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04/04/2012 | FRANCE | N°10-28266

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 avril 2012, 10-28266


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Cros et fils le 1er juin 1990 en qualité de VRP exclusif ; qu'elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 11 avril 2008 ; que contestant la régularité et le bien-fondé de son licenciement, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes à titre indemnitaire ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'un solde d'indemnité c

onventionnelle de licenciement, alors, selon le moyen, que les dispositions p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Cros et fils le 1er juin 1990 en qualité de VRP exclusif ; qu'elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 11 avril 2008 ; que contestant la régularité et le bien-fondé de son licenciement, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes à titre indemnitaire ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'un solde d'indemnité conventionnelle de licenciement, alors, selon le moyen, que les dispositions plus favorables de la convention collective normalement applicable à l'entreprise ne bénéficient pas aux VRP, sauf mention expresse ; que faute d'avoir relevé l'existence d'une telle mention dans la convention collective des papiers et cartons, la cour d'appel ne pouvait l'appliquer à Mme X... en sa qualité de VRP et a, ce faisant, violé les articles L. 7313-9 du code du travail, et le préambule, alinéa 3, de l'accord national interprofessionnel des voyageurs représentants placiers du 3 octobre 1975 ;
Mais attendu qu'en application de l'article L. 7313-17 du code du travail, lorsque l'employeur est assujetti à une convention collective applicable à l'entreprise, le VRP peut prétendre à une indemnité qui sera égale à celle à laquelle il aurait eu droit si, bénéficiant de la convention, il avait été licencié, dès lors que la convention collective applicable n'exclut pas les VRP de son champ d'application ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que la convention collective nationale de la distribution des papiers-cartons commerces de gros n'excluait pas les VRP de son champ d'application, en a exactement déduit que la salariée pouvait prétendre à l'indemnité de licenciement prévue par cette convention ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles L. 1235-1 et L. 1235-5 du code du travail ;
Attendu que le défaut de signature de la lettre de licenciement ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse mais constitue une irrégularité de la procédure de licenciement qui entraîne pour le salarié un préjudice que l'employeur doit réparer et qu'il appartient au juge d'évaluer ;
Attendu que pour dire que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'absence de signature de la lettre de licenciement par une personne ayant pouvoir et qualité pour licencier en tant qu'employeur s'analyse en une absence de lettre et donc de motifs opposables au salarié dont le licenciement est nécessairement sans cause réelle et sérieuse, la lettre devant comporter des éléments d'identification permettant notamment de vérifier qu'elle n'émane pas d'une personne étrangère à l'entreprise ; que la lettre de licenciement du 11 avril 2008 ne comporte aucun élément permettant d'identifier son auteur, aucune signature et que son caractère dactylographié ne permet pas de suppléer cette absence, ne serait-ce que par une vérification d'écritures ; que même si le seul défaut de signature manuscrite au bas de la lettre de licenciement peut également constituer une irrégularité formelle, il y a lieu de retenir, sans qu'il soit nécessaire de s'interroger sur le manquement de la société Cros et fils dans son obligation de reclassement, que le licenciement de la salariée est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il juge le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamne la société Cros et fils à payer à Mme X... la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 20 octobre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour la société Cros et fils
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société CROS et Fils à verser à Mme X... une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité de préavis et les congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE l'absence de signature de la lettre de licenciement par une personne ayant pouvoir et qualité pour licencier en tant qu'employeur s'analyse en une absence de lettre et donc de motifs opposables au salarié dont le licenciement est nécessairement sans cause réelle et sérieuse, la lettre devant comporter les éléments d'identification permettant, notamment, de vérifier qu'elle n'émane pas d'une personne étrangère à l'entreprise ; qu'en l'espèce le courrier de licenciement du 11 avril 2008 ne comporte aucun élément permettant d'identifier son auteur, aucune signature et son caractère dactylographié, ainsi que le relève justement Mme Roberte X..., ne permet pas de suppléer cette absence, ne seraitce que par une vérification et comparaison d'écritures ; que même si le seul défaut de signature manuscrite au bas de la lettre de licenciement peut également constituer une irrégularité formelle de la procédure de licenciement de nature à entraîner l'application des dispositions de l'article L. 1235-2 du Code du travail (anciennement L. 122-14-1 et L. 122-14-5) et sans qu'il soit utile en l'espèce de s'interroger sur le manquement de la société CROS ET FILS dans son obligation de reclassement, le licenciement de Mme Roberte X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que même si Mme Roberte X... possède une ancienneté de plus de deux ans et peut cumuler l'indemnité pour irrégularité de la procédure avec celle pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la société CROS ET FILS emploie habituellement moins de onze salariés ; qu'ainsi Mme Roberte X... peut prétendre à des indemnités correspondant aux préjudices subis ;
AUX MOTIFS éventuellement adoptés QU'en l'espèce, la lettre de licenciement indique que malgré l'avis d'inaptitude définitive au poste de travail et à tous postes dans l'entreprise, il lui a été proposé un poste de manutentionnaire, poste spécialement créé aux fins de reclasser la salariée ce qu'elle a refusé, que malgré l'avis négatif du médecin du travail sur ce reclassement, cette recherche a été effective et s'est avérée impossible compte tenu des emplois existants non disponibles ; que l'employeur ne justifie pas avoir tout mis en oeuvre pour reclasser la salariée ; qu'en effet il argue de la création d'un poste par ailleurs incompatible avec l'état de santé de cette dernière, pour justifier du respect de son obligation de reclassement ; que cependant, il convient de constater qu'il ne lui a pas proposé une création de poste compatible avec son état de santé voire une modification, une transformation ou aménagement de son poste de travail ; que l'employeur ne justifie pas donc avoir satisfait de façon loyale à son obligation de reclassement et le licenciement est de ce fait dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
