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04/07/2012 | FRANCE | N°10-24082

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 juillet 2012, 10-24082


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par note du 2 octobre 1957, la société Turbomeca s'est engagée à assurer le versement d'un capital aux ayants droit de ses salariés en cas de décès ; qu'en 1970, la société Turbomeca a signé un contrat collectif de prévoyance auprès de l'organisme CRI prévoyance, auquel a succédé Adour mutualité à compter de 1980 pour les frais d'hospitalisation médicale et chirurgicale, dans le cadre duquel elle a mis en place une garantie prévoyance en faveur des retraités et prére

traités en s'engageant à prendre en charge, partiellement ou totalement, l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par note du 2 octobre 1957, la société Turbomeca s'est engagée à assurer le versement d'un capital aux ayants droit de ses salariés en cas de décès ; qu'en 1970, la société Turbomeca a signé un contrat collectif de prévoyance auprès de l'organisme CRI prévoyance, auquel a succédé Adour mutualité à compter de 1980 pour les frais d'hospitalisation médicale et chirurgicale, dans le cadre duquel elle a mis en place une garantie prévoyance en faveur des retraités et préretraités en s'engageant à prendre en charge, partiellement ou totalement, leurs cotisations ; qu'en 1996, lors de la mise en oeuvre d'un plan social, la société Turbomeca a décidé de supprimer le capital décès qu'elle versait aux conjoints ou aux ayants droit des salariés et sa participation au paiement des cotisations de prévoyance santé pour les retraités ; que soutenant que le régime de prévoyance mis en place au bénéfice de ces derniers et que le versement d'un capital décès au profit des ayants droit des salariés de la société Turbomeca résultaient d'un accord d'entreprise signé le 18 décembre 1967 ou subsidiairement d'un usage non régulièrement dénoncé, le syndicat CGT des actifs et retraités de la société Turbomeca (le syndicat CGT) a saisi le tribunal de grande instance de demandes tendant à dire que cet accord ou usage était toujours valide et au paiement de dommages-intérêts ; que plusieurs salariés et ayants droit de salariés sont intervenus volontairement à l'instance pour obtenir paiement d'un capital décès ou le remboursement de cotisations ainsi que de dommages-intérêts pour inexécution de l'accord du 18 décembre 1967, ou subsidiairement pour non respect d'un usage irrégulièrement dénoncé ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de condamnation de la société Turbomeca au paiement d'un capital décès, alors, selon le moyen, qu'avant de supprimer un avantage qui résulte d'un usage d'entreprise l'employeur doit informer individuellement chaque salarié concerné par une disposition qui lui profite, à peine de voir la dénonciation lui être inopposable ; qu'il importe peu qu'au jour de la dénonciation le salarié remplisse les conditions pour en bénéficier immédiatement dès lors qu'il est susceptible d'en bénéficier dans le futur ; que la cour d'appel qui a estimé que l'employeur n'était pas tenu à une information individuelle de M. X... concernant la dénonciation de l'usage relatif au capital décès parce que le décès ouvrant droit au versement d'un capital décès était postérieur de plus d'un an à la dénonciation de l'usage a violé l'article 1134 du code civil et les règles relatives à la dénonciation de l'usage ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que la dénonciation de l'usage avait été portée à la connaissance des salariés par l'envoi d'une note de l'employeur en date du 22 juillet 1996 adressée à l'ensemble des personnels de la société Turbomeca, a, par ce seul motif, justifié sa décision ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu les articles 1315 et 1353 du code civil ;
Attendu que pour dire que l'usage relatif à la prise en charge partielle des cotisations de prévoyance des retraités et préretraités de la société Turbomeca n'a pas été valablement dénoncé, l'arrêt retient que l'employeur fait valoir que le 20 décembre 1996 il a adressé une lettre individuelle à chacun des retraités de la société afin de dénoncer l'usage litigieux ; que cette lettre n'a pas fait l'objet d'un envoi recommandé avec accusé de réception ce qui relève de la liberté de l'employeur ; que les intéressés affirment n'avoir pas reçu cette lettre ; que la lettre adressée par la mutuelle à chacun d'eux postérieurement à la date fixée pour le terme de l'usage ne peut pallier la carence de l'employeur dans la charge de la preuve ; que celui-ci pour justifier de l'information individuelle réalisée, excipe d'une lettre ouverte adressée le 21 février 1997 par les retraités et préretraités, signée notamment par les intimés permettant de présumer que ceux-ci ont fait l'objet de l'envoi individuel de la lettre du 20 décembre 1996 ; que toutefois il appartient à l'employeur d'en rapporter la preuve et une présomption ne saurait pallier l'absence de cette preuve ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la dénonciation de l'usage avait été portée à la connaissance de chaque salarié, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi principal :
REJETTE le pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit que l'usage relatif au versement d'un capital décès aux ayants droit des salariés de la société Turbomeca a été régulièrement dénoncé, l'arrêt rendu le 28 juin 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne MM. Y..., X..., Z..., C..., D..., Mme A... et le syndicat CGT des actifs et retraités de la société Turbomeca aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Turbomeca.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'usage relatif à la prise en charge partielle des cotisations de prévoyance des retraités et préretraités de la société Turbomeca n'avait pas été valablement dénoncé, d'AVOIR, en conséquence, condamné la société Turbomeca à verser à Mme A... et à Messieurs Y..., X..., Z..., D... et C... les cotisations de prévoyance santé qui auraient dû rester à la charge de la société Turbomeca en exécution de l'usage non valablement dénoncé et la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et d'AVOIR également condamné la société Turbomeca à verser au syndicat CGT des actifs et retraités de la société Turbomeca la somme de 2000 euros à titre de dommages-intérêts,
