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29/03/2012 | FRANCE | N°11-14106

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 29 mars 2012, 11-14106


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été victime de violences volontaires dont M. Y..., un des coauteurs, a été reconnu coupable par jugement du 10 mai 2004 d'un tribunal correctionnel ; que Mme X... a parallèlement saisi une commission d'indemnisation des victimes d'infraction (CIVI) qui, par décision du 24 janvier 2005, a condamné le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (FGTI) à verser à la victime la somme de 16 476, 04 euros en réparation du prÃ

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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été victime de violences volontaires dont M. Y..., un des coauteurs, a été reconnu coupable par jugement du 10 mai 2004 d'un tribunal correctionnel ; que Mme X... a parallèlement saisi une commission d'indemnisation des victimes d'infraction (CIVI) qui, par décision du 24 janvier 2005, a condamné le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (FGTI) à verser à la victime la somme de 16 476, 04 euros en réparation du préjudice subi ; que par jugement du 7 février 2005 rendu sur l'opposition formée par M. Y..., un tribunal correctionnel a déclaré de nouveau ce dernier coupable des faits de violences volontaires et a renvoyé l'examen du dossier sur les intérêts civils ; que par jugement du 22 juin 2006, ce tribunal a constaté le désistement de Mme X... de son action civile et déclaré irrecevable comme tardive la constitution de partie civile du FGTI qui a alors assigné M. Y... devant un tribunal de grande instance, sur le fondement de l'article 706-11 du code de procédure pénale, en remboursement des sommes versées à la victime ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche ;

Vu les articles 455, alinéa 1er, et 954, alinéa 2, du code de procédure civile ;

Attendu que s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date ;

Attendu que pour rejeter les demandes du FGTI, la cour d'appel s'est prononcée au visa des conclusions qu'il avait déposées le 5 août 2010 ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas visé, avec indication de leur date, les dernières conclusions déposées et signifiées le 30 novembre 2010 par le FGTI ni exposé succinctement dans sa motivation, les moyens figurant dans ces conclusions, a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique, pris en ses trois autres branches ;

Vu l'article 706-11 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que le recours subrogatoire que le FGTI exerce contre l'auteur de l'infraction, déclaré responsable par une juridiction du dommage causé à la victime des faits, n'est pas subordonné à l'intervention préalable d'une décision de justice statuant sur le préjudice de cette victime et opposable à l'auteur de l'infraction ; que ni le désistement de son action civile par la victime ni l'irrecevabilité comme tardive de la constitution de partie civile du FGTI devant la juridiction répressive ne font obstacle à son recours subrogatoire devant les juridictions civiles ;

Attendu que pour débouter le FGTI de sa demande de condamnation de M. Y... à lui payer la somme réglée à Mme X... en réparation de son préjudice, l'arrêt énonce que le jugement du tribunal correctionnel du 10 mai 2004 a été mis à néant par celui du 7 février 2005, rendu sur opposition et déclarant M. Y... coupable et solidairement responsable des violences commises tout en renvoyant à l'audience du 26 mai 2005 pour la liquidation du préjudice de la victime ; qu'à cette date, le tribunal a constaté le désistement de Mme X... et déclaré irrecevable le FGTI en sa constitution de partie civile, dès lors que cette constitution était postérieure aux réquisitions du ministère public sur le fond ; que le FGTI, quand bien même il établit avoir réglé les indemnités allouées à la victime, ne dispose d'aucune voie pour exercer son recours subrogatoire à l'encontre de M. Y..., dès lors que celui-ci n'a pas été reconnu, par une décision judiciaire qui lui soit opposable, responsable des dommages causés à Mme X... ou tenu à un titre quelconque d'en assurer la réparation ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d ‘ appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 janvier 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer au Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils pour le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions.

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté le Fonds de garantie de sa demande de condamnation de M. Y... à lui payer la somme de 16 917, 04 euros réglée à Mlle X... ;

Aux motifs que « l'article 706-11 du code de procédure pénale dispose que le Fonds est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir des personnes responsables du dommage causé par l'infraction ou tenues à un titre quelconque d'en assurer la réparation totale ou partielle le remboursement de l'indemnité qu'il a versée dans la limite du montant des réparations à la charge desdites personnes ; que le jugement rendu le 10 mai 2004 ayant déclaré Monsieur Fred Y... coupable et solidairement responsable des violences commises sur la personne de Madame X... a été mis à néant par le jugement en date du 7 février 2005 qui a déclaré recevable l'opposition formée par Monsieur Fred Y... et qui l'a déclaré coupable pénalement d'avoir commis les faits de violence tout en renvoyant à l'audience du 26 mai 2005 pour la liquidation du préjudice de Madame Mélanie X... et afin que la C. P. A. M. soit convoquée à cette audience et qu'elle puisse chiffrer son préjudice ; qu'à l'audience du 26 mai 2005, le tribunal a constaté le désistement présumé de Madame Mélanie X... et déclaré irrecevable le Fonds de Garantie en sa constitution de partie civile dès lors que cette constitution était postérieure aux réquisitions du Ministère Public sur le fond puisque le Fonds de Garantie ne s'était pas constitué partie civile lors de l'audience pénale ; que le Fonds de Garantie, quand bien même il établit avoir réglé les indemnités allouées à la victime, ne dispose d'aucune voie pour exercer son recours subrogatoire à l'encontre de Monsieur Fred Y... dès lors que celui-ci n'a pas été reconnu, par une décision judiciaire qui lui soit opposable, responsable des dommages causés à Madame Mélanie X... ou tenu à un titre quelconque d'en assurer la réparation ; qu'en conséquence et par motifs substitués, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions » ;

