LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 décembre 2010) et les productions, que M. Z..., qui avait donné à bail à M. et Mme X... un appartement situé à Toulon, le contrat indiquant que les lieux seraient occupés à titre d'habitation secondaire et contenant une clause qualifiée d'élection de domicile selon laquelle les parties signataires élisaient domicile, le bailleur en sa demeure et le locataire dans les lieux loués, a fait signifier, par actes délivrés à Paris le 20 mars 1998, à Mme X... en personne et à M. X... à domicile, une ordonnance de référé réputée contradictoire du 25 février 1998 constatant la résolution du contrat de bail et ordonnant l'expulsion de ceux-ci ; que M. X... a fait assigner M. Z... devant un juge de l'exécution afin de faire constater que l'ordonnance de référé ne lui avait pas été valablement signifiée dans le délai de six mois à compter de sa date et qu'elle était en conséquence non avenue à son égard ; que M. Z... a fait établir le 2 septembre 2009 un procès-verbal d'expulsion, contenant assignation devant un juge de l'exécution, qui a ordonné la jonction des deux procédures ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes et d'ordonner la vente aux enchères publiques des biens et objets mobiliers décrits dans l'inventaire annexé au procès-verbal d'expulsion, alors, selon le moyen :
1°/ que l'anéantissement du contrat par le fait de sa résolution n'affecte pas les clauses qui sont prévues pour régler, le cas échéant, les effets de cette résolution ; qu'en estimant que la signification de l'ordonnance de référé du 25 février 1998, effectuée à Paris, était régulière, dès lors que « la clause d'élection de domicile incluse dans un contrat de bail dont la résiliation a été judiciairement constatée ne peut plus être invoquée » quand cette clause avait notamment vocation à être mise en oeuvre pour régler les effets de la résiliation du bail, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que les décisions de justice sont opposables aux parties par la notification régulière qui leur en est faite ; qu'en estimant que « la clause d'élection de domicile incluse dans un contrat de bail dont la résiliation a été judiciairement constatée ne peut plus être invoquée » quand cette résiliation, décidée par l'ordonnance de référé du 25 février 1998, n'était pas opposable à M. X... tant qu'une signification régulière de cette décision de justice n'était pas intervenue, ce qui impliquait que soit mise en oeuvre la clause d'élection de domicile stipulée dans le contrat de bail, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et 651 du code de procédure civile ;
3°/ que lorsque l'élection de domicile a été stipulée dans l'intérêt d'une partie, ou dans l'intérêt commun des parties, les significations et poursuites relatives à l'acte doivent être faites au domicile élu ; qu'en estimant que la signification de l'ordonnance de référé du 25 février 1998 avait été régulièrement effectuée à Paris, au motif que le domicile élu de Toulon constituait une résidence secondaire pour les locataires, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si l'élection de domicile avait été stipulée dans l'intérêt de M. X..., s'est déterminée par une motivation inopérante et a privé sa décision de base légale au regard des articles 654, 655 et 689 du code de procédure civile et de l'article 111 du code civil ;
4°/ que la signification à personne étant la règle, l'huissier de justice doit procéder à toutes les recherches démontrant qu'une telle signification était impossible ; qu'en estimant que la signification délivrée ...(16e) était régulière, bien que M. X... ait été absent à ce domicile et que l'acte ait été délivré à son épouse, tout en relevant qu'un précédent commandement de payer avait été délivré avec succès au domicile professionnel de M. X..., situé rue Crevaux à Paris, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'existence de diligences suffisantes de l'huissier de justice en vue de délivrer une signification à personne, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 655 du code de procédure civile ;
Mais attendu que les effets de l'élection de domicile prévue à l'article 111 du code civil ne s'étendent pas à la signification des jugements ou ordonnances rendus pour l'exécution de la convention ;
