LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 5 octobre 2010) et les productions, que M. X..., qui était directeur salarié de la Mutuelle d'assurances de l'éducation (la MAE), a été licencié le 9 novembre 2004 ; qu'après son départ, il a continué à être sociétaire de la MAE ; que cette dernière a convoqué les délégués des sociétaires à une première assemblée générale d'approbation des comptes de l'année 2004-2005 qui s'est tenue le 22 février 2006 ; que les commissaires aux comptes n'ayant pu certifier les comptes en temps utile, la MAE a convoqué les délégués à une seconde assemblée générale qui s'est réunie le 21 juin 2006 ; qu'invoquant diverses irrégularités relatives à la communication des documents, aux délais de convocation et à la tenue des deux assemblées générales, M. X... a assigné la MAE en annulation de ces deux assemblées et a attrait à l'instance la MAE de la Seine-Maritime ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande d'annulation des assemblées générales des 22 février et 21 juin 2006, alors, selon le moyen :
1°/ que les formalités liées à la convocation, à la consultation des documents et à la tenue des assemblées générales des sociétaires des sociétés d'assurance mutuelles sont prescrites à peine de nullité ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a énoncé le contraire, a violé l'article R. 322-90 du code des assurances ;
2°/ que tout sociétaire peut, dans les quinze jours qui précèdent la réunion d'une assemblée générale, prendre communication de tous les documents qui doivent être présentés ou communiqués à l'assemblée générale des sociétaires ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a estimé que la communication des documents au sociétaire ne s'étendait pas au droit, pour M. X..., d'en obtenir une copie, ce dont il était résulté que le sociétaire n'avait pu comprendre et analyser les documents comptables de la MAE et donc n'avait pas été mis en mesure de formuler des observations auprès des délégués composant l'assemblée générale d'approbation des comptes, a violé l'article R. 322-61 du code des assurances ;
3°/ que tout sociétaire doit pouvoir obtenir communication des documents comptables complets d'une société d'assurance mutuelle ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a écarté le grief soulevé par M. X... et tiré de ce que les documents qui lui avaient été communiqués, relativement aux comptes annuels de la MAE, étaient incomplets, au prétexte qu'il s'agissait d'une question de fond qui devait être débattue à l'assemblée générale du 22 février 2006, a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 322-61 du code des assurances ;
4°/ que le droit de tout sociétaire d'une société d'assurance mutuelle de prendre communication de tous les documents qui doivent être présentés à la prochaine assemblée générale, constitue une formalité substantielle qui ne peut être régularisée par la tenue d'une assemblée ultérieure ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a écarté le grief de M. X..., tiré de ce que tous les documents prescrits par la loi ne lui avaient pas été communiqués, aux simples motifs qu'une véritable "masse de documents" lui avaient été communiquée et qu'en tout état de cause, une nouvelle assemblée avait été convoquée le 21 juin 2006 pour approuver les documents qui n'avaient pas été établis en février, a violé l'article R. 322-61 du code des assurances ;
5°/ que tout sociétaire doit pouvoir connaître, antérieurement à la tenue de l'assemblée générale d'une société d'assurance mutuelle, les noms des délégués des sociétaires qui peuvent prendre part à l'assemblée générale ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a écarté le grief de M.Wargnier, tiré de ce qu'il n'avait pu obtenir la communication des noms des délégués des sociétaires pouvant prendre part à l'assemblée générale du 22 février 2006, au prétexte que l'appelant, qui avait été directeur salarié de la MAE jusqu'au mois de novembre 2004, ne rapportait pas la preuve de l'absence de préjudice résultant d'un tel défaut de communication, quand M. X... avait été ainsi privé, faute de connaître le nom de son délégué, de la possibilité de présenter ses observations sur les points figurant à l'ordre du jour et donc d'influer sur la marche de la société, a violé l'article R. 322-58 du code des assurances ;
