LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la Selarl Christophe Mandon, ès qualités, du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. et Mme Z..., Mmes B... et C..., MM. D..., E..., G... et F... ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 566 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (troisième chambre civile, 7 novembre 2007, Bull. civ. III, n° 191), que l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Eria (l'EURL) a entrepris l'édification d'un immeuble proposé à la vente en l'état futur d'achèvement, une garantie d'achèvement étant souscrite auprès de la société Compagnie européenne de garanties immobilières (la CEGI), aux droits de laquelle est la société Compagnie européenne de garanties et cautions (la CEGC), dans les termes des articles R. 261-17 et suivants du code de la construction et de l'habitation ; que des appartements ont été acquis par les consorts F..., B..., D..., E..., G..., C..., A..., Z... et Y... ; que l'EURL a été placée en liquidation judiciaire, avec la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (Selarl) Christophe Mandon comme liquidateur, alors que les travaux n'étaient pas achevés et que les acquéreurs avaient réglé 85 % du prix ; que la CEGI a fait procéder à l'achèvement des ouvrages par la Société européenne de travaux et services, l'une de ses filiales ; que devant le refus des acquéreurs de lui régler le solde du prix d'achat de leur bien, elle les a assignés en paiement de ce solde entre ses mains tandis que les acquéreurs ont sollicité l'allocation de dommages-intérêts pour retards ;
Attendu que, pour déclarer recevable la demande présentée en appel par la société CEGC à l'encontre de la Selarl Christophe Mandon, tendant au paiement des sommes qu'elle a exposées pour l'achèvement des ouvrages, l'arrêt retient que cette demande, bien que nouvelle, est le complément de celle en paiement du solde du prix de vente formée en première instance à l'encontre des acquéreurs ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la société CEGC n'avait formé aucune demande à l'encontre du liquidateur en première instance et que la demande litigieuse ne pouvait être le complément d'une demande dirigée contre d'autres parties devant le premier juge, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la Selarl Christophe Landon, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Eria, de sa fin de non-recevoir fondée sur l'article 564 du code de procédure civile, déclaré la société Compagnie européenne de garanties et cautions (CEGC), venant aux droits de la société Compagnie européenne de garanties immobilières, recevable en sa demande à l'encontre de la Selarl Christophe Landon, ès qualités, et condamné cette société à payer à la société CEGC, par priorité sur toute autre créance, la somme de 498 262, 32 euros, diminuée des sommes qui seront reçues par la société CEGC des acquéreurs des appartements, l'arrêt rendu le 31 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable, comme nouvelle, la demande de la société CEGC tendant au paiement par la Selarl Christophe Landon, ès qualités, de la somme de 498 262, 32 euros, correspondant au coût du sinistre ;
Condamne la société GEGC aux dépens exposés devant les juges du fond, en ce qui concerne la demande déclarée irrecevable, et à ceux de cassation ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour la société Christophe Mandon, ès qualités
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société CHRISTOPHE MANDON ès qualités de sa fin de non-recevoir fondée sur l'article 564 du code de procédure civile, d'avoir déclaré la société CEGC, venant aux droits de la société CEGI, recevable en sa demande à l'encontre de la société CHRISTOPHE MANDON ès qualités et d'avoir condamné la société CHRISTOPHE MANDON ès qualités à payer à la société CEGC, par priorité sur toute autre créance, conformément aux dispositions de l'ancien article L. 621-32 II du code de commerce, la somme de 498 262, 32 euros ;
AUX MOTIFS QUE « s'il est exact que dans ses conclusions de première instance, la société CEGI s'est contentée de conclure au rejet des prétentions de la société Bouffard-Mandon ès qualités sans former aucune demande contre elle, bien que l'ayant assignée, l'article 566 du code de procédure civile autorise les parties à ajouter aux demandes et défenses soumises au premier juge « toute les demandes qui en sont l'accessoire la conséquence ou le complément » ; que tel est le cas en l'espèce de la demande de la société CEGC en paiement du coût du sinistre par le liquidateur judiciaire, sous déduction des sommes encaissées par elle des acquéreurs, cette prétention constituant le complément des demandes en paiement du solde des prix de vente formée contre ceux-ci ; qu'il y a donc lieu de débouter la société CHRISTOPHE MANDON ès qualités de sa fin de non-recevoir et de déclarer la société CEGI recevable en sa demande » (arrêt p. 8, 2ème attendu)