AUX MOTIFS QUE au cours de l'année 1970, la société Turbomeca avait signé en faveur des retraités un contrat collectif de prévoyance, dont les cotisations étaient prises partiellement ou totalement en charge par la société ; que les retraités de la société Turbomeca étaient couverts à la date du plan social litigieux :- par la CRI Prévoyance pour les frais médicaux, les cotisations étant prises en charge à hauteur de 10 % par la société ;- par Adour Mutualité pour les risques hospitalisation médicale et chirurgie, les cotisations étant prises en charge à 100 % par la société Turbomeca ; que les avantages précités constituaient une pratique générale, constante et fixe permettant de retenir l'existence d'un usage ; que si l'employeur ne peut mettre fin à un usage en cessant de l'appliquer, il a la faculté de le dénoncer en respectant certaines conditions ; que sous réserve du respect de ces conditions, la dénonciation est opposable aux salariés ; que pour que l'usage soit valablement dénoncé, l'employeur doit chronologiquement :- informer les institutions représentatives du personnel,- informer de sa décision les salariés concernés par l'avantage supprimé,- respecter un délai de prévenance suffisant ; sur la dénonciation des usages relatifs au versement d'un capital décès et à la prise en charge pour les retraités d'une partie des cotisations relatives aux frais médicaux, d'hospitalisation et de chirurgie : que c'est dans le cadre d'un projet de plan d'adaptation et de plan social de l'entreprise, qui rencontrait des difficultés économiques, que l'employeur a informé le 9 juillet 1996, le comité central d'entreprise de la société Turbomeca qu'il envisageait de prendre des mesures d'ordre économique parmi lesquelles la suppression de l'usage constitué par le versement d'un capital décès propre à l'entreprise et ce à compter du 1er janvier 1997 et de l'usage constitué par la prise en charge partielle ou totale de la cotisation prévoyance des retraités à compter du 1er janvier 1997 ; qu'avant l'information individuelle des salariés l'employeur est tenu d'informer de sa décision les institutions représentatives du personnel ; que si l'entreprise a plusieurs établissements et qu'elle est pourvue d'un comité central d'entreprise, c'est ce dernier qui doit être informé si l'usage est d'application générale ; que la société Turbomeca était une entreprise à pluri-établissements pourvue d'un comité central d'entreprise ; que le 17 juillet 1996, le comité central d'entreprise tenait une réunion extraordinaire au cours de laquelle l'employeur rappelait que par mesure d'économie il entendait mettre un terme aux usages précités et des discussions étaient engagées ; que les 29 et 31 octobre 1996 s'est tenue une nouvelle réunion du comité central d'entreprise au cours de laquelle a été débattu le problème de la dénonciation des usages précités ; qu'étaient présents au comité central d'entreprise les membres titulaires et les suppléants élus des syndicats CFDT, CGC, CGT, FO, ainsi que des représentants des quatre syndicats précités ; que les 2 octobre et 7 novembre 1996, les comités d'établissement ont débattu de ces questions ; que le plan social a été adopté ; que les intimés font valoir qu'un usage ne peut être dénoncé dans le cadre d'un plan social ; que cependant il apparaît de l'article L. 321-4 du code du travail, dans ses dispositions issues de la loi n° 89-549 du 2 août 1989, que l'employeur est tenu de faire connaître aux représentants du personnel les mesures de nature économique qu'il entend prendre pour remédier à la situation ; que la dénonciation des usages précités faisait partie des mesures de nature économique que l'employeur entendait prendre pour remédier à la situation économique de la société qui avait des difficultés ; que cette dénonciation pouvait donc entrer dans le cadre d'un plan social ; que les représentants du personnel, au sens des articles L. 321-1, L. 321-2 et L. 321-3 du code du travail applicables à la date des faits, était le comité d'entreprise pour les entreprises employant plus de 50 salariés ; qu'ainsi que l'a retenu le premier juge, il sera admis que l'employeur a satisfait à la première obligation qui pesait sur lui, à savoir l'information des institutions représentatives du personnel, dans un délai de prévenance suffisant, celles-ci ayant été informées cinq mois et demi avant la dénonciation des usages précités, ce qui constitue un délai de prévenance suffisant ;
ET QUE sur l'information individuelle de chaque salarié : que concernant l'information des bénéficiaires de la prise en charge partielle des cotisations de prévoyance par la société : que l'employeur doit informer de sa décision tous les salariés concernés par l'avantage supprimé, mais seules les personnes bénéficiant de l'usage sont destinataires individuellement de la lettre d'information ; que la société ne prenait partiellement ou totalement en charge que les cotisations de prévoyance des retraités, couvrant les risques hospitalisation médicale, chirurgie, petits risques ; que l'information doit être individuelle et l'employeur ne peut s'acquitter de cette obligation par un simple affichage ; que l'employeur fait valoir que le 20 décembre 1996, il a adressé une lettre individuelle à chacun des retraités de la société afin de dénoncer l'usage relatif à la prise en charge des cotisations de prévoyance dont bénéficiaient exclusivement les retraités ; que cette lettre est produite au débat et ainsi libellée : « Notre société traverse une crise sans précédent nous imposant, pour assurer son avenir, de prendre un certain nombre de mesures difficiles. Cette situation a été largement explicitée devant le comité central d'entreprise, les comités d'établissement ainsi qu'à l'ensemble du personnel. Dans cette optique, il a été confirmé, auprès des partenaires sociaux, la suppression de la participation de la société au financement de la prévoyance collective des retraités et préretraités (…) : à compter du 1er janvier 1997 pour la CRI Prévoyance, frais médicaux ;- à compter du 1er avril 1997 pour Adour Mutualité (hospitalisations médicales et chirurgicales). Néanmoins nous tenons à préciser que la validité du contrat n'est pas remise en cause pour 1997 par Turbomeca (…) » ; que le même jour l'employeur adressait au groupe CRI et à Adour Mutualité un exemplaire de la lettre du 20 décembre 1996 et un listing informatique relatif à la « population couverte » ; que c'est à l'employeur qu'il appartient de dénoncer individuellement l'usage ; que la lettre du 20 décembre 1996 