La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/07/2012 | FRANCE | N°11-19953

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 juillet 2012, 11-19953


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 avril 2011), qu'Alain X... est décédé le 20 décembre 2001, laissant pour lui succéder sa veuve, Mme Y..., et ses deux filles, Mmes Sandrine et Séverine X... ; que la déclaration de succession a été remise le 20 juin 2002 par Mme Y... qui s'est acquittée d'un certain montant de droits tandis que les deux autres héritières demandaient un paiement différé ; que cette déclaration a été enregistrée le 19 mars 2003 ; que, le 14

juin 2006, l'administration fiscale a notifié une proposition de rectificati...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 avril 2011), qu'Alain X... est décédé le 20 décembre 2001, laissant pour lui succéder sa veuve, Mme Y..., et ses deux filles, Mmes Sandrine et Séverine X... ; que la déclaration de succession a été remise le 20 juin 2002 par Mme Y... qui s'est acquittée d'un certain montant de droits tandis que les deux autres héritières demandaient un paiement différé ; que cette déclaration a été enregistrée le 19 mars 2003 ; que, le 14 juin 2006, l'administration fiscale a notifié une proposition de rectification, réintégrant divers biens et dons manuels dans l'actif successoral, puis a émis, le 31 octobre suivant, un avis de mise en recouvrement ; qu'après dégrèvement partiel des droits rappelés puis rejet, le 13 février 2009, de sa réclamation, Mme Séverine X... a saisi le tribunal de grande instance afin d'obtenir la décharge de l'imposition subsistant ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le moyen :
1°/ que le tribunal de grande instance, devant lequel Mme X... invoquait le bénéfice de la doctrine administrative, notamment celle contenue dans une instruction du 1er juillet 2002, avait retenu que suivant celle-ci "l'enregistrement consiste non seulement dans la relation sur un registre d'opérations juridiques présentées à la formalité, mais encore dans de simples recettes correspondant à une déclaration, à une remise d'états périodiques ou même dans le simple dépôt d'un double de l'acte soumis à l'enregistrement ou la remise d'extraits d'actes ou de jugements", de sorte que "doit être retenue la date du 5 août 2002 correspondant à la réception de l'envoi en recommandé à la recette des impôts par l'avocat chargé de la succession, d'un courrier du 20 juin 2002 contenant outre la déclaration, une demande de paiement fractionné ainsi qu'un chèque correspondant aux droits dus par l'épouse du défunt" qu'en s'abstenant de toute réfutation de ces motifs du jugement desquels Mme X... lui demandait la confirmation, ainsi que de toute réponse aux conclusions qui en établissaient le bien-fondé, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que suivant l'article 1717 du code général des impôts, dans le cas où les impositions exigibles font l'objet d'un crédit de paiement différé, il est dérogé aux dispositions de l'article 1701 de ce code subordonnant l'exécution de l'enregistrement au paiement des actes ; que dès lors, en jugeant que l'accord donné par le receveur des impôts le 5 août 2002 pour un paiement différé des droits de succession n'avait pas fait courir le délai de prescription de l'article L. 180 du livre des procédures fiscales bien qu'il n'y eût alors aucun obstacle, jusqu'à la déchéance du bénéfice de ce crédit à défaut de constitution de garanties, à l'enregistrement de la déclaration, la cour d'appel a violé les articles 1717 du code général des impôts, 403 de l'annexe III à ce code et L. 180 du livre des procédures fiscales ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la déclaration de succession avait été enregistrée le 19 mars 2003, après que les héritières avaient demandé au receveur des impôts de considérer la somme versée en juin 2002, non plus comme le paiement des droits de la veuve du défunt, mais comme un acompte pour elles trois, la cour d'appel, répondant aux conclusions dont elle était saisie, en a déduit à bon droit que cette date d'enregistrement constituait le point de départ du délai de prescription ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer au directeur général des finances publiques la somme de 2 500 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir confirmé l'imposition mise à la charge de Mme Séverine X... AUX MOTIFS QUE l'article L.180 du livre des procédures fiscales dispose que le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle de l'enregistrement d'un acte ou d'une déclaration ou de l'accomplissement de la formalité fusionnée définie à l'article 647 du code général des impôts ; s'agissant d'une succession, l'acte est la déclaration de succession ; la date de départ de la prescription est celle de l'enregistrement de la déclaration de succession ; Mme X... estime que la date d'enregistrement est celle à laquelle l'administration fiscale a réellement reçu la déclaration et en a accusé réception et non celle à laquelle elle a décidé de l'enregistrer, ce qui ferait dépendre cette date de la volonté de l'administration fiscale et serait une atteinte à la propriété contraire à l'article 1er du protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; l'avocat de Mme X... a adressé une déclaration pour tous les héritiers reçue par la recette des impôts de Fréjus le 20 juin 2002, en demandant à être autorisée à différer le paiement des droits pour les filles ; une somme de 55.523 € qui