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28/06/2012 | FRANCE | N°11-19544

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 28 juin 2012, 11-19544


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et cinquième branches :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 2 janvier 2006, la société Nevets III a confié à la société UBS immobilier France (la société UBS) un mandat exclusif de vente d'un bâtiment situé à Grasse au prix de 6 300 000 euros, la rémunération du mandataire à la charge du mandant étant fixé à 5 % du prix de vente hors droits ; que, par acte authentique dressÃ

© le 27 avril 2006 par le notaire du vendeur, avec la participation du notaire de l'acquér...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et cinquième branches :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 2 janvier 2006, la société Nevets III a confié à la société UBS immobilier France (la société UBS) un mandat exclusif de vente d'un bâtiment situé à Grasse au prix de 6 300 000 euros, la rémunération du mandataire à la charge du mandant étant fixé à 5 % du prix de vente hors droits ; que, par acte authentique dressé le 27 avril 2006 par le notaire du vendeur, avec la participation du notaire de l'acquéreur, la société Nevets III a promis de vendre ce bien à la société France groupe organisation management européen et services (la société FGOMES) qui s'est engagée à l'acquérir au prix de 4 500 000 euros, les honoraires de négociation de la société UBS d'un montant de 5 % du prix net vendeur étant à la charge du vendeur ; que la vente n'a pas été réitérée par acte authentique à l'issue du délai prévu par la promesse, qui a été ultérieurement annulée ; que la société Nevets III a assigné la société UBS en paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que pour rejeter sa demande, l'arrêt retient que les
divers préjudices dont se plaint la société Nevets III , marchand de biens qui a pris le risque de renoncer à la sûreté prévue par l'agent immobilier lors de la négociation initiale et a accepté celui d'une occupation des lieux avant le transfert de propriété, sont dus aux engagements que cette société a pris elle-même dans la promesse du 27 avril 2006 et le bail signé à la même date, actes auxquels la société UBS est étrangère ;

Qu'en se déterminant ainsi sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur les critères selon lesquels l'agent immobilier avait sélectionné l'offre de société FGOMES et, notamment, sur les vérifications de la solvabilité de celle-ci auxquelles il aurait procédé, ni répondre aux conclusions par lesquelles la société Nevets III faisait valoir que Mme X..., responsable de la société UBS, était présente lors de la signature de la promesse du 27 avril 2006, comme l'attestait l'un des notaires, et l'aurait incitée à signer cet acte, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne la société UBS immobilier France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société UBS immobilier France ; la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société Nevets III ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Nevets III

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et débouté la société Nevets III de ses demandes visant à voir engager la responsabilité de la société UBS Immobilier France en raison des fautes commises par elle dans l'exécution du mandat de vente du 2 janvier 2006 ;