n'a pas fait l'objet d'un envoi recommandé avec accusé de réception, ce qui relevait de la liberté de l'employeur ; mais que les intimés allèguent n'avoir pas reçu cette lettre ; que bien que la mutuelle Ociane ait adressé à chaque retraité et pré-retraité copie de la lettre du 20 décembre 1996, postérieurement à la date fixée pour le terme mis à l'usage, cela ne peut pallier la carence de l'employeur dans la charge de la preuve ; que l'employeur pour justifier de l'information individuelle réalisée, excipe d'une lettre ouverte en date du 21 février 1997, des retraités et préretraités adressée à la société Turbomeca, signée notamment par Messieurs X..., Z..., Y... et D... dans laquelle il est précisé : « la suppression de la participation de la société au financement de la prévoyance pour les retraités, pré-retraités et ayant droit est présentée par M. B... directeur des ressources humaines dans son courrier circulaire du 20 décembre 1996 comme entrant dans une répartition équitable des efforts sur l'ensemble de la collectivité Turbomeca » ; que même si cette lettre permet de présumer que les retraités et préretraités ont bien fait l'objet de l'envoi individuel de la lettre du 20 décembre 1996, ainsi que le soutient l'employeur, il appartient à ce dernier d'en rapporter la preuve et une présomption ne saurait pallier l'absence de cette preuve ; qu'en conséquence, il ne peut être retenu que l'usage relatif à la prise en charge partielle des cotisations par la société a été dénoncé individuellement à chacun des personnes bénéficiant de l'usage ; que le manquement par l'employeur à l'une des trois conditions précitées rend la dénonciation inopposable aux salariés ; que la décision déférée sera confirmée de ce chef ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE l'usage n'étant pas assimilé à un accord collectif du travail, sa dénonciation n'obéit pas aux règles imposées par l'article L. 132-8 du code du travail ; que la validité de la dénonciation d'un usage nécessite toutefois avec un délai de prévenance suffisant permettant aux organisations syndicales d'envisager une négociation collective et aux salariés de prendre toutes dispositions utiles, une information préalable tant aux institutions représentatives du personnel qu'à chaque salarié individuellement ; sur l'information des institutions représentatives du personnel : que cette formalité a été remplie dès le 9 juillet 1996 par une convocation des institutions représentatives du personnel à la réunion extraordinaire du comité central d'entreprise du 17 juillet 1996 dans le cadre d'un projet de plan d'adaptation devant conduire à la suppression de « l'usage que constitue le versement d'un capital décès propre à l'entreprise (…) et la prise en charge partielle de la cotisation à la Prévoyance des Retraités (…) à compter du 1er janvier 1997 » ; que la décision de suppression des avantages a donc été portée à la connaissance des institutions représentatives du personnel 5 mois et demi avant l'échéance, ce qui constitue un délai de prévenance raisonnable ; sur l'information individuelle des salariés : que cette information procéderait selon la société Turbomeca d'une lettre circulaire adressée le 20 décembre 1996 à chacun des salariés ; que le délai de prévenance limité à une dizaine de jours est particulièrement insuffisant s'agissant de l'obligation imposée à chaque salarié de financer lui-même son assurance prévoyance (frais médicaux) soit 907, 14 francs par trimestre pour un couple, avec un supplément de 263, 45 francs par enfant ; que ces atermoiements de la direction sont d'autant moins compréhensibles que sa décision de supprimer ce financement patronal, ainsi qu'il vient d'être dit, a été prise plusieurs mois auparavant ; que l'importance des répercussions d'une telle décision justifiait de plus fort une information rapide, appropriée et personnalisée auprès de chaque salarié ; que bien que la formalité de la lettre recommandée ne soit pas imposée, la société Turbomeca ne rapporte pas la preuve, dont la charge lui incombe, d'une notification personnelle de la dénonciation d'un usage qui, fût-il accordé de façon collective, profitait directement à chaque salarié individuellement, ainsi dispensé de cotisations sociales ; que l'affichage de notes de services à l'attention du personnel comme celle du 22 juillet 1996, la diffusion de périodiques d'information ou encore le relais de l'information y compris par des tracts syndicaux ne sauraient suppléer l'absence de notification individuelle ; que dans ces conditions, il y aura lieu de dire que l'usage en cause n'a pas été valablement dénoncé ; que la société Turbomeca verse aux débats un accord salarial daté du 3 avril 2001 ainsi qu'un avenant du 25 avril 2001 concernant la prise en charge des cotisations capital décès avec un alignement du régime des non cadres sur celui des cadres ; que s'il peut être mis fin à un usage par un accord collectif (Soc., 25 janvier 1995) sans qu'il y ait lieu, à la charge de l'employeur, à une dénonciation régulière (Soc., 28 janvier 1998), il convient toutefois d'observer que l'accord du 3 avril 2001, qui ne fait d'ailleurs référence à aucun usage, ne concerne pas le versement d'un capital décès propre à l'employeur ni les cotisations de prévoyance santé ; que les demandes tendent pourtant précisément au paiement du capital décès propre à la SA Turbomeca et au remboursement de cotisations indues et sont donc nécessairement fondées sur un usage qui n'a jamais été valablement dénoncé ;
