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07/03/2012 | FRANCE | N°10-24248

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 mars 2012, 10-24248


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 27 décembre 2004 par l'association Le Pain de l'espoir, M. X... a été licencié le 31 juillet 2006 pour faute grave ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'annexe 1 de l'accord collectif de travail applicable dans les centres d'hébergement et de réadaptation sociale ;


Attendu que pour décider que M. X... exerçait des fonctions relevant du ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 27 décembre 2004 par l'association Le Pain de l'espoir, M. X... a été licencié le 31 juillet 2006 pour faute grave ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'annexe 1 de l'accord collectif de travail applicable dans les centres d'hébergement et de réadaptation sociale ;
Attendu que pour décider que M. X... exerçait des fonctions relevant du statut de cadre et condamner l'association Le Pain de l'espoir à payer à celui-ci une somme à titre de rappel de salaire, l'arrêt, après avoir énoncé que peut être considéré comme cadre, indépendamment du statut visé par les parties au contrat, le salarié qui dispose d'une autonomie et de responsabilités correspondant à un tel statut, retient que ce salarié, encadrant des jeunes en contrat d'insertion, d'une part, savait diriger le service avec rigueur et encadrer les membres de son équipe, d'autre part, disposait d'une autonomie dans l'organisation et la répartition de ses tâches ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur les dispositions de l'accord collectif invoqué par l'employeur, relatives à la classification des cadres, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que M. X... a exercé des fonctions relevant du statut de cadre et a condamné l'association Le Pain de l'espoir à lui payer la somme de 16 388, 13 euros à titre de rappel de salaire, l'arrêt rendu le 1er juillet 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour l'association Le Pain de l'espoir
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR jugé que le salarié relevait du statut de cadre et condamné l'employeur à lui verser la somme de 16. 388, 13 € à titre de rappel de salaire ;
AUX MOTIFS QUE « peut être considéré comme cadre, indépendamment du statut visé par les parties au contrat, le salarié qui dispose d'une autonomie et de responsabilités correspondant à un tel statut. Il ressort des circonstances propres à l'espèce que M. X... a été engagé en qualité de logisticien, que toutefois l'association LE PAIN DE L'ESPOIR elle-même a dans un rapport d'activité 2004 précisé, " nous avons embauché sur le poste de logisticien M. X..., un spécialiste de la logistique qui va encadrer et organiser ce service au mieux des attentes des associations ", qu'il a été amené à encadrer des jeunes en contrat d'insertion, étant relevé que l'employeur ne dénie pas qu'elle pouvait en accueillir jusqu'à dix concomitamment. Une telle mission d'encadrement amenait ipso facto le salarié à exercer une autorité, à tout le moins, déléguée sur ces jeunes en contrat. Trois témoins attestent que M. X... savait se faire respecter par son équipe, savait diriger et encadrer, écouter les membres de celle-ci ». M. Y... embauché par l'association LE PAIN DE L'ESPOIR à compter de mars 2006, expose avoir constaté que M. X... dirigeait le service avec rigueur, que l'organisation mise en place permettait aux personnes en réinsertion de travailler dans une structure active, avec un encadrement méthodique et consistant... il expliquait à tous l'importance d'appliquer de respecter les consignes des normes alimentaires. Par ailleurs, s'il était soumis aux horaires collectifs de l'association, il est admis qu'il disposait d'une autonomie dans l'organisation et la répartition des tâches qu'il était amené à réaliser et à superviser entre les deux sites de l'association LE PAIN DE L'ESPOIR. M. X... est recevable et fondé à revendiquer ce statut de cadre avec toutes les conséquences s'y attachant sur le plan de la rémunération. Il sera fait droit à la demande de rappel de salaires formulée et la somme de 16 388, 13 € sera allouée à M. X... » ;