6°/ que la convocation à l'assemblée générale des sociétaires d'une société d'assurance mutuelle doit précéder d'au moins quinze jours la réunion ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui, après avoir constaté que ce délai de quinze jours n'avait pas été respecté concernant les assemblées générales des 22 février et 21 juin 2006, a estimé ensuite qu'il ne s'agissait pas d'une irrégularité substantielle et qu'en tout état de cause, aucun préjudice n'en était résulté, alors que les sociétaires et leurs délégués avaient été privés du délai minimum légal pour consulter les documents devant être soumis à l'assemblée, et notamment les pièces comptables, a violé l'article R. 322-59 du code des assurances ;
7°/ que l'assemblée générale des actionnaires ne peut délibérer que sur les points régulièrement inscrits à l'ordre du jour, lequel doit être suffisamment précis pour que les sociétaires ne puissent se méprendre sur la portée des questions mises à l'ordre du jour ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a estimé que l'irrégularité de l'ordre du jour de l'assemblée du 22 février 2006 avait été couverte par la tenue d'une assemblée subséquente le 21 juin suivant et que l'ordre du jour de celle-ci -pourtant conçu en termes trop généraux- était suffisamment précis, a violé les articles R. 322-57 et R. 322-59 du code des assurances ;
8°/ que la preuve de la composition régulière de l'assemblée générale des sociétaires d'une société d'assurance mutuelle, incombe à celle-ci ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a estimé que cette preuve pesait sur M. X..., et non sur la MAE, a renversé la charge de la preuve, en violation des articles 1315 du code civil et R. 322-58 du code des assurances ;
Mais attendu, en premier lieu, que la nullité édictée par l'article R. 322-90 du code des assurances sanctionne uniquement l'inobservation des règles relatives à la constitution des sociétés d'assurance mutuelles ; qu'ayant retenu, par motifs propres et adoptés, qu'aucune disposition ne sanctionnait par la nullité l'inobservation des formalités liées à la convocation et à la tenue des assemblées générales ainsi qu'à la communication des documents aux sociétaires, la cour d'appel en a déduit à bon droit que ces formalités ne sont prescrites à peine de nullité qu'en cas de grief ;
Attendu, en second lieu, que l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que M. X... a pu consulter au siège social l'ensemble des documents qui devaient être présentés à l'assemblée générale du 22 février 2006 ; qu'il constate qu'une nouvelle assemblée générale s'est tenue le 21 juin 2006, avec pour ordre du jour l'approbation des comptes qui n'avaient pas été établis en février 2006; qu'il relève que M. X..., qui était directeur salarié de la MAE jusqu'en novembre 2004, savait parfaitement à quel délégué s'adresser pour faire connaître ses observations ; qu'il relève encore que le léger retard dans la convocation des membres des assemblées n'était pas de nature à entraver leur participation ; que de ces constatations et appréciations souveraines, la cour d'appel a pu déduire, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la troisième branche, et sans encourir le grief de la huitième branche, que la preuve d'un préjudice résultant des irrégularités alléguées n'était pas rapportée ;
D'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la MAE et à la MAE de la Seine-Maritime la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le conseiller doyen qui en a délibéré, en remplacement du président, à l'audience publique du vingt mars deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils pour M. X...
