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02/10/2012 | FRANCE | N°11-23568

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 02 octobre 2012, 11-23568


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le troisième moyen :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X...est preneur à bail commercial de locaux appartenant à la commune de Carry-le-Rouet (la commune) ; que la bailleresse a signifié un refus de renouvellement à M. X...qui a assigné la commune en annulation de ce refus, mise en conformité des lieux loués et, à titre subsidiaire, fixation de l'indemnité d'éviction ;
Attendu que pour débouter M. X...de sa demande d'indemnisation des

frais de licenciement, l'arrêt retient que celui-ci ne rapporte pas la preuv...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le troisième moyen :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X...est preneur à bail commercial de locaux appartenant à la commune de Carry-le-Rouet (la commune) ; que la bailleresse a signifié un refus de renouvellement à M. X...qui a assigné la commune en annulation de ce refus, mise en conformité des lieux loués et, à titre subsidiaire, fixation de l'indemnité d'éviction ;
Attendu que pour débouter M. X...de sa demande d'indemnisation des frais de licenciement, l'arrêt retient que celui-ci ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un contrat de travail (pas de registre du personnel ni de copies de bulletins de salaires) qui pourrait donner lieu à licenciement d'un ou plusieurs salariés ;
Qu'en statuant ainsi, alors que dans ses conclusions la commune demandait la confirmation du jugement en ce qu'il l'avait condamnée à rembourser à M. X...des frais de licenciement des salariés sur production de justificatifs, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les deux autres moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X...de sa demande au titre des frais de licenciement, l'arrêt rendu le 24 juin 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la commune de Carry-le-Rouet au dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la commune de Carry-le-Rouet à payer à M. X...la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la commune de Carry-le-Rouet ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux octobre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande d'annulation de refus de renouvellement présentée par Monsieur X...;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur la validité du refus de renouvellement du bail commercial, le 5 mars 2004 René X...a fait notifier à son bailleur, la commune de Carry le Rouet une demande de renouvellement du bail commercial liant les parties depuis le 29 septembre 1984 ; que le 3 juin 2004 la commune de Carry le Rouet lui a fait signifier son refus de renouvellement avec offre d'une indemnité d'éviction ; que ce refus de renouvellement respecte les obligations de forme : délai et mentions, édictées par l'article L. 145-10 du code de commerce ; qu'en application des dispositions de l'article L. 145-14 du même code le bailleur peut refuser le renouvellement du bail : selon ces dispositions le bailleur dispose d'un droit absolu de refuser le renouvellement du bail à la seule condition de payer au locataire évincé une indemnité égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement et il n'a pas à justifier son refus ; que la décision frappée d'appel sera confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande d'annulation du refus de renouvellement présentée par René X...; qu'en l'état de ce refus de renouvellement du bail commercial, seule procédure dont la Cour est saisie, il n'y a pas lieu à ordonner une mesure d'expertise pour évaluer une éventuelle perte de jouissance du preneur qui a déjà engagé des procédures pour voir condamner son bailleur à exécuter des travaux dans les lieux loués dans le cadre de l'exécution du contrat de bail commercial, et René X...sera débouté de sa demande de désignation d'un expert ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE René X...conteste la validité du congé sans offre de renouvellement que la commune de Carry le Rouet lui a notifié, ainsi que le montant de l'Indemnité d'éviction que celle-ci lui propose ; que le demandeur considère que ce refus de renouvellement, dont il ne conteste pas la régularité formelle, est frauduleux en tant qu'il permet à la bailleresse d'échapper à son obligation de délivrance et aux travaux de mise aux normes des locaux donnés à bail ; que contrairement à ce qu'il soutient, le droit pour le bailleur de refuser le renouvellement du contrat de-location est absolu, selon le principe qu'édicté l'article L 145-14 du code de commerce, sauf à ce que l'exercice de ce droit soit sanctionné par le paiement d'une Indemnité d'éviction ; que l'inexécution par le bailleur de ses obligations contractuelles, au titre de l'entretien de l'Immeuble ou de sa mise en conformité, se résout en dommages et intérêts, conformément à l'article 1147 du Code civil, mais ne saurait faire obstacle à l'exercice de ce droit de refus de renouvellement ; qu'il en va de même pour l'appréciation de sa bonne foi dans l'exécution de ces obligations ; que quant au dol contractuel que René X...allègue, le terme est inapproprié dans les circonstances de l'espèce dès lors qu'aucun consentement n'est susceptible d'être altéré et qu'à supposer un comportement empreint de malice de la part de la commune ; que le demandeur serait seulement recevable à en réclamer réparation à raison du préjudice subi ; qu'il s'ensuit que la demande d'annulation du refus de renouvellement n'est pas fondée et sera rejetée ;
