LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, qui est recevable :
Vu l'article 1er du code de procédure civile de la Polynésie française ;
Attendu que l'action n'est ouverte qu'à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention et sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Papeete, 28 avril 2011), que Mme X... a assigné M. Y... en revendication des terres Vairei n° 302 à 307, situées à Papeari en sa qualité d'ayant droit dans la succession des Z... et pour les avoir acquis, par acte de vente en date de 1928 et 1929 ; que M. Y... s'oppose à ces demandes en soutenant que Mme X... n'établit ni que les consorts X... ont des droits dans la succession de leur auteur E..., ni que les vendeurs ont des droits sur les terres litigieuses ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable l'action engagée par Mme X..., faute d'intérêt et de qualité à agir, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'elle ne démontre pas son lien de parenté avec la succession des Z... et que sa qualité de propriétaire des terres dont elle demande le partage avec leurs autres ayants droit n'est donc pas établie ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action et que l'établissement de sa qualité de propriétaire des terres revendiquées par Mme X... n'était pas une condition de recevabilité de son action mais de son succès, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 avril 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de M. Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize octobre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour Mme X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'action engagée par Mme X..., épouse A... ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, à propos des droits des consorts X... en qualité d'ayant droit des Z... par leur mère, l'expert a conclu « nous n'avons pu établir le lien de parenté entre les revendiquants F... a Z..., G... et H... a Z... ; ainsi qu'il résulte de nos recherches, ces deux revendiquants ont laissé une postérité ou des collatéraux », et l'intimé a raison lorsqu'il indique que le patronyme Z... est celui de F... ne suffit pas à prouver son lien de parenté avec les revendiquants mais qu'il appartient aux demandeurs d'en apporter des justificatifs par des actes d'état civil et qu'en tout cas, les déductions faites à partir du nom de Z... ou I... ne suffisent pas à rapporter d'une manière certaine ce lien de parenté ; à propos des droits des consorts X... en qualité de propriétaires des terres Vairei n° 302, 303, 304, 305, 306 et 307 pour les avoir acquis des frères et soeurs de B... a C..., leur mère et d'autres membres de la famille C... : ainsi que l'affirme l'intimé, les droits acquis sont issus du même auteur F...
Z..., dont il a été démontré qu'elle n'avait aucun lien de parenté avec les revendiquants ; les droits des consorts X... ne sont donc pas établis non plus sur ce fondement ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il est constant que les terres en litige ont été revendiquées par J... a Z..., K... a Z..., L... a Z..., M..., N... a Z..., O... a Z..., H... a Z... ; il appartient donc aux consorts X... qui exercent une action en revendication, de faire la preuve de leur qualité d'ayant droit de ceux-ci ; les consorts X... ont versé des actes d'état civil qui démontrent qu'ils sont les enfants de Monsieur D...
X... et Mme B... a C... mais aucun acte ne prouve que Monsieur D...
X... et Mme B... a C... sont les ayant droit de J... a Z..., K... a Z..., P... a Z..., Q..., R... a Z..., O... a Z..., H... a Z... ; l'expert indique dans son rapport qu'elle n'a pu découvrir aucune information sur les revendiquants J... a Z..., K... a Z..., L... a Z..., R... a Z...
O... a Z... ; il convient dès lors de constater que les demandeurs n'ont pas établi leur qualité de propriétaires des terres dont ils demandent le partage ; leur demande est irrecevable pour défaut d'intérêt et de qualité à agir ;
1°) ALORS QUE l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légal au succès ou au rejet d'une prétention ; que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action ; qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que la qualité de propriétaire de Mme Mme X... n'était pas une condition de recevabilité de son action, mais de son succès, la cour d'appel a violé les articles les articles 1er et 45 du code de procédure civile de la Polynésie française ;
1°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en l'absence d'acte état civil, une personne qui prétend avoir recueilli une succession peut apporter la preuve de sa généalogie ancienne par tout moyen ; qu'en exigeant de Mme A... qu'elle démontre l'existence de son lien de parenté par la fourniture d'actes d'état civil, pourtant inexistants d'après les attestations délivrées à l'expert par la Direction des affaires foncières de la Polynésie française, la cour d'appel a violé l'article 730 du code civil ;
2°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE celui qui soutient être propriétaire d'un fonds peut invoquer, à titre de présomption vis-à-vis des tiers, des titres translatifs de propriété et il incombe alors à celui qui conteste le droit résultant de ces titres de justifier d'un droit de propriété préférable ; qu'en relevant, pour considérer que les droits de propriété de Mme A... sur les terres litigieuses n'étaient pas établis, que les droits cédés à son père provenaient de Mme F...
Z... dont il aurait été démontré qu'elle n'avait aucun lien de parenté avec les revendiquants, sans rechercher si M. Y..., qui contestait les droits de propriété résultant de ces titres, disposait lui-même d'un droit de propriété préférable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 544 du code civil ;
3°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable la demande de Mme A... tendant à faire reconnaître sa qualité de propriétaire des terres litigieuses, qu'elle ne pouvait se prévaloir des actes de vente au profit de son père, M. D...
X..., puisque les droits cédés à ce dernier provenaient de F...
Z..., « dont il a (vait) été démontré qu'elle n'avait aucun lien de parenté avec les revendiquants » originels des terres, après avoir pourtant énoncé que « les déductions faites à partir du nom de Z... ou I... ne suffisent pas à rapporter d'une manière certaine ce lien de parenté », ce dont il résultait qu'il pouvait parfaitement exister, la cour d'appel, qui a statué par des motifs contradictoires, a méconnu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et 268 du code de procédure civile de la Polynésie française ;
4°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE le juge ne peut se borner à procéder par voie de simple affirmation sans analyser, même sommairement, les éléments de preuve sur lesquels il se fonde ; qu'en affirmant, pour déclarer irrecevable la demande de Mme A... tendant à faire reconnaître sa qualité de propriétaire des terres litigieuses, qu'elle ne pouvait se prévaloir des actes de vente au profit de son père, M. D...
X..., puisque les droits cédés à ce dernier provenaient de F...
Z..., « dont il a (vait) été démontré qu'elle n'avait aucun lien de parenté avec les revendiquants » originels des terres, sans préciser les éléments de preuve dont cela résultait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile et 268 du code de procédure civile de la Polynésie française.