Et attendu qu'ayant relevé que l'acte avait été délivré à l'épouse de M. X..., en l'absence de celui-ci, qui ne justifiait pas disposer d'un domicile professionnel, en leur domicile dont l'adresse correspondait à celle indiquée sur sa carte de visite transmise à son ancien bailleur au mois de janvier 1998 avec la mention indiquant qu'il s'agissait de sa nouvelle adresse et que ce dernier lui y avait expédié une lettre parvenue à son destinataire, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Et attendu que le second moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Attendu enfin que le pourvoi revêt un caractère abusif ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Condamne M. X... à une amende civile de 2 000 euros envers le Trésor public ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Bertrand, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé « que l'ordonnance de référé ordonnant l'expulsion, rendue le 25 février 1998, n'a pas été valablement signifiée à Monsieur Pierre X... dans le délai de six mois de sa date et, vu l'article 478 du Code de procédure civile, qu'elle est en conséquence non avenue à son égard » et ordonné la vente aux enchères publiques des biens et objets mobiliers décrits dans l'inventaire annexé au procès-verbal d'expulsion dressé le 2 septembre 2008 ;
AUX MOTIFS QUE le caractère non avenu d'une décision n'ayant pas été notifiée dans les six mois de sa date, prévu par l'article 478 du Code de procédure civile, n'est acquis qu'en l'absence d'une signification régulière ; que la clause d'élection de domicile incluse dans un contrat de bail dont la résiliation a été judiciairement constatée ne peut plus être invoquée ; qu'il convient d'observer que la convention de location précise que le bien loué sis à TOULON constitue pour les preneurs une résidence secondaire ; qu'il en résulte que les actes postérieurs devaient être signifiés au domicile des époux X... ; qu'aux termes de l'article 655 du Code de procédure civile, si la signification à personne s'avère impossible, un acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence ; qu'il ajoute que la copie peut être remise à toute personne présente, à condition qu'elle l'accepte ; que le second alinéa de l'article 655, selon lequel l'huissier de justice doit relater dans l'acte des diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne du destinataire les circonstances caractérisant l'impossibilité d'y procéder, issu du décret du 28 décembre 2005, n'est applicable que depuis le 1er mars 2006 ; que l'acte de signification du 20 mars 1998 a été délivré ...75116 à PARIS pour le compte de Monsieur Pierre X... et en raison de son absence, à Madame Catherine Y..., son épouse, dont il ne prétend pas être séparé, ni divorcé et qui a déclaré accepter de le recevoir ; que l'appelant ne conteste pas le fait que cette adresse, figurant sur des cartes de visite qu'il a transmises à son ancien bailleur au mois de janvier 1998 avec la mention : « nouvelle adresse » et à laquelle il ne conteste pas avoir reçu le courrier adressé par ce dernier le 20 janvier 1998, portant accusé de réception d'un chèque de 25. 000 francs, constitue son domicile, dès lors qu'il indique que le commandement avait été délivré à sa personne sur son lieu de travail ; que Monsieur Pierre X... n'apporte pas la preuve qui lui incombe que son domicile se trouvait en un autre lieu ou qu'il disposait encore de son domicile professionnel rue Crevaux à PARIS où avait été signifié le commandement du 17 novembre 1997, à la date de la signification litigieuse ; que la mention par l'huissier de justice de l'envoi de la lettre prévue par l'article 658 du Code de procédure civile fait foi jusqu'à inscription de faux et que la production de celle-ci n'est pas exigée pour la validité de l'acte ; que l'appelant ne justifie pas avoir diligenté une procédure en ce sens ; que cette signification est régulière et l'ordonnance de référé rendue le 25 février 1998 ne peut être déclarée non avenue de ce chef (arrêt attaqué pp. 6-7) ;
ALORS, d'une part, QUE l'anéantissement du contrat par le fait de sa résolution n'affecte pas les clauses qui sont prévues pour régler, le cas échéant, les effets de cette résolution ; qu'en estimant que la signification de l'ordonnance de référé du 25 février 1998, effectuée à PARIS, était régulière, dès lors que « la clause d'élection de domicile incluse dans un contrat de bail dont la résiliation a été judiciairement constatée ne peut plus être invoquée » quand cette clause avait notamment vocation à être mise en oeuvre pour régler les effets de la résiliation du bail, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
