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26/09/2012 | FRANCE | N°11-14645

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 septembre 2012, 11-14645


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 488 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant en matière de référé, qu'employé par la société Pedus depuis le 7 juillet 1991, M. X... a été désigné en qualité de délégué syndical et représentant syndical au comité d'entreprise par le syndicat FO ; que la société Pedus ayant été placée en redressement judiciaire, le mandataire judiciaire a, après autorisation, procédé au licenciement économique d

u salarié protégé par une lettre du 27 janvier 2004 ; que par un jugement du 25 mars 2008,...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 488 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant en matière de référé, qu'employé par la société Pedus depuis le 7 juillet 1991, M. X... a été désigné en qualité de délégué syndical et représentant syndical au comité d'entreprise par le syndicat FO ; que la société Pedus ayant été placée en redressement judiciaire, le mandataire judiciaire a, après autorisation, procédé au licenciement économique du salarié protégé par une lettre du 27 janvier 2004 ; que par un jugement du 25 mars 2008, le tribunal administratif a annulé la décision ministérielle ayant confirmé l'autorisation de l'inspecteur du travail ; que M. X... a sollicité sa réintégration le 30 mai 2008 ; que par une ordonnance de référé du 24 mars 2009, le conseil de prud'hommes, constatant l'accord de la société Lancry protection sécurité, venant aux droits de la société Europe Interventions à laquelle avait été cédée partie de l'activité de la société Pedus, a "en tant que de besoin" ordonné la réintégration de M. X... au sein de la société ; qu'à la suite de sa convocation à un entretien le 25 mars 2009 en vue de la régularisation de la réintégration de l'intéressé, la société Lancry protection sécurité a notifié à M. X..., par une lettre du 22 avril 2009, son licenciement pour faute grave ;
Attendu que pour ordonner la réintégration du salarié dans son emploi au sein de la société Lancry protection sécurité sous astreinte, avec reprise du paiement des salaires et accessoires à compter du 1er avril 2009, la cour d'appel énonce qu'en l'état de la décision du 24 mars 2009, la société Lancry protection sécurité est irrecevable à revenir sur un litige tranché par une décision définitive puisque non frappée d'appel et qu'il serait contraire à tout principe de loyauté de l'autoriser à remettre en cause à l'occasion du présent litige, alors que cette décision est fondée sur un engagement sans réserve de sa part ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'employeur soutenait n'avoir eu connaissance qu'en septembre 2010 des termes de la décision arrêtant le plan de cession partielle des activités de la société Pedus à la société Europe Interventions et précisant le nombre des salariés dont le licenciement était autorisé ainsi que les catégories professionnelles concernées, ce qui était de nature à caractériser l'existence de circonstances nouvelles l'empêchant de se fonder sur une précédente ordonnance de référé pour écarter les moyens de défense de l'employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 janvier 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Lancry ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Lancry protection sécurité
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné la réintégration de Monsieur X... dans son emploi au sein de la Société LANCRY PROTECTION SECURITE, sous astreinte, d'avoir ordonné à la Société LANCRY PROTECTION SECURITE de reprendre le paiement des salaires et accessoires à partir du 1er avril 2009, et de l'avoir condamnée au paiement de sommes en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS PROPRES QUE, devant le Conseil de Prud'hommes, lors de l'audience de référé ayant conduit à l'ordonnance précitée du 24 mars 2009, la Société LANCRY PROTECTION SECURITE a reconnu, sans réserve, le bien fondé de la demande de réintégration de Monsieur X..., au point que, dans le dispositif de sa décision, le Conseil et, en tant que de besoin, a condamné la société à respecter cet engagement ; qu'en l'état de cette décision, la Société LANCRY PROTECTION SECURITE est désormais recevable à revenir sur un litige tranché par une décision définitive – puisque non frappée d'appel – et qu'il serait contraire à tout principe de loyauté de l'autoriser à remettre en cause à l'occasion du présent litige, alors que cette décision est fondée sur un engagement sans réserve de sa part ; que, pour ce même motif, la Société LANCRY PROTECTION SECURITE est irrecevable à soutenir qu'en définitive, Monsieur X... n'aurait pas rempli les conditions tenant aux modalités d'exercice de ses mandats et n'aurait pu prétendre ainsi à une protection justifiant sa réintégration ;
