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09/05/2012 | FRANCE | N°10-27079

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 09 mai 2012, 10-27079


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Résidence Le Valparaiso du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Infinim ;

Sur le moyen unique :
Vu l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 23 septembre 2010), que la société civile immobilière résidence Ivry-sur-Seine Le Valparaiso (la SCI) a confié la construction de quatre immeubles d'habitation à la société Socofrance, qui a sous-traité les travaux d'isolation thermique et

de protection contre l'incendie à la société Proseco ; qu'après avoir réclamé le montant...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Résidence Le Valparaiso du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Infinim ;

Sur le moyen unique :
Vu l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 23 septembre 2010), que la société civile immobilière résidence Ivry-sur-Seine Le Valparaiso (la SCI) a confié la construction de quatre immeubles d'habitation à la société Socofrance, qui a sous-traité les travaux d'isolation thermique et de protection contre l'incendie à la société Proseco ; qu'après avoir réclamé le montant des travaux exécutés à la société Socofrance, placée en redressement judiciaire, la société Proseco a assigné en paiement le maître de l'ouvrage ;
Attendu que pour condamner la SCI à payer une indemnité à la société Proseco, l'arrêt retient que la SCI, en sa qualité de maître d'ouvrage, n'a pas mis en demeure la société Socofrance, entrepreneur principal, de fournir une caution bancaire à son sous-traitant, la société Proseco ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la SCI n'avait pas accepté la société Proseco en qualité de sous-traitant et que l'obligation de mettre en demeure l'entrepreneur principal de fournir une caution bancaire n'est prévue qu'en cas d'acceptation du sous-traitant, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a jugé que la SCI a engagé sa responsabilité sur le fondement de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 en n'ayant pas mis en demeure l'entrepreneur principal Socofrance de remplir son obligation légale de fournir une caution bancaire à son sous-traitant non agréé, la société Proseco et condamné la SCI à payer 17 000 euros à la société Proseco à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 23 septembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans, autrement composée ;
Condamne la société Proseco aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Proseco à payer la somme de 2 500 euros à la SCI Ivry-sur-Seine Résidence Le Valparaiso ; rejette la demande de la société Proseco ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils pour la société Ivry-sur-Seine résidence Le Valparaiso
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a condamné la SCI IVRY SUR SEINE « RESIDENCE LE VALPARAISO » à payer à la société PROSECO une indemnité de 17.000 euros, au titre d'une perte de chance, pour n'avoir pas, en sa qualité de maître d'ouvrage, mis en demeure la société SOCOFRANCE, chargée des travaux, de fournir une caution bancaire ;
AUX MOTIFS TOUT D'ABORD QUE « s'agissant de1a prétention de l'appelante à voir juger qu'elle aurait fait l'objet d'un agrément tacite du maître de l'ouvrage, elle n'est pas fondée et a été rejetée à juste titre par le tribunal ; que la société Proseco n'est en effet à même de se prévaloir d'aucun acte positif caractérisant une telle volonté de l'agréer, l'absence de réaction à sa présence sur le chantier n'en tenant pas lieu ; qu'en tout état de cause, la société Socofrance avait formulé le 6 mars 2007 une demande d'agrément de son sous-traitant par un courrier adressé à un Monsieur Rémy X... (pièce n°05) qui lui avait répondu – par lettre du 15 mars 2007 référencée "RGILE/SCI Ivry Résidence Le Valparaiso" dont la SCI Ivry Résidence Le Valparaiso confirme être l'auteur – qu'elle ne pourrait donner son autorisation d'intervention sur le chantier que si trois conditions étaient satisfaites, tenant respectivement à la formulation d'une demande d'agrément qui précisât le montant sous-traité et le mode de paiement en direct avec production d'une caution bancaire ou paiement par la SCI, à la présentation d'une note de calcul et d'une fiche technique du produit pour accord de son bureau de contrôle, et à l'organisation d'une visite préalable avec le SPS (cf. pièce 4 des intimées) ; que cette pièce – que les intimées ne peuvent être suspectées d'avoir créée pour les besoins de la cause dès lors qu'Infinim s'y référait déjà dans un courrier du 4 janvier 2008 adressé à une officine de recouvrement mandatée par Proseco, laquelle l'a reçu car elle le produit (cf. sa pièce n° 20) – exclut nécessairement qu'un agrément ait été donné, puisque des conditions y avaient été mises dont il n'est ni démontré ni soutenu qu'elles auraient été remplies et en l'absence de tout autre élément, l'agrément allégué n'est pas démontré ; que la société Proseco n'est donc pas en droit de prétendre exercer l'action directe ; qu'elle n'est pas davantage fondée en sa prétention subsidiaire à voir juger que le maître de l'ouvrage aurait commis un abus de droit en ne l'agréant pas, les conditions posées ne revêtant aucun caractère fallacieux, d'autant que la première était formulée dans le respect de la législation relative à la sous-traitance et dans l'intérêt même du sous-traitant, et que les autres relèvent de précautions légitimes » ;