AUX MOTIFS QUE : « l'obligation de conseil, à laquelle l'agent immobilier est tenu, est une obligation de moyen qui doit s'apprécier en fonction des circonstances de la cause et, notamment, de la volonté des parties ; qu'au cas d'espèce, selon la lettre adressée le 29 mars 2006 par l'avocat de la société FGOMES à la société UBS, qui récapitule les conditions de la négociation intervenue entre ces deux sociétés, le prix devait être versé en totalité le jour de la signature de l'acte authentique de vente emportant transfert de propriété et jouissance de l'immeuble au profit de l'acquéreur, l'acte authentique devait être précédé d'un avant-contrat et, au jour de la signature de ce dernier, l'acquéreur devait procéder la remise d'une caution de 220.000 € délivrée par un établissement bancaire ou financier notoirement solvable avec renonciation aux bénéfices de division et de discussion ; qu'ainsi, l'agent immobilier avait protégé son client en prévoyant que le bien restât libre d'occupation pendant toute la durée de la promesse, que l'immobilisation fût indemnisée par le versement de la somme de 225.000 € garanti par une caution bancaire et que le prix .fût payé comptant au jour de la réalisation de la vente ; que toutefois la promesse synallagmatique de vente du 27 avril 2006, qui n'est pas rédigée par l'agent immobilier, mais par le notaire de la société Nevets III, et à laquelle la société UBS n'est pas partie, prévoit que l'indemnité d'immobilisation due par la société FGOMES "sera garantie par la remise au plus tard le 15 juin 2006 entre les mains du notaire (…) d'un engagement de caution d'un établissement bancaire" ; qu'ainsi, la société Nevets III, qui bénéficiait du conseil de son notaire, a accepté de prendre le risque de renoncer à la sûreté prévue par l'agent immobilier lors de la négociation initiale ; que, le jour de la signature de la promesse, la société Nevets III a consenti à la SARL Palais Victoria, qui a le même gérant que la société FGOMES, par acte sous seing privé du 27 avril 2006 dont la société UBS n'est pas le rédacteur, un bail dérogatoire d'une durée de douze mois, du 27 avril 2006 au 27 avril 2007, portant sur l'ensemble immobilier, objet de la vente ; qu'ainsi, ruinant la précaution prise par l'agent immobilier lors de la négociation, le vendeur, qui est pourtant un commerçant exerçant l'activité de marchand de biens, a pris le risque d'une occupation des lieux avant le transfert de propriété ; que le notaire rédacteur de la promesse a adressé à la société UBS le 12 avril 2006 un extrait du registre de commerce de la société FGOMES qui ne mentionne aucune interdiction de gérer du représentant légal de cette société ; qu'il ne peut donc être reproché à la société UBS de ne pas avoir procédé à cette recherche ; qu'il ne peut être déduit de sa seule qualité de filiale de la banque UBS que la société UBS Immobilier avait connaissance de l'incapacité du gérant de la société FGOMES ; que, dans le dernier état de ses offres, la société UBS ayant proposé plusieurs candidats à l'achat, soit la société FGOMES au prix de 4.500.000 €, la société Financière Serreau au prix de 3.000.000 € et la société SOFERIM au prix de 3.000.000 €, et la société Nevets III assistée de ses conseils, ayant choisi la mieux disante, ainsi qu'il résulte de la lettre du 31 mars 2006 adressée par l'avocat de la société FGOMES à sa cliente, il ne peut être déduit aucune collusion entre l'agent immobilier et l'acquéreur du lien de parenté existant entre le conseil de l'acquéreur et la directrice de la société UBS Immobilier dont rien paiements de la société FGOMES, qui est postérieur à la promesse, ne pouvait être découvert par l'agent immobilier ; qu'il ressort de tous ces éléments que les divers préjudices dont se plaint la société Nevets III, nés des défauts de paiements de l'indemnité d'immobilisation et des loyers, sont dus aux engagements pris dans la promesse du 27 avril 2006 et dans le bail de la même date, actes auxquels la société UBS est étrangère » ;

ALORS 1°) QUE : l'agent immobilier est tenu à une obligation de renseignement et de conseil à l'égard de son mandant tout au long de leurs relations contractuelles ; qu'il doit procéder aux investigations nécessaires à l'exécution de cette obligation ; qu'en considérant que la société UBS Immobilier France pouvait se contenter des documents fournis par le notaire et n'avait pas à effectuer ses propres vérifications de la situation et de la solvabilité du candidat à l'achat qu'elle proposait à sa cliente, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

ALORS 2°) QUE : l'agent immobilier est tenu à une obligation de renseignement et de conseil à l'égard de son mandant tout au long de leurs relations contractuelles ; qu'il doit procéder aux investigations nécessaires à l'exécution de cette obligation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel aurait dû rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si la société UBS Immobilier France avait bien procédé à une « analyse minutieuse » de la proposition de la société FGOMES, comme Madame X... le promettait dans l'article de presse invoqué par la société Nevets III, et sur quels critères elle avait sélectionné la société FGOMES, candidate à l'achat qu'elle proposait à sa cliente, et quelles vérifications elle avait faites de la situation et de la solvabilité de cette dernière, la cour d'appel a également privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