Alors, d'une part, que la cour d'appel ne peut statuer que sur les dernières conclusions régulièrement déposées et signifiées par les parties ; qu'en statuant au regard des conclusions déposées par le Fonds de garantie le 5 août 2010 cependant que celui-ci avait régulièrement déposé et fait signifier de nouvelles conclusions le 30 novembre 2010, la cour d'appel a violé l'article 954, alinéa 2 du code de procédure civile ;

Alors, d'autre part, que le recours subrogatoire que le Fonds de garantie exerce contre le responsable, qui est l'occasion pour celui-ci de discuter de l'existence et de l'étendue de son obligation à l'égard de la victime subrogeante, n'est pas subordonné à l'intervention préalable d'une décision de justice ayant statué sur le préjudice de la victime et opposable à ce responsable ; qu'en déboutant néanmoins le Fonds de garantie de son recours subrogatoire à l'encontre de M. Y... au motif que celui-ci n'a pas été reconnu, par une décision judiciaire qui lui soit opposable, responsable des dommages causés à Mlle X... ou tenu à un titre quelconque d'en assurer la réparation, la cour d'appel a violé l'article 706-11 du code de procédure pénale ;

Alors, par ailleurs, que le désistement de partie civile ne met pas obstacle à l'action civile devant la juridiction compétente ; qu'en conséquence, la circonstance que la victime qui s'était constituée partie civile se soit ultérieurement désistée de son action civile ne fait pas obstacle au recours subrogatoire exercé devant les juridictions civiles par le Fonds de garantie, subrogé dans les droits de la victime ; qu'à supposer que l'arrêt puisse être lu comme opposant au Fonds de garantie, pour le débouter de son recours subrogatoire, le désistement de Mlle X... de son action civile, en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles 426 et 706-11 du code de procédure pénale ;

Alors, enfin, que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ; que l'autorité de la chose jugée attachée à la décision ayant déclaré irrecevable la constitution de partie civile du Fonds de garantie comme tardive ne fait pas obstacle à ce que celui-ci exerce son recours subrogatoire contre l'auteur d'une infraction devant les juridictions civiles ; qu'à supposer que l'arrêt puisse être lu comme opposant au Fonds de garantie, pour le débouter de son recours subrogatoire, l'irrecevabilité de sa constitution de partie civile en raison de sa tardiveté constatée par le tribunal correctionnel, la cour d'appel a alors violé les articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-14106
Date de la décision : 29/03/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

FONDS DE GARANTIE - Actes de terrorisme et d'autres infractions - Recours subrogatoire - Recours contre l'auteur de l'infraction - Conditions - Intervention préalable d'une décision de justice statuant sur le préjudice de la victime et opposable à l'auteur de l'infraction (non)

FONDS DE GARANTIE - Actes de terrorisme et d'autres infractions - Recours subrogatoire - Recours contre l'auteur de l'infraction - Désistement de son action civile par la victime - Absence d'influence FONDS DE GARANTIE - Actes de terrorisme et d'autres infractions - Recours subrogatoire - Recours contre l'auteur de l'infraction - Irrecevabilité comme tardive de la constitution de partie civile du FGTI devant la juridiction répressive - Absence d'influence

Il résulte de l'article 706-11 du code de procédure pénale que le recours subrogatoire que le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (FGTI) exerce contre l'auteur de l'infraction, déclaré par une juridiction responsable du dommage causé à la victime des faits, n'est pas subordonné à l'intervention préalable d'une décision de justice statuant sur le préjudice de cette victime et opposable à l'auteur de l'infraction ; que ni le désistement de son action civile par la victime ni l'irrecevabilité comme tardive de la constitution de partie civile du FGTI devant la juridiction répressive ne font obstacle à son recours subrogatoire devant les juridictions civiles


Références :

article 706-11 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 19 janvier 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 29 mar. 2012, pourvoi n°11-14106, Bull. civ. 2012, II, n° 64
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, II, n° 64

Composition du Tribunal
Président : M. Bizot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Lautru
Rapporteur ?: Mme Bouvier
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 06/12/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.14106
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