ALORS QUE le bailleur a la faculté de refuser le renouvellement du bail, sauf lorsque ce refus a comme seul but de se soustraire à ses obligations de mise à disposition des locaux et ses obligations d'entretien ; qu'en affirmant néanmoins que l'inexécution de ses obligations contractuelles par le bailleur ne pouvait faire obstacle à l'exercice du droit de refus de renouvellement, la Cour d'appel a violé l'article L. 145-14 du Code de commerce.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la commune de CARRY le ROUET à payer à Monsieur X...la somme de 249. 000 € au titre de l'indemnité principale d'éviction indexée depuis le mois de janvier 2004 sur l'évolution du nouvel indice trimestriel des loyers commerciaux et d'avoir dit que la somme de 249. 000 € allouée au titre de l'indemnité principale d'éviction sera indexée depuis le mois de juin 2004 sur l'évolution du nouvel indice trimestriel des loyers commerciaux ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'expert Y...désigné par ordonnance de référé en date du 8 février 2005, confirmée par arrêt de la Cour d'Appel d'Aix en Provence, a déposé un rapport le 25 mai 2007 dans lequel il propose plusieurs calculs du montant de l'indemnité d'éviction : valeur selon le chiffre d'affaires attesté en 2005 : 138 3006 ; valeur par application du coefficient d'érosion monétaire sur le montant de l'acquisition du fonds de commerce : 107 477 € ; valeur potentielle théorique déduction faite des travaux de rénovation à engager par le locataire pour atteindre un tel chiffre d'affaires : 362 600 € ; valeur du droit au bail : 166 000 € : que le premier juge a fixé l'indemnité d'éviction à la somme de 249. 000 € en appliquant à la valeur potentielle du fonds évaluée par l'expert Y...à 362 617 €, frais de réfection déduits, une pondération fondée sur la perte de chance d'augmentation de la valeur du fonds du fonds : il a en effet retenu que le bailleur n'avait pas respecté ses obligations de mise en conformité, manqué à ses obligations en détruisant un immeuble mitoyen ce qui a mis en péril la solidité de l'immeuble, et ne s'était pas assuré du raccordement du fonds de commerce au réseau public sanitaire, mais également que le preneur n'avait pas procédé aux travaux de rénovation de l'immeuble qui lui incombaient ; que selon les documents qui figurent au dossier l'immeuble dans lequel est exploité le fonds de commerce d'hôtel restaurant sous l'enseigne " ... " à Carry le Rouet nécessitait des travaux de sécurité dès l'année 1982 ; que l'immeuble a été fermé entre 1982 et 1988 et en 1990 des travaux de ravalement de façade ont été ordonnés par la Mairie de Carry le Rouet ; que si le preneur n'a pas pu exploiter les lieux de façon normale, il a engagé de nombreuses procédures à l'encontre de son bailleur pour que ce dernier soit condamné à effectuer les travaux utiles comme cela résulte des arrêts rendus par la Cour d'Appel d'Aix en Provence le 7 mars 1984 et le 26 février 2004 ; que la partie hôtellerie est inexploitée depuis de nombreuses années sans qu'aucune précision ne soit fournie sur ce point par l'expert comme par le preneur ; que l'expert Y...pour l'évaluation de la valeur locative annuelle a retenu à la fois les locaux dans lesquels est exploitée l'activité de bar restaurant, y compris la grande salle à manger non exploitée lors de l'expertise, et les locaux d'hôtellerie soit 9 chambres classées en catégorie 0* du fait d'installations sanitaires communes ; que René X...n'est pas fondé à demander l'indemnisation de la perte d'un fonds de commerce d'hôtellerie d'une catégorie supérieure, c'est à dire de la potentialité des lieux, en prenant comme élément de comparaison un hôtel 3 étoiles d'un confort bien supérieur, alors qu'aucun travaux ni demandes de travaux n'ont été faits dans le sens d'une exploitation d'une autre catégorie depuis l'origine du bail litigieux en septembre 1980 ; qu'au contraire l'établissement a été fermé entre février 1982 et juin 1988, la réouverture n'étant pas autorisée pour 3 chambres sur 9 ; qu'à la date du refus du renouvellement du bail commercial en juin 2004, l'activité d'hôtellerie n'était pas exploitée, et ne l'était pas depuis de nombreuses années ; qu'au vu de ces éléments l'indemnité d'éviction qui doit indemniser le preneur de la perte de son fonds de commerce et donc de son remplacement, aucun déplacement du fonds avec réinstallation n'étant envisagé tant dans le rapport d'expertise judiciaire que dans les conclusions de René X..., a été justement fixée par le premier juge conformément aux dispositions de l'article L 145-14 du code de commerce à la somme de 249. 000 euros et la décision frappée d'appel sera confirmée sur ce point ; que cette somme sera indexée sur le nouvel indice trimestriel des loyers commerciaux à compter de juin 2004, et non à compter de janvier 2004 comme mentionné par erreur dans le jugement frappé d'appel ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE les parties discutent fermement l'évaluation de l'Indemnité d'éviction telle que l'expert l'a déterminée ; la commune produit deux avis de Dominique Z...qui, le 24 juillet 2006, propose une valeur de 144 160 € et, le 2 février 2007, une valeur de 67 937 € sur la base du chiffre d'affairée 2005, et ne modifie pas son offre de 166 000 € selon l'estimation de la valeur du droit au bail par l'expert judiciaire ; que René X...produit l'évaluation faite par Didier A...qui aboutit à une indemnité principale de 604. 