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05/06/2012 | FRANCE | N°11-21110

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 juin 2012, 11-21110


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 25 mai 2011), que Mme X..., engagée le 31 mai 1988 en qualité d'ouvrière par la société Philips France, a été licenciée pour motif économique le 18 août 2008 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement est fondé et de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la réorganisation d'une entreprise constitue un motif économique de licenciement si elle est effectuée pour sauvegarder

la compétitivité du secteur d'activité du groupe international auquel l'entrepri...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 25 mai 2011), que Mme X..., engagée le 31 mai 1988 en qualité d'ouvrière par la société Philips France, a été licenciée pour motif économique le 18 août 2008 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement est fondé et de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la réorganisation d'une entreprise constitue un motif économique de licenciement si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe international auquel l'entreprise appartient ; les juges ne caractérisent pas la menace pesant sur la compétitivité, s'ils se bornent à se référer de manière générale à la situation du marché, sans s'expliquer de manière précise sur la situation du secteur d'activité de l'entreprise ou du groupe par rapport à celle de ses concurrents ; que la cour d'appel qui s'est bornée à énoncer qu'il résultait du résultat déficitaire de l'entreprise et du groupe dans le secteur d'activité concerné que la société Philips s'était trouvé confrontée à une diminution du rythme de croissance du marché des écrans plats, liée à une érosion des prix en raison d'un marché de plus en plus concurrentiel, sans autre précision sur la situation du groupe par rapport aux concurrents, alors même qu'(elle) avait fait valoir que la société Philips était un des plus gros acteurs sur le marché de la télévision dont il était un " price maker ", la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;
2°/ que lorsque la décision de licenciement a été prise pour réaliser des économies et améliorer sa rentabilité au détriment de la stabilité de l'emploi du site concerné, au profit d'une main d'oeuvre bon marché située à l'étranger et notamment en Europe de l'Est, le licenciement économique n'est pas justifié ; que la cour d'appel qui s'est bornée à constater que la société Philips s'était trouvée confrontée au niveau européen à une diminution du rythme de croissance du marché des écrans plats, mais qui n'a pas recherché si la délocalisation de son activité en Europe de l'Est, invoquée dans la lettre de licenciement, n'avait pas pour seul but de réaliser un plus grand profit, au détriment des salariés travaillant dans l'établissement concerné à Dreux, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a constaté que dans le cadre du secteur d'activité des téléviseurs la société Philips France était la seule entreprise européenne du groupe susceptible de pouvoir faire concurrence aux entreprises asiatiques ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel, qui, par une appréciation souveraine des éléments chiffrés relatifs à ce secteur d'activité qui lui avaient été soumis, a relevé, d'une part, qu'après avoir connu une forte augmentation, le rythme de croissance du marché européen des écrans plats de télévision avait diminué en raison de la baisse des prix de ces produits et généré un résultat net déficitaire en 2008 ainsi que des pertes importantes en 2007 et 2008, et, d'autre part, que cette situation imposait à la société Philips France de se réorganiser pour pouvoir affronter la concurrence accrue du marché ; qu'ayant ainsi caractérisé une menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe dans lequel intervenait l'employeur, elle n'avait pas à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inutile ;
D'où il suit que la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen :
Attendu que la salariée reproche à l'arrêt de dire que la société a respecté son obligation de reclassement et de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque l'employeur ne fait pas de recherche de reclassement dans tous les établissements du groupe dont ceux situés à l'étranger entre lesquels des permutations d'emplois étaient possibles, il ne respecte pas son obligation de reclassement ; qu'il ne peut en aucun cas limiter ses offres en fonction de la volonté présumée des salariés de les refuser ; qu'en énonçant que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement sous prétexte qu'il avait proposé quatorze postes à la salariée proches de son domicile, dont certains dans le cadre d'un partenariat avec une autre entreprise, mais sans constater que des recherches de reclassement avaient eu lieu dans les sociétés du groupe situées à l'étranger, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail ;
