La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/05/2012 | FRANCE | N°10-27427;10-27428

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 mai 2012, 10-27427 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° U 10-27.427 et V 10-27-428 ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 1222-6 du code du travail ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que MM. X... et Y... ont été engagés par la société Brasserie L'Européen, respectivement le 24 août 1987 en qualité de limonadier et le 21 décembre 1993 en qualité de chef de rang ; qu'ils ont, l'un et l'autre, été promus aux fonctions de maître d'hôtel ; qu'invoquant une modification unilatérale de leur contrat de tra

vail à la suite de la reprise, en juin 2006, de la société Brasserie L'Européen pa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° U 10-27.427 et V 10-27-428 ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 1222-6 du code du travail ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que MM. X... et Y... ont été engagés par la société Brasserie L'Européen, respectivement le 24 août 1987 en qualité de limonadier et le 21 décembre 1993 en qualité de chef de rang ; qu'ils ont, l'un et l'autre, été promus aux fonctions de maître d'hôtel ; qu'invoquant une modification unilatérale de leur contrat de travail à la suite de la reprise, en juin 2006, de la société Brasserie L'Européen par le groupe Gérard Joulie, par lettres du 22 février 2007 les salariés ont pris acte de la rupture de leur contrat de travail aux torts de leur employeur ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à dire que la rupture avait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et à obtenir la condamnation de leur employeur au paiement de diverses sommes ;
Attendu que pour dire que la rupture des contrats de travail produisait les effets d'une démission, les arrêts retiennent, par motifs propres et adoptés, qu'en compensation de la suppression des fonctions de maître d'hôtel "gérant" occupées précédemment par les salariés, qui avaient la responsabilité de l'ouverture ou de la fermeture de l'établissement, l'employeur leur avaient alloué une prime mensuelle de 350 euros qui avait été acceptée par les intéressés le 20 octobre 2006 ; que les dispositions prévues par l'article L. 1222-6 du code du travail, relatives à la modification du contrat de travail pour motif économique, étaient inapplicables en l'espèce ;
Attendu cependant que la modification du contrat de travail, proposée par l'employeur pour un motif non inhérent à la personne du salarié est réputée fondée sur un motif économique ; qu'il en résulte que l'employeur qui n'a pas respecté les formalités prescrites par l'article L. 1222-6 du code du travail ne peut se prévaloir ni d'un refus ni d'une acceptation de la modification du contrat de travail par le salarié ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il résultait de ses énonciations que la modification des fonctions et de la rémunération des salariés était intervenue dans le cadre de mesures d'urgence mises en place par la société Brasserie L'Européen pour la sauvegarde de l'entreprise et que l'employeur avait modifié le contrat de travail des salariés sans respecter les formalités prévues en cas de modification pour motif économique, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation sur le premier moyen emporte la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif relatifs aux demandes de rappels de prime de gérance et d'indemnité de congés payés afférente ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, les arrêts rendus le 29 septembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société Brasserie L'Européen aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Brasserie L'Européen à payer à MM. X... et Y... la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi n° U 10-27.427

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la rupture du contrat de travail de Monsieur X... s'analysait en une démission et d'AVOIR en conséquence débouté celui-ci de ses demandes formées à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