ALORS QUE la catégorie professionnelle d'un salarié dépend d'abord de la classification conventionnelle ou contractuelle retenue avant d'être déterminée par les fonctions réellement exercées ; que la Cour d'appel a affirmé que le salarié, engagé par contrat initiative emploi, et peu diplômé, devait bénéficier du statut de cadre au regard des fonctions qu'il exerçait, sans vérifier si le groupe 3, échelon 418, 40 de la convention collective CHRS du SOP auquel il était rattaché correspondait, ou non, à la classification de cadre, lors même qu'elle relevait qu'il avait été engagé en qualité d'agent de logistique ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et de l'annexe 1 de la convention collective CHRS du SOP relative à la classification des emplois et des salaires ;
ET ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la qualification de cadre suppose que le salarié exerce effectivement des fonctions de direction et d'encadrement, sans avoir à en référer à un supérieur hiérarchique, avec un important pouvoir d'initiative, matérialisé notamment par la faculté d'engager financièrement l'employeur ; que pour dire que le salarié devait bénéficier du statut de cadre, et condamner l'employeur à lui verser les rappels de salaire afférents, la Cour d'appel s'est bornée à relever que le salarié, spécialiste de la logistique, disposait d'une autonomie et de responsabilités correspondant à un tel statut matérialisées dans le fait qu'il pouvait être amené à encadrer des jeunes en contrat d'insertion et que, même s'il était soumis aux horaires collectifs de l'association, il disposait d'une autonomie dans la réalisation des tâches qu'il était amené à réaliser ; qu'en statuant par ces motifs, impropres à caractériser en quoi les fonctions effectivement réalisées par le salarié, agent logisticien, correspondaient à celles d'un cadre, la Cour d'appel a, à nouveau, entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et de l'annexe 1 de la convention collective CHRS du SOP.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR jugé que le licenciement du salarié était abusif, et condamné l'employeur à lui verser les sommes de 15. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 10. 310, 40 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, et la somme de 1. 031 € au titre des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QU'« en application des dispositions de l'article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties... si un doute subsiste, il profite au salarié. Constitue une faute grave un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation de ses obligations d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il incombe à l'employeur d'établir la réalité des griefs qu'il formule. La lettre de licenciement du 31 juillet 2006, qui circonscrit le litige, est ainsi rédigée "... nous vous notifions, par la présente, votre licenciement, sans préavis, ni indemnité, pour faute grave et ceci pour les motifs suivants :- en premier lieu, votre contrat de travail prévoit expressément que vous devez assurer la logistique, l'approvisionnement et la redistribution des produits dans le respect de notre agrément et de nos méthodes... Depuis que la directrice a pris ses fonctions, elle ne cesse de vous demander d'étiqueter les produits surgelés, alors qu'il s'agit là d'un élément essentiel de traçabilité, préconisée dans le cadre de la méthode HACCP que l'association LE PAIN DE L'ESPOIR s'est obligée à respecter, tant au regard de la convention passée avec la société Picard surgelés, qu'en ce qui concerne le respect de la législation concernant la traçabilité des produits alimentaires surgelés. Elle vous a rappelé, personnellement, le 4 mai 2006 oralement, l'importance de l'étiquetage des produits surgelés, et vous lui avez répondu que vous ne le feriez pas. La directrice ainsi que Mme Sandrine Z..., salariée de l'association LE PAIN DE L'ESPOIR, ont constaté que certains produits stockés dans la chambre froide avaient une date limite de consommation dépassée, et cela les 2 et 13 juin 2006. C'est ainsi qu'est mise en danger la santé des personnes qui pourraient consommer ces produits, après que nous les ayons redistribués à des associations caritatives. De plus, le 30 mai 2006, la DDASS a effectué un contrôle dans l'association LE PAIN DE L'ESPOIR. Elle vous a tenu informé des résultats de ce contrôle et des observations qui lui ont été faites sur le non-respect des procédures HACCP. Vous lui avez alors répondu : " la DDASS, ils me font chier, je n'en ai rien à foutre ". En tout état de cause, le non-respect de ces procédures, au-delà de vos grossièretés, met en danger la santé des bénéficiaires des produits, qui sont des personnes