2°/ que la proposition de transfert des contrats de travail au sein d'une société ne faisant pas partie du même groupe que l'employeur ne relève pas de l'article L. 1233-4 du code du travail ; qu'en énonçant que la société Philips avait satisfait à son obligation de reclassement en proposant à Mme X... un poste dans la société Cordon Electronics implantée sur le site avec laquelle elle avait établi un partenariat, la cour d'appel a violé l'article 1233-4 du code du travail ;
3°/ que le salarié est en droit de refuser les mesures de reclassement proposées par l'employeur et le refus d'un salarié ne dispense pas l'employeur de son obligation de reclassement ; qu'en décidant que l'employeur avait respecté son obligation de reclassement sous prétexte que la salariée n'avait pas donné suite aux propositions de reclassement qui lui avaient été faites mais sans constater qu'il avait fait des recherches de reclassement dans toutes les sociétés du groupe et celles situées à l'étranger, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Mais attendu que l'arrêt relève que les propositions personnelles de reclassement adressées préalablement au licenciement et refusées par la salariée portaient sur tous les postes disponibles susceptibles de correspondre à sa catégorie professionnelle, l'un d'entre eux n'entraînant qu'un changement d'horaires de travail et certains autres ne nécessitant aucune formation ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu décider que l'employeur avait ainsi satisfait à son obligation ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y..., épouse X..., aux dépens
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me de Nervo, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à la cour d'appel d'avoir dit que le licenciement de Madame X... était un licenciement pour motif économique et de l'avoir en conséquence déboutée de ses demandes
Aux motifs que sur la nécessité de restructurer le secteur d'activité pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise : il résulte des éléments chiffrés versés aux débats, se rapportant au secteur d'activité Connected Display qu'après avoir été en forte augmentation, le marché de la télévision a baissé, pour être déficitaire tant au niveau du groupe que sur le site de Dreux lui-même, puisque connaissant un résultat net de moins 17, 8M € en 2008 alors que ce même résultat net était de + 77 M € en 2007, ce d'autant plus que la société Philips donne une perte de 68M € en 2007 et une perte de 413 € en 2008 dont 93 M € au premier trimestre 2008 et les résultats de l'activité du site de Dreux suivent la même tendance puisque d'un profit de 7, 7M € l'activité télévision de Dreux passe à une perte de-2, 9M € au premier trimestre 2008, puis de – 17, 8 M € à la fin de l'année 2008, hors coût de restructuration ; il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société Philips s'est trouvée confrontée au niveau européen à une diminution du rythme de croissance du marché des écrans plats liée à une érosion des prix en raison d'un marché de plus en plus concurrentiel ; elle a été ainsi placée devant la nécessité de sauvegarder la compétitivité du groupe par une réorganisation se traduisant sur le site de Dreux par un recentrage de la production sur les téléviseurs hauts de gamme et présentant une rentabilité viable ; dès lors il convient de confirmer le jugement entrepris ayant reconnu la réalité du motif économique, cause réelle et sérieuse des licenciements des salariés prononcés dont le licenciement de l'appelante
1) Alors que la réorganisation d'une entreprise constitue un motif économique de licenciement si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe international auquel l'entreprise appartient ; les juges ne caractérisent pas la menace pesant sur la compétitivité, s'ils se bornent à se référer de manière générale à la situation du marché, sans s'expliquer de manière précise sur la situation du secteur d'activité de l'entreprise ou du groupe par rapport à celle de ses concurrents ; que la cour d'appel qui s'est bornée à énoncer qu'il résultait du résultat déficitaire de l'entreprise et du groupe dans le secteur d'activité concerné que la société Philips s'était trouvé confrontée à une diminution du rythme de croissance du marché des écrans plats, liée à une érosion des prix en raison d'un marché de plus en plus concurrentiel, sans autre précision sur la situation du groupe par rapport aux concurrents, alors même que l'exposante avait fait valoir que la société Philips était un des plus gros acteurs sur le marché de la télévision dont il était un « price maker », la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L 1233-3 du code du travail
2) Alors que lorsque la décision de licenciement a été prise pour réaliser des économies et améliorer sa rentabilité au détriment de la stabilité de l'emploi du site concerné, au profit d'une main d'oeuvre bon marché située à l'étranger et notamment en Europe de l'Est, le licenciement économique n'est pas justifié ; que la cour d'appel qui s'est bornée à constater que la société Philips s'était trouvée confrontée au niveau européen à une diminution du rythme de croissance du marché des écrans plats, mais qui n'a pas recherché si la délocalisation de son activité en Europe de l'Est, invoquée dans la lettre de licenciement, n'avait pas pour seul but de réaliser un plus grand profit, au détriment des salariés travaillant dans l'établissement concerné à Dreux, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L 1233-3 du code du travail
