LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 15 septembre 2010), que M.
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a été engagé par la société Acza le 24 octobre 2005 ; qu'à la suite de plusieurs arrêts de travail pour maladie à compter du 9 novembre 2006, il a, le 9 février 2007 présenté sa démission pour le 12 de ce mois, en invoquant son état de santé ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de décider que la rupture produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que l'examen de reprise du travail dont doit bénéficier un salarié en cas d'absences répétées pour raisons de santé ayant, suivant les dispositions des articles R. 4624-21 et R. 4624-22 du code du travail, lieu lors de la reprise du travail ou au plus tard dans un délai de huit jours, l'employeur n'a pas, antérieurement à cette reprise du travail, l'obligation de faire procéder à un tel examen ; qu'en l'état des constatations de la cour d'appel selon lesquelles M.
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devait bénéficier de cet examen en raison d'absences répétées totalisant " quarante-deux jours d'arrêt de travail en sept périodes depuis trois mois ", la dernière courant jusqu'au 11 février 2007 inclus, son employeur n'avait l'obligation de faire procéder à une visite de reprise qu'à l'issue du dernier arrêt de travail provoqué par ces " absences répétées " ; que cependant la cour d'appel a constaté que la démission de ce salarié avait été donnée le 9 février 2007, soit pendant qu'il se trouvait en arrêt de maladie ; qu'en déduisant un " manquement grave " de l'employeur à ses obligations du défaut d'organisation d'une visite de reprise au cours d'une suspension du contrat de travail la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;
2°/ que l'examen médical que le salarié doit subir en cas d'absences répétées pour maladie a pour objet d'apprécier son aptitude à reprendre son emploi et l'éventuelle nécessité d'une adaptation de ses conditions de travail ; que l'employeur, qui n'est pas tenu de faire constater cette aptitude en cours de suspension du contrat de travail, n'a l'obligation d'organiser un tel examen que pour autant que le salarié, dont la dernière période d'arrêt de maladie a pris fin, a demandé à reprendre le travail ou, lui ayant demandé d'organiser cette visite, se tient à sa disposition pour qu'il y soit procédé ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que l'obligation, pour l'employeur, d'organiser une visite médicale au profit de M.
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, était née d'absences répétées pour maladie dont la dernière était en cours au jour où ce salarié a donné sa démission ; qu'en requalifiant celle-ci en prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur, coupable selon elle d'un manquement à son devoir d'organiser une visite de reprise au cours d'une suspension du contrat de travail sans constater ni que le salarié aurait demandé à reprendre son travail ni qu'ayant sollicité l'organisation de cette visite, il se serait tenu à sa disposition pour qu'il y fût procédé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles R. 4624-21 et R. 4624-22 du code du travail ;
Mais attendu que, selon l'article R. 4624-22 du code du travail, l'examen de reprise a lieu " lors de la reprise du travail et au plus tard dans un délai de huit jours " ; que la cour d'appel ayant constaté l'existence d'arrêts de travail répétés, antérieurs au dernier arrêt de travail du 26 janvier 2007 au 11 février 2007 et suivis de reprise du travail, en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, que l'employeur avait, en n'assurant pas au salarié le bénéfice d'un examen en dépit de telles absences répétées, manqué à son obligation de sécurité de résultat ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Acza aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Acza et la condamne à payer à M.
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la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour la société Acza
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR " dit que le contrat de travail avait pris fin le 9 février 2007 à la suite de la prise d'acte de rupture de Monsieur Cyril
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produisant les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse " et, en conséquence, condamné la Société Acza à verser à ce salarié les sommes de 15 000 € à titre d'indemnité pour rupture abusive, 1 526, 23 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents et 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'à lui délivrer une attestation Assedic rectifiée ;
AUX MOTIFS QUE " la lettre de démission de Monsieur
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datée du vendredi 9 février 2007 est ainsi rédigée :
" Je soussigné, Monsieur X... Cyril, salarié dans la société Acza Couverture depuis le 24. 10. 2005, donne ma démission pour le 12. 02. 07 pour raison de santé. Si possible de ne pas faire mon préavis, je ne ferai plus partie de vos effectifs à partir du 12. 02. 07 " ;
QUE " la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou, dans le cas contraire, d'une démission ;
QU'en vertu des dispositions de l'article R. 4624-21 du Code du travail, le salarié bénéficie d'un examen de reprise de travail par le médecin du travail, notamment en cas d'absences répétées pour raisons de santé ; que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, doit en assurer l'effectivité et ne peut laisser un salarié reprendre son travail en cas d'absences répétées pour raison de santé sans le faire bénéficier d'un examen par le médecin du travail destiné à apprécier son aptitude à reprendre son ancien emploi, la nécessité d'une adaptation des conditions de travail ou d'une réadaptation ou éventuellement de l'une et l'autre de ces mesures ;
QU'en l'espèce, la Société Acza indique elle-même dans ses conclusions développées oralement que Monsieur