PRIS DE CE QUE l'arrêt attaqué a débouté un sociétaire (monsieur Marc X...) de ses demandes en annulation des assemblées générales des 22 février et 21 juin 2006, tenues par une mutuelle (la MAE),
- AUX MOTIFS QUE la cour constatait qu'aucune nullité textuelle ne sanctionnait ces prescriptions conventionnelles, législatives ou réglementaires, seul l'article R 322-91 évoquant les nullités des assemblées générales des sociétés d'assurance mutuelle sans les définir ; que la reprise dans les statuts des dispositions législatives ou réglementaires ne saurait, faute de précision statutaire particulière, leur conférer une valeur supérieure ; qu'il convenait, dès lors, d'examiner concrètement la nature des nullités invoquées par l'appelant et les griefs qui auraient résulté de leur inobservation éventuelle ; que, sur la nullité de l'assemblée générale ordinaire du 22 février 2006 pour non respect de son droit de communication, monsieur X... invoquait, aux termes de ses dernières écritures : la non-délivrance de copies des documents qu'il avait consultés ; que, cependant, dès lors qu'il reconnaissait lui-même les avoir consultés, aucun préjudice ne pouvait en être résulté, à supposer que la délivrance de copies soit prescrite, ce qui n'était pas le cas, les textes statutaires et l'article R 322-61 évoquant une simple communication, laquelle pouvait avoir lieu sur place ; qu'il avait aussi invoqué la non-fiabilité des documents qui lui avaient été présentés ; que cette question de fond ne saurait cependant constituer une cause de nullité, dès lors qu'elle était de celles qui devaient être débattues lors de l'assemblée générale ; qu'il invoquait aussi le défaut de présentation de documents réglementaires relatifs à l'assemblée générale ; que leur liste résultait du constat établi par huissier le 15 février 2006 ; que, cependant, la communication de ces documents n'était pas prescrite à peine de nullité ; que les observations de monsieur X... ne sauraient entraîner l'annulation demandée, compte tenu de la masse des documents qui lui avaient été communiqués, notamment les comptes de résultat et le bilan au 31 août 2005 ; qu'au demeurant, une nouvelle assemblée avait été convoquée pour le 21 juin 2006 pour approuver les documents qui n'avaient pas été établis en février, cette régularisation couvrant toute nullité pouvant résulter du défaut des documents évoqués lors de l'assemblée générale de février 2006 ; que, sur la non6 communication de la liste des membres pouvant prendre part à l'assemblée générale, l'appelant, qui avait été directeur salarié de la MAE jusqu'en novembre 2004, n'établissait pas l'existence d'un préjudice pouvant résulter de cette absence ; que, sur la nullité de l'assemblée générale du 22 février 2006, pour convocation des deux assemblées générales de la MAE et de la MAE de la Seine-Maritime aux mêmes date et heure, la même date de convocation ne prouvait pas que les deux assemblées générales ne s'étaient pas tenues successivement ni qu'il y avait eu une confusion effective sur l'objet des assemblées ; que l'utilité d'une convocation étant de s'assurer de la présence des intéressés, monsieur X... ne rapportait pas la preuve du grief qui serait résulté de cette convocation aux mêmes date, lieu et heure ; que, sur la nullité des assemblées générales des 22 février et 21 juin 2006 pour non-respect du délai de convocation, des dispositions concernant l'ordre du jour et pour irrégularité dans leur composition, il était constant qu'un délai de 14 jours s'était écoulé entre la date de publication des convocations aux assemblées générales et leur tenue, au lieu des 15 jours requis par l'article R 322-59 du code des assurances ; qu'il ne s'agissait néanmoins d'une irrégularité, ni substantielle, ni de fond ; qu'aucun préjudice n'était résulté du non-respect du délai, sa diminution n'étant pas, vue sa faible importance, de nature à avoir entravé la participation des délégués ou des adhérents des deux sociétés mutuelles ; que, sur les moyens tirés de l'imprécision de l'ordre du jour de l'assemblée du 21 juin 2006 et des conditions de désignation de certains délégués, monsieur X... ne rapportait pas la preuve de ce qu'il avançait sur ce dernier point ; que, quant à l'ordre du jour, il devait être analysé comme résultant de la convocation complémentaire d'une seconde assemblée générale ordinaire et extraordinaire en juin 2006, due au retard dans l'établissement de certains documents pour l'assemblée générale de février ; que, quoiqu'il en soit, l'appelant ne rapportait pas la preuve du préjudice qui en était résulté, 1°) ALORS QUE les formalités liées à la convocation, à la consultation des documents et à la tenue des assemblées générales des sociétaires des sociétés d'assurance mutuelles sont prescrites à peine de nullité ; qu'en l'espèce, la cour, qui a énoncé le contraire, a violé l'article R 322-90 du code des assurances.
2°) ALORS QUE tout sociétaire peut, dans les quinze jours qui précèdent la réunion d'une assemblée générale, prendre communication de tous les documents qui doivent être présentés ou communiqués à l'assemblée générale des sociétaires ; qu'en l'espèce, la cour, qui a estimé que la communication des documents au sociétaire ne s'étendait pas au droit, pour monsieur X..., d'en obtenir une copie, ce dont il était résulté que le sociétaire n'avait pu comprendre et analyser les documents comptables de la MAE et donc n'avait pas été mis en mesure de formuler des observations auprès des délégués composant l'assemblée générale d'approbation des comptes, a violé l'article R 322-61 du code des assurances.