QUE le seul litige susceptible d'opposer désormais les parties à trait, non pas à la réintégration de Monsieur X..., celle-ci étant acquise, mais au point de savoir si, à la date où la Société LANCRY PROTECTION SECURITE a engagé une nouvelle procédure de licenciement contre Monsieur X..., selon convocation préalable du 26 mars 2009 (finalement achevée par un licenciement prononcé, sans autorisation, le 22 avril suivant), Monsieur X... était encore, ou non, un salarié protégé par l'effet de ses anciens mandats syndicaux ; qu'au cas d'espèce, il n'est pas discutable que Monsieur X... était délégué syndical et représentant syndical au comité d'entreprise au sein de la Société PEDUS, lorsqu'a été engagé son premier licenciement, à l'origine finalement de la décision du tribunal administratif de CERGYPONTOISE du 25 mars 2008 - annulant la décision ministérielle autorisant son licenciement – dont s'est prévalu Monsieur X... le 30 mai 2008 auprès de la Société LANCRY PROTECTION SECURITE, pour solliciter sa réintégration ;
QUE la Société LANCRY PROTECTION SECURITE, venant aux droits de Me Y..., bénéficiaire des autorisations administratives antérieures de licenciement, ainsi mises à néant, et s'étant de surcroît engagée judiciairement le 24 mars 2009, ainsi qu'il a été précédemment rappelé, à procéder à la réintégration ainsi requise, devait, donc, et a d'ailleurs, procédé à un commencement de réintégration de l'intéressé par sa convocation le 17 mars 2009 à l'entretien du 25 mars 2009, comme indiqué dans l'exposé des faits ci-dessus ; que le seul point de droit à trancher a trait à la persistance, ou non, d'une protection pour Monsieur X..., au jour de l'engagement de la procédure initiée par la convocation susvisée du 26 mars 2009 ayant conduit au licenciement du 22 avril suivant –puisqu'il n'est pas contestable que l'intéressé ne peut plus prétendre, et ne prétend d'ailleurs pas, exercer au sein de la Société LANCRY PROTECTION SECURITE, les anciens mandats dont il disposait au sein de la Société PEDUS ;
QU'ainsi que l'a rappelé le Conseil dans l'ordonnance entreprise, les dispositions de l'article L.2411-3 du Code du travail énoncent que le licenciement d'un délégué syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail et cette autorisation est également requise pour le licenciement de l'ancien délégué syndical durant les douze mois suivant la date de cessation de ses fonctions s'il a exercé ces dernières pendant un an ; qu'en outre, selon l'article L.2411-8 du même Code, l'ancien représentant syndical au comité d'entreprise qui, désigné depuis deux ans n'est pas reconduit dans ses fonctions lors du renouvellement du comité, bénéficie également de cette protection pendant les six premiers mois suivant l'expiration de son mandat ou la disparition de l'institution ; que la durée de la procédure administrative consécutive à l'autorisation administrative nécessaire au licenciement d'un salarié protégé ne peut priver celui-ci de sa protection post mandat, lorsque l'autorisation de licencier est annulée, ce dont il résulte que la durée de cette protection ne peut commencer à courir avant la réintégration effective du salarié ;
QUE, vainement, la Société LANCRY PROTECTION SECURITE prétend qu'elle n'aurait pas été informée, lors du licenciement aujourd'hui litigieux, de la persistance des effets protecteurs des mandats de Monsieur X..., alors, d'une part, que les éléments de fait, nécessaires à son information, résultent des diverses décisions administratives intervenues et débattues au cours de la précédente instance en référé qui l'a opposée à Monsieur X... et, d'autre part, en tout état de cause, que cette persistance s'impose à elle, peu important la connaissance ou non par elle de cette persistance, compte tenu du caractère d'ordre public du statut protecteur des représentants du personnel ;
QUE la Société LANCRY PROTECTION SECURITE ayant licencié Monsieur X... sans autorisation le 22 avril 2009 alors qu'elle avait initié sa réintégration le 17 mars 2009, il s'ensuit que le salarié était encore protégé à la date de l'engagement de cette nouvelle procédure de licenciement, sur convocation du 26 mars 2009 ; que ce licenciement est dès lors constitutif d'un trouble manifestement illicite ; qu'il a été justement déclaré sans effet par les premiers juges dont la décision sera intégralement confirmée ;
ET AUX MOTIFS, ADOPTES DES PREMIERS JUGES, QUE l'article R.1455-6 du Code du travail dispose que la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'il résulte de l'article L.2411-3 du Code du travail que le licenciement d'un délégué syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail et que cette autorisation est également requise pour le licenciement de l'ancien délégué syndical durant les douze mois suivant la date de cessation des ses fonctions s'il a exercé ces dernières pendant au moins un an ; que, selon les dispositions de l'article L.2411-8 du même Code, l'ancien représentant syndical au comité d'entreprise qui, désigné depuis deux ans, n'est pas reconduit dans ses fonctions lors du renouvellement du comité, bénéficie également de cette protection pendant les six premiers mois suivant l'expiration de son mandat ou la disparition de l'institution ;
QU'il est constant que le salarié était membre du comité d'entreprise au sein de la Société PEDUS désigné par son organisation syndicale au mois de mars 2001 et représentant syndical au comité d'entreprise depuis cette même date ; que le salarié, dès lors qu'il ne peut plus être réintégré dans ses fonctions de délégué syndical ni dans son mandat de représentant syndical, les institutions où il exerçait ses fonctions n'existant plus du fait de la cession du fonds de commerce de la Société PEDUS et qu'il est constant qu'il a exercé ses fonctions de délégué du personnel et de représentant syndical au comité d'entreprise pendant plus de deux ans, ne peut prétendre qu'à la protection postérieure à la fin de ses fonctions de délégué syndical ou de son mandat de représentant syndical au comité d'entreprise ; que la durée de la procédure administrative consécutive à l'autorisation administrative nécessaire au licenciement du salarié protégé ne peut priver celui-ci de sa protection post mandat lorsque l'autorisation de licencier est annulée, ce dont il résulte que la durée de cette protection ne peut commencer à courir avant la réintégration effective du salarié ;