AUX MOTIFS QUE la prise d'acte de rupture de son contrat de travail par un salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur s'analyse, soit en licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits allégués sont démontrés et avérés, soit, dans le cas contraire, en démission ; que dans le cas d'espèce M. Eddine X... fait grief à son employeur ayant repris la société BRASSERIE L'EUROPEEN en juin 2006 : d'avoir, à compter de cette date, modifié unilatéralement son contrat de travail (en modifiant son titre passé de "maître d'hôtel responsable" à "maître d'hôtel" et en modifiant l'amplitude horaire de son travail l'obligeant ainsi à travailler plus sans augmentation de salaire), d'avoir omis de lui régler des heures supplémentaires, ces faits contribuant à la dégradation de son état de santé ; qu'il résulte des éléments du dossier, qu'à la suite du rachat, en juin 2006, de la société BRASSERIE L'EUROPEEN par le groupe Gérard JOULIE un accord d'entreprise a été négocié puis signé le 6 juillet 2006 ; que dans ce cadre, après constat de la situation préoccupante de l'établissement (résultat de seulement 30.000 € pour un chiffre d'affaires de 6.000.000 €), des mesures d'urgence étaient mises en place pour la sauvegarde de l'entreprise à savoir : réduction des frais généraux excessifs, nouvelle organisation des achats, restructuration des effectifs de salle, règlement des nombreux contentieux en cours ; que ces dispositions se traduisaient concrètement par : la suppression de tous les véhicules de fonction, la résiliation des baux de parking individuel, la suppression des téléphones portables, la rationalisation des systèmes informatiques, la dénonciation des contrats fournisseurs non indispensables, la renégociation des contrats existants ; que s'y ajoutaient : la suppression des postes de direction générale et administrative et de leur rémunération, l'absence de prise de dividendes par les actionnaires, le passage du calcul du pourcentage service sur un prix HT et non plus TTC, et la mise en place d'une nouvelle grille de répartition ; qu'en contrepartie étaient maintenus : l'accord sur la répartition et l'amplitude du temps de travail (6 jours) et des jours de repos (2 jours tournants) hebdomadaires, confirmé à l'inspection du travail, la garantie de la masse du pourcentage service pour 2005 ; qu'il était mentionné in fine de l'accord que, pour être valide, il devait être signé et ratifié par le ou les délégués syndicaux, ainsi que par deux autres salariés, par l'employeur, ce qui était le cas ; que, par ailleurs, concernant les postes de "maître d'hôtel gérant", que M. Eddine X... qualifie de "maître d'hôtel responsable" (aucun de ces vocables n'existant, au demeurant, dans la convention collective des cafés hôtels restaurants), dont les tâches étaient celles de maître d'hôtel ayant, en plus, la responsabilité de l'ouverture ou de la fermeture de la brasserie, il était alloué aux salariés concernés, dont M. Eddine X..., une prime mensuelle de 350 € brut laquelle était expressément acceptée par le salarié le 20 octobre 2006 ; qu'il n'est pas justifié par celui-ci, eu égard à la généralité et à l'imprécision des termes de sa lettre du 22 février 2007, que son acceptation était limitée à cette seule modification ; que M. Eddine X... ne justifie donc pas des griefs qu'il allègue relatifs à une quelconque modification de son contrat de travail qui lui aurait été unilatéralement imposée par l'employeur ; qu'au regard du grief relatif aux heures supplémentaires impayées, il convient de rappeler qu'aux termes de l'article L.3171-4 du Code du travail la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés ; qu'au vu de ces éléments et ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en tant que de besoin, toutes les mesures qu'il estime utiles ; que si le décompte des heures de travail accomplies est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable ; qu'il a été rappelé que l'horaire mensuel contractuel de M. Eddine X... était de 169 heures, ce chiffre étant mentionné sur tous ses bulletins de salaire ; que M. Eddine X... expose avoir effectué à titre des heures supplémentaires demeurées impayées, d'abord, 152 heures de juin 2006 à octobre 2006 ; que cette allégation n'est toutefois accompagnée d'aucun élément, aucune feuille de temps faisant apparaître un écart par rapport au planning n'étant produite ; qu'il ajoute avoir effectué à titres d'heures supplémentaires : 42 heures 20 en novembre 2006, 49 heures 35 en décembre 2006, 39 heures 15 en janvier 2007, 41 heures 45 en février 2007, 60 heures 30 en mars 2007, 5 heures en avril 2007 ; que ces affirmations n'apparaissent pas crédibles au vu de la confrontation des planning et des bulletins de salaire de l'intéressé qui font état : pour novembre 2006 d'un horaire de seulement 163 heures 80 donc inférieur à l'horaire