LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- l'Administration des douanes, partie poursuivante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 8 des vacations, en date du 11 août 2011, qui, dans la procédure suivie contre M. Tarek X... du chef de contrebande de marchandises prohibées, l'a déclaré irrecevable en son appel ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 juin 2012 où étaient présents : M. Louvel président, M. Bayet conseiller rapporteur, M. Dulin, Mme Desgrange, M. Rognon, Mmes Nocquet, Ract-Madoux, MM. Bloch, Soulard, Moreau conseillers de la chambre, Mmes Labrousse, Moreau conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Boccon-Gibod ;
Greffier de chambre : Mme Téplier ;
Sur le rapport de M. le conseiller BAYET, les observations de la société civile professionnelle BORÉ et SALVE de BRUNETON, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BOCCON-GIBOD ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 38, 215, 343, 392, 414, 417, 420, 421, 422, 437 et 438 du code des douanes, 509, 520, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt a déclaré irrecevable l'appel interjeté par l'administration des douanes ;
"aux motifs que la cour est ainsi appelée à statuer sur l'appel interjeté par la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, désignée ci-après comme administration des douanes, à l'encontre du jugement, sur procédure de comparution immédiate du tribunal correctionnel de Paris en date du 27 mai 2011, prononcé en fin d'audience, ayant déclaré M. X..., contrôlé le 25 mai 2011 en possession de 2,539 kg de cannabis, coupable de transport non autorisé, d'usage illicite, d'acquisition non autorisée, de détention non autorisée de stupéfiants et de contrebande de marchandises prohibées et l'ayant condamné à une peine d'emprisonnement de deux ans avec le bénéfice d'un sursis avec mise à l'épreuve à concurrence d'un an, et ayant ordonné en outre la confiscation des scellés et son placement en détention avec mandat de dépôt immédiat ; que par conclusions déposées à la barre au soutien de son appel, l'administration des douanes soutient que le tribunal a ainsi omis de statuer sur ses conclusions, adressées par télécopie le 26 mai 2011 à 12 h 04 qui tendaient à voir condamner M. X... au paiement d'une amende douanière de 5 102 euros ; que cependant, il s'impose de relever que le jugement déféré ne contient aucune mention relative à une présence à la procédure comme partie intervenante de l'appelante ; qu'il apparaît de plus que les conclusions de première instance invoquées par l'appelante sont établies pour une audience du 26 mai 2011 et ne supportent aucun visa du président et du greffier d'audience ; qu'il ressort enfin des notes d'audience que le ministère public n'a formulé aucune réquisition pour le prononcé d'une amende douanière ; qu'en conséquence, la cour ne saurait constater aucune omission de statuer de la part du tribunal, n'ayant ainsi été saisi d'aucune demande au profit de l'administration des douanes ; que dans ces conditions, l'appel de cette administration ne peut qu'être déclaré irrecevable sans qu'il y ait lieu de statuer sur son bien fondé, sa demande ne pouvant en tout état de cause qu'être considérée comme une demande nouvelle ;
"1°/ alors que selon l'article 343, alinéa 2, du code des douanes, l'action pour l'application des sanctions fiscales est exercée à titre principal par l'administration des douanes et peut l'être par le ministère public accessoirement à l'action publique ; qu'en déclarant irrecevable l'appel formé par l'administration des douanes à l'encontre du jugement ayant déclaré M. X... coupable du délit douanier réputé importation en contrebande de marchandise prohibée aux motifs que l'administration des douanes n'était pas intervenue à la procédure devant le premier juge, n'a pas déposé de conclusions et qu'aucune réquisition n'a été prise sur l'action douanière alors que saisie de l'appel de l'administration des douanes contre le jugement ayant retenu, sur l'action fiscale du ministère public exercée concurremment à l'action publique, la culpabilité du prévenu du chef du délit douanier poursuivi, la cour d'appel, qui avait l'obligation d'évoquer après annulation du jugement en ce qu'il avait omis de statuer sur les sanctions fiscales encourues, a violé les textes susvisés ;
"2°/ alors qu'aux termes de l'article 414 du code des douanes, tout fait de contrebande ou d'importation sans déclaration doit être sanctionné par une confiscation et une amende proportionnelle ; qu'en affirmant, motifs pris de ce que l'administration des douanes n'avait pas déposé de conclusions devant le premier juge et que le ministère public n'avait formulé aucune réquisition pour le prononcé d'une amende douanière, qu'elle ne saurait constater aucune omission de statuer de la part du tribunal celui-ci n'ayant été saisi d'aucune demande au profit de l'administration des douanes et que la demande de celle-ci ne pouvait qu'être considérée comme une demande nouvelle et partant irrecevable alors que le tribunal ayant retenu la culpabilité du prévenu du chef du délit douanier poursuivi était tenu de prononcer une sanction nonobstant l'absence de réquisition du parquet en sorte que l'administration des douanes était recevable à solliciter l'annulation du jugement ayant omis de statuer sur les sanctions fiscales encourues, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
Vu l'article 343 du code des douanes, ensemble les articles 509 et 520 du code de procédure pénale ;
Attendu que, d'une part, selon l'article 343, alinéa 2, du code des douanes, l'action pour l'application des sanctions fiscales est exercée à titre principal par l'administration des douanes et peut l'être par le ministère public accessoirement à l'action publique ;
Attendu que, d'autre part, la juridiction qui déclare le prévenu coupable de l'infraction prévue par l'article 414 du code des douanes est tenue de le condamner aux sanctions résultant de la combinaison de ce texte et de l'article 369 dudit code ;
Attendu qu'enfin, aux termes de l'article 509 du code de procédure pénale, l'affaire est dévolue à la cour d'appel dans les limites fixées par l'acte d'appel et la qualité de l'appelant ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X... a été traduit selon la procédure de comparution immédiate devant la juridiction correctionnelle du chef du délit douanier d'importation en contrebande de marchandises prohibées ; que, l'administration des douanes n'est pas intervenue aux débats devant les premiers juges, qui ont retenu la culpabilité du prévenu pour le délit douanier poursuivi, sans statuer sur les pénalités douanières encourues ; que l'administration des douanes a interjeté appel des dispositions fiscales dudit jugement ;
Attendu que, pour déclarer cet appel irrecevable, l'arrêt retient que l'administration des douanes n'était pas représentée à l'audience devant le tribunal, au cours de laquelle aucune réquisition n'a été prise sur l'action douanière ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que, saisie de l'appel de l'administration des douanes du jugement ayant statué, sur l'action du ministère public, sur la culpabilité du prévenu du chef du délit douanier reproché, la cour d'appel, qui avait l'obligation d'annuler le jugement, en ce qu'il avait omis de statuer sur les sanctions fiscales encourues puis d'évoquer , a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 11 août 2011, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze juillet deux mille douze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;