1°) ALORS QU'est régulière la dénonciation d'un usage qui a été précédée d'une information des représentants du personnel dans un délai permettant d'éventuelles négociations et d'une information individuelle des bénéficiaires de l'usage ; que la preuve de l'information individuelle des bénéficiaires de l'usage peut être faite par l'employeur par tous moyens, y compris par présomptions ; qu'en l'espèce, la société Turbomeca faisait valoir qu'elle avait adressé à chacun des retraités et pré-retraités une lettre simple datée du 20 décembre 1996 les informant de la fin de la prise en charge partielle par l'employeur des cotisations de prévoyance santé ; qu'afin de prouver l'envoi de cette lettre et sa réception par les intéressés, la société Turbomeca produisait une lettre qui lui avait été adressée le 21 février 1997 par les retraités et préretraités concernés, faisant expressément référence à la lettre de l'employeur du 20 décembre 1996, d'où s'évinçait nécessairement que ces personnes avaient effectivement reçu ce courrier de dénonciation du 20 décembre 1996 ; qu'après avoir rappelé que l'employeur n'était pas tenu d'adresser en recommandé avec accusé de réception la lettre de dénonciation d'un usage, la cour d'appel a constaté que la lettre du 21 février 1997 adressée à la société par les retraités et pré-retraités permettait de présumer que ces personnes avaient bien fait l'objet de l'envoi individuel de la lettre du 20 décembre 1996 ; qu'en affirmant cependant, pour juger irrégulière la dénonciation de l'usage en cause, que cette présomption ne pouvait pallier l'absence de preuve, incombant à l'employeur, de l'envoi individuel de la lettre de dénonciation du 20 décembre 1996, quand la société Turbomeca était au contraire en droit de prouver avoir satisfait à son obligation d'information individuelle des bénéficiaires de l'usage par tous moyens y compris par présomptions, la cour d'appel a violé les articles 1315 et 1353 du code civil ;
2°) ALORS QUE la preuve de l'information individuelle des bénéficiaires de l'usage peut être faite par l'employeur par tous moyens, y compris par présomptions ; qu'en l'espèce, la société Turbomeca faisait valoir que l'organisme Adour Mutualité avait adressé aux retraités en mars 1997 une lettre qui les informait qu'ils auraient à prendre en charge à compter du 1er avril 1997 le montant de leur cotisation pour les garanties chirurgie – hospitalisation médicale ; que Adour Mutualité joignait à sa lettre copie de la lettre de l'employeur du 11 mars 1997 reprenant elle-même les termes de son précédent courrier du 20 décembre 1996 par lequel il avait dénoncé l'usage auprès des intéressés ; qu'Adour Mutualité joignait également à sa lettre les autorisations de prélèvement comportant le nouveau montant de la cotisation, et tirant ainsi les conséquences de la dénonciation effectuée par l'employeur ; qu'ont été produites aux débats les autorisations de prélèvement dûment renvoyées par les retraités à Adour Mutualité au cours du deuxième trimestre de l'année 1997, desquelles s'évinçait que les intéressés avaient bien été destinataires du courrier d'Adour Mutualité renvoyant directement à la dénonciation de l'usage précédemment effectuée par l'employeur, avec copie jointe du courrier de l'entreprise, et qu'ils avaient parfaitement eu connaissance de la dénonciation de l'usage emportant modification de la prise en charge des cotisations, pour l'application de laquelle ils retournaient précisément les autorisations de prélèvement ; que cette lettre de l'organisme Adour Mutualité de mars 1997, tendait donc elle aussi à faire présumer que les retraités avaient bien été précédemment destinataires de la lettre du 20 décembre 1996 envoyée par l'employeur et dénonçant régulièrement l'usage en cause ; que la cour d'appel a d'ailleurs relevé que la mutuelle avait bien adressé à chaque retraité et préretraité copie de la lettre de l'employeur du 20 décembre 1996, avec son envoi de mars 1997 ; qu'en affirmant cependant, pour refuser à tort de prendre effectivement en compte ces éléments probants, que cet envoi ne pouvait pallier la carence de l'employeur dans la charge de la preuve de son obligation d'information individuelle des bénéficiaires de l'usage, quand la société Turbomeca pouvait prouver avoir satisfait à son obligation par tous moyens, et que l'envoi de cette lettre par la mutuelle, tirant les conséquences de la dénonciation de l'usage en adressant aux intéressés copie de la dénonciation de l'employeur ainsi que de nouvelles autorisations de prélèvement traduisant les effets de cette dénonciation sur la prise en charge des cotisations, dûment retournées par les intéressés, faisait présumer que les bénéficiaires de l'usage avaient bien été précédemment rendus destinataires par l'employeur d'une dénonciation individuelle de cet usage, la cour d'appel a derechef violé les articles 1315 et 1353 du code civil ;
3°) ALORS QUE les juges du fond, avant d'écarter les prétentions d'une partie, se doivent d'examiner l'ensemble des pièces régulièrement produites aux débats et soumises à leur examen par cette partie à l'appui de sa prétention ; qu'en l'espèce, la société Turbomeca produisait aux débats, outre la lettre de l'employeur du 20 décembre 1996 et la lettre des retraités du 21 février 1997, deux lettres de la société Turbomeca du 11 mars 1997 et du 24 avril 1997 adressées aux personnes intéressées, confirmant les termes de son précédent courrier du 20 décembre 1996, deux lettres de Adour Mutualité des 16 et 18 avril 1997 adressée aux retraités et se référant à la lettre du 20 décembre 1996, trois lettres de retraités datées du 28 mars 1997 précisant qu'ils avaient bien reçu la lettre de l'employeur du 20 décembre 1996 ; qu'en se dispensant de prendre en compte et d'analyser, serait-ce sommairement, ces éléments de preuve versés aux débats par la société Turbomeca, qui tendaient pourtant à confirmer l'envoi aux retraités de la lettre du 20 décembre 1996 les informant individuellement de la dénonciation de l'usage portant sur la prise en charge partielle des cotisations prévoyance santé, et à corroborer la présomption admise en ce sens par la cour d'appel, cette dernière a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article 1353 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'usage relatif à la prise en charge partielle des cotisations de prévoyance des retraités et préretraités de la société Turbomeca n'avait pas été valablement dénoncé, d'AVOIR, en conséquence, condamné la société Turbomeca à verser à Mme A... les cotisations de prévoyance santé qui auraient dû rester à la charge de la société Turbomeca en exécution de l'usage non valablement dénoncé et la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