contractuel, mention que M. Eddine X... n'a pas contesté, pour décembre 2006 du 10 heures 40 supplémentaires qui ont été comptabilisées, pour janvier 2007 de 7 heures d'absence, pour février 2007 de 5 jours d'absence pour congés payés, pour mars 2007, aucun élément n'est produit, pour avril 2007 de 38 heures d'absence ; que ce grief n'est donc pas démontré, étant observé à ce titre, comme plus généralement sur l'ensemble des griefs formulés, que si les carences de l'employeur avaient été telles que l'allègue M. Eddine X... depuis juin 2006, il n'aurait pas manqué de l'interpeller sur le sujet avant le 22 février 2007 ; que la lettre du 22 février 2007 doit donc être qualifiée de démission et M. Eddine X... doit être débouté de toutes les demandes financières qu'il formule en arguant d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il convient de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;
Et AUX MOTIFS, adoptés des premiers juges, QUE lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à l'employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués et établis le justifiaient, soit dans le cas contraire, d'une démission ; qu'en l'espèce, Monsieur X... a énoncé quatre griefs à l'encontre de son employeur ; que le premier d'entre eux est relatif à son titre et ses fonctions qui auraient été modifiés par le nouvel employeur ; que force est de relever que le demandeur ne procède que par simples allégations quant à renonciation des tâches qu'il dit avoir assumées en tant que maître d'hôtel responsable, et en tant que maître d'hôtel à compter de juin 2006 ; que la convention collective ne connaît pas cet emploi, qu'il est constant que le 20 octobre 2006, Monsieur X... a donné expressément son accord sur la modification de la dénomination de son poste et l'attribution d'une prime de 350 euros en compensation des tâches spécifiques liées à l'ouverture de l'établissement ; que ce faisant, l'employeur n'a pas manqué à une quelconque de ses obligations car il a sollicité l'accord du salarié pour ces modifications ; que la procédure visée par le salarié n'est pas applicable en l'espèce puisqu'elle est relative aux modifications d'un élément essentiel du contrat de travail pour motif économique ; que l'employeur n'avait donc pas à respecter le délai d'un mois prévu dans le cadre de cette procédure ; que l'employeur démontre par la production des attestations d'autres maîtres d'hôtel que le contrôle des caisses relève de leurs attributions, la convention collective attribuant à cet emploi la responsabilité d'encaisser les notes qui si elle est déléguée, reste toujours sous le contrôle du maître d'hôtel ; qu'aucun manquement de l'employeur n'est caractérisé de ce chef par le demandeur ; qu'en second lieu, Monsieur X... soutient que l'employeur lui a imposé un changement d'horaires entraînant une augmentation de la durée du temps de travail sans contrepartie financière ; que Monsieur X... verse à l'appui de ses dires trois attestations ; que celle de Monsieur Z... est rédigée en termes généraux et ne permettent pas de caractériser les horaires de travail du demandeur ; que celle de Monsieur A... ne dispose pas d'une force probante certaine dès lors que celui-ci a engagé une procédure contentieuse à rencontre de la société défenderesse ; que la dernière attestation rédigée par Monsieur B... ne mentionne pas Monsieur X... ; que des feuilles de présence versées aux débats, il ressort que les temps de présence de Monsieur X... en mai et juin 2006 sont sans rapport avec ceux du début de l'année 2007 qui sont concomitants, à la prise d'acte de rupture et que de celles du mois d'avril 2007, dernier mois travaillé, il ressort que les horaires sont semblables à ceux de 2006 ; que le demandeur ne justifie pas que l'employeur soit à l'origine de ces horaires alors même que celui-ci démontre qu'à certains jours pour lesquels, Monsieur X... indique avoir quitté très tard dans la nuit, l'établissement était fermé ainsi le 1er février 2007, Monsieur X... indiqué avoir terminé son service à 3H30 du matin alors que les deux derniers chefs de rang avaient quitté leur service à 1H45 ; que le manquement n'est pas rapporté ; que le troisième grief est relatif à la diminution de sa rémunération ; que Monsieur X... affirme que l'employeur a modifié sa rémunération par la suppression de la prime de gérance de 45 euros ; que comme il a été vu ci-avant, l'employeur rapporte la preuve de l'accord de Monsieur X... ; que Monsieur X... ne peut valablement