défavorisées, et met en danger la pérennité de l'association LE PAIN DE L'ESPOIR, car nous nous obligeons, tant à l'égard de la DDASS que des sociétés de distribution des produits (Carrefour, Picard) à suivre la traçabilité de nos produits et à ne jamais distribuer des produits périmés. Il s'agit là d'une faute grave, car il y a mise en danger tant des personnes défavorisées qui se retrouveraient à consommer des produits périmés, que pour l'association LE PAIN DE L'ESPOIR qui, compte tenu du non-respect des procédures risquerait de perdre les donateurs alors que les magasins, nous vous le rappelons, nous cèdent les produits avant la date de péremption, afin que nous les redistribuions à des associations caritatives afin qu'ils soient consommés avant la péremption. En deuxième lieu, par courrier du 23 mai 2006, de la mairie de Melun, qui est un partenaire extrêmement important pour l'association LE PAIN DE L'ESPOIR, puisque c'est la commune de Melun qui nous met gracieusement à disposition la plate-forme de logistique, vous n'avez pas hésité à renvoyer à deux reprises un jeune, dans le cadre d'une convention concernant des chantiers d'intérêts collectifs passée entre le Pain de l'Espoir et la mairie de Melun. Ainsi vous lui avez dit : " rentre chez toi et on dira que tu as fait deux heures ". Ainsi, l'image du Pain de l'Espoir et les valeurs qu'elle véhicule sont gravement mises à mal et surtout vous dégradez nos relations avec la commune ce qui est totalement déraisonnable et porte gravement atteinte à l'intérêt de l'association. En troisième lieu, comme le témoignent les propos que nous venons de rappeler ci-dessus, prononcée à l'égard de la directrice, par lesquelles vous indiquiez que " la DDASS vous fait chier " et que " les procédures HACCP, je n'en ai rien à foutre ". Vous raccrochez au nez de Sandrine Z..., la secrétaire et vous n'hésitez pas à lui dire, le 5 mai 2006 : " tu n'as qu'à t'occuper de tes fesses ". Lorsque cette même secrétaire vous rappelle qu'il faut respecter certaines procédures au niveau des acomptes, vous lui répondez : " je m'en bats les couilles ", le 6 juin 2006. Vous n'hésitez pas à dire à la directrice, le 13 juin 2006 : " ici, au Cana, c'est moi le patron, je ne vous donnerai plus rien, vous irez vous faire téter les yeux ". Ainsi, vos propos sont à la fois grossiers et contestent totalement son autorité de directrice. Tout cela caractérise également la faute grave. En quatrième lieu, vous refusez d'appliquer les instructions de l'employeur. Ainsi, tout d'abord, depuis le mois de mai, vous refusez de transmettre des états récapitulatifs des produits distribués aux associations et des produits collectés par magasin et vous n'hésitez pas à utiliser le chantage. Ainsi, le 2 mai 2006 nous avons constaté que pour le mois d'avril, le tableau habituellement établi par vos soins, faisant apparaître les poids et prix des différents produits distribués aux associations et donné à la comptabilité a été supprimé. Il a été remplacé de votre propre initiative par un nouveau tableau. Sur ce dernier n'apparaît plus qu'un montant total par association, cela ne permet plus une justification comptable et une justification commerciale vis-à-vis des associations partenaires, sauf à refaire le travail que vous avez dû réaliser pour fournir ce tableau consolidé. Le 8 juin 2006, comme le démontre le mail que vous avez envoyé à la directrice, à la suite d'un fax du 8 juin dans lequel elle vous demandait de lui transmettre les documents que vous aviez transmis aux différents magasins Carrefour où ont lieu les collectes, vous lui avez répondu que vous ne les transmettriez pas dans la mesure ou votre statut n'avait pas été modifié. Vous avez confirmé à M. Guerbet, président du pain de l'espoir, par courrier du 27 juin 2006, que vous exigez de bénéficier du statut de chef de service ou de celui de chef d'atelier, alors que vous êtes, en exécution de votre contrat de travail, agent de logistique.... Vous lui avez indiqué que tant que vous n'obtiendriez pas la reconnaissance de nouvelles fonctions, ainsi que le salaire correspondant, vous ne transmettriez plus les informations consolidées de distribution aux différents magasins. Il s'agit là, ni plus ni moins, de chantage, ce qui caractérise encore la faute grave. En dernier lieu, nous avons pu constater le 15 juin 2006, que l'ordinateur dédié aux personnes en insertion avait été vidé de toutes informations saisies par ce même personnel. Ce fait