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12/04/2012 | FRANCE | N°11-22290

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 avril 2012, 11-22290


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Vu les articles L. 2121-1, L. 2122-1 et L. 2122-2 du code du travail ;
Attendu que l'affiliation confédérale sous laquelle un syndicat a présenté des candidats au premier tour des élections des membres titulaires du comité d'entreprise constitue un élément essentiel du vote des électeurs ; qu'il s'ensuit qu'une organisation syndicale ne peut revendiquer à son profit, au sein d'une entreprise, le score électoral obtenu par un syndicat qui lui est af

filié qu'à la condition que cette affiliation ait été mentionnée sur les bu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Vu les articles L. 2121-1, L. 2122-1 et L. 2122-2 du code du travail ;
Attendu que l'affiliation confédérale sous laquelle un syndicat a présenté des candidats au premier tour des élections des membres titulaires du comité d'entreprise constitue un élément essentiel du vote des électeurs ; qu'il s'ensuit qu'une organisation syndicale ne peut revendiquer à son profit, au sein d'une entreprise, le score électoral obtenu par un syndicat qui lui est affilié qu'à la condition que cette affiliation ait été mentionnée sur les bulletins de vote au moyen desquels les électeurs ont exprimé leur choix ou ait été portée à leur connaissance certaine par le syndicat ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que le premier tour des élections des membres des comités d'établissement et des délégués du personnel de la société Air France a eu lieu le 3 mars 2011 ; que, le 16 mars 2011, le syndicat CFDT Groupe Air France SPASAF a saisi le tribunal aux fins de dire que l'Union des navigants de l'aviation civile (UNAC) et le syndicat indépendant des cadres, agents de maîtrise et techniciens du groupe Air France (SICAMT-GAF), affilié à la CFE-CGC, constituent deux syndicats distincts dont les voix ne sauraient s'additionner et de rectifier en conséquence les résultats de l'élection pour apprécier la représentativité au sein de l'entreprise ;
Attendu que, pour rejeter cette demande, le tribunal retient que, si l'UNAC a présenté ses listes et fait campagne au nom de l'UNAC ou "l'UNPL UNAC" sans mentionner son affiliation à la CFE-CGC, pour autant cette affiliation était connue comme rappelée dans les tracts de campagne d'autres organisations syndicales et régulièrement mentionnée dans les accords collectifs négociés par elle au sein d'Air France, et certaine, comme résultant expressément de l'article 1er de ses statuts modifiés du 13 avril 2005 régulièrement déposés en mairie de Tremblay-en-France ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, le tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 22 juillet 2011, entre les parties, par le tribunal d'instance d'Aulnay-sous-Bois ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance d'Aubervilliers ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Air France à payer au syndicat CFDT Groupe Air France SPASAF, la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze avril deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour le syndicat CFDT groupe Air France SPASAF
Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR rejeté les demandes du syndicat CFDT SPASAF tendant à voir dire et juger que les voix obtenues par l'UNAC et la CFE CGC à l'occasion des élections professionnelles au sein de la compagnie Air France ne doivent pas être cumulées pour apprécier leur représentativé dans l'entreprise et ordonner par conséquent la rectification des résultats du premier tour des élections professionnelles au comité d'établissement AIR France en séparant les voix de l'UNAC et celles de la CFE CGC pour l'appréciation de l'influence et de la représentativité au sein de l'entreprise, sous réserve de la contestation concernant les PNT ;
AUX MOTIFS QUE l'article L2122-1 du Code du travail dispose: "Dans l'entreprise ou l'établissement, sont représentatives les organisations syndicales qui satisfont aux critères de l'article L2121 -1 et qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants."; l'article L2122-2 du Code du travail dispose: "Dans l'entreprise ou l'établissement, sont représentatives à l'égard des personnels relevant des collèges électoraux dans lesquels leurs règles statutaires leur donnent vocation à présenter des candidats les organisations syndicale catégorielles affiliées à une confédération syndicale catégorielle interprofessionnelle nationale qui satisfont aux critères de l'article L2121-1 et qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel dans ces collèges, quel que soit le nombre de votants."; il s'ensuit que dans une entreprise composée de plusieurs établissements distincts dans lesquels se déroulent des élections aux comités d'établissement, cette audience minimale de 10 % (et non pas la représentativité dont elle n'est que l'un des critères) se calcule au niveau de l'entreprise en additionnant tous les suffrages obtenus par les syndicats affiliés à la même confédération syndicale nationale dans l'ensemble des établissements, dans tous les collèges, à l'exception des syndicats affiliés à la CFE CGC dont cette audience minimale s'apprécie dans le seul cadre des collèges dans lesquels leurs règles statutaires leur donnent vocation à présenter des candidats ; néanmoins, rien n'interdit à un syndicat affilié à la CFE CGC de présenter des candidats dans des collèges autres que le 2ème ou 3ème et de consentir à voir son audience mesurée sur l'ensemble des collèges afin d'établir sa représentativité à l'égard de l'ensemble des personnels ; en l'espèce, si l'UNAC a présenté ses listes et fait campagne au nom de l'UNAC ou "l'UNPL UNAC" sans mentionner son affiliation à la CFE CGC, pour autant, il ne peut qu'être constaté que cette affiliation est connue (rappelée dans les tracts de campagne d'autres organisations syndicales et régulièrement mentionnée dans les accords collectifs négociés par elle au sein d'AIR FRANCE) et certaine, comme