ET AUX MOTIFS ENCORE QUE « l'appelante est en revanche fondée à rechercher la responsabilité de la société Ivry sur le fondement de l'article 14-1 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, dont l'applicabilité en la cause n'est pas elle-même litigieuse ; qu'il ressort en effet des productions que la S.A.R.L. Socofrance avait pour gérant Jean-Luc Y..., qui était aussi le président du conseil d'administration de la S.A.S. Infinim, elle-même gérante de droit de la SCI lvry s/Seine Résidence "Le Valparaiso", dont M. Y... était également associé fondateur ; que la société Proseco ayant oeuvré sur le chantier dès le début du mois de mars 2007, à la fin duquel elle avait d'ailleurs exécuté les trois quarts de son marché, Monsieur Y... avait connaissance de cette présence en sa qualité de dirigeant de l'entreprise principale lui ayant sous traité les travaux, ce dont il résulte (cf Cass. 3° Civ 02.02.2005 Bull. 2005, III, n°23) que le maître de l'ouvrage doit être regardé comme ayant nécessairement eu lui-même connaissance de cette présence sur le chantier, les intimées n'en disconvenant d'ailleurs pas véritablement puisqu'elles se contentent d'indiquer qu'au 5 avril 2007 encore, le maître de l'ouvrage n'en avait "pas été avisé officiellement" ; qu'or si un sous-traitant pouvait certes intervenir sur le chantier sans être agréé, ainsi que l'objectent les intimées, l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 faisait obligation au maître de l'ouvrage d'exiger de l'entrepreneur principal que le sous-traitant présent sur son chantier sans bénéficier d'une délégation e paiement, et qu'elle ne prouve ni ne prétend d'ailleurs avoir payé, fût protégé par le mécanisme légal de caution bancaire, et du fait de cette communauté de dirigeant personne physique avec la société Socofrance, la SCI Ivry savait pertinemment que cette garantie n'avait pas été mise en place ; que néanmoins, et alors que Proseco oeuvrait déjà" la société Ivry n'a pas mis en demeure Socofrance de fournir caution, la référence à une caution bancaire contenue dans le courrier du 15 mars 2007 dont elle se dit l'auteur n' étant exprimée qu'à titre de condition pour agréer son sous-traitant et non pas du tout à titre de mise en demeure présentant pour seul destinataire un caractère comminatoire certain ; qu'en laissant ainsi un sous-traitant non agréé intervenir sur le chantier sans mettre en demeure l'entrepreneur principal de remplir son obligation légale de fournir caution bancaire, la société Ivry a elle-même manqué à son obligation et commis une faute qui a causé préjudice à Proseco, laquelle, non réglée de sa créance par la procédure collective, s'est trouvée privée d'une garantie sûre de paiement, ce qui caractérise une perte de chance justifiant, au regard de la force de la garantie considérée, l'allocation d'une somme de 17.000€ à titre de dommages et intérêts » ;
ALORS QUE, premièrement, l'obligation faite au maître d'ouvrage d'exiger de l'entrepreneur principal qu'à défaut de délégation, il fournisse une caution, pour garantir le paiement du sous-traitant agréé, suppose l'existence d'un agrément et ne trouve à s'appliquer que s'il y a eu agrément préalable ; qu'en imputant néanmoins la faute à la SCI IVRY SUR SEINE «RESIDENCE LE VALPARAISO » de n'avoir pas mis en demeure la société SOCOFRANCE de fournir une caution, quand ils constataient qu'il n'y avait pas eu agrément de la société PROSECO, la société SOCOFRANCE n'ayant pas satisfait aux conditions exigées par le maître d'ouvrage, les juges du fond ont violé l'article 14-1 de la Loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
ALORS QUE, deuxièmement, si l'absence de réaction de la part du maître d'ouvrage, faute de demande d'agrément de la part de l'entrepreneur principal, à la suite de l'intervention sur le chantier d'un sous-traitant, peut révéler un agrément tacite qui a été écarté au cas d'espèce, la présence d'un sous-traitant à l'égard duquel l'agrément a été en l'état refusé ne peut en tout état de cause faire peser sur le maître d'ouvrage l'obligation d'enjoindre à l'entrepreneur principal de fournir une caution bancaire ; que de ce point de vue également, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des articles 14-1 de la loi n° 1334 du 13 décembre 1975 ensemble l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 10-27079
Date de la décision : 09/05/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONTRAT D'ENTREPRISE - Sous-traitant - Rapports avec le maître de l'ouvrage - Garanties de paiement - Obligation d'exiger de l'entrepreneur principal la fourniture d'une caution - Conditions - Acceptation du sous-traitant

L'obligation du maître de l'ouvrage de mettre en demeure l'entrepreneur principal de fournir une caution bancaire n'est prévue qu'en cas d'acceptation du sous-traitant


Références :

article 14-1 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 23 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 09 mai. 2012, pourvoi n°10-27079, Bull. civ. 2012, III, n° 68
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, III, n° 68

Composition du Tribunal
Président : M. Terrier
Avocat général : M. Petit
Rapporteur ?: M. Nivôse
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.27079
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