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12/04/2012 | FRANCE | N°11-12808

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 12 avril 2012, 11-12808


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu les articles 9 de l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996 et L. 376-1 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu, selon les deux premiers de ces textes, qu'en contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement des prestations mises à sa charge, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affiliée la victime recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du responsable au pr

ofit de l'organisme national d'assurance maladie ; que cette dispositio...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu les articles 9 de l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996 et L. 376-1 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu, selon les deux premiers de ces textes, qu'en contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement des prestations mises à sa charge, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affiliée la victime recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du responsable au profit de l'organisme national d'assurance maladie ; que cette disposition s'applique aux actions en remboursement dont les dossiers ont été réglés à compter du 1er janvier 1996 soit par voie amiable, soit par une décision de justice passée en force de chose jugée ; que selon le dernier de ces textes, le juge condamne dans toutes les instances la partie tenue aux dépens, ou à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, et les productions, que le 14 avril 1991, M. X... a été blessé dans un accident de karting impliquant l'engin piloté par M. Y..., assuré auprès de la société AIG Europe, devenue la société Chartis Europe (l'assureur) ; que M. X... a assigné en réparation de son préjudice M. Y... et son assureur en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne (la caisse) ; que par arrêt du 18 février 2004, rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 11 avril 2002, pourvoi n° 00-12.224) M. Y... et son assureur ont été condamnés à indemniser les conséquences dommageables de l'accident, une expertise étant ordonnée avant dire droit sur la liquidation des préjudices ; que par arrêt du 7 juillet 2006, M. Y... ainsi que son assureur, dans la limite de sa garantie, ont été condamnés in solidum à rembourser à la caisse le montant des prestations exposées par elle dans l'intérêt de M. X... à la suite de l'accident ; que le 9 septembre 2008, la caisse a fait signifier à l'assureur un commandement aux fins de saisie-vente afin d'obtenir le paiement d'une certaine somme en exécution de cette décision ; que l'assureur a saisi le juge de l'exécution d'une demande de mainlevée de ce commandement ; que par un arrêt du 9 septembre 2010, rectifié le 25 novembre 2010, le commandement litigieux a été validé dans la limite du plafond contractuel de garantie et l'assureur condamné à payer à la caisse la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; que la caisse ayant mis en demeure l'assureur de lui verser l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, lui a, faute de paiement, décerné une contrainte le 8 octobre 2008 ; que l'assureur a saisi un tribunal des affaires de sécurité sociale d'une opposition à cette contrainte ;
Attendu que pour annuler la contrainte litigieuse, le jugement énonce que la somme de 941 euros réclamée au titre des frais de gestion n'est pas due car elle fait double emploi avec la somme de 1 000 euros accordée à la caisse au titre des frais irrépétibles par l'arrêt du 9 septembre 2010 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnité forfaitaire de gestion diffère tant par ses finalités que par ses modalités d'application des frais exposés non compris dans les dépens de l'instance, le tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 16 décembre 2010, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Nanterre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Versailles ;
Condamne la société Chartis Europe aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Chartis Europe, la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze avril deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne.
Le pourvoi fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit l'opposition formée par la compagnie CHARTIS EUROPE à la contrainte à elle délivrée par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine et Marne le 8 octobre 2010 recevable et fondée, d'AVOIR invalidé ladite contrainte qui ne pourra en conséquence sortir aucun effet et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE la disposition, fondement de la contrainte, mérite qu'il lui soit porté attention : Article L.376-1 du Code de la sécurité sociale: « . . . En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu dans les limites d'un montant maximum de 910 € et d'un montant minimum de 91 €. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés sont révisés chaque année ... » ; Attendu qu'il convient d'observer que la Caisse, en ses conclusions d'intimée devant la cour d'appel de Versailles, en date du 22 février 2010 sollicitait la condamnation de la Société CHARTIS EUROPE, à lui payer une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens comprenant le coût du commandement ; qu'elle a le 8 octobre 2008 fait signifier une contrainte du 19 septembre 2008 à la compagnie d'assurance pour 941 € en capital, faisant suite à une mise en demeure du juillet 2007 (faite à l'auteur de l'accident) (!) au titre de l'indemnité forfaitaire - contrepartie de frais; Attendu que la Cour en son arrêt du 9 septembre 2010 avait : considéré qu'il apparaissait équitable au vu des circonstances de la cause d'allouer à la C.P.A.M de Seine-et-Marne une somme de 1.000 € au titre des frais irrépétibles de procédure qu'elle a dû exposer en appel pour recouvrer son dû, considéré qu'au regard de la solution du litige, chacune des parties supportera les dépens par elle exposés tant en première instance qu'en appel, les frais du commandement, avant saisie-vente, étant partagés par moitié entre elles. Attendu que cette somme de 1.000 €, mise à la charge de la