a été constaté alors que vous étiez en arrêt maladie le 15 juin 2006. Vous avez contacté le Cana téléphoniquement et vous lui avez indiqué que vous aviez vidé les ordinateurs, tant l'ordinateur dédié aux personnes en insertion, que celui que vous partagez avec Mme Josette A..., votre collègue, et que vous avez protégé par un mot de passe, ce qui rend les informations que pourrait encore contenir cet ordinateur, si vous ne les aviez pas effectivement effacées, inutilisables et non accessibles. Ainsi, l'association LE PAIN DE L'ESPOIR n'a plus de données informatiques, en ce qui concerne les produits distribués aux associations partenaires du pain de l'espoir. Ainsi l'association LE PAIN DE L'ESPOIR n'a plus aucune information en ce qui concerne le poids des différentes catégories de produits collectés. Ainsi, vous empêchez l'association LE PAIN DE L'ESPOIR de mener à bien ses missions en la privant de données informatiques et des justificatifs demandés par les magasins Carrefour essentiels pour la vie de l'association LE PAIN DE L'ESPOIR. Il s'agit, là encore, d'une faute grave, car il s'agit ni plus ni moins de sabotage pour empêcher l'association LE PAIN DE L'ESPOIR de fonctionner ». M. X... conteste la réalité des griefs ainsi formulés. Il admet n'avoir plus voulu établir les états dans les conditions qu'il avait lui-même mises au point dans la mesure où la direction lui refusait le statut de cadre qu'il revendiquait. Il ne conteste pas les propos tenus à l'égard de la directrice mais estime qu'ils se sont inscrits dans un contexte de tension qui les explique et qui leur ôte tout caractère fautif. L'examen des éléments fournis par les parties montre que les relations de travail entre la directrice et M. X... se sont en effet dégradées et notamment en raison du fait que M. X... demandait à pouvoir bénéficier du statut de cadre. Si l'association LE PAIN DE L'ESPOIR produit un compte rendu de réunion du 20octobre 2005 dans lequel Mme B... a expressément indiqué : " il faut que les produits surgelés soient étiquetés avant d'être redistribués " aucun document, ou attestation ne démontre les prétendus refus du salarié de suivre les injonctions et instructions données. Pour combattre les griefs exposés dans la lettre de licenciement à propos du non-respect des consignes, M. X... verse aux débats plusieurs témoignages montrant qu'il n'a cessé de demander à la direction des moyens matériels pour respecter les normes imposées par la procédure HACCP. Mme
A...
précise n'avoir jamais reçu la transmission d'un quelconque compte rendu du contrôle de la DDASS. Ce témoin ajoute que les jeunes en contrat leur étaient envoyés sans aucune concertation, y compris à des moments où les personnes présentes ne pouvaient pas s'en occuper. Elle précise à toutes fins que le samedi est un jour particulier puisqu'en 2 h 30, il leur fallait assurer la réception des marchandises, la criée, la redistribution, le nettoyage des camions et des locaux. Elle ajoute qu'à son retour de vacances 28 juin 2006, la directrice lui a demandé des informations, qu'elle a remis en mains propres l'ensemble des fiches de saisie, celle-ci s'arrêtant le 14 juin, date à laquelle M. X... était en arrêt maladie. Elle a fait le constat, à ce retour, que l'ordinateur de travail qu'elle partageait avec M. X... avait disparu. Dans une seconde attestation, ce même témoin indique que pendant son congé, " la directrice avait pris l'ordinateur qu'elle partageait avec M. X... et ne lui a pas rendu la laissant sans outil de travail alors qu'elle disposait du mot de passe de la session administrateur ". M. D... employé à l'association LE PAIN DE L'ESPOIR jusqu'en août 2005, confirme l'absence de moyens suffisants pour faire face aux exigences imposées par la méthode. Il souligne que M. X... était extrêmement strict sur le respect de la chaîne du froid et le contrôle de la qualité des produits tant sur les dates de consommation que sur l'aspect général ce qui lui a d'ailleurs valu le surnom de " sergent chef pendant quelques mois. M. E... indique que 80 % des étiquettes ne tiennent pas sur les produits dans la chambre froide, qu'aucun équipement vestimentaire n'est prévu pour travailler aune température de-20°, ce dont la directrice est parfaitement consciente. Ces constatations sont confirmées par M. F...qui précise que la directrice et la secrétaire présentes et conscientes des difficultés n'ont jamais formulé aucune observation. M. G...témoigne du fait que