AUX MOTIFS QUE au cours de l'année 1970, la société Turbomeca avait signé en faveur des retraités un contrat collectif de prévoyance, dont les cotisations étaient prises partiellement ou totalement en charge par la société ; que les retraités de la société Turbomeca étaient couverts à la date du plan social litigieux :- par la CRI Prévoyance pour les frais médicaux, les cotisations étant prises en charge à hauteur de 10 % par la société ;- par Adour Mutualité pour les risques hospitalisation médicale et chirurgie, les cotisations étant prises en charge à 100 % par la société Turbomeca ; que les avantages précités constituaient une pratique générale, constante et fixe permettant de retenir l'existence d'un usage ; que si l'employeur ne peut mettre fin à un usage en cessant de l'appliquer, il a la faculté de le dénoncer en respectant certaines conditions ; que sous réserve du respect de ces conditions, la dénonciation est opposable aux salariés ; que pour que l'usage soit valablement dénoncé, l'employeur doit chronologiquement :- informer les institutions représentatives du personnel,- informer de sa décision les salariés concernés par l'avantage supprimé,- respecter un délai de prévenance suffisant ; sur la dénonciation des usages relatifs au versement d'un capital décès et à la prise en charge pour les retraités d'une partie des cotisations relatives aux frais médicaux, d'hospitalisation et de chirurgie : que c'est dans le cadre d'un projet de plan d'adaptation et de plan social de l'entreprise, qui rencontrait des difficultés économiques, que l'employeur a informé le 9 juillet 1996, le comité central d'entreprise de la société Turbomeca qu'il envisageait de prendre des mesures d'ordre économique parmi lesquelles la suppression de l'usage constitué par le versement d'un capital décès propre à l'entreprise et ce à compter du 1er janvier 1997 et de l'usage constitué par la prise en charge partielle ou totale de la cotisation prévoyance des retraités à compter du 1er janvier 1997 ; qu'avant l'information individuelle des salariés l'employeur est tenu d'informer de sa décision les institutions représentatives du personnel ; que si l'entreprise a plusieurs établissements et qu'elle est pourvue d'un comité central d'entreprise, c'est ce dernier qui doit être informé si l'usage est d'application générale ; que la société Turbomeca était une entreprise à pluri-établissements pourvue d'un comité central d'entreprise ; que le 17 juillet 1996, le comité central d'entreprise tenait une réunion extraordinaire au cours de laquelle l'employeur rappelait que par mesure d'économie il entendait mettre un terme aux usages précités et des discussions étaient engagées ; que les 29 et 31 octobre 1996 s'est tenue une nouvelle réunion du comité central d'entreprise au cours de laquelle a été débattu le problème de la dénonciation des usages précités ; qu'étaient présents au comité central d'entreprise les membres titulaires et les suppléants élus des syndicats CFDT, CGC, CGT, FO, ainsi que des représentants des quatre syndicats précités ; que les 2 octobre et 7 novembre 1996, les comités d'établissement ont débattu de ces questions ; que le plan social a été adopté ; que les intimés font valoir qu'un usage ne peut être dénoncé dans le cadre d'un plan social ; que cependant il apparaît de l'article L. 321-4 du code du travail, dans ses dispositions issues de la loi n° 89-549 du 2 août 1989, que l'employeur est tenu de faire connaître aux représentants du personnel les mesures de nature économique qu'il entend prendre pour remédier à la situation ; que la dénonciation des usages précités faisait partie des mesures de nature économique que l'employeur entendait prendre pour remédier à la situation économique de la société qui avait des difficultés ; que cette dénonciation pouvait donc entrer dans le cadre d'un plan social ; que les représentants du personnel, au sens des articles L. 321-1, L. 321-2 et L. 321-3 du code du travail applicables à la date des faits, était le comité d'entreprise pour les entreprises employant plus de 50 salariés ; qu'ainsi que l'a retenu le premier juge, il sera admis que l'employeur a satisfait à la première obligation qui pesait sur lui, à savoir l'information des institutions représentatives du personnel, dans un délai de prévenance suffisant, celles-ci ayant été informées cinq mois et demi avant la dénonciation des usages précités, ce qui constitue un délai de prévenance suffisant ;
ET QUE sur l'information individuelle de chaque salarié : que concernant l'information des bénéficiaires de la prise en charge partielle des cotisations de prévoyance par la société : que l'employeur doit informer de sa décision tous les salariés concernés par l'avantage supprimé, mais seules les personnes bénéficiant de l'usage sont destinataires individuellement de la lettre d'information ; que la société ne prenait partiellement ou totalement en charge que les cotisations de prévoyance des retraités, couvrant les risques hospitalisation médicale, chirurgie, petits risques ; que l'information doit être individuelle et l'employeur ne peut s'acquitter de cette obligation par un simple affichage ; que l'employeur fait valoir que le 20 décembre 1996, il a adressé une lettre individuelle à chacun des retraités de la société afin de dénoncer l'usage relatif à la prise en charge des cotisations de prévoyance dont bénéficiaient exclusivement les retraités ; que cette lettre est produite au débat et ainsi libellée : « Notre société traverse une crise sans précédent nous imposant, pour assurer son avenir, de prendre un certain nombre de mesures difficiles. Cette situation a été largement explicitée devant le comité central d'entreprise, les comités d'établissement ainsi qu'à l'ensemble du personnel. Dans cette optique, il a été confirmé, auprès des partenaires sociaux, la suppression de la participation de la société au financement de la prévoyance collective des retraités et préretraités (…) : à compter du 1er janvier 1997 pour la CRI Prévoyance, frais médicaux ;- à compter du 1er avril 1997 pour Adour Mutualité (hospitalisations médicales et chirurgicales). Néanmoins nous tenons à préciser que la validité du contrat n'est pas remise en cause pour 1997 par Turbomeca (…) » ; que le même jour l'employeur adressait au groupe CRI et à Adour Mutualité un exemplaire de la lettre du 20 décembre 1996 et un listing informatique relatif à la « population couverte » ; que c'est à l'employeur qu'il appartient de dénoncer individuellement l'usage ; que la lettre du 20 décembre 1996 n'a pas fait l'objet d'un envoi recommandé avec accusé de réception, ce qui relevait de la liberté de l'employeur ; mais que les intimés allèguent n'avoir pas reçu cette lettre ; que bien que la mutuelle Ociane ait adressé à chaque retraité et pré-retraité copie de la lettre du 20 décembre 1996, postérieurement à la date fixée pour le terme mis à l'usage, cela ne peut pallier la carence de l'employeur dans la charge de la preuve ; que l'employeur pour justifier de l'information individuelle réalisée, excipe d'une lettre ouverte en date du 21 février 1997, des retraités et préretraités adressée