ALORS QUE l'absence de signature de la lettre de licenciement est une irrégularité de forme qui ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse ; qu'en déclarant que l'absence de signature de la lettre de licenciement de Madame X... privait le licenciement de cause réelle et sérieuse quand il était constant que le licenciement avait été prononcé par cette lettre et que celle-ci était motivée, la Cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1232-1 et L. 1235-5 du Code du travail.
ALORS en tout cas QU'il résulte des constatations de l'arrêt que la société CROS et Fils a conclu a la validité du licenciement prononcé ce dont se déduit sa volonté claire et non équivoque de cette société de ratifier la mesure prise ; qu'en déduisant cependant du seul défaut de signature de la lettre que le licenciement était privé de cause, la Cour d'appel n'a pas tiré de cette constatation les conséquences qui s'en déduisaient au regard des articles L. 1232-6, L. 1232-1 et L. 1235-5 du Code du travail.
ALORS QUE dans le cadre de son obligation de reclassement, l'employeur n'est tenu de proposer que les emplois disponibles, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail, ou aménagement du temps de travail ; qu'il ne peut se voir imposer de créer un nouveau poste compatible avec l'état de santé du salarié devenu inapte ; que lorsque l'employeur allègue s'être trouvé dans l'impossibilité de reclasser le salarié devenu inapte, les juges du fond sont tenus de rechercher si cette preuve est rapportée ; qu'en se bornant à constater que le poste proposé à la salariée n'était pas compatible avec son état de santé et l'absence de création d'un poste compatible avec son état de santé, sans vérifier, comme ils y étaient invités, si l'employeur rapportait la preuve de cette impossibilité de reclassement, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société CROS et Fils à verser à Mme X... un complément d'indemnité conventionnelle de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE la société Cros et Fils est soumise aux dispositions de la convention collective des papiers et cartons (distribution et commerce de gros) et a calculé l'indemnité conventionnelle de licenciement sur la base de la convention collective applicable aux VRP ; que cependant lorsque l'employeur est assujetti à une convention collective applicable à l'entreprise, le VRP peut prétendre en tout état de cause à une indemnité qui sera égale à celle à laquelle il aurait eu droit si, bénéficiant de la convention, il avait été licencié, sauf l'hypothèse où les parties signataires de ladite convention qui en déterminent le champ d'application, excluent du bénéfice de ses dispositions les VRP ; que dès lors la société Cros et Fils ne peut utilement prétendre qu'en sa qualité de VRP Mme Roberte X... est exclu du bénéfice de la convention collective des papiers et cartons dans la mesure où aucune disposition expresse n'inclut les VRP dans son champ d'application ; que contrairement à ce qu'indiqué le premier juge l'article 1er de la convention collective nationale pour le personnel des industries de cartonnage qui ne portent que sur les intentions de la fédération française du cartonnage et des syndicats de salariés signataires d'établir des rapports de bonne entente et de parfaite loyauté entre tous les membres de la profession et ainsi d'harmoniser les règles générales du travail dans les entreprises de cartonnages n'excluent pas les VRP de son champ d'application ; que seul l'article 2 a pour objet de déterminer le champ d'application et est ainsi rédigé : « la présente convention conclue en application des chapitres 1er et II du titre III du livre 1er du code du travail est applicable à l'ensemble du territoire national, elle ne fait pas obstacle aux droits spécifiques de certaines régions administratives et/ ou aux usages locaux, elle règle les conditions générales des rapports entre employeurs et salariés, y compris les salariés à domicile employés dans les entreprises de fabrication de cartonnages entrant dans son champ d'application, elle s'applique également au personnel ne relevant pas directement de l'industrie du cartonnage, mais travaillant dans les entreprises liées par la présente convention, toutefois, en ce qui concerne les salariés dont l'emploi dans l'entreprise relève d'une autre industrie, leur classification et leurs rémunérations (salaires et primes) ne pourront en aucun cas être inférieures à celles dudit emploi dans cette autre industrie et cette convention s'appliquera aux ouvriers, employés, agents de maîtrise et cadres des deux sexes dont l'activité s'exerce dans les industries de la transformation du carton énumérées ci-après par référence à la nomenclature d'activité française (NAF) constituée par le décret n° 921-29 du 2 octobre 1992 et entrée en vigueur au 1er janvier 1993 ; que ces éléments caractérisent qu'aucune disposition n'exclut les VRP du champ d'application de la convention collective dont relève la société Cros et Fils et Mme Roberte X... est fondée à en solliciter l'application à son bénéfice pour le bénéfice de l'indemnité conventionnelle de licenciement ;
ALORS QUE les dispositions plus favorables de la convention collective normalement applicable à l'entreprise ne bénéficie pas aux VRP, sauf mention expresse ; que faute d'avoir relevé l'existence d'une telle mention dans la convention collective des papiers et cartons, la Cour d'appel ne pouvait l'appliquer à Madame X... en sa qualité de VRP et a, ce faisant, violé les articles L. 7313-9 du Code du travail, et le préambule, alinéa 3, de l'accord national interprofessionnel des voyageurs représentants placiers du 3 octobre 1975.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-28266
Date de la décision : 04/04/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel de Montpellier, 20 octobre 2010, 10/01291

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 20 octobre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 avr. 2012, pourvoi n°10-28266


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.28266
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