soutenir avoir accepté cette modification au motif que l'employeur lui aurait promis de lui attribuer le statut de cadre sans étayer par une pièce quelconque cette déclaration, qu'il n'y a pas de manquement ; que la suppression de la place de stationnement qui constitue le dernier grief, ne constitue pas un manquement de nature à justifier la rupture du contrat de travail ; qu'enfin Monsieur X... allègue avoir été victime de harcèlement ; qu'il verse à l'appui de cette déclaration quatre attestations ; que celles rédigées par Messieurs Z... et A... n »ont aucune force probante dès lors que leurs auteurs ne procèdent par allégation quant au but de la présence de Monsieur D... affirmé comme étant d'espionner et d'écouter le personnel sans préciser l'objectif à ceci ; que l'attestation de Monsieur E... est rédigée en termes généraux, ne permettant pas de caractériser en quoi Monsieur Yann F... (non cité d'ailleurs par Monsieur X...) exerçait une pression constante sur celui-ci, tenait de propos humiliants, d'autant que Monsieur E... situe la prise de fonction de ce personnage en mars 2007 soit postérieurement à la prise d'acte de rupture de Monsieur X... qui a effectué un préavis et qui n'évoque pas ce salarié dans sa lettre de prise d'acte ni dans ses écritures ; que l'attestation de Monsieur B... est tout aussi dépourvue de force probante pour être rédigée en termes généraux sans contenir la moindre précision quant aux dates des faits invoqués, quant aux termes des propos tenus et qualifiés d'humiliants ; que force est d'ailleurs de relever que Monsieur X... qui allègue d'un harcèlement moral ne présente aucune demande de ce chef ; qu'il résulte de ce qui précède que Monsieur X... ne rapporte pas la preuve d'un manquement de l'employeur d'une gravité telle qu'il justifie que la prise d'acte de rupture soit prononcée aux torts de la société défenderesse ; qu'en conséquence sa prise d"acte de rupture produit les effets d'une démission ;
ALORS QUE la modification du contrat de travail proposée pour un motif non inhérent à la personne du salarié est soumise aux formalités prescrites par l'article L.1222-6 du Code du travail ; que l'employeur qui n'a pas respecté les formalités prévues par ce texte ne peut se prévaloir ni d'un refus, ni d'une acceptation de la modification de son contrat de travail par le salarié ; qu'en l'espèce, il était constant que les propositions de modification de contrat de travail adressées à Monsieur X... les 6 juillet et 20 octobre 2006 s'inscrivaient dans le cadre des mesures d'urgence mises en place par la société BRASSERIE L'EUROPEEN pour la sauvegarde de l'entreprise ; qu'il était tout aussi constant qu'elles n'avaient été, ni adressées par lettre recommandée avec accusé de réception, ni assorties du délai d'un mois de réflexion institué par l'article L.1222-6 du Code du travail ; qu'en jugeant, dès lors, par motifs propres et adoptés, que les formalités instituées par ce texte n'étaient pas applicables aux propositions litigieuses, de sorte que Monsieur X... devait être regardé comme ayant valablement accepté aussi bien la modification de sa qualification contractuelle, que celle de son mode de rémunération, la Cour d'appel a violé les articles L.1222-6 et L.1233-3 du Code du travail ;
ALORS, en outre, QUE l'acceptation par le salarié d'une modification de son contrat de travail ne peut résulter que d'une manifestation de volonté claire et non équivoque ; qu'aux termes de la proposition de modification de contrat remise à Monsieur X... le 20 octobre 2006, la société BRASSERIE L'EUROPEEN informait celui-ci de la disparition des postes de maîtres d'hôtel gérant, de la fin corrélative du versement du complément de salaire qu'il percevait jusqu'alors au titre du remplacement de cette catégorie de personnel lors de leurs jours de repos et de la mise en place d'une prime mensuelle de 350 € brut venant compenser les sujétions particulières liées aux opérations de fermeture de l'établissement ; qu'en énonçant que Monsieur X... avait, en signant ce document, donné son accord à la modification de sa qualification contractuelle, autorisant ainsi la société BRASSERIE L'EUROPEEN à lui confier des fonctions de maître d'hôtel, en lieu et place de celles de maître d'hôtel responsable, qu'il exerçait auparavant, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
:
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de rappel de prime de gérance et d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents.
