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18/01/2012 | FRANCE | N°10-13572

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 janvier 2012, 10-13572


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Met hors de cause la société Fresnes transports ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er septembre 1998 par la société Fresnes transports en qualité de responsable transports ; que son contrat de travail a été repris le 1er janvier 2001 par la société Bruyas-VRDS avec des fonctions de conducteur de travaux catégorie ouvrier ; qu'il a été promu cadre le 1er juillet 2002 ; que reprochant à son employeur de l'avoir rétrogradé dans des fonctions de chauffeur de poids lourd

et de lui avoir supprimé le véhicule de fonction dont il bénéficiait, il a, le ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Met hors de cause la société Fresnes transports ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er septembre 1998 par la société Fresnes transports en qualité de responsable transports ; que son contrat de travail a été repris le 1er janvier 2001 par la société Bruyas-VRDS avec des fonctions de conducteur de travaux catégorie ouvrier ; qu'il a été promu cadre le 1er juillet 2002 ; que reprochant à son employeur de l'avoir rétrogradé dans des fonctions de chauffeur de poids lourd et de lui avoir supprimé le véhicule de fonction dont il bénéficiait, il a, le 28 septembre 2005, pris acte de la rupture de son contrat de travail puis a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir requalifier la prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse et se voir allouer des dommages-intérêts pour harcèlement moral ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. X... doit s'analyser en une démission, l'arrêt retient que le salarié ne justifie pas suffisamment par deux attestations la rétrogradation au poste de chauffeur dont il aurait fait l'objet de la part de son employeur, qu'il a accepté de conduire un camion à partir de septembre 2004 et a attendu le 25 juillet 2005 pour dénoncer cette situation ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que la réalité du changement de fonctions n'était pas contestée et qu'il lui appartenait de rechercher, comme il lui était demandé, si la réduction des attributions et responsabilités était établie et caractérisait une modification du contrat de travail laquelle nécessitait l'accord exprès du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Sur le second moyen :