correspondait aux droits dus par la veuve a été versée et encaissée par la recette des impôts le 27 juin 2002 ; la Recette des impôts a répondu le 5 août 2002 en donnant un accord pour un paiement différé sous réserve de garanties ; le 5 novembre 2002 le receveur a refusé d'accorder un différé faute de garanties suffisantes ; le 3 mars 2003, l'avocat de Mme X... écrivait à la recette des impôts pour demander un nouveau différé sur la base d'un acompte versé ; le 19 mars 2003, le receveur des impôts considérait la somme de encaissée le 27 juin 2002, non plus comme le paiement des droits de la veuve, mais comme un acompte pour tous les héritiers et dès lors, considérant qu'un acompte était versé, procédait à un enregistrement de la déclaration de succession ; Monsieur Alain X... était décédé le 20 décembre 2001 ; les droits de succession étaient exigibles au 20 juin 2002 ; le 20 juin 2002 était déposée une déclaration sans paiement des droits ; compte tenu des négociations entre Mme X... et l'administration fiscale entre le 20 juin 2002 et le 19 mars 2003, l'administration fiscale a exigé les droits à compter du 19 mars 2003, en prenant la somme versée comme un acompte ; l'article 1703 du code général des impôts dispose que les comptables des impôts ne peuvent sous aucun prétexte, lors même qu'il y aurait lieu à expertise, différer l'enregistrement des actes et mutations dont les droits ont été payés ; le 20 juin 2002, les droits n'étaient pas payés et aucun accord pour un différé de paiement n'avait été accordé ; ce n'est qu'à compter de la date à laquelle les héritiers X... ont demandé d'être autorisé à verser un acompte que le receveur a alors admis l'enregistrement sur la base de cet acompte ; cette date n'a pas dépendu de la volonté de l'administration fiscale, mais de la demande des contribuables, au vu du refus de différé ; cette date d'enregistrement n'avait pas alors été contestée ; ce n'est que plus de cinq ans après, soit le 18 septembre 2008 qu'elle a été contestée ; cette date d'enregistrement est définitive ; elle est le point de départ de la prescription par application de l'article L.180 du livre des procédures fiscales ;
ALORS QUE le tribunal de grande instance, devant lequel Mme X... invoquait le bénéfice de la doctrine administrative, notamment celle contenue dans une instruction du 1er juillet 2002, avait retenu que suivant celle-ci «l'enregistrement consiste non seulement dans la relation sur un registre d'opérations juridiques présentées à la formalité, mais encore dans de simples recettes correspondant à une déclaration, à une remise d'états périodiques ou même dans le simple dépôt d'un double de l'acte soumis à l'enregistrement ou la remise d'extraits d'actes ou de jugements », de sorte que « doit être retenue la date du 05 août 2002 correspondant à la réception de l'envoi en recommandé à la Recette des impôts par l'avocat chargé de la succession, d'un courrier du 20 juin 2002 contenant outre la déclaration, une demande de paiement fractionné ainsi qu'un chèque correspondant aux droits dus par l'épouse du défunt »; qu'en s'abstenant de toute réfutation de ces motifs du jugement desquels Mme X... lui demandait la confirmation, ainsi que de toute réponse aux conclusions qui en établissaient le bien-fondé, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ET ALORS en toute hypothèse QUE, suivant l'article 1717 du code général des impôts, dans le cas où les impositions exigibles font l'objet d'un crédit de paiement différé, il est dérogé aux dispositions de l'article 1701 de ce code subordonnant l'exécution de l'enregistrement au paiement des actes ; que dès lors, en jugeant que l'accord donné par le receveur des impôts le 5 août 2002 pour un paiement différé des droits de succession n'avait pas fait courir le délai de prescription de l'article L.180 du livre des procédures fiscales bien qu'il n'y eût alors aucun obstacle, jusqu'à la déchéance du bénéfice de ce crédit à défaut de constitution de garanties, à l'enregistrement de la déclaration, la cour d'appel a violé les articles 1717 du code général des impôts, 403 de l'annexe III à ce code, et L.180 du livre des procédures fiscales.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-19953
Date de la décision : 10/07/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Enregistrement - Prescription - Prescription abrégée - Point de départ - Exclusion - Date de l'accord pour un paiement différé des droits

Le point de départ du délai de prescription abrégée, prévu par l'article L. 180 du livre des procédures fiscales pour l'exercice par l'administration de son droit de reprise, est constitué par l'enregistrement de l'acte ou de la déclaration soumis à droits, à l'exclusion de la date de l'accord donné par le comptable des impôts pour un paiement différé des droits


Références :

article L. 180 du livre des procédures fiscales

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14 avril 2011

A rapprocher :Com., 26 novembre 1996, pourvoi n° 94-19658, Bull. 1996, IV, n° 286 (1) (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 jui. 2012, pourvoi n°11-19953, Bull. civ. 2012, IV, n° 152
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, IV, n° 152

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : M. Carre-Pierrat
Rapporteur ?: Mme Bregeon
Avocat(s) : SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 06/09/2013
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.19953
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award