résultant expressément de l'article 1 de ses statuts modifiés du 13 avril 2005 régulièrement déposés en mairie de Tremblay en France, étant rappelé que tout syndicat est libre de s'affilier à des fédérations ou confédérations de son choix; en ce qui concerne les élections au comité d'établissement Exploitation Aérienne notamment le SICAMT-GAF (syndicat de cadres, agents de maîtrise et techniciens) a présenté une liste dans les collèges PN et PNT ; la méthode de calcul de l'audience retenue par l'employeur au niveau de l'entreprise, qui a consisté à additionner les suffrages exprimés en faveur des deux organisations syndicales affiliées à la confédération nationale CFE CGC au premier tour des élections des représentants titulaires aux comités d'établissement, tous collèges confondus, et qui n'est pas contestée par l'UNAC CFE CGC et le SICAMT-GAF CFEC CGC, est bien fondée ; il convient en conséquence de rejeter les demandes tendant à voir séparer les voix de l'UNAC CFE CGC et du SICAMT- GAF CFEC CGC pour l'appréciation de l'influence et la représentativité au sein de l'entreprise, étant toutefois précisé que les résultats proclamés le 4 mars 2011 sont susceptibles d'être modifiés en considération des nouveaux scrutins à intervenir, compte tenu de l'annulation du 1er tour des élections des membres des 2ème et 3ème collèges du comité d'établissement «Commercial International » et du 1er tour des élections des membres du comité d'établissement n°3 « Direction Générale de l'Exploitation Sol » de la société AIR France prononcée par ailleurs ;
ALORS QUE après avoir relevé que « rien n'interdit à un syndicat affilié à la CFE CGC de présenter des candidats dans des collèges autres que le 2ème ou 3ème et de consentir à voir son audience mesurée sur l'ensemble des collèges afin d'établir sa représentativité à l'égard de l'ensemble des personnels », le Tribunal a affirmé que le SICAMT-GAF (affilié à la CFE CGC) avait présenté une liste dans les collèges PN et PNT ; qu'en statuant de la sorte alors que le SICAMT-GAF (affilié à la CFE CGC) n'avait présenté des candidats que dans les 2ème et collèges, le Tribunal a dénaturé les termes du litige en violation de l'article 4 du Code de Procédure Civile ;
Et ALORS QUE conformément aux dispositions des articles L 2122-2 du Code du Travail et L 6524-3 du Code des Transports, l'audience est appréciée distinctement selon les syndicats en cause et les catégories de personnel qu'il représentent statutairement ; qu'en application de l'article L 2131-1 du Code du Travail, les syndicats professionnels ont exclusivement pour objet l'étude et la défense des droits ainsi que des intérêts matériels et moraux, tant collectifs qu'individuels, des personnes mentionnées dans leurs statuts ; que le Tribunal, qui a validé le procédé consistant à additionner les suffrages obtenus par deux syndicats catégoriels différents dans des collèges distincts sans tenir compte des modes de calcul spécifiques et des catégories de personnel correspondant à leurs statuts, a violé les articles L 2122-2 et L 2131-1 du Code du Travail et L 6524-3 du Code des Transports ;
ALORS subsidiairement QUE si les suffrages obtenus pas des organisations syndicales affiliées à la même Confédération peuvent être additionnés pour apprécier le seuil d'audience, cette affiliation doit être certaine à la date des élections en cause ; que le Tribunal a affirmé que l'affiliation de l'UNAC à la CFE CGC était certaine « comme résultant expressément de l'article 1 de ses statuts modifiés du 13 avril 2005 régulièrement déposés en mairie de Tremblay en France » ; qu'en statuant comme il l'a fait sans constater que cette affiliation était certaine à la date des élections de mars 2011 alors que le syndicat exposant se prévalait d'une déclaration officielle faite par l'UNAC le 30 décembre 2008 ne mentionnant aucune affiliation, le Tribunal a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L 2121-1, L 2122-1 et L 2122-2 du Code du Travail ;
Et ALORS QUE le syndicat exposant avait souligné que l'UNAC ayant elle-même présenté ses listes et fait campagne sans mentionner son affiliation à la CFE CGC, ce procédé portait atteinte à la sincérité du scrutin, les électeurs n'ayant pas eu connaissance de ce qu'ils votaient pour la CFE CGC en votant pour l'UNAC, ce dont il résultait que les suffrages obtenus par l'UNAC ne pouvaient être additionnés à ceux obtenus par le syndicat SICAMT-GAF, lui-même affilié à la CFE CGC ; que le Tribunal, après avoir constaté que l'UNAC avait présenté ses listes et fait campagne sans mentionner son affiliation à la CFE CGC, a affirmé que cette affiliation était connue car « rappelée dans les tracts de campagne d'autres organisations syndicales et régulièrement mentionnée dans les accords collectifs négociés par elle au sein d'AIR France » ; qu'en rejetant la contestation du syndicat exposant en se référant à des documents non datés ou aux tracts de campagne d'autres organisations syndicales alors qu'il résultait de ses propres constatations que, lors des élections en cause, l'UNAC n'avait pas elle-même informé les électeurs de son affiliation à la CFE CGC, le Tribunal a violé les articles L 2121-1, L 2122-1 et L 2122-2 du Code du Travail ;
Et ALORS en tout état de cause QUE la cassation à intervenir de la décision ayant statué sur le contentieux concernant le Personnel Navigant Technique (jugement rendu par le Tribunal d'instance d'Aulnay sous Bois le 22 juillet 2011 RG n° 11/11-397 – pourvoi n°E 11 22 289) emportera cassation par voie de conséquence du jugement rendu par le Tribunal d'instance d'Aulnay sous Bois le 22 juillet 2011 RG n° 11/11-398 et ce, en application de l'article 625 du Code de Procédure Civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-22290
Date de la décision : 12/04/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SYNDICAT PROFESSIONNEL - Représentativité - Syndicat affilié à une organisation syndicale représentative sur le plan national - Affiliation - Affiliation au moment des élections professionnelles - Influence sur le vote des électeurs - Portée

L'affiliation confédérale sous laquelle un syndicat a présenté des candidats au premier tour des élections des membres titulaires du comité d'entreprise constitue un élément essentiel du vote des électeurs. Il s'ensuit qu'une organisation syndicale ne peut revendiquer à son profit, au sein d'une entreprise, le score électoral obtenu par un syndicat qui lui est affilié qu'à la condition que cette affiliation ait été mentionnée sur les bulletins de vote au moyen desquels les électeurs ont exprimé leur choix ou ait été portée à leur connaissance certaine par le syndicat. Viole les articles L. 2121-1, L. 2122-1 et L. 2122-2 du code du travail un tribunal d'instance qui, pour rejeter la demande tendant à ce que les suffrages obtenus par deux syndicats ayant la même affiliation confédérale ne soient pas additionnés, retient que, si l'un des syndicats a présenté ses listes et fait campagne sans mentionner son affiliation confédérale, pour autant cette affiliation était connue comme rappelée dans les tracts de campagne d'autres organisations syndicales et régulièrement mentionnée dans les accords collectifs négociés par lui au sein de l'entreprise, et certaine, comme résultant expressément de l'article 1er de ses statuts modifiés du 13 avril 2005 régulièrement déposés en mairie, de tels motifs étant inopérants


Références :

articles L. 2121-1, L. 2122-1 et L. 2122-2 du code du travail

Décision attaquée : Tribunal d'instance d'Aulnay-sous-Bois, 22 juillet 2011

Sur les conséquences de l'information préalable des électeurs quant à l'affiliation confédérale de syndicats sur l'addition des suffrages obtenus par eux, à rapprocher : Soc., 12 avril 2012, pourvoi 11-22.291, Bull. 2012, V, n° 126 (rejet). Sur les conséquences, quant à sa représentativité, d'une désaffiliation du syndicat après les élections, à rapprocher :Soc., 18 mai 2011, pourvoi n° 10-60069, Bull. 2011, V, n° 125 (rejet)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 avr. 2012, pourvoi n°11-22290, Bull. civ. 2012, V, n° 127
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, V, n° 127

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Legoux
Rapporteur ?: M. Huglo
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.22290
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