LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte authentique reçu le 9 juillet 2004 par M. de Y..., notaire associé de la SCP Z... et de Y..., M. X... a acquis, sur la commune de Thorigny-sur-Marne, une maison d'habitation, édifiée sur un terrain cadastré section B n° 602, et un terrain à bâtir cadastré section B n° 603 ; que reprochant au notaire de ne pas l'avoir informé du caractère inconstructible de la parcelle n° 603, M. X... l'a assigné en responsabilité devant un tribunal de grande instance ;
Attendu que pour rejeter l'ensemble des demandes de M. X..., l'arrêt, après avoir relevé que l'acquéreur reconnaissait dans l'acte que le notaire lui avait donné lecture des documents d'urbanisme, annexés à la convention et revêtus de sa signature, mentionnant que la parcelle vendue se trouvait dans une zone naturelle classée par le plan d'occupation des sols en secteur Ndb et en zone rouge sur le plan de prévention des risques de mouvements de terrain, en déduit que M. X... disposait d'éléments d'information suffisants lui permettant d'appréhender l'exacte portée de son acquisition en sorte que le notaire a satisfait à son devoir de conseil et à son obligation d'information ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la contradiction constatée entre les mentions figurant dans l'acte de vente, qualifiant la parcelle n° 603 de terrain à bâtir, et les documents d'urbanisme annexés à l'acte, dont il résultait que la parcelle litigieuse ne pouvait recevoir aucune construction, imposait au notaire, tenu d'éclairer les parties sur la portée, les effets et les risques des actes auxquels il prête son concours, d'attirer l'attention de l'acquéreur sur le fait que le terrain, bien que qualifié de terrain à bâtir, était inconstructible en l'état, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 février 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la SCP Z... et de Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCP Z... et de Y..., la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille douze, et signé par M. Bargue, conseiller doyen faisant fonction de président et par Mme Laumône, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils pour M. X...
Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de ses demandes dirigées contre la SCP Z... et de LA PASSE,
AUX MOTIFS QUE l'acte authentique de vente en date du 9 juillet 2004, passé en l'étude de M. de Y..., notaire à Paris, et portant sur les deux parcelles de terrain acquises par M. X..., sises à Thorigny-sur-Marne (Seine et Marne) et cadastrées section B, n° 602, désignée comme étant bâtie, et n° 603, présentée comme étant un terrain à bâtir, énonce expressément aux pages 14 et 15, sous la rubrique « URBANISME – ENONCIATION DES DOCUMENTS OBTENUS », que « sont demeurées ci-jointes et annexées après visa de l'acquéreur et mention du notaire, les pièces suivantes :- note de renseignements d'urbanisme en date du 7 juin 2004 et plan de situation. L'acquéreur reconnaît que le notaire soussigné lui a donné lecture du document et déclare en avoir pris parfaite connaissance » ; que conformément aux énonciations de l'acte, les renseignements d'urbanisme tels qu'ils sont annexés à l'acte et revêtus de la signature de M. X..., font apparaître que les dispositions d'urbanisme applicables aux parcelles numérotées 602 et 603 sont : « Plan d'occupation des sols : zone naturelle, secteur NBd … Plan de prévention des risques naturels prévisibles des mouvements de terrain : zone rouge » ; qu'il suit de ce qui précède que la SCP Z... et de Y... a satisfait à son devoir de conseil et à son obligation d'information et qu'aucune faute ne lui est reprochable ;
ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, que Monsieur X... ne peut valablement soutenir qu'il a été tenu dans l'ignorance, lorsqu'il a donné sa signature, de la situation exacte de ses parcelles au visa des règles d'urbanisme et plus particulièrement des restrictions frappant celles-ci à propos de la possibilité d'y édifier des constructions ; qu'il ne justifie donc pas du manquement dont aurait fait preuve à son égard Maître de Y... au devoir d'information et de conseil lui incombant en tant que rédacteur d'acte, celui-ci lui ayant parfaitement donné connaissance des documents susceptibles de l'éclairer sur la réglementation applicable à ses biens et sur son incidence ; que si Maître de Y... a cru bon d'établir le 9 juillet 2004 une attestation de propriété désignant la parcelle B 603 comme terrain à bâtir, il ressort toutefois de ce qui précède que Monsieur X... disposait d'éléments d'information suffisants pour lui permettre d'appréhender l'exacte portée de cette mention et d'en percevoir le caractère contradictoire par rapport aux informations résultant des annexes dont il disposait, ce qui du reste lui a permis d'obtenir un dégrèvement auprès des Services fiscaux ;
ALORS QUE, D'UNE PART, le notaire est tenu d'une obligation d'assurer l'efficacité des actes passés par son ministère ; qu'il résulte de l'acte authentique de vente que la parcelle 603 a été vendue comme terrain à bâtir, soit un terrain constructible ; qu'en décidant qu'en dépit d'une telle mention dans l'acte et quand bien même la parcelle 603 s'était révélée inconstructible, le notaire n'avait pas manqué à son devoir d'assurer l'efficacité de l'acte de vente, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1382 du code civil,
ALORS QUE, D'AUTRE PART, le notaire est tenu d'un devoir de conseil et doit apporter la preuve qu'il a informé les parties des conséquences juridiques de l'acte qu'il a instrumenté, notamment en permettant aux parties de connaître l'exacte portée des mentions d'un document d'urbanisme ; qu'en l'espèce, le notaire n'a pas informé Monsieur X... des conséquences exactes du classement de la parcelle vendue, comme terrain à bâtir, en zone naturelle NDb, et de son classement en zone rouge dans le plan de prévention des risques naturels prévisibles de mouvements de terrain ; qu'en estimant cependant que Me de Y..., qui s'était borné à porter à la connaissance de Monsieur X... les mentions du document d'urbanisme classant le terrain en zone naturelle NDb et en zone rouge sur le plan de prévention des risques naturels, avait satisfait à son obligation de conseil et d'information, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil,
ALORS QU'EN TOUTE HYPOTHESE, le notaire est tenu à tout le moins d'aviser les parties sur des mentions contradictoires figurant à l'acte qu'il instrumente ; qu'en l'espèce, le notaire n'a pas informé M. X... de la contradiction affectant l'acte de vente, qui qualifiait le terrain vendu de terrain à bâtir mais comportait en annexe des documents d'urbanisme faisant état d'un classement en zone naturelle NDb et en zone rouge dans le plan de prévention des risques naturels prévisibles de mouvements de terrain ; qu'en décidant cependant que la SCP Z... et Y... avait satisfait à son devoir de conseil en se bornant à porter à la connaissance de Monsieur X... les éléments du document d'urbanisme classant la parcelle en zone inconstructible, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.