3°) ALORS QUE tout sociétaire doit pouvoir obtenir communication des documents comptables complets d'une société d'assurance mutuelle ; qu'en l'espèce, la cour, qui a écarté le grief soulevé par monsieur X... et tiré de ce que les documents qui lui avaient été communiqués, relativement aux comptes annuels de la MAE, étaient incomplets, au prétexte qu'il s'agissait d'une question de fond qui devait être débattue à l'assemblée générale du 22 février 2006, a privé sa décision de base légale au regard de l'article R 322-61 du code des assurances.
4°) ALORS QUE le droit de tout sociétaire d'une société d'assurance mutuelle de prendre communication de tous les documents qui doivent être présentés à la prochaine assemblée générale, constitue une formalité substantielle qui ne peut être régularisée par la tenue d'une assemblée ultérieure ; qu'en l'espèce, la cour, qui a écarté le grief de monsieur X..., tiré de ce que tous les documents prescrits par la loi ne lui avaient pas été communiqués, aux simples motifs qu'une véritable « masse de documents » lui avaient été communiquée et qu'en tout état de cause, une nouvelle assemblée avait été convoquée le 21 juin 2006 pour approuver les documents qui n'avaient pas été établis en février, a violé l'article R 322-61 du code des assurances.
5°) ALORS QUE tout sociétaire doit pouvoir connaître, antérieurement à la tenue de l'assemblée générale d'une société d'assurance mutuelle, les noms des délégués des sociétaires qui peuvent prendre part à l'assemblée générale ; qu'en l'espèce, la cour, qui a écarté le grief de monsieur X..., tiré de ce qu'il n'avait pu obtenir la communication des noms des délégués des sociétaires pouvant prendre part à l'assemblée générale du 22 février 2006, au prétexte que l'appelant, qui avait été directeur salarié de la MAE jusqu'au mois de novembre 2004, ne rapportait pas la preuve de l'absence de préjudice résultant d'un tel défaut de communication, quand monsieur X... avait été ainsi privé, faute de connaître le nom de son délégué, de la possibilité de présenter ses observations sur les points figurant à l'ordre du jour et donc d'influer sur la marche de la société, a violé l'article R 322-58 du code des assurances.
6°) ALORS QUE la convocation à l'assemblée générale des sociétaires d'une société d'assurance mutuelle doit précéder d'au moins quinze jours la réunion ; qu'en l'espèce, la cour qui, après avoir constaté que ce délai de quinze jours n'avait pas été respecté, concernant les assemblées générales des 22 février et 21 juin 2006, a estimé ensuite qu'il ne s'agissait pas d'une irrégularité substantielle et qu'en tout état de cause, aucun préjudice n'en était résulté, alors que les sociétaires et leurs délégués avaient été privés du délai minimum légal pour consulter les documents devant être soumis à l'assemblée, et notamment les pièces comptables, a violé l'article R 322-59 du code des assurances.
7°) ALORS QUE l'assemblée générale des actionnaires ne peut délibérer que sur les points régulièrement inscrits à l'ordre du jour, lequel doit être suffisamment précis pour que les sociétaires ne puissent se méprendre sur la portée des questions mises à l'ordre du jour ; qu'en l'espèce, la cour, qui a estimé que l'irrégularité de l'ordre du jour de l'assemblée du 22 février 2006 avait été couverte par la tenue d'une assemblée subséquente le 21 juin suivant et que l'ordre du jour de celle-ci – pourtant conçu en termes trop généraux – était suffisamment précis, a violé les articles R 322-57 et R 322-59 du code des assurances.
8°) ALORS QUE la preuve de la composition régulière de l'assemblée générale des sociétaires d'une société d'assurance mutuelle, incombe à celle-ci ; qu'en l'espèce, la cour, qui a estimé que cette preuve pesait sur monsieur X..., et non sur la MAE, a renversé la charge de la preuve, en violation des articles 1315 du code civil et R 322-58 du code des assurances.