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10/10/2012 | FRANCE | N°11-16450;11-16451;11-16452

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 octobre 2012, 11-16450 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° s G11-16450, J 11-16451 et K11-16452 ;
Sur les moyens uniques de chaque pourvoi qui sont identiques :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Bordeaux, 17 février 2011) que MM. X..., Y... et Z..., employés en qualité de chauffeur par la société Transports Guyamier, ont saisi la juridiction prud'homale pour faire condamner leur employeur, adhérent à l'UNOSTRA, au versement d'un rappel de salaire au titre d'une prime d'ancienneté due en application d'un protocole d'accord

départemental de fin de grève signé le 12 février 1972 ;
Attendu que...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° s G11-16450, J 11-16451 et K11-16452 ;
Sur les moyens uniques de chaque pourvoi qui sont identiques :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Bordeaux, 17 février 2011) que MM. X..., Y... et Z..., employés en qualité de chauffeur par la société Transports Guyamier, ont saisi la juridiction prud'homale pour faire condamner leur employeur, adhérent à l'UNOSTRA, au versement d'un rappel de salaire au titre d'une prime d'ancienneté due en application d'un protocole d'accord départemental de fin de grève signé le 12 février 1972 ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir fait droit aux demandes des salariés, alors, selon le moyen :
1°/ que l'accord collectif est un acte écrit à peine de nullité et doit dès lors, pour être valable, comporter la signature des parties qui l'ont conclu ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la copie de l'accord en date du 12 février 1972 produite par le salarié mentionnant l'adhésion de l'UNOSTRA le 13 février 1972, syndicat dont est membre l'employeur, n'est pas signée par ce dernier ; qu'en jugeant néanmoins cet accord valablement conclu par l'UNOSTRA et par conséquent applicable à la société, la cour d'appel a violé l'article L. 2231-3 du code du travail ; 2°/ qu'il appartient au juge de vérifier la validité de l'accord collectif contestée devant lui ; qu'en se fondant sur la seule circonstance que l'accord litigieux avait été déposé auprès de l'inspection du travail compétente, pour en déduire qu'il était régulier, sans constater par elle-même que celui-ci avait été valablement signé par l'UNOSTRA, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2231-3 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la copie de l'accord produite par les salariés comportait les noms des représentants patronaux et syndicaux signataires ainsi que ceux de leurs organisations et indiquait que l'UNOSTRA avait adhéré au protocole le 13 février 1972, la cour d'appel a pu en déduire que ce dernier était applicable à l'employeur ; que le moyen, qui manque en fait en sa seconde branche, n'est pas fondé en sa première ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Transports Guyamier aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à MM. X..., Y... et Z..., la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit aux pourvois n° s G 11-16. 450, J 11-16. 451 et K 11-16. 452 par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Transports Guyamier
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société à verser au salarié un rappel de prime d'ancienneté ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile
AUX MOTIFS PROPRES QUE « En ce qui concerne l'accord départemental du 12 février 1972 : Considérant que la SARL TRANSPORTS GUYAMIER conteste en premier lieu la validité du protocole d'accord départemental du 12 février 1972 au motif que le document produit par M. X... devant le conseil de prud'hommes n'est que la copie d'un document non signé et portant copie d'un cachet à peine lisible ; qu'elle demande en conséquence à la cour, sur le fondement de l'article 138 du code de procédure civile, d'ordonner la communication de ce document par la direction départementale du travail et par le conseil de prud'hommes de Bordeaux ; Considérant que l'article 138 du code de procédure civile dispose que : « Si, dans le cours d'une instance, une partie entend faire état d'un acte authentique ou sous seing privé auquel elle n'a pas été partie ou d'une pièce détenue par un tiers, elle peut demander au juge saisi de l'affaire d'ordonner la délivrance d'une expédition ou la production de l'acte ou de la pièce » ;
Considérant que la société TRANSPORTS GUYAMIER, à qui il était loisible de solliciter directement auprès de l'inspection du travail ou du conseil de prud'hommes, ou même auprès de l'UNOSTRA dont il est membre, une expédition ou une copie du protocole litigieux, ne justifie, ni avoir effectué cette démarche, ni a fortiori s'être heurtée à un refus de communication de la part de l'inspection du travail ou du conseil de prud'hommes ; que dans ces conditions elle sera déboutée de sa demande parfaitement dilatoire fondée sur l'article 138 du code de procédure civile ; Considérant au demeurant que M. X... produit aux débats deux photocopies d'un protocole d'accord, en date du 12 février 1972, conclu entre d'une part l'union syndicale des transports publics routiers de la Gironde et le syndicat départemental des loueurs de véhicules industriels de la Gironde, d'autre part, les syndicats départementaux C. G. T., C. F. D. T., F. N. C. R., et F. O, que la première copie comporte les signatures manuscrites des représentants patronaux et des représentants ouvriers ; que la seconde copie comporte, d'une part, une mention indiquant que l'UNOSTRA, a adhéré au protocole, le 13 février 1972, et, sur chacune de ses deux pages, le timbre humide du ministère des transports-inspection du travail et mentionne les noms des représentants patronaux signataires : A..., B... et C... et les noms des représentants ouvriers signataire, pour F. O. D..., pour la C. F. D. T E..., pour la C. G. T. F... et pour la F. N. C. R. G... ;