ALORS, d'autre part, QUE les décisions de justice sont opposables aux parties par la notification régulière qui leur en est faite ; qu'en estimant que « la clause d'élection de domicile incluse dans un contrat de bail dont la résiliation a été judiciairement constatée ne peut plus être invoquée » quand cette résiliation, décidée par l'ordonnance de référé du 25 février 1998, n'était pas opposable à Monsieur X... tant qu'une signification régulière de cette décision de justice n'était pas intervenue, ce qui impliquait que soit mise en oeuvre la clause d'élection de domicile stipulée dans le contrat de bail, la cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et 651 du Code de Procédure civile ;
ALORS, de troisième part, QUE lorsque l'élection de domicile a été stipulée dans l'intérêt d'une partie, ou dans l'intérêt commun des parties, les significations et poursuites relatives à l'acte doivent être faites au domicile élu ; qu'en estimant que la signification de l'ordonnance de référé du 25 février 1998 avait été régulièrement effectuée à PARIS, au motif que le domicile élu de TOULON constituait une résidence secondaire pour les locataires, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si l'élection de domicile avait été stipulée dans l'intérêt de Monsieur X..., s'est déterminée par une motivation inopérante et a privé sa décision de base légale au regard des articles 654, 655 et 689 du Code de procédure civile et de l'article 111 du Code civil ;
ALORS, enfin, QUE la signification à personne étant la règle, l'huissier doit procéder à toutes les recherches démontrant qu'une telle signification était impossible ; qu'en estimant que la signification délivrée ...(16ème) était régulière, bien que Monsieur X... ait été absent à ce domicile et que l'acte ait été délivré à son épouse, tout en relevant qu'un précédent commandement de payer avait été délivré avec succès au domicile professionnel de Monsieur X..., situé rue Crevaux à PARIS, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'existence de diligences suffisantes de l'huissier en vue de délivrer une signification à personne, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 655 du Code de Procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande tendant à l'annulation du procès-verbal d'expulsion du 2 septembre 2008 et ordonné la vente aux enchères publiques des biens et objets mobiliers décrits dans l'inventaire annexé au procès-verbal d'expulsion dressé le 2 septembre 2008 ;
AUX MOTIFS QU'il convient de constater que le procès-verbal d'expulsion dressé le 2 septembre 2008 ne précise par si les biens inventoriés ont ou non une valeur marchande comme le prévoit à peine de nullité, l'article 201 du décret du 31 juillet 1992 ; qu'il résulte de l'article 114 du Code de procédure civile que l'irrégularité liée aux carences susvisées constitue un vice de forme ne pouvant entraîner la nullité de l'acte qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver l'existence d'un grief ; qu'en l'espèce, Monsieur Pierre X... ne conteste pas le fait que les parties sont tombées d'accord, dans le cadre d'une procédure de diligentée devant le président du Tribunal de grande instance de TOULON, pour que les meubles transportés à l'hôtel des ventes le 1er juillet 2009, soient transférés chez un garde-meuble et conservés, aux frais des anciens locataires ; qu'ils ne peuvent donc invoquer aucun grief de ce chef ; que dans ces conditions, il n'y a pas lieu d'annuler le procès-verbal d'expulsion du 2 septembre 2008, ni d'ordonner la réintégration dans les lieux de Monsieur X..., ce, sous astreinte (arrêt attaqué p. 7 al. 8 à 12) ;
ALORS QUE si, à la suite d'une mesure d'expulsion, des biens ont été laissés sur place ou déposés par l'huissier de justice en un lieu approprié, le procès-verbal d'expulsion contient notamment, à peine de nullité, l'inventaire de ces biens avec l'indication qu'ils paraissent avoir ou non une valeur marchande ; qu'en déboutant Monsieur X... de sa demande tendant à l'annulation du procès-verbal d'expulsion dressé le 2 septembre 2008, tout en constatant que cet acte ne précisait pas si les biens inventoriés avaient ou non une valeur marchande, d'où il résultait nécessairement l'existence d'un grief pour la personne expulsée, qui se trouvait privée de la garantie procurée par cette règle de forme, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 201 du décret du 31 juillet 1992 et l'article 114 du Code de Procédure civile.