à la société Turbomeca, signée notamment par Messieurs X..., Z..., Y... et D... dans laquelle il est précisé : « la suppression de la participation de la société au financement de la prévoyance pour les retraités, pré-retraités et ayant droit est présentée par M. B... directeur des ressources humaines dans son courrier circulaire du 20 décembre 1996 comme entrant dans une répartition équitable des efforts sur l'ensemble de la collectivité Turbomeca » ; que même si cette lettre permet de présumer que les retraités et préretraités ont bien fait l'objet de l'envoi individuel de la lettre du 20 décembre 1996, ainsi que le soutient l'employeur, il appartient à ce dernier d'en rapporter la preuve et une présomption ne saurait pallier l'absence de cette preuve ; qu'en conséquence, il ne peut être retenu que l'usage relatif à la prise en charge partielle des cotisations par la société a été dénoncé individuellement à chacun des personnes bénéficiant de l'usage ; que le manquement par l'employeur à l'une des trois conditions précitées rend la dénonciation inopposable aux salariés ; que la décision déférée sera confirmée de ce chef ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE l'usage n'étant pas assimilé à un accord collectif du travail, sa dénonciation n'obéit pas aux règles imposées par l'article L. 132-8 du code du travail ; que la validité de la dénonciation d'un usage nécessite toutefois avec un délai de prévenance suffisant permettant aux organisations syndicales d'envisager une négociation collective et aux salariés de prendre toutes dispositions utiles, une information préalable tant aux institutions représentatives du personnel qu'à chaque salarié individuellement ; sur l'information des institutions représentatives du personnel : que cette formalité a été remplie dès le 9 juillet 1996 par une convocation des institutions représentatives du personnel à la réunion extraordinaire du comité central d'entreprise du 17 juillet 1996 dans le cadre d'un projet de plan d'adaptation devant conduire à la suppression de « l'usage que constitue le versement d'un capital décès propre à l'entreprise (…) et la prise en charge partielle de la cotisation à la Prévoyance des Retraités (…) à compter du 1er janvier 1997 » ; que la décision de suppression des avantages a donc été portée à la connaissance des institutions représentatives du personnel 5 mois et demi avant l'échéance, ce qui constitue un délai de prévenance raisonnable ; sur l'information individuelle des salariés : que cette information procéderait selon la société Turbomeca d'une lettre circulaire adressée le 20 décembre 1996 à chacun des salariés ; que le délai de prévenance limité à une dizaine de jours est particulièrement insuffisant s'agissant de l'obligation imposée à chaque salarié de financer lui-même son assurance prévoyance (frais médicaux) soit 907, 14 francs par trimestre pour un couple, avec un supplément de 263, 45 10 francs par enfant ; que ces atermoiements de la direction sont d'autant moins compréhensibles que sa décision de supprimer ce financement patronal, ainsi qu'il vient d'être dit, a été prise plusieurs mois auparavant ; que l'importance des répercussions d'une telle décision justifiait de plus fort une information rapide, appropriée et personnalisée auprès de chaque salarié ; que bien que la formalité de la lettre recommandée ne soit pas imposée, la société Turbomeca ne rapporte pas la preuve, dont la charge lui incombe, d'une notification personnelle de la dénonciation d'un usage qui, fût-il accordé de façon collective, profitait directement à chaque salarié individuellement, ainsi dispensé de cotisations sociales ; que l'affichage de notes de services à l'attention du personnel comme celle du 22 juillet 1996, la diffusion de périodiques d'information ou encore le relais de l'information y compris par des tracts syndicaux ne sauraient suppléer l'absence de notification individuelle ; que dans ces conditions, il y aura lieu de dire que l'usage en cause n'a pas été valablement dénoncé ; que la société Turbomeca verse aux débats un accord salarial daté du 3 avril 2001 ainsi qu'un avenant du 25 avril 2001 concernant la prise en charge des cotisations capital décès avec un alignement du régime des non cadres sur celui des cadres ; que s'il peut être mis fin à un usage par un accord collectif (Soc., 25 janvier 1995) sans qu'il y ait lieu, à la charge de l'employeur, à une dénonciation régulière (Soc., 28 janvier 1998), il convient toutefois d'observer que l'accord du 3 avril 2001, qui ne fait d'ailleurs référence à aucun usage, ne concerne pas le versement d'un capital décès propre à l'employeur ni les cotisations de prévoyance santé ; que les demandes tendent pourtant précisément au paiement du capital décès propre à la SA Turbomeca et au remboursement de cotisations indues et sont donc nécessairement fondées sur un usage qui n'a jamais été valablement dénoncé ;
1°) ALORS QUE les juges du fond doivent répondre aux conclusions dont ils sont saisis et que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif ; qu'en l'espèce, la société Turbomeca faisait valoir que Mme A..., ayant liquidé sa retraite le 31 juillet 1998, ne justifiait pas avoir réuni à la date de la dénonciation de l'usage en décembre 1996 les conditions de son bénéfice, de sorte qu'elle ne pouvait donc pas contester la régularité de la dénonciation de l'usage (page 24 des conclusions d'appel de la société Turbomeca) ; qu'en omettant de répondre à ce moyen déterminant de l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE l'employeur qui entend dénoncer un usage n'a en principe une obligation d'information individuelle qu'à l'égard des bénéficiaires de l'usage, autrement dit de ceux qui remplissaient au jour de la dénonciation les conditions pour bénéficier de cet usage ; que celui qui ne justifie pas à la date de la suppression de l'usage réunir les conditions de son bénéfice ne peut contester la régularité de sa dénonciation et notamment l'absence d'information individuelle ; qu'en l'espèce, la société Turbomeca faisait valoir que Mme A... n'était pas en droit de se prévaloir d'une dénonciation irrégulière de l'usage relatif à la prise en charge partielle au bénéfice des retraités des cotisations prévoyance santé puisque sa retraite n'avait été liquidée que le 31 juillet 1998, et qu'elle ne justifiait donc pas avoir réuni à la date de la dénonciation de l'usage en décembre 1996 les conditions de son bénéfice (page 24 des conclusions d'appel de la société Turbomeca) ; que la cour d'appel a elle-même expressément relevé que « l'employeur doit informer de sa décision tous les salariés concernés par l'avantage supprimé, mais seules les personnes bénéficiant de l'usage sont destinataires individuellement de la lettre d'information » ; qu'en considérant néanmoins que la société Turbomeca devait rembourser à Mme A... les cotisations de prévoyance santé qui auraient dû rester à la charge de l'employeur dans la mesure où l'usage n'avait pas été valablement dénoncé à son égard, sans rechercher ainsi qu'elle y était invitée si Mme A... était en droit de contester la régularité de la dénonciation de l'usage en cause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil et des règles régissant la dénonciation des usages.