AUX MOTIFS, adoptés des premiers juges, QUE Monsieur X..., qui a donné son accord à la modification de la rémunération et la suppression de la prime de gérance, n'est pas fondé à en demander le paiement ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation s'étendra au chef du dispositif relatif au rejet de la demande formée par Monsieur X... à titre de rappel de prime de gérance et d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents, la société BRASSERIE L'EUROPEEN ne pouvant se prévaloir du consentement du salarié quant à la suppression de cette prime, en application de l'article 624 du Code de procédure civile. Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. Y..., demandeur au pourvoi n° V 10-27.428

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la rupture du contrat de travail de Monsieur Y... s'analysait en une démission et d'AVOIR en conséquence débouté celui-ci de ses demandes formées à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
AUX MOTIFS QUE la prise d'acte de rupture de son contrat de travail par un salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur s'analyse, soit en licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits allégués sont démontrés et avérés, soit, dans le cas contraire, en démission ; que dans le cas d'espèce M. Alain Y... fait grief à son employeur ayant repris la société BRASSERIE L'EUROPEEN en juin 2006 : d'avoir, à compter de cette date, modifié unilatéralement son contrat de travail (en modifiant l'amplitude horaire de son travail l'obligeant ainsi à travailler plus sans augmentation de salaire et en modifiant son titre passé de maître d'hôtel responsable à maître d'hôtel), d'avoir omis de lui régler des heures supplémentaires, ces faits contribuant à la dégradation de son état de santé ; qu'il résulte des éléments du dossier, qu'à la suite du rachat, en juin 2006, de la société BRASSERIE L'EUROPEEN par le groupe Gérard JOULIE un accord d'entreprise a été négocié puis signé le 6 juillet 2006 ; que dans ce cadre, après constat de la situation préoccupante de l'établissement (résultat de seulement 30.000 € pour un chiffre d'affaires de 6.000.000 €), des mesures d'urgence étaient mises en place pour la sauvegarde de l'entreprise à savoir : réduction des frais généraux excessifs, nouvelle organisation des achats, restructuration des effectifs de salle, règlement des nombreux contentieux en cours ; que ces dispositions se traduisaient concrètement par : la suppression de tous les véhicules de fonction, la résiliation des baux de parking individuel, la suppression des téléphones portables, la rationalisation des systèmes informatiques, la dénonciation des contrats fournisseurs non indispensables, la renégociation des contrats existants ; que s'y ajoutaient : la suppression des postes de direction générale et administrative et de leur rémunération, l'absence de prise de dividendes par les actionnaires, le passage du calcul du pourcentage service sur un prix HT et non plus TTC, et la mise en place d'une nouvelle grille de répartition ; qu'en contrepartie étaient maintenus : l'accord sur la répartition et l'amplitude du temps de travail (6 jours) et des jours de repos (2 jours tournants) hebdomadaires, confirmé à l'inspection du travail, la garantie de la masse du pourcentage service pour 2005 ; qu'il était mentionné in fine de l'accord que, pour être valide, il devait être signé et ratifié par le ou les délégués syndicaux, ainsi que par deux autres salariés, par l'employeur, ce qui était le cas ; que, par ailleurs, concernant les postes de "maître d'hôtel gérant", que M. Alain Y... qualifie de "maître d'hôtel responsable" (aucun de ces vocables n'existant, au demeurant, dans la convention collective des cafés hôtels restaurants), dont les tâches étaient celles de maître d'hôtel ayant, en plus, la responsabilité de l'ouverture ou de la fermeture de la brasserie, il était alloué aux salariés concernés, dont