ALORS QUE la faculté donnée aux parties par l'article 566 du code de procédure civile d'expliciter en appel les prétentions virtuelles comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et d'ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l'accessoire la conséquence ou le complément implique qu'une demande ait été formée devant la juridiction du premier degré ; qu'en retenant, pour en déduire que la demande était recevable, que la demande de la société CEGC dirigée à l'encontre de la société CHRISTOPHE MANDON ès qualités et tendant au paiement du coût du sinistre qu'elle avait pris en charge constituait le complément des demandes en paiement du solde des prix de vente formées contre les acquéreurs quand elle constatait qu'aucune demande n'avait été formée en première instance par la société CEGC à l'encontre de la société CHRISTOPHE MANDON ès qualités, la cour d'appel a violé l'article 566 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la société CEGC, venant aux droits de la société CEGI, recevable en sa demande à l'encontre de la société CHRISTOPHE MANDON ès qualités et d'avoir condamné la société CHRISTOPHE MANDON ès qualités à payer à la société CEGC par priorité sur toute autre créance, conformément aux dispositions de l'ancien article L. 621-32 II du code de commerce, la somme de 498 262, 32 euros ;
AUX MOTIFS QUE la société CHRISTOPHE MANDON, ès qualités, fait valoir que la créance invoquée par la société CEGC a son origine antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective du 20 décembre 2000, à savoir dans le contrat conclu entre cette société et la société Eria le 17 mars 1999, ou, le cas échéant, dans le fait que l'immeuble était inachevé à la date contractuellement prévue du 31 mars 2000, ce qui entraînait la réunion de conditions de l'intervention du garant, ou encore dans une lettre de demande d'intervention que les acquéreurs ont adressée à celui-ci le 15 novembre 2000 ; qu'elle soutient que la créance litigieuse aurait donc dû faire l'objet d'une déclaration à la procédure collective et qu'à défaut, elle doit être considérée comme étaient ; qu'elle critique par ailleurs l'interprétation que le tribunal a donnée de l'article R. 261-1 du code de la construction et l'habitation, au motif que ce texte, de nature réglementaire et antérieur aux dispositions à caractère législatif du code de commerce relatives aux procédures collectives, ne saurait prévaloir sur celles-ci ; cependant, il ressort du rappel des faits contenu dans le jugement, qui ne fait l'objet d'aucune contestation, que la société CEGI n'ayant donné aucune suite aux demandes d'intervention formées par les acquéreurs avant l'ouverture de la garantie d'achèvement par lettre du 16 janvier 2001, postérieure à cette ouverture, lettre à laquelle la société CEGI a répondu le 22 janvier 2001 qu'elle confirmait la mise en oeuvre de sa garantie, tout en indiquant le même jour aux acquéreurs qu'elle mandatait la société à responsabilité limitée société européenne de travaux et de services pour évaluer le coût des travaux nécessaire de se référer à l'article R. 261-21 du code de la construction et de l'habitation, que l'intervention de la société CEGI a trouvé sa cause dans une demande du liquidateur judiciaire, postérieure à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, de sorte que la créance en résultant n'avait pas à être déclarée et ne se trouve pas éteinte ; qu'il y a donc lieu de faire droit à la demande de la société CEGC, dont le montant ne fait l'objet d'aucune critique, même à titre très subsidiaire ;
ALORS QUE le garant d'achèvement des travaux, qui remplit une obligation qui lui est personnelle est tenu, dans ses rapports avec le constructeur, de la charge définitive de la dette qu'il a acquittée à la suite de la défaillance de celui-ci ; qu'en faisant droit à l'action du garant d'achèvement, la société CEGC, à l'encontre du constructeur en liquidation judiciaire au titre du paiement des sommes nécessaires à l'achèvement des travaux, la cour d'appel a violé l'article R. 261-21 du code de la construction et de l'habitation ;
ALORS QUE, à supposer même que le garant d'achèvement des travaux puisse se prévaloir d'une créance à l'encontre du constructeur, la créance de recours du garant d'achèvement des travaux à l'encontre du constructeur naît à la date à laquelle l'engagement a été souscrit ; qu'en retenant que le liquidateur avait sollicité la mise en oeuvre de la garantie d'achèvement postérieurement à l'ouverture de la procédure collective du constructeur pour en déduire que la créance de la société CEGC à son encontre était postérieure à l'ouverture de la procédure et n'avait pas à être déclarée, la cour d'appel a violé les articles L. 621-32 et L. 621-43 du code de commerce dans leur rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;
ALORS QUE, subsidiairement, en retenant que la mise en oeuvre de la garantie d'achèvement résultait de la demande du liquidateur judiciaire du vendeur pour en déduire que la créance du garant d'achèvement à l'encontre du constructeur n'avait pas à être déclarée, quand elle constatait que les acquéreurs avaient sollicité la mise oeuvre de la garantie avant l'ouverture de la procédure collective, ce dont il résultait que le fait générateur de la créance était antérieur à l'ouverture de la procédure, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 621-32 et L. 621-43 du code de commerce dans leur rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises.