LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les deux moyens, tels que reproduits en annexe :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 janvier 2011) que M. X... a été victime d'un accident de la circulation le 5 janvier 2004, impliquant le véhicule automobile conduit par M. Y..., assuré par la société Areas dommages ; qu'un accord transactionnel est intervenu entre M. Y... et l'assureur pour l'indemnisation des préjudices à caractère personnel ; que M. Y... a assigné l'assureur en indemnisation de sa perte de gains professionnels temporaire et d'une perte de chance d'accéder au statut d'associé dans la société qui l'employait ;
Mais attendu que sous le couvert de grief non fondé de violation de l'article 1382 du code civil, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve par la cour d'appel, qui, répondant aux conclusions par une décision motivée d'où il résultait, d'une part, que l'arrêt de travail consécutif à l'accident interdisant à la victime de reprendre une activité professionnelle ne s'était pas poursuivi jusqu'à la consolidation de ses blessures, d'autre part, que M. X... n'établissait pas avoir été en mesure de satisfaire la contribution financière contractuelle exigée pour devenir associé de la société qui l'employait, a pu statuer comme elle l'a fait ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ; le condamne à payer à la société Areas dommages la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze avril deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
M. Laurent X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Areas Assurances à lui payer la somme de 8.721,48 € au titre de l'indemnisation de la perte de gains professionnels avant consolidation ;
AUX MOTIFS QUE M. X... justifie par la production de ses bulletins de salaire qu'il percevait un salaire mensuel moyen net imposable de 1.907,83 € ; le décompte établi par la CPAM des Alpes Maritimes le 5 août 2008 mentionne le versement d'indemnités journalières au titre de l'assurance maladie, durant la période du 8 janvier 2004 au 16 mars 2004 pour un montant de 2725,50 €, M. X... a été licencié à compter du 26 mars 2004 et la lettre de licenciement qui lui a été adressée le 26 février 2004 établit suffisamment le lien entre celui-ci et l'accident ; l'expert a retenu une ITT de 6 mois en soulignant que cette période d'incapacité correspond à la cessation des activités professionnelles en relation avec le handicap généré par les suites de l'accident et au retentissement de ce dernier sur les pertes et actes de la vie courante ; s'il a fixé une date de consolidation au 5 juillet 2009, les éléments médicaux qu'il a relevés ne permettent pas de caractériser une impossibilité pour M. X... de reprendre une activité professionnelle à l'issue de ce délai de 6 mois, et même s'il a bénéficié d'arrêts de travail jusqu'au 31 mars 2005, ces arrêts n'ont pas donné lieu à prise en charge par la CPAM ; il en résulte que l'indemnisation de la perte de gains avant consolidation doit être limitée à une durée de 6 mois et être indemnisée sur la base du salaire net imposable moyen antérieur au licenciement. Déduction faite des indemnités journalières perçues de la CPAM, il revient en conséquence à M. X... la somme de 872,48 € ;
ALORS QUE la réparation d'un dommage doit être intégrale et que pour l'indemnisation du préjudice corporel la réparation du poste perte de gains professionnels actuels inclut toute la période antérieure à la date de consolidation ; que dès lors en retenant, pour limiter l'indemnisation de la perte de gains avant consolidation à une durée de 6 mois à compter de l'accident survenu le 5 janvier 2004 et condamner en conséquence la société Areas Assurance à ne payer à ce titre que la somme de 8.721,48 € à M. X..., que les éléments médicaux relevés par l'expert judiciaire ne permettaient pas de caractériser une impossibilité pour M. X... de reprendre une activité professionnelle à l'issue du délai de 6 mois de l'ITT, la Cour, qui a relevé que l'expert avait fixé la date de consolidation au 5 juillet 2005, n'a pas réparé intégralement ce poste du préjudice et a ainsi violé l'article 1382 du code civil ;
ET ALORS QU'en toute hypothèse, pour déterminer la réalité et l'étendue d'un préjudice, le juge de droit commun n'est pas lié par les décisions prises par les caisses de sécurité sociale ; que dès lors en retenant, pour limiter à la durée de 6 mois de l'ITT l'indemnisation de la pertes des gains professionnels actuels de M. X..., que même si celui-ci a bénéficié d'arrêts de travail jusqu'au 31 mars 2005, ces arrêts n'avaient pas été pris en charge par la CPAM, la Cour a encore violé l'article 1382 du code civil ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
M. Laurent X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande tendant à se voir indemniser de la perte d'une chance ;
AUX MOTIFS QUE la faculté d'association était prévue de façon précise par le contrat liant M. X... à la société G. Distribution et se trouvait subordonnée à des critères prédéfinis, montant de la marge brute, création d'un point de vente supplémentaire et disposition d'un capital donné ; les documents comptables produits par M. X... montraient que la marge brute réalisée dans l'établissement de Nice où il était employé a atteint le montant fixé dans la clause seulement à partir de l'exercice 2006, même si le résultat des exercices antérieurs était bénéficiaire ; il est justifié que les deux points de vente ont été ouverts, l'un à Toulouse en février 2005 et l'autre à Cannes en janvier 2008 ; à cette dernière date, M. X... aurait donc pu théoriquement prétendre à une prime de participation dans le capital de la filiale, sous réserve de disposer d'un capital de 8.000 € ; toutefois, M. X... ne produit aucun élément permettant de retenir l'existence d'une réelle probabilité qu'il puisse investir cette somme, et que son licenciement dont le lien avec l'accident a été mis en évidence, lui ait donc fait perdre une chance sérieuse d'acquérir la qualité d'associé ; il en résulte que M. X... doit être débouté de sa demande en indemnisation d'une incidence professionnelle après consolidation ;
ALORS QUE la perte de chance est constituée par la disparition d'un évènement favorable ; que dès lors, ayant constaté qu'en raison de la marge brute réalisée dans l'établissement où il était employé et de l'ouverture de deux autres points de vente ainsi que le prévoyait son contrat de travail, M. X... aurait pu théoriquement prétendre à une prise de participation dans le capital de la filiale de G. Distribution, en énonçant, pour considérer que son licenciement en lien avec l'accident ne lui avait pas fait perdre une chance d'acquérir la qualité d'associé et le débouter en conséquence de sa demande d'indemnisation de ce chef, qu'il ne produisait aucun élément permettant de retenir qu'il puisse investir la somme de 8.000 € fixée pour l'acquisition d'une part du capital de l'entreprise, la Cour n'a pas tiré les conséquences légales de sa constatation, d'où il ressort que le licenciement et l'arrêt de travail consécutifs à l'accident dont il a été victime, qui l'ont privé de ressources financières, l'ont empêché de saisir cette opportunité, et partant a violé l'article 1382 du code civil ;
ET ALORS QU'en toute hypothèse la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue ; dès lors, en déboutant totalement M. X... de sa demande d'indemnisation d'une perte de chance d'acquérir la qualité d'associé de l'entreprise qui l'employait, parce qu'il ne produisait aucun élément permettant de retenir qu'il puisse investir la somme de 8.000 € fixée pour acquérir une part du capital, au lien d'évaluer la chance perdue par M. X..., du fait de l'accident qui avait entraîné son licenciement, de devenir associé, quand elle constatait que les conditions contractuelles de marge réalisée et d'ouverture d'autres points de vente étaient remplies, la Cour a encore violé l'article 1382 du code civil.