits et obligations de la société France 3 n'est pas fondée ; qu'en l'état de ces énonciations, tous autres arguments des parties étant surabondants ou inopérants, il échet, infirmant le jugement entrepris, de débouter la société NATIXIS COFICINE de sa demande en paiement contre la société France Télévisions ;
1°) ALORS QU'en jugeant que l'acte passé le 17 février 2006 entre la société NATIXIS COFICINE et la société TVOR, publié au Registre public du cinéma et de l'audiovisuel le 23 mars 2006, emportait cession à la première de « a) la créance de EUR 138.000 HT plus TVA détenue à l'encontre de France Télévisions … au titre des droits de diffusion télévisuelle des films « Libéra amore moi », « Marisa la Civetta », « Bubu di Montparnasse » et de b) la créance de EUR 38.000 HT plus TVA détenue à l'encontre de France Télévisions … au titre des droits de diffusion télévisuelle du film l'Incompris » », alors qu'elle portait en réalité sur « l'intégralité des produits à revenir à la société TVOR de l'exploitation télévisuelle en France » (chapitre I Cession, p. 2, al. 3) de ces films, comprenant « toutes redevances, prix de cession ou de location, à-valoir ou minima garantis, toutes taxes comprises, exigibles à raison ou en vue de l'exploitation télévisuelle des FILMS, quel que soit le procédé utilisé : par voies hertziennes, émetteur, satellite ou câble, etc… pour un ou plusieurs passages à une société de télévision publique ou privée, payante ou non, ou à toute autre société publique ou privée, sans aucune déduction » et « toutes sommes à revenir à l'exploitation des droits dérivés » (Chapitre III, Calcul des produits, contrat publié au RPCA, p. 2), la Cour d'appel a dénaturé, par omission, l'acte publié au RPCA et a violé l'article 1134 du Code civil ;
2°) ALORS QUE, en toute hypothèse, le bénéficiaire d'une cession de tout ou partie des produits présents ou à venir d'une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle dûment inscrite au RPCA encaisse seul et directement, nonobstant toute opposition autre que celle fondée sur un privilège légal, à concurrence de ses droits et suivant l'ordre de son inscription, le montant des produits de l'oeuvre cinématographique ou audiovisuelle, de quelque nature que ce soit, et sans qu'il soit besoin de signification aux débiteurs cédés qui seront valablement libéré entre ses mains ; qu'en jugeant, après avoir constaté que « la société NATIXIS COFICINE avait fait publier au RPCA l'acte de cession de créance passé le 17 février 2006 entre cet établissement de crédit et la société TVOR » (arrêt p. 6, al. 7) que la société France 3 avait pu valablement se libérer entre les mains de la société TVOR, sans constater que la cession publiée excluait expressément de son assiette les recettes issues de la cession des droits intervenue au profit de la société France 3, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 36 du Code de l'industrie cinématographique ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société NATIXIS COFICINE à payer à la société France Télévision la somme de 187.037,41 euros avec les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 16 mars 2009 ;
AUX MOTIFS QU'« en conséquence de l'infirmation prononcée, il échet de condamner la société NATIXIS COFICINE à payer à la société France 3 la somme de 187.037,41 euros représentant les sommes versées en exécution du jugement entrepris, avec les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 16 mars 2009, date des conclusions récapitulatives valant mise en demeure conformément aux dispositions de l'article 1153, al. 3 du Code civil » ;
1°) ALORS QUE l'obligation de restitution résulte de plein droit de l'infirmation du jugement assorti de l'exécution provisoire ; qu'en condamnant, en l'espèce, la société NATIXIS COFICINE à payer à la société France Télévisions la somme de 187.037,41 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 mars 2009, quand l'obligation à restitution résultait déjà de l'infirmation du jugement, l'arrêt infirmatif a violé l'article 31 de la loi du 9 juillet 1991 ;
2°) ALORS QUE la partie qui doit restituer une somme qu'elle détenait en vertu d'une décision de justice exécutoire n'en doit les intérêts au taux légal qu'à compter de la notification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution ; qu'en condamnant, en conséquence de l'infirmation prononcée, la société NATIXIS COFICINE à payer à la société France 3 « la somme de 187.037,41 euros représentant les sommes versées en exécution du jugement entrepris, avec les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 16 mars 2009, date des conclusions récapitulatives valant mise en demeure conformément aux dispositions de l'article 1153, al. 3 du Code civil » (arrêt p. 7, al. 7), la Cour d'appel a violé l'article 1153, al. 3 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-23599
Date de la décision : 23/10/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

NANTISSEMENT - Oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles - Délégation ou cession des produits - Inscription au registre public du cinéma et de l'audiovisuel - Effets - Opposabilité aux tiers - Limites - Clause contraire du contrat de délégation ou de cession - Inscription au RPCA - Constatations nécessaires

Il résulte des articles 33 et 36 du code de l'industrie cinématographique que, sauf dispositions contraires portées au contrat et inscrites au registre public du cinéma et de l'audiovisuel, le bénéficiaire d'une délégation ou d'une cession, en propriété ou à titre de garantie, de tout ou partie des produits présents et à venir d'une oeuvre cinématographique régulièrement inscrite audit registre, encaisse seul et directement, à concurrence de ses droits et suivant l'ordre de son inscription, le montant des produits de cette oeuvre, de quelque nature qu'ils soient, et ce sans qu'il soit besoin de signification aux débiteurs cédés qui seront valablement libérés entre ses mains. Ne donne pas de base légale à sa décision, la cour d'appel qui, pour rejeter la demande du délégataire des recettes provenant de l'exploitation télévisuelle de plusieurs films, retient que, à défaut de notification de l'acte de délégation au cessionnaire des droits de diffusion de certains de ces films, ce dernier avait pu valablement se libérer du prix de cession entre les mains du délégateur, sans constater que l'acte publié au registre public du cinéma et de l'audiovisuel par le délégataire excluait expressément de son assiette les recettes provenant de la cession des droits de diffusion au profit de ce cessionnaire


Références :

articles 33 et 36 du code de l'industrie cinématographique, devenus les articles L. 123-1 et L. 124-2 du code du cinéma et de l'image animée

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 16 juin 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 23 oct. 2012, pourvoi n°11-23599, Bull. civ. 2012, IV, n° 191
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, IV, n° 191

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : M. Mollard
Rapporteur ?: Mme Mandel
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 11/09/2013
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.23599
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