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'usage relatif à la prise en charge partielle des cotisations de prévoyance des retraités et préretraités de la société Turbomeca n'avait pas été valablement dénoncé, d'AVOIR, en conséquence, condamné la société Turbomeca à verser à Mme A... et à Messieurs Y..., X..., Z..., D... et C... les cotisations de prévoyance santé qui auraient dû rester à la charge de la société Turbomeca en exécution de l'usage non valablement dénoncé et la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et d'AVOIR également condamné la société Turbomeca à verser au syndicat CGT des actifs et retraités de la société Turbomeca la somme de 2000 euros à titre de dommages-intérêts,
AUX MOTIFS QUE par mesure conservatoire et en cours de procédure, l'employeur par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 2 décembre 2005 a dénoncé individuellement à chaque retraité et aux représentants du personnel l'usage relatif à la prise en charge partielle des cotisations de prévoyance pour les frais médicaux d'hospitalisation et de chirurgie ; que pour que cette dénonciation puisse être valable bien que faite sous réserve, les trois conditions précitées devaient être remplies ; qu'entre la décision de l'employeur de dénoncer l'usage et la disparition effective de l'avantage doit s'écouler un délai de prévenance suffisant ; que ce délai a pour finalité de permettre l'engagement éventuel d'une négociation collective même si l'employeur qui dénonce un usage n'est pas tenu d'entamer des négociations pendant le délai de prévenance ; que ce délai commence à courir à compter du jour où l'employeur a informé les salariés concernés ainsi que les institutions représentatives du personnel ; que la dénonciation ne peut être effective qu'à une date postérieure à ces formalités ; que dans la dénonciation intervenue au mois de décembre 2005 tant celle faite auprès des représentants du personnel que des retraités, l'employeur n'a pas précisé à quelle date il entendait mettre un terme à l'usage litigieux ; qu'il ne pouvait en toute hypothèse fixer ce terme au 1er janvier ou 1er avril 1997, l'information devant être antérieure à la date de la disparition de l'usage ; que si par cette nouvelle dénonciation l'employeur entendait, même sous réserve, mettre un terme à l'usage relatif à la prise en charge des cotisations de prévoyance, il devait respecter les trois conditions posées pour une dénonciation régulière ; qu'en l'espèce, il ne peut être retenu que l'information faite aux représentants du personnel et aux salariés au mois de décembre 2005 respectait un délai de prévenance suffisant ; qu'une dénonciation irrégulière la rend inopposable aux salariés ; que l'usage relatif à la prise en charge partielle des cotisations de prévoyance continue donc à courir ;
1°) ALORS QUE l'employeur qui entend dénoncer un usage doit respecter un délai de prévenance suffisant afin que d'éventuelles négociations puissent s'ouvrir ; qu'en l'espèce, la société Turbomeca faisait valoir qu'elle avait procédé en décembre 2005 à une nouvelle dénonciation de l'usage portant sur la prise en charge partielle des cotisations prévoyance santé en faisant inscrire cette réitération à l'ordre du jour du comité central d'entreprise du 2 décembre 2005 et en adressant ensuite, le 19 décembre 2005, un courrier recommandé avec accusé de réception à chacun des retraités et des salariés de la société Turbomeca ; qu'elle ajoutait que cette dénonciation avait été opérée à titre conservatoire dans l'attente de la décision de la cour d'appel, à la suite du jugement du tribunal de grande instance de Pau du 26 octobre 2005 qui avait jugé irrégulière la dénonciation de l'usage opérée en décembre 1996 ; que par ailleurs, dans le dispositif de ses conclusions, la société Turbomeca demandait à la cour d'appel, sur le fondement de cette dénonciation opérée en décembre 2005, de débouter les intimés de leurs demandes formulées au titre des années 2006 et suivantes ; qu'en jugeant que la société Turbomeca ne pouvait fixer le terme de la dénonciation de l'usage opérée en décembre 2005 au 1er janvier 1997 ou au 1er avril 1997 parce que l'information devait être antérieure à la date de la disparition de l'usage, quand la société Turbomeca n'avait jamais prétendu que la dénonciation de décembre 2005 devait prendre effet rétroactivement, mais ne l'invoquait au contraire que pour l'avenir, la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE si l'employeur qui entend dénoncer un usage doit en principe respecter un délai de prévenance suffisant afin que d'éventuelles négociations puissent s'ouvrir, aucun délai de prévenance exprès ne peut cependant être utilement fixé par l'employeur lorsque la dénonciation est faite à titre conservatoire et sous réserve, dans l'attente d'une décision judiciaire sur la validité contestée de la précédente dénonciation de cet usage faite par l'employeur plusieurs années auparavant-et donc pour le cas où l'irrégularité de la dénonciation initiale serait retenue par le juge-, que cette dénonciation initiale avait donné lieu à la conclusion d'un nouvel accord collectif dans l'entreprise, et que l'usage litigieux n'est plus concrètement appliqué dans l'entreprise depuis la première dénonciation ; qu'en l'espèce, à la suite du jugement du 26 octobre 2005 ayant jugé irrégulière la dénonciation effectuée en 1996, la société Turbomeca a procédé en décembre 2005, à titre conservatoire et dans l'attente de l'arrêt de la cour d'appel, à une nouvelle dénonciation de l'usage portant sur la prise en charge partielle au bénéfice des retraités des cotisations prévoyance santé, en informant d'une part, le comité