Vu l'article 625 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation intervenue du chef de la prise d'acte entraîne par voie de conséquence la cassation du chef du harcèlement moral ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a requalifié la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en démission et a débouté M. X... de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral, l'arrêt rendu le 17 décembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Bruyas-VRDS aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Bruyas-VRDS à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la prise d'acte de la rupture par M. X... devait s'analyser en une démission et de l'avoir, en conséquence, débouté des demandes subséquentes ;
AUX MOTIFS QU'il y a lieu de rappeler le principe posé en matière de prise d'acte selon lequel : « lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission » ; qu'il appartient donc au salarié de démontrer que les faits invoqués sont établis, et qu'ils constituent des manquements suffisamment graves pour caractériser une rupture imputable à l'employeur ; qu'aux termes de la lettre qu'il a adressée le 28 septembre 2005 à la SARL FRESNES TRANSPORTS et qui fixe les limites du litige, Monsieur Luc X... invoque deux griefs :- la rétrogradation au poste de chauffeur dont il se prétend victime,- la suppression du véhicule de fonction ; que sur la rétrogradation alléguée, en l'espèce, Monsieur Luc X... ne justifie pas suffisamment par deux attestations émanant de Monsieur Y... d'une part et de Monsieur Z... d'autre part, la rétrogradation dont il aurait fait l'objet de la part de son employeur ; qu'en revanche, la seule chronologie des faits permet de conclure que Monsieur Luc X... n'a jamais fait l'objet de rétrogradation, ainsi pourtant qu'il le soutient ; que d'une part, il y a lieu de s'étonner qu'il ait accepté de conduire un camion à partir de septembre 2004 et qu'il ait attendu le 25 juillet 2005 pour dénoncer cette situation ; que d'autre part, Monsieur Luc X... a saisi le Conseil de Prud'hommes de Meaux le 12 juillet 2005, soit antérieurement à l'envoi du courrier du 25 juillet 2005 à son employeur ; qu'en outre, la Société FRESNES TRANSPORTS produit un certain nombre d'attestations de plusieurs salariés (Philippe A..., Patrick B..., Daniel C..., Christian D..., Didier E..., Rudy F...) qui témoignent que Monsieur Luc X... ne s'est jamais plaint de devoir conduire des camions ; qu'enfin, il n'est pas contesté que la SARL FRESNES TRANSPORTS a maintenu le statut et le salaire de Monsieur Luc X... ; que par suite ce premier grief ne saurait être retenu ; que sur la suppression du véhicule mis à disposition de Monsieur Luc X..., il est constant que le véhicule mis à disposition de Monsieur Luc X... est tombé en panne à compter du 10 juin 2005, ainsi que le corrobore Monsieur Patrick B..., mécanicien poids lourd, dans une attestation établie le 15 juin 2006 ; qu'il est également acquis aux débats que Monsieur Luc X... a été en arrêt de travail à compter du 11 juin 2005, soit dès le lendemain de la panne de ce véhicule et qu'il n'a jamais repris son poste au sein de la SARL FRESNES TRANSPORTS à compter de cette date, de sorte que ce grief n'est pas davantage fondé ; qu'il y a lieu de faire observer à cet égard que l'argument développé par Monsieur Luc X... selon lequel le véhicule mis à sa disposition était bien un véhicule de fonction constituant un avantage en nature, est inopérant ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que la prise d'acte de rupture de Monsieur Luc X... doit s'analyser en une démission et en ce qu'il l'a débouté de toutes ses demandes subséquentes.
ALORS, D'UNE PART, QUE le juge méconnaît les termes du litige lorsqu'il déclare contesté un fait dont l'exactitude n'est pas discutée ; qu'il était constant et non contesté en l'espèce (cf. conclusions en appel de la Société BRUYAS VRD, p. 4, § 10 et 11, p. 10, § 5) qu'à compter du mois d'août 2004, M. X... avait cessé d'exercer les fonctions de conducteur de travaux, pour reprendre celles de chauffeur poids lourds qu'il occupait jusqu'au 1er janvier 2001 ; qu'en excluant, dès lors, l'existence d'un manquement de l'employeur justifiant la prise d'acte de la rupture au motif que le salarié ne justifiait pas de la rétrogradation dont il aurait fait l'objet, quand ce changement de fonctions n'était contesté par personne, seule se posant la question de savoir s'il avait été ou non accepté par M. X..., la Cour d'appel a d'ores et déjà méconnu les termes du litige et violé en conséquence l'article 4 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le changement d'affectation d'un salarié qui concerne des fonctions de qualification différentes caractérise une modification du contrat de travail qui ne peut être décidée unilatéralement par l'employeur sans l'accord préalable de l'intéressé ; que l'accord du salarié doit être exprès et ne saurait être déduit de la poursuite de l'exécution du contrat aux nouvelles conditions sans protestation ni réserve de sa part ; que dès lors qu'il était constant et non contesté qu'à compter du mois d'août 2004, M. X... avait cessé d'exercer les fonctions de conducteur de travaux, pour reprendre celles de chauffeur poids lourds, il incombait à la Cour d'appel de s'assurer que, ainsi que la Société BRUYAS VRD le prétendait sans cependant pouvoir en apporter la preuve formelle, cette modification du contrat de travail avait réellement été demandée par le salarié et acceptée par lui ; qu'en écartant l'existence d'un manquement de l'employeur résultant de la rétrogradation alléguée par le salarié sans caractériser l'existence d'un tel accord, la Cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
ALORS, ENSUITE (et subsidiairement), QUE le changement d'affectation d'un salarié qui concerne des fonctions de qualification différentes caractérise une modification du contrat de travail qui nécessite l'accord préalable du salarié ; que cet accord doit être exprès et ne saurait être déduit de la poursuite de l'exécution du contrat aux nouvelles conditions sans protestation ni réserve de sa part ; qu'en affirmant que la seule chronologie des faits permettait de conclure que M. X... n'avait jamais fait l'objet d'une rétrogradation, dans la mesure où, d'une part, il avait attendu 11 mois pour dénoncer cette situation auprès de son employeur, où, d'autre part, il avait saisi le Conseil de Prud'hommes 13 jours avant de dénoncer la rétrogradation qu'il avait subie et où, enfin, il ressortait des attestations produites par la Société que le salarié ne se serait jamais plaint de devoir conduire des camions, constatations impropres à établir la réalité d'un accord exprès de l'intéressé en l'absence, notamment, de tout avenant signé de sa main formalisant la modification de ses fonctions de Conducteur de travaux en simple chauffeur de poids lourds, la Cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
ET ALORS, ENFIN, QU'un changement d'affectation caractérise une modification du contrat de travail dès lors qu'il concerne des fonctions de qualification différente, peu important qu'il n'ait pas modifié le montant de la rémunération perçue par le salarié ; qu'en retenant, pour exclure l'existence d'un manquement justifiant la prise d'acte par le salarié de la rupture des relations contractuelles, que la Société avait maintenu le statut et le salaire de M. X..., constatations impropres à exclure l'existence d'une modification de son contrat de travail qui aurait impliqué son accord préalable, la Cour d'appel a encore violé l'article L. 1221-1 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à obtenir la somme de 17. 916, 30 € à titre de dommages intérêts pour harcèlement moral ;
AUX MOTIFS QUE dans la mesure où il a été jugé que la rétrogradation n'était pas établie, les faits de harcèlement moral dont Monsieur Luc X... prétend avoir été victime ne sont pas caractérisés en l'espèce ; qu'au surplus, il ne justifie pas davantage que la dépression soit directement liée aux conditions de travail qu'il dénonce ; que Monsieur Luc X... doit être débouté de sa demande en paiement de dommages intérêts pour harcèlement moral ;
ALORS QUE ces motifs seront censurés par voie de conséquence de la cassation à intervenir sur le premier moyen, par application de l'article 625 du nouveau Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-13572
Date de la décision : 18/01/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 décembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 jan. 2012, pourvoi n°10-13572


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Blanc et Rousseau, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.13572
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