M. Alain Y..., une prime mensuelle de 350 € brut laquelle était expressément acceptée par le salarié le 20 octobre 2006 ; qu'il n'est pas justifié par celui-ci, eu égard à la généralité et à l'imprécision des termes de sa lettre du 22 février 2007, que son acceptation était limitée à cette seule modification ; que M. Alain Y... ne justifie donc pas des griefs qu'il allègue relatifs à une quelconque modification de son contrat de travail qui lui aurait été unilatéralement imposée par l'employeur ; qu'au regard du grief relatif aux heures supplémentaires impayées, il convient de rappeler qu'aux termes de l'article L.3171-4 du Code du travail la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés ; qu'au vu de ces éléments et ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en tant que de besoin, toutes les mesures qu'il estime utiles ; que si le décompte des heures de travail accomplies est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable ; qu'il a été rappelé que l'horaire mensuel contractuel de M. Alain Y... était de 169 heures, ce chiffre étant mentionné sur tous ses bulletins de salaire ; que M. Alain Y... expose avoir effectué à titre des heures supplémentaires demeurées impayées, à raison de : 8 heures en juin 2006, 22 heures en juillet 2006, 40 heures en août 2006, 20 heures en septembre 2006, 32 heures 30 en octobre 2006, 32 heures en décembre 2006, 32 heures 15 en janvier 2007, 8 heures 45 en février 2007 ; que cependant, outre le fait que le montant qu'il réclame à ce titre (5.812,79 € + congés payés afférents) est comme il est rappelé ci-dessus en discordance totale avec l'argumentation afférente figurant de manière détaillée aux pages 16,17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24 de ses écritures remises à l'audience, ce qui ne permet pas de vérifier le mode de calcul y aboutissant, force est de constater que le salarié ne justifie pas des allégations quant aux heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées au regard de la confrontation des plannings de travail et des pièces qu'il verse aux débats, ses bulletins de salaire, quand ils font apparaître un dépassement de l'horaire contractuel, ayant comptabilisé ce dépassement et d'autres bulletins de salaire mentionnant un horaire inférieur à l'horaire contractuel ce dont M. Y... ne prétend pas s'être plaint auprès de son employeur avant la lettre du 22 février 2007 ; que ce grief n'est donc pas démontré, étant observé à ce titre, comme plus généralement sur l'ensemble des griefs formulés, que si les carences de l'employeur avaient été telles que l'allègue M. Alain Y... depuis juin 2006, il n'aurait pas manqué de l'interpeller sur le sujet avant le 22 février 2007 ; que la lettre du 22 février 2007 doit donc être qualifiée de démission et M. Alain Y... doit être débouté de toutes les demandes financières qu'il formule en arguant d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il convient de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;
Et AUX MOTIFS, adoptés des premiers juges, QUE lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à l'employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués et établis le justifiaient, soit dans le cas contraire, d'une démission ; qu'en l'espèce, Monsieur Y... a énoncé quatre griefs à l'encontre de son employeur ; que le premier d'entre eux est relatif à son titre et ses fonctions qui auraient été modifiés par le nouvel employeur ; que force est de relever que le demandeur ne procède que par simples allégations quant à renonciation des tâches qu'il dit avoir assumées en tant que maître d'hôtel responsable, et en tant que maître d'hôtel à compter de juin 2006 ; que la convention collective ne connaît pas cet emploi de maître d'hôtel responsable, qu'il est constant que le 20 octobre 2006, Monsieur Y... a donné expressément son accord sur la modification de la dénomination de son poste et l'attribution d'une prime de 350 euros en