central d'entreprise le 2 décembre 2005 et d'autre part, les retraités et salariés par courriers recommandés avec accusés de réception du 19 décembre 2005 ; que par hypothèse, l'usage en cause n'était cependant plus appliqué dans l'entreprise depuis sa première dénonciation intervenue le 20 décembre 1996, qui avait donné lieu à une négociation avec les partenaires sociaux aboutissant à la conclusion d'un nouvel accord de groupe le 5 septembre 1997 ; qu'en privant de tout effet cette dénonciation conservatoire effectuée en 2005, au prétexte que l'employeur n'avait pas fixé un délai de prévenance exprès, sans aucunement tenir compte, d'une part, du caractère conservatoire et sous réserve de cette dénonciation, concernant un usage initialement dénoncé une dizaine d'années plus tôt et n'ayant plus été appliqué depuis lors dans l'entreprise, d'autre part, de ce qu'un nouvel accord avait été signé le 5 septembre 1997 à la suite de la dénonciation initiale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, ensemble les règles régissant la dénonciation des usages ;
3°) ALORS QUE, en tout état de cause, l'employeur qui entend dénoncer un usage doit respecter un délai de prévenance suffisant afin que d'éventuelles négociations puissent s'ouvrir ; qu'en l'absence de délai jugé suffisant dans la dénonciation faite par l'employeur, il appartient au juge de fixer souverainement le délai de prévenance nécessaire au regard de l'usage en cause ; qu'en l'espèce, la société Turbomeca a procédé en décembre 2005, à titre conservatoire et dans l'attente de l'arrêt de la cour d'appel, à une nouvelle dénonciation de l'usage portant sur la prise en charge partielle au bénéfice des retraités des cotisations prévoyance santé, en informant d'une part, le comité central d'entreprise le 2 décembre 2005 et d'autre part, les retraités et salariés par courriers recommandés avec accusés de réception du 19 décembre 2005 ; que la cour d'appel a cependant jugé que cette dénonciation n'avait pas été faite régulièrement dans la mesure où l'employeur n'avait pas déterminé un délai de prévenance suffisant, pour en conclure que l'usage continuait à courir ; qu'en statuant ainsi, quand, en présence d'une dénonciation individuelle dont la réalité même était admise, il lui appartenait de fixer elle-même le délai de prévenance qu'elle considérait suffisant pour que cette dénonciation individuelle prenne effet, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, ensemble les règles régissant la dénonciation des usages ;
4°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a soulevé d'office le moyen tiré d'un délai de prévenance insuffisant rendant irrégulière la dénonciation en décembre 2005 par la société Turbomeca de son usage portant sur la prise en charge partielle des cotisations prévoyance santé ; qu'en statuant ainsi, sans avoir préalablement recueilli les observations des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour MM. Y..., X..., Z..., C..., D..., Mme A... et le syndicat CGT des actifs et retraités de la société Turbomeca.
LE MOYEN DE CASSATION :
fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Charles X... de sa demande tendant à voir condamner la société TURBOMECA à lui payer la somme de 31 257 euros au titre du capital décès dû à la suite du décès de son fils le 20 mars 2002 ;
AUX MOTIFS QUE sur l'information des salariés concernant la dénonciation de l'usage relative au versement d'un capital décès ; pour qu'un usage soit valablement dénoncé une information individuelle doit être adressée aux salariés concernés ; les salariés concernés sont ceux qui remplissent au jour de la dénonciation de l'usage les conditions de son bénéfice ; le salarié qui ne justifie pas à la date de la suppression de l'usage ou de l'engagement unilatéral, réunir les conditions de son bénéfice ne peut contester la régularité de sa dénonciation ; l'information individuelle ne concerne que les salariés auxquels profitaient la disposition de l'usage que l'employeur entendait supprimer et qui remplissait au jour de la dénonciation les conditions pour bénéficier de cet usage ; la dénonciation de l'usage relatif capital décès a été régulièrement faite aux institutions représentatives du personnel ; aucun des intimés n'établit qu'à la date de la dénonciation de l'usage précité il remplissait les conditions pour bénéficier de l'avantage supprimé, tous les décès qui auraient été susceptibles de donner droit au versement d'un capital par la société TURBOMECA étant postérieurs de plus d'un an à la dénonciation de l'usage ; en conséquence l'employeur n'était pas tenu à une information individuelle à leur égard ; la dénonciation de l'usage a été portée à la connaissance des salariés par l'envoi d'une note de l'employeur en date du 22 juillet 1996 adressée à « l'ensemble des personnels de TURBOMECA ; l'employeur n'étant pas tenu à une information individuelle concernant la dénonciation de l'usage relatif au capital décès dès lors qu'il n'est ni établi ni même allégué qu'il existait au jour de la dénonciation de l'usage des personnes réunissant les conditions pour en bénéficier, il ne lui incombe pas de prouver que la note du 22 juillet 1996 est bien parvenue à chacun des salariés ; en conséquence les éléments sont réunis pour retenir que cet usage a été régulièrement dénoncé ;
ALORS QU'avant de supprimer un avantage qui résulte d'un usage d'entreprise l'employeur doit informer individuellement chaque salarié concerné par une disposition qui lui profite, à peine de voir la dénonciation lui être inopposable ; qu'il importe peu qu'au jour de la dénonciation le salarié remplisse les conditions pour en bénéficier immédiatement dès lors qu'il est susceptible d'en bénéficier dans le futur ; que la cour d'appel qui a estimé que l'employeur n'était pas tenu à une information individuelle de Monsieur X... concernant la dénonciation de l'usage relatif au capital décès parce que le décès ouvrant droit au versement d'un capital décès était postérieur de plus d'un an à la dénonciation de l'usage a violé l'article 1134 du code civil et les règles relatives à la dénonciation de l'usage.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-24082
Date de la décision : 04/07/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 28 juin 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 jui. 2012, pourvoi n°10-24082


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.24082
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