LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. David X...,
- M. Fabrice Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 12 juillet 2011, qui, pour fraude fiscale, les a condamnés, chacun, à huit mois d'emprisonnement avec sursis, a ordonné la publication et l'affichage de la décision, et a prononcé sur les demandes de l'administration fiscale, partie civile ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires personnels produits ;
Sur le moyen unique de cassation proposé par M. X... et sur le moyen unique de cassation proposé par M. Y..., pris, dans les mêmes termes, de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des doits de l'homme, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, sur le rapport de vérification de comptabilité de la société Trema, ayant une activité de bar-discothèque, gérée par MM. Y... et X..., ces derniers sont poursuivis pour avoir frauduleusement soustrait la société à l'établissement et au paiement de la taxe sur la valeur ajoutée due au titre de la période du 1er janvier 2005 au 28 février 2007, en déposant des déclarations minorées du chiffre d'affaires imposable ;
Attendu que, pour condamner les prévenus du chef de fraude fiscale, l'arrêt, après avoir relevé qu'ils avaient reconnu les faits, les expliquant par les difficultés financières de la société dont la trésorerie avait ainsi pu bénéficier du montant de la taxe fraudée, énonce qu'ils n'ont pas interjeté appel du jugement les condamnant ; que, pour infirmer le jugement, sur les seuls appels du procureur de la République et de l'administration fiscale, et dire que M. X... et M. Y... seraient tenus, solidairement avec la société, au paiement de la taxe fraudée et des pénalités afférentes, les juges retiennent que les demandeurs ont fraudé en toute connaissance de cause, dans le but avoué d'éviter la déconfiture de leur société ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que, d'une part, les demandeurs ne sauraient se faire un grief des motifs confirmant les dispositions pénales d'un jugement dont ils n'ont pas relevé appel, d'autre part, le prononcé de la solidarité, qui relève d'une faculté que les juges tiennent de la loi, n'a pas à être spécialement motivé, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être admis ;
Mais, sur le moyen relevé d'office, pris de l'inconstitutionnalité de l'article 1741, alinéa 4, du code général des impôts et de l'abrogation de la loi pénale ;
Vu les articles 61-1 et 62 de la Constitution, ensemble l'article 111-3 du code pénal ;
Attendu que, d'une part, une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 précité est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision ;
Attendu que, d'autre part, nul ne peut être puni, pour un délit, d'une peine qui n'est pas prévue par la loi ;
Attendu qu'après avoir déclaré M. X... et M. Y... coupables de fraude fiscale, l'arrêt ordonne, notamment, la publication et l'affichage de la décision, par application des dispositions de l'article 1741, alinéa 4, du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la date des faits ;
Mais attendu que ces dispositions ont été déclarées contraires à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel du 10 décembre 2010, prenant effet à la date de sa publication au Journal officiel de la République française le 11 décembre 2010 ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Angers, en date du 12 juillet 2011, en ce qu'il a ordonné la publication et l'affichage de la décision, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Angers et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Rognon conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;