compensation des tâches spécifiques liées à l'ouverture de l'établissement ; que ce faisant, l'employeur n'a pas manqué à une quelconque de ses obligations car il a sollicité l'accord du salarié pour ces modifications ; que la procédure visée par le salarié n'est pas applicable en l'espèce puisqu'elle est relative aux modifications d'un élément essentiel du contrat de travail pour motif économique ; que l'employeur n'avait donc pas à respecter le délai d'un mois prévu dans le cadre de cette procédure ; que l'employeur démontre par la production des attestations d'autres maîtres d'hôtel que le contrôle des caisses relève de leurs attributions, la convention collective attribuant à cet emploi la responsabilité d'encaisser les notes qui si elle est déléguée, reste toujours sous le contrôle du maître d'hôtel ; qu'aucun manquement de l'employeur n'est caractérisé de ce chef par le demandeur ; qu'en second lieu, Monsieur Y... soutient que l'employeur lui a imposé un changement d'horaires entraînant une augmentation de la durée du temps de travail sans contrepartie financière ; que Monsieur Y... verse à l'appui de ses dires trois attestations ; que celle de Monsieur Z... est rédigée en termes généraux et ne permettent pas de caractériser les horaires de travail du demandeur ; que celle de Monsieur A... ne dispose pas d'une force probante certaine dès lors que celui-ci a engagé une procédure contentieuse à rencontre de la société défenderesse ; que la dernière attestation rédigée par Monsieur B... ne mentionne pas les heures de travail du demandeur pour être ainsi rédigée : "Monsieur Y... ... au restaurant ... dans ses ouvertures (horaire de 6 h du matin jusqu'à 18 h ou 18 h 30) ..." ; que des feuilles de présence versées aux débats, il ressort que le temps de présence de Monsieur Y... en mai et juin 2006 est sans rapport avec celui du début de l'année 2007 ; que les feuilles de présence postérieures à la prise d'acte font apparaître que un temps de travail semblable à celui du début de l'année 2006, sans que Monsieur Y... prétende qu'au cours de cette période avoir vu ses fonctions modifiées par l'employeur ; que le demandeur ne justifie pas que l'employeur soit à l'origine de ces horaires alors même que celui ci démontre qu'à certains jours pour lesquels, Monsieur Y... indique avoir quitté très tard dans la nuit, l'établissement était fermé ainsi le 31 janvier 2007, Monsieur Y... indiqué avoir terminé son service à 3H15 du matin soit plus d'une heure après le départ des derniers chefs de rang ; que le manquement n'est pas rapporté ; que le troisième grief est relatif à la diminution de sa rémunération ; que Monsieur Y... affirme que l'employeur a modifié sa rémunération par la suppression de la prime de gérance de 45 euros ; que comme il a été vu ci- avant, l'employeur rapporte la preuve de l'accord de Monsieur Y... ; que Monsieur Y... ne peut valablement soutenir avoir accepté cette modification au motif que l'employeur lui aurait promis de lui attribuer le statut de cadre sans étayer par une pièce quelconque cette déclaration, qu'il n'y a pas de manquement ; que la suppression de la place de stationnement qui constitue le dernier grief, ne constitue pas un manquement de nature à justifier la rupture du contrat de travail ; qu'enfin Monsieur Y... allègue avoir été victime de harcèlement ; qu'il verse à l'appui de cette déclaration quatre attestations ; que celles rédigées par Messieurs Z... et A... n »ont aucune force probante dès lors que leurs auteurs ne procèdent par allégation quant au but de la présence de Monsieur D... affirmé comme étant d'espionner et d'écouter le personnel sans préciser l'objectif à ceci ; que l'attestation de Monsieur B... est tout aussi dépourvue de force probante pour être rédigée en termes généraux sans contenir la moindre précision quant aux dates des faits invoqués, quant aux termes des propos tenus et qualifiés d'humiliants ; que force est d'ailleurs de relever que Monsieur Y... qui allègue d'un harcèlement moral ne présente aucune demande de ce chef ; qu'il résulte de ce qui précède que Monsieur Y... ne rapporte pas la preuve d'un manquement de l'employeur d'une gravité telle qu'il justifie que la prise d'acte de rupture soit prononcée aux torts de la société défenderesse ; qu'en conséquence sa prise d"acte de rupture produit les effets d'une démission ;