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la société Philips France avait respecté son obligation de reclassement, et de l'avoir en conséquence déboutée de ses demandes
Aux motifs que la cour constate que la société Philips France justifie avoir : saisi le 27 avril 2008 la commission paritaire territoriale de l'emploi conformément aux dispositions de l'article 28 de l'accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987 ; mis en place le 29 mai 2008 une cellule de redressement Altedia et adressé des courriers individuels invitant les salariés à se rendre à une réunion d'information animée par le cabinet Altedia sur les différentes mesures contenues dans le PSE, fixée au 25 août 2008 au relais emploi ;- établi un partenariat avec la société Cordon Electronics implantée sur le site et qui offrait 60 postes au reclassement à des salariés Philips France dont 34 n'ont pas été pourvus ;- proposé des mesures de reclassement interne en proposant personnellement à l'appelante par courriers recommandés avec AR tous les poste susceptibles de correspondre à sa catégorie professionnelle avec à chaque fois l'intitulé du poste le grade le secteur sa localisation sa rémunération le descriptif et le profil du poste ; au total 14 postes ont été proposés personnellement à Madame X... les 11 juillet et 4 août 2008 parmi lesquels plusieurs postes ne nécessitaient aucune formation ; parmi ces postes figuraient notamment un poste d'opérateur sur le site Philips Eclairage de Chartres c'est-à-dire à 40 Km du site de Dreux ; mais la cour constate que l'appelante n'a jamais donné une quelconque suite aux propositions de reclassement interne ni ne s'est non plus positionnée sur les postes affichés et disponibles au sein de Cordon Electronics, société voisine immédiate de Philips France à Dreux alors que ce reclassement ne supposait aucun déménagement ; elle a aussi refusé un poste de travail équivalent au sien sur l'horaire du matin ; au vu de l'ensemble de ces éléments la cour constate que la société Philis France justifie avoir respecté son obligation de reclassement vis-à-vis de l'appelante alors que tous les postes disponibles lui ont été proposés et qu'elle les a refusés sans motifs ; qu'il convient de dire que la société Philips a fondé le licenciement sur une cause réelle et sérieuse et il convient de confirmer la décision entreprise ayant débouté Madame X... de l'intégralité de ses demandes ;
1° Alors que lorsque l'employeur ne fait pas de recherche de reclassement dans tous les établissements du groupe dont ceux situés à l'étranger entre lesquels des permutations d'emplois étaient possibles, il ne respecte pas son obligation de reclassement ; qu'il ne peut en aucun cas limiter ses offres en fonction de la volonté présumée des salariés de les refuser ; qu'en énonçant que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement sous prétexte qu'il avait proposé 14 postes à la salariée proches de son domicile, dont certains dans le cadre d'un partenariat avec une autre entreprise, mais sans constater que des recherches de reclassement avaient eu lieu dans les sociétés du groupe situées à l'étranger, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'art L 1233-4 du code du travail
2° Alors que la proposition de transfert des contrats de travail au sein d'une société ne faisant pas partie du même groupe que l'employeur ne relève pas de l'article L 1233-4 du code du travail ; qu'en énonçant que la société Philips avait satisfait à son obligation de reclassement en proposant à Madame X... un poste dans la société Cordon Electronics implantée sur le site avec laquelle elle avait établi un partenariat, la cour d'appel a violé l'article 1233-4 du code du travail ;
3° Alors que le salarié est en droit de refuser les mesures de reclassement proposées par l'employeur et le refus d'un salarié ne dispense pas l'employeur de son obligation de reclassement ; qu'en décidant que l'employeur avait respecté son obligation de reclassement sous prétexte que la salariée n'avait pas donné suite aux propositions de reclassement qui lui avaient été faites mais sans constater qu'il avait fait des recherches de reclassement dans toutes les sociétés du groupe et celles situées à l'étranger, la cour d'appel a violé l'article L 1233-4 du code du travail


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-21110
Date de la décision : 05/06/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 25 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 jui. 2012, pourvoi n°11-21110


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me de Nervo, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.21110
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