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a été placé en arrêt pour maladie non professionnelle du 9 novembre au 17 novembre 2006 inclus, du 5 décembre au 8 décembre 2006, du 12 au 13 décembre 2006 en raison d'une hospitalisation, puis à nouveau du 8 janvier au 15 janvier 2007, du 18 au 19 janvier 2007, du 19 janvier au 20 janvier 2007 puis du 26 janvier au 11 février 2007 inclus ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que ces arrêts de travail pour maladie non professionnelle ont tous été déclarés par l'employeur auprès de BTP Prévoyance professionnelle et que les jours d'absence pour maladie ont été décomptés sur les bulletins de paie de Monsieur
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; qu'ainsi le moyen de la Société Acza tiré de son ignorance des problèmes de santé de Monsieur
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manque en fait alors que le moyen tiré de son ignorance des problèmes cardiaques de Monsieur
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est inopérant, les prescriptions de l'article R. 4624-21 s'imposant à l'employeur même s'il ignore le motif médical des absences répétées pour raison de santé de son salarié ; qu'en outre, le moyen de la Société Acza d'après lequel elle n'a su que postérieurement à la démission de Monsieur
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que celui-ci souffrait d'un anévrisme de l'aorte qui le rendait inapte à son poste de couvreur est de même inopérant dès lors que la Société Acza n'avait pas fait bénéficier Monsieur
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d'un examen d'aptitude par le médecin du travail ; qu'enfin, l'argument de la Société Acza tenant à ce que son gérant avait pu constater que Monsieur
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allait dans les discothèques et participait à des randonnées sera écarté, l'obligation de sécurité de l'employeur n'ayant pas pour effet de lui donner un droit d'appréciation personnel sur l'état de santé du salarié mais de faire peser sur lui l'obligation de s'assurer d'une aptitude au travail donnée par le médecin du travail ;
QU'ainsi il convient de constater qu'à la date de sa lettre de démission, alors qu'il se trouvait en position d'arrêt de maladie, Monsieur
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n'avait fait l'objet d'aucun examen par le médecin du travail ayant le caractère d'une visite de reprise, alors même que le salarié totalisait 42 jours d'arrêt de travail en 7 périodes depuis trois mois ; que la démission de Monsieur
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, donnée pour raison de santé, avait un caractère nécessairement équivoque dès lors que la Société Acza avait manqué gravement à son obligation de sécurité de résultat quant à la protection de sa santé et de sa sécurité en ne lui assurant pas le bénéfice d'un examen par le médecin du travail en dépit de ses absences répétées pour raison de santé ;
QUE la démission de Monsieur
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s'analyse en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail qui produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse " (arrêt p. 2 dernier alinéa, p. 3) ;
1°) ALORS QUE l'examen de reprise du travail dont doit bénéficier un salarié en cas d'absences répétées pour raisons de santé ayant, suivant les dispositions des articles R. 4624-21 et R. 4624-22 du code du travail, lieu lors de la reprise du travail ou au plus tard dans un délai de huit jours, l'employeur n'a pas, antérieurement à cette reprise du travail, l'obligation de faire procéder à un tel examen ; qu'en l'état des constatations de la Cour d'appel selon lesquelles Monsieur
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devait bénéficier de cet examen en raison d'absences répétées totalisant " 42 jours d'arrêt de travail en 7 périodes depuis trois mois ", la dernière courant jusqu'au 11 février 2007 inclus, son employeur n'avait l'obligation de faire procéder à une visite de reprise qu'à l'issue du dernier arrêt de travail provoqué par ces " absences répétées " ; que cependant la Cour d'appel a constaté que la démission de ce salarié avait été donnée le 9 février 2007, soit pendant qu'il se trouvait en arrêt de maladie ; qu'en déduisant un " manquement grave " de l'employeur à ses obligations du défaut d'organisation d'une visite de reprise au cours d'une suspension du contrat de travail la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;
2°) ALORS QUE l'examen médical que le salarié doit subir en cas d'absences répétées pour maladie a pour objet d'apprécier son aptitude à reprendre son emploi et l'éventuelle nécessité d'une adaptation de ses conditions de travail ; que l'employeur, qui n'est pas tenu de faire constater cette aptitude en cours de suspension du contrat de travail, n'a l'obligation d'organiser un tel examen que pour autant que le salarié, dont la dernière période d'arrêt de maladie a pris fin, a demandé à reprendre le travail ou, lui ayant demandé d'organiser cette visite, se tient à sa disposition pour qu'il y soit procédé ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a considéré que l'obligation, pour l'employeur, d'organiser une visite médicale au profit de Monsieur
X...
, était née d'absences répétées pour maladie dont la dernière était en cours au jour où ce salarié a donné sa démission ; qu'en requalifiant celle-ci en prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur, coupable selon elle d'un manquement à son devoir d'organiser une visite de reprise au cours d'une suspension du contrat de travail sans constater ni que le salarié aurait demandé à reprendre son travail ni qu'ayant sollicité l'organisation de cette visite, il se serait tenu à sa disposition pour qu'il y fût procédé, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles R. 4624-21 et R. 4624-22 du Code du travail.