ALORS QUE la modification du contrat de travail proposée pour un motif non inhérent à la personne du salarié est soumise aux formalités prescrites par l'article L.1222-6 du Code du travail ; que l'employeur qui n'a pas respecté les formalités prévues par ce texte ne peut se prévaloir ni d'un refus, ni d'une acceptation de la modification de son contrat de travail par le salarié ; qu'en l'espèce, il était constant que les propositions de modification de contrat de travail adressées à Monsieur Y... les 6 juillet et 20 octobre 2006 s'inscrivaient dans le cadre des mesures d'urgence mises en place par la société BRASSERIE L'EUROPEEN pour la sauvegarde de l'entreprise ; qu'il était tout aussi constant qu'elles n'avaient été, ni adressées par lettre recommandée avec accusé de réception, ni assorties du délai d'un mois de réflexion institué par l'article L.1222-6 du Code du travail ; qu'en jugeant, dès lors, par motifs propres et adoptés, que les formalités instituées par ce texte n'étaient pas applicables aux propositions litigieuses, de sorte que Monsieur Y... devait être regardé comme ayant valablement accepté aussi bien la modification de sa qualification contractuelle, que celle de son mode de rémunération, la Cour d'appel a violé les articles L.1222-6 et L.1233-3 du Code du travail ;
ALORS, en outre, QUE l'acceptation par le salarié d'une modification de son contrat de travail ne peut résulter que d'une manifestation de volonté claire et non équivoque ; qu'aux termes de la proposition de modification de contrat remise à Monsieur Y... le 20 octobre 2006, la société BRASSERIE L'EUROPEEN informait celui-ci de la disparition des postes de maîtres d'hôtel gérant, de la fin corrélative du versement du complément de salaire qu'il percevait jusqu'alors au titre du remplacement de cette catégorie de personnel lors de leurs jours de repos et de la mise en place d'une prime mensuelle de 350 € brut venant compenser les sujétions particulières liées aux opérations de fermeture de l'établissement ; qu'en énonçant que Monsieur Y... avait, en signant ce document, donné son accord à la modification de sa qualification contractuelle, autorisant ainsi la société BRASSERIE L'EUROPEEN à lui confier des fonctions de maître d'hôtel, en lieu et place de celles de maître d'hôtel responsable, qu'il exerçait auparavant, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
:
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Y... de sa demande de rappel de prime de gérance et d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents.
AUX MOTIFS, adoptés des premiers juges, QUE Monsieur Y..., qui a donné son accord à la modification de la rémunération et la suppression de la prime de gérance, n'est pas fondé à en demander le paiement ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation s'étendra au chef du dispositif relatif au rejet de la demande formée par Monsieur Y... à titre de rappel de prime de gérance et d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents, la société BRASSERIE L'EUROPEEN ne pouvant se prévaloir du consentement du salarié quant à la suppression de cette prime, en application de l'article 624 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-27427;10-27428
Date de la décision : 03/05/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 mai. 2012, pourvoi n°10-27427;10-27428


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : Me Bouthors, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.27427
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award