000 euros : cette évaluation n'est pas raisonnable car elle se base sur des critères, de qualité hôtelière et de restauration sans rapport avec rétablissement du preneur, môme dans l'hypothèse d'une remise en état complète ; que Dominique Z...a raison d'indiquer qu'il s'agit sans doute d'une ancienne pension de famille dont l'activité n'a pas su évoluer, sauf pour l'activité de bar dansant en soirée ; que l'expert judiciaire précise aussi à juste titre qu'il n'y a pas lieu de tenir compte des travaux de modernisation effectues par le preneur après la date de refus de renouvellement ; que toutefois, contrairement à ce que soutient la commune, le litige portant sur des travaux à la charge de la bailleresse tranché par l'arrêt de la Cour d'appel du 26 février 2004 concerne une période antérieure à 1988, date de réouverture du fonds de commerce après fermeture administrative ; que même si, ainsi que l'expert judiciaire le relève, une grande partie des travaux de rénovation des locaux incombait au preneur, la bailleresse ne démontre pas avoir satisfait à ses obligations de mise en conformité dont elle avait la charge, à défaut de convention contraire, et dont cette charge fui a été transmise par acte d'achat de l'immeuble ; qu'au surplus, la commune de Carry le Rouet, en sa double qualité de bailleur et de gestionnaire de la collectivité publique, a manqué à ses obligations an détruisant un immeuble mitoyen, ce qui a mis en péril la solidité du bâtiment de l'hôtel, et en ne vérifiant pas le fonctionnement du collecteur de la voie publique auquel le réseau sanitaire du fonds de commerce de René X...est raccordé, ainsi que l'établit son constat d'huissier d'août 2004 ; qu'à ce titre, la carence du bailleur, qui se conjugue à celle du preneur, est la cause d'une perte de chance dans la valorisation du fonds de commerce ; que l'expert judiciaire a estimé la valeur potentielle de ce fonds, à le supposer en parfait état, à 362 017 €, frais de réfection déduits, soit le double de la valeur du droit au bail de 166 000 € ; qu'une pondération de 100 % est excessive et sera réduite à 50 %, dès fore qu'il s'agit seulement d'une. perte de chance d'augmentation de la valeur du fonds, soit 249 000 € ; que c'est indemnité, qui doit être évaluée au jour où le tribunal statue, sera indexée sur l'évolution du nouvel indice trimestriel des loyers commerciaux (loi du 4 août 2008) depuis juin 2004 ; que les parties ne discutent pas le calcul des indemnités accessoires telles que l'expert les a évaluées pour une indemnité de remploi (10 % de l'indemnité principale selon l'usage), la perte d'exploitation chiffrée à 11. 775 €, les frais de déménagement estimés à 3000 € ;
ALORS QUE dans le cas où le bailleur refuse le renouvellement du bail, il doit payer au locataire évincé une indemnité dite d'éviction réparant le préjudice causé par le refus de renouvellement et tenant compte les potentialités attachées au fonds de commerce loués ; qu'en affirmant, pour refuser de prendre en compte la potentialité des lieux loués pour évaluer l'indemnité d'éviction que Monsieur X...n'avait fait aucune démarche pour exploiter l'activité hôtelière depuis de nombreuses années tout en constatant que c'était en raison de l'inexécution par le bailleur de ses obligations que le preneur n'avait pas pu exploiter les lieux de façon normale, la Cour d'appel a violé l'article L. 145-14 du Code de commerce.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X...de sa demande au titre des frais de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE René X...sera débouté de sa demande de remboursement des indemnités de licenciement des salariés employés dans le fonds de commerce ne rapportant la preuve de l'existence d'aucun contrat de travail (pas de registre du personnel ni de copies de bulletins de salaires) qui pourrait donner lieu à licenciement d'un ou plusieurs salariés ;
1°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties telles qu'elles résultent de leurs conclusions ; que la commune de CARRY LE ROUTET demandait la confirmation du jugement en ce qu'il l'avait condamné à rembourser Monsieur X...des frais de licenciement des salariés sur production de justificatifs ; qu'en refusant néanmoins d'indemniser Monsieur X...des indemnités de licenciement aux motifs qu'il ne produisait pas les contrats de travail de ses salariés, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le juge, doit en toutes circonstances, faire observer et observer lui même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut à ce titre, relever un moyen d'office sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; que la commune de CARRY LE ROUET se bornait à demander à la confirmation du jugement en ce qu'il avait condamné à rembourser Monsieur X...des frais de licenciement des salariés sur production de justificatifs ; qu'en se fondant néanmoins sur l'absence de preuve de l'existence de contrat de travail, pour rejeter la demande de remboursement des indemnités de licenciement des salariés, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 11-23568
Date de la décision : 02/10/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 24 juin 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 02 oct. 2012, pourvoi n°11-23568


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.23568
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