M. X... voulait toujours que chacun fasse attention à la chaîne du froid, qu'il fallait aller vite pour charger le camion, que M. X... avait donné la consigne " d'être très attentif dans le tri des produits périmés ou pas bons ". Dans ces conditions, dans le contexte d'une ambiance difficile, et en l'absence de moyens pertinents pour permettre au salarié d'assurer ses missions dans le respect des procédures évoquées, les motifs invoqués dans la lettre de licenciement y compris les quelques écarts de langage relevés et d'ailleurs reconnus par le salarié, ne peuvent pas être retenus comme suffisamment sérieux pour justifier un licenciement pour faute grave, ni même pour une cause réelle et sérieuse. Le jugement déféré sera infirmé. M. X... avait presque deux années d'ancienneté, les conditions de son licenciement ont été vexatoires en ce qu'elles remettaient en question ses aptitudes professionnelles pourtant reconnues par de nombreux témoins. Il n'a pas retrouvé d'emploi et perçoit le RSA, ses droits à la perception des indemnités de chômage étant arrivés à expiration. Une somme de 15. 000 € lui sera allouée à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. S'agissant d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'association LE PAIN DE L'ESPOIR est redevable d'une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents. Elle sera par voie de conséquence condamnée à verser à M. X... la somme de 10. 310, 40 € au titre de cette indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 1. 031 € au titre des congés payés afférents » ;
ALORS QUE la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis ; que le fait pour un salarié de refuser avec grossièreté d'assurer les tâches confiées par son supérieur hiérarchique, tout en ayant une attitude insultante à son égard, ainsi qu'à l'égard de ses collègues de travail constitue une faute grave, indépendamment du contexte dans lequel cette faute a été commise ; que la Cour d'appel a relevé que le salarié s'était volontairement abstenu d'établir les états des produits distribués aux différentes associations partenaires et de les transmettre à son employeur et qu'il n'avait pas respecté les procédures HACCP ; que la Cour d'appel a également constaté que le salarié ne contestait pas avoir, à plusieurs reprises, tenu des propos à l'égard de la directrice de l'association en ces termes « ici, au Cana, c'est moi le patron, je ne vous donnerai plus rien, vous irez vous faire téter les yeux, « la DDASS, ils me font chier, je n'en n'ai rien à foutre » et indiqué à la secrétaire « tu n'as qu'à t'occuper de tes fesses, je m'en bats les couilles » ; que la Cour d'appel aurait du déduire de ses propres énonciations que le salarié, dont il était par ailleurs établi, qu'en méconnaissance flagrante de ses obligations contractuelles, il avait renvoyé, à deux reprises, de sa propre initiative, un jeune envoyé par la mairie de Melun, partenaire indispensable de l'association, en lui affirmant « rentre chez toi et on dira que tu as fait tes heures », avait commis une faute grave ; qu'en décidant le contraire aux motifs que ces agissements fautifs s'inscrivaient dans un contexte particulier lié au refus de l'employeur d'accorder au salarié, agent logistique, le statut de cadre, et que les jeunes étaient envoyés sans aucune concertation à des moments où les personnes ne pouvaient pas s'en occuper, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres énonciations, a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail ;
ET ALORS QUE le juge a l'obligation d'examiner l'ensemble des griefs contenus dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; que l'employeur invoquait expressément dans la lettre de licenciement à l'encontre du salarié, le grief tiré de ce que ce dernier s'était vanté auprès de son employeur d'avoir vidé l'ordinateur dédié aux personnes en insertion qui contenait la saisie des entrées des produits réclamées en vain par le magasin Carrefour, partenaire essentiel de l'association le Pain de l'Espoir ; qu'en s'abstenant d'analyser ce grief, de nature à justifier le licenciement pour faute grave, la Cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-24248
Date de la décision : 07/03/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 01 juillet 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 mar. 2012, pourvoi n°10-24248


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.24248
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