Considérant que c'est à juste titre dans ces conditions, que le conseil des prud'hommes, après avoir exactement relevé, d'une part, que les articles D. 2231-4 et D. 2231-5 du code du travail précisent que les conventions et accords collectifs sont déposés auprès de la direction départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle et que le service départemental dépositaire des conventions et accords collectifs de travail est celui dans le ressort duquel ils ont été conclus, d'autre part, que la copie du protocole produite par M. X..., émane de l'inspection du travail de la Gironde, puisqu'elle est revêtue de son cachet, a reconnu la validité de cet accord ;
Considérant que c'est encore à juste titre que le conseil, après avoir relevé que la société TRANSPORTS GUYAMIER n'établit pas, ni même d'ailleurs n'allègue, que l'accord en cause a été régulièrement dénoncé, a déclaré cet accord applicable à la société TRANSPORTS GUYAMIER ;
En ce qui concerne la prime d'ancienneté :
Considérant que l'article 3° de l'accord du 12 février 2007 en réalité le 12 février 1972, intitulé « majoration pour ancienneté » dispose que : « Le salaire réel pour l'ensemble du personnel ouvrier sera majoré de 3 % tous les 3 ans jusqu'à 15 % à 15 ans »
Considérant que M. X... est dès lors bien fondé à réclamer, sur la base de cette disposition de l'accord de 1972, la condamnation de la société TRANSPORTS GUYAMIER à lui verser un rappel de prime d'ancienneté selon son décompte arrêté au 30 juin 2010, que la société TRANSPORTS GUYAMIER ne discute pas »
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « M. X... base sa demande sur les dispositions d'un protocole d'accord départemental du 12 février 1972 qui, dans son article 3, prévoit que le salaire réel pour l'ensemble du personnel ouvrier des transports routiers de la Gironde, sera majoré de 3 % tous les 3 ans jusqu'à 15 % à 15 ans.
De son côté, l'employeur affirme que les majorations pour ancienneté ont été calculées conformément aux dispositions de la Convention Collective et que M. X... ne rapporte pas la preuve que le protocole d'accord départemental du 12 février 1972 serait applicable.
A ce sujet, l'article L 2232-5 du Code du Travail précise que le champ d'application territorial des conventions de branches et des accords professionnels peut être national, régional ou local.
Par conséquent, un accord départemental est parfaitement admissible.
De plus, l'article L 2261-1 du Code du Travail prévoit que les conventions et accords sont applicables, sauf stipulations contraires, à partir du jour qui suit leur dépôt auprès du service compétent, dans des conditions déterminées par voie réglementaire.
Les articles D 2231-4 et D 2231-5 du Code du Travail précisent que les conventions et accords collectifs sont déposés auprès de la Direction Départementale du Travail, de l'Emploi et de la Formation Professionnelle et que le service départemental dépositaire des conventions et accords collectifs de travail est celui dans le ressort duquel ils ont été conclus.
En l'espèce, la copie de l'accord du 12 février 1972 produite par M. X... émane de l'Inspection du Travail des Transports de la Gironde, puisqu'elle est revêtue de son cachet.
En conséquence, le Conseil ne peut que constater que l'accord départemental du 12 février 1972 a bien fait l'objet d'un dépôt auprès de l'Inspection du Travail compétente et, dans un tel cas, la Cour de Cassation a jugé, dans un arrêt du 21 février 2007, qu'un accord est réputé valable dès lors qu'il a fait l'objet d'un dépôt auprès de la Direction Départementale du Travail qui l'a accepté, après en avoir contrôlé la régularité formelle.
En outre, cet arrêt du 21 février 2007 confirmait un jugement de la Section Commerce du Conseil de Prud'hommes de BORDEAUX du 17 février 2004 et concernait directement l'accord départemental du 12 février 1972, dont la Cour de Cassation a confirmé la validité en ces termes :
" Le Conseil de Prud'hommes, qui a constaté que la copie de l'accord produite par le salarié émanait de la Direction Départementale du Travail, a pu en déduire que celle-ci, qui est chargée de recevoir le dépôt des conventions et accords collectifs en cinq exemplaires signés par les parties, avait accepté le dépôt de l'accord litigieux après en avoir contrôlé la régularité formelle, et que celui-ci était valable ». Dans ces conditions, en application de cette jurisprudence, le Conseil considère que cet accord départemental du 12 février 1972, est parfaitement valable.
Par ailleurs, l'employeur ne rapporte pas la preuve que cet accord aurait été valablement dénoncé et donc il continue à s'appliquer aux entreprises de transports routiers de la Gironde et, en particulier, au sein de la SARL TRANSPORTS GUYAMIER.
En application de cet accord, il est, par conséquent fait droit à la demande de l'appel de primes d'ancienneté de M, X... pour les années 2007 et 2008, conformément à ses calculs »
1. ALORS QUE l'accord collectif est un acte écrit à peine de nullité et doit dès lors, pour être valable, comporter la signature des parties qui l'ont conclu ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la copie de l'accord en date du 12 février 1972 produite par le salarié mentionnant l'adhésion de l'UNOSTRA le 13 février 1972, syndicat dont est membre l'employeur, n'est pas signée par ce dernier ; qu'en jugeant néanmoins cet accord valablement conclu par l'UNOSTRA et par conséquent applicable à la société exposante, la Cour d'appel a violé l'article L 2231-3 du Code du travail ;
2. ALORS QU'il appartient au juge de vérifier la validité de l'accord collectif contestée devant lui ; qu'en se fondant sur la seule circonstance que l'accord litigieux avait été déposé auprès de l'inspection du Travail compétente, pour en déduire qu'il était régulier, sans constater par elle-même que celui-ci avait été valablement signé par l'UNOSTRA, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 2231-3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-16450;11-16451;11-16452
Date de la décision : 10/10/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 17 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 oct. 2012, pourvoi n°11-16450;11-16451;11-16452


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.16450
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