compagnie CHARTIS EUROPE, légèrement supérieure à celle de l'indemnité forfaitaire sollicitée pour contrepartie de frais d'obtention de remboursement, doit être affectée à ceux-ci, à peine de faire un double emploi, non pertinent. Attendu que la Cour n'aurait pas souhaité cette double indemnisation alors qu'elle a opposé à la Caisse qui le négligeait, le plafonnement de la garantie et ordonné la main levée partielle du commandement délivré par l'organisme social et qui lui était soumis. Attendu, en conséquence, que l'opposition à contrainte doit être déclarée recevable et fondée, la somme y figurant faisant double emploi avec le titre obtenu par la C.P.A.M. de Seine-et-Marne quant au versement, à son profit, par la compagnie CHARTIS EUROPE, de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile « au titre des frais irrépétibles de procédure qu'elle a dû exposer en appel pour recouvrer son dû ». Attendu pour autant qu'il ne serait pas équitable de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile à l'encontre de la C.P.A.M. de Seine-et-Marne alors que des multiples décisions judiciaires, en la cause, rendent excusable l'excès d'exigences indemnitaires de l'organisme social.
1. – ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que la société Chartis Europe soutenait exclusivement qu'elle s'était d'ores et déjà acquittée de toutes les sommes dont elle était redevable dans la limite de son plafond de garantie, de sorte qu'elle ne pouvait être condamnée à payer l'indemnité forfaitaire de gestion réclamée par la Caisse primaire d'assurance maladie de Seine et Marne ; qu'en affirmant que la somme de 941 euros réclamée au titre des frais de gestion n'était pas due car elle faisait double emploi avec la somme de 1.000 euros accordée à la caisse au titre des frais irrépétibles par l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 9 septembre 2010, le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2. – ALORS QUE le juge qui doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que la société Chartis Europe soutenait exclusivement qu'elle s'était d'ores et déjà acquittée de toutes les sommes dont elle était redevable dans la limite de son plafond de garantie, de sorte qu'elle ne pouvait être condamnée à payer l'indemnité forfaitaire de gestion réclamée par la Caisse primaire d'assurance maladie de Seine et Marne ; qu'en relevant d'office le moyen pris de ce que la somme de 941 euros réclamée au titre des frais de gestion n'était pas due car elle faisait double emploi avec la somme de 1.000 euros accordée à la caisse au titre des frais irrépétibles par l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 9 septembre 2010, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
3. – ALORS en tout état de cause QUE les dispositions respectives de l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale et de l'article 700 du code de procédure civile sont différentes dans leurs finalités et leurs modalités ; que les premières ont pour objet d'assurer l'équilibre financier de la branche maladie de la sécurité sociale et de faire prendre en charge les frais de gestion, en personnel et en matériel, des dossiers engagés par une caisse de sécurité sociale pour obtenir du tiers le remboursement des prestations que la caisse avait prises en charge alors que la responsabilité du tiers était engagée ; que les frais non compris dans les dépens, visés par l'article 700 du code de procédure civile, sont limités aux instances contentieuses et couvrent les seuls honoraires d'avocat ainsi que les frais de plaidoirie, de déplacement et d'huissier ; qu'il en résulte que le juge ne peut déduire de la somme allouée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, l'indemnité forfaitaire de gestion perçue par la caisse, pas plus qu'il ne peut imputer sur la somme allouée au titre des frais irrépétibles non compris dans les dépens l'indemnité forfaitaire de gestion ; qu'en affirmant que la somme de 1.000 euros allouée à la caisse primaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile par l'arrêt du 9 septembre 2010 faisait double emploi avec celle de 941 euros réclamée en vertu de l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale, si bien que les 1.000 euros alloués au titre des frais exposés non compris dans les dépens devaient être affectés à l'indemnité forfaitaire de gestion, le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé ensemble l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale et l'article 700 du code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-12808
Date de la décision : 12/04/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

FRAIS ET DEPENS - Frais non compris dans les dépens - Indemnité forfaitaire de gestion - Distinction - Portée

SECURITE SOCIALE, ASSURANCES SOCIALES - Tiers responsable - Recours des caisses - Indemnité forfaitaire de gestion - Frais non compris dans les dépens - Distinction - Portée

L'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code la sécurité sociale, diffère tant par ses finalités que par ses modalités d'application des frais exposés non compris dans les dépens de l'instance. Dès lors, viole les articles 9 de l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996 et L. 376-1 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 700 du code de procédure civile, le tribunal qui pour annuler la contrainte décernée par une caisse primaire d'assurance maladie afin d'obtenir le recouvrement de l'indemnité forfaitaire de gestion, énonce que cette indemnité fait double emploi avec la somme allouée à la caisse au titre de ses frais irrépétibles


Références :

article L. 376-1 du code la sécurité sociale

article 9 de l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996

article 700 du code de procédure civile

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Nanterre, 16 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 12 avr. 2012, pourvoi n°11-12808, Bull. civ. 2012, II, n° 73
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, II, n° 73

Composition du Tribunal
Président : M. Bizot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Rapporteur ?: Mme Touati
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.12808
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