QU'en l'espèce, l'autorisation administrative de licencier le salarié ayant été annulée le 25 mars 2008, la durée de protection post mandat du salarié n'a pu commencer à courir avant le 24 mars 2009, date à laquelle la Société LANCRY PROTECTION SECURITE a accepté de réintégrer le salarié, en l'absence de touts documents établissant la réalité d'une réintégration effective antérieure ;
QU'en conséquence, la Société LANCRY PROTECTION SECURITE, qui ne pouvait ignorer que le salarié était salarié protégé au moment de son licenciement intervenu le 27 janvier 2004 du fait même des motifs du jugement du tribunal administratif du 25 mars 2008, en l'ayant licencié le 22 avril 2009 moins de six mois après le 24 mars 2009 sans autorisation de l'inspecteur du travail, lui a causé un trouble manifestement illicite ; que, pour faire cesser ce trouble manifestement illicite, il convient, d'une part, d'ordonner la réintégration du salarié dans les quinze jours de la notification de cette ordonnance, le conseil en formation de référé ne pouvant prononcer la nullité du licenciement, celui-ci se trouvant seulement provisoirement privé d'effet ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'ordonnance de référé n'a pas en principe l'autorité de la chose jugée, et peut être modifiée ou rapportée en référé en cas de circonstance nouvelle ; qu'en se refusant à examiner les circonstances nouvelles invoquées par la Société LANCRY PROTECTION SECURITE, tirées de la communication, après avis favorable de la Commission d'accès aux documents administratifs, des dossiers du contentieux administratif relatif à l'autorisation de licenciement de Monsieur X..., dont il résultait que la Société PEDUS où il occupait des mandats de salarié protégé, n'avait fait l'objet que d'une cession judiciaire partielle à la Société EUROPE INTERVENTION, et que Monsieur X... n'était pas rattaché à l'exploitation ni affecté à aucun site dont les contrats aient été repris par le cessionnaire, si bien que le contrat de travail de Monsieur X... n'avait pu lui être transmis par application de l'article L.122-12, alinéa 2, ancien, du Code du travail, et qu'il ne pouvait invoquer à son encontre cette qualité d'ancien délégué syndical et d'ancien représentant au comité d'entreprise de la Société PEDUS, au motif erroné que la Société LANCRY PROTECTION SECURITE était désormais irrecevable à revenir sur un litige tranché par une décision définitive, puisque non frappée d'appel, et qu'il serait contraire à tout principe de loyauté de l'autoriser à remettre en cause à l'occasion du présent litige alors que cette décision était fondée sur un engagement sans réserve de sa part, la Cour d'appel a violé l'article 488 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'autorisation de l'Inspecteur du travail est requise pour le licenciement de l'ancien délégué syndical, durant les 12 mois suivant la date de cessation de ses fonctions, s'il a exercé ces dernières pendant au moins un an ; que l'ancien membre élu du comité d'entreprise ainsi que l'ancien représentant syndical qui, désigné depuis deux ans, n'est pas reconduit dans ses fonctions lors du renouvellement du comité, ne peut être licencié qu'après autorisation de l'Inspecteur du travail pendant les six premiers mois suivant l'expiration de leur mandat ou la disparition de l'institution ; qu'en retenant que le licenciement de Monsieur X..., prononcé le 22 avril 2009, en raison de propos injurieux et menaçants tenus lors de l'entretien du 25 mars 2009, ne pouvait être prononcé sans autorisation administrative préalable compte tenu de la protection dont il continuait à bénéficier en raison de son statut d'ancien délégué et d'ancien représentant syndical au comité d'entreprise, au motif erroné en droit que la durée de la protection résultant de sa qualité d'ancien délégué syndical et d'ancien représentant syndical au comité d'entreprise ne pouvait commencer à courir avant la réintégration effective du salarié consécutive à l'annulation de l'autorisation administrative de licenciement à l'issue de la procédure contentieuse, la Cour d'appel a violé les articles L.2411-8 et L2411-3 du Code du travail ;
ET ALORS, ENFIN, SUBSIDIAIREMENT, QU'en s'abstenant de répondre aux conclusions de la Société LANCRY PROTECTION SECURITE faisant valoir que la Cour d'appel ne pouvait ordonner la réintégration de Monsieur X... dès lors qu'avant qu'elle ne statue, Monsieur X... avait pris acte de la rupture de son contrat de travail par courrier du 17 avril 2010, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-14645
Date de la décision : 26/09/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 janvier 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 sep. 2012, pourvoi n°11-14645


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.14645
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