ALORS 3°) QUE : dans ses conclusions d'appel, la société Nevets III reprochait expressément à la société UBS Immobilier France, qui s'était engagée « à une analyse minutieuse » des propositions d'investissement faites à ses clients et leur avait promis l'accès à des informations privilégiées, de ne pas indiquer sur quels critères elle avait sélectionné la société FGOMES, candidate à l'achat qu'elle proposait à sa cliente, et quelles vérifications elle avait faites de la situation et de la solvabilité de cette dernière ; qu'en ne répondant pas à ce chef péremptoire des conclusions de l'exposante, la cour d'appel a, de plus, violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS 4°) QUE : l'agent immobilier est tenu à une obligation d'assistance et de conseil à l'égard de son mandant ; qu'il lui incombe de rapporter la preuve de l'exécution de cette obligation ; que la société UBS Immobilier France avait l'obligation, au moment de la signature de la promesse de vente - quand bien même elle ne l'aurait pas rédigée elle-même et n'en aurait pas été partie -, de mettre en garde la société Nevets III contre les risques tant de la signature d'une promesse de vente ne comportant pas les garanties qu'elle avait elle-même prévues lors de la négociation initiale, à savoir le versement immédiat d'une indemnité d'immobilisation, que de la conclusion d'un contrat de bail avec la société Palais Victoria, immobilisant ainsi les locaux, sans avoir obtenu cette garantie ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, par des motifs inopérants, sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si la société UBS Immobilier France, représentée par Madame Annachiarico lors de la signature, établissait avoir procédé à cette mise en garde, la cour d'appel a encore, à ce titre, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

ALORS 5°) QUE : dans ses conclusions d'appel, la société Nevets III faisait expressément valoir que Madame X..., directrice de la société UBS Immobilier France, était présente lors de la signature de la promesse de vente du 27 avril 2006, ainsi que l'attestait le notaire, et l'avait incitée à signer ledit acte malgré l'absence des garanties prévues, en l'assurant que la société FGOMES était solvable ; qu'en ne répondant pas à ce chef péremptoire des conclusions de l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS 6°) QUE : en toute hypothèse, le fait, à le supposer établi, que la société Nevets III ait pris un risque délibéré au moment de la signature de la promesse de vente ne pouvait exonérer la société UBS Immobilier France de son devoir de conseil et de sa responsabilité quant au choix fait par elle de sélectionner la société FGOMES en tant que candidate à l'achat ; qu'en retenant le contraire, par des motifs qui ne sont pas de nature à justifier sa décision, la cour d'appel a encore violé l'article 1147 du code civil ;

ALORS 7°) QUE : de plus, le fait que la société Nevets III ait pu bénéficier des conseils de son notaire n'exonérait pas l'agent immobilier de son propre devoir de conseil et d'information et donc de sa responsabilité à l'égard de son mandant ; qu'en considérant le contraire, la cour d'appel a encore violé l'article 1147 du code civil ;

ALORS 8°) QUE : le fait que la société UBS Immobilier France ait présenté la société FGOMES comme candidat acquéreur alors que sa directrice était l'épouse du conseil de cette dernière société caractérise en soi un manquement de l'agent immobilier à son obligation de loyauté vis-à-vis de sa cliente, indépendamment de toute collusion entre celui-ci et l'acquéreur ; qu'en considérant le contraire, la cour d'appel a encore violé l'article 1147 du code civil ;

ALORS 9°) QUE : il incombe à l'agent immobilier, tenu à une obligation d'information et de conseil, de rapporter la preuve de l'exécution de cette obligation ; que la société UBS Immobilier France se devait ainsi, à tout le moins, d'informer sa cliente du lien de parenté existant entre sa directrice et le conseil de la société FGOMES, société sélectionnée par elle en tant que candidate à l'acquisition ; qu'en retenant que rien n'indiquait que ce lien avait été dissimulé au vendeur, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et ainsi violé l'article 1315 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 11-19544
Date de la décision : 28/06/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